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17/02/2011 | FRANCE | N°09LY00848

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 février 2011, 09LY00848


Vu la requête enregistrée le 20 avril 2009, présentée pour la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT dont le siège est rue de Dôle à Lyon (69007) ;

La SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805086 du 5 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, à la demande de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), a ordonné son expulsion du domaine public fluvial du port Edouard Herriot de Lyon dans les deux mois et sous l'astreinte journalière de 500 euros et l'a condamnée à verser au gestionnaire de la dépendance dom

aniale la somme de 58 068,99 euros TTC d'indemnité d'occupation ;

2°) de re...

Vu la requête enregistrée le 20 avril 2009, présentée pour la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT dont le siège est rue de Dôle à Lyon (69007) ;

La SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805086 du 5 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, à la demande de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), a ordonné son expulsion du domaine public fluvial du port Edouard Herriot de Lyon dans les deux mois et sous l'astreinte journalière de 500 euros et l'a condamnée à verser au gestionnaire de la dépendance domaniale la somme de 58 068,99 euros TTC d'indemnité d'occupation ;

2°) de rejeter la demande de la CNR, à titre principal, comme dirigée devant une juridiction incompétente pour en connaître, subsidiairement, comme non fondée ;

3°) de mettre à la charge de la Compagnie Nationale du Rhône une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT soutient que le Tribunal s'est irrégulièrement reconnu compétent pour connaître du litige ; que le restaurant objet de l'amodiation ne concourt pas à l'activité portuaire et n'en constitue pas un complément indissociable ; qu'il est, dès lors, édifié sur une dépendance du domaine privé et que la demande d'expulsion ressortit à la compétence du juge judiciaire ; subsidiairement, qu'elle détient un titre d'occupation constitué par l'absence d'opposition du gestionnaire de la dépendance à la demande qu'elle lui a présentée pour succéder aux droits du titulaire précédent ; que cette demande était suffisamment précise et comportait, notamment, l'ordonnance du tribunal de commerce autorisant la cession de l'amodiation ; qu'un certificat de non opposition de la CNR à l'ordonnance du tribunal de commerce a d'ailleurs été délivré par le greffe de cette juridiction ; que cette notification de la décision juridictionnelle ordonnant la cession a emporté cession de l'amodiation ; que la CNR a admis avoir été informée de cette cession, ce qui vaut aveu judiciaire en vertu de l'article 1356 du code civil, et ne peut faire obstacle au déroulement de la procédure collective de liquidation du précédent titulaire ; que l'absence de dévolution du droit d'occuper la parcelle porterait atteinte, d'une part, au principe de continuité du service public assuré par l'activité de restauration interentreprises sur la parcelle en cause, d'autre part, à ses droits patrimoniaux protégés par l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 12 novembre 2009, présenté pour la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) dont le siège est rue André Bonin à Lyon (69316) ;

La CNR conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La CNR soutient que la parcelle en cause ayant été classée dans le domaine public fluvial de l'Etat dont la gestion lui a été concédée, l'exécution de la convention d'occupation et l'expulsion des occupants sans titre relèvent de la compétence du juge administratif ; qu'elle n'a pas été rendue destinataire de la demande d'agrément du cessionnaire du contrat d'amodiation prévue par l'article R. 57-7 du code du domaine de l'Etat, et l'article 7 du contrat d'amodiation, si bien que la requérante ne saurait se prévaloir d'un agrément tacite acquis après l'expiration d'un délai de trois mois décompté depuis ladite notification de la demande ; que la requérante, n'ayant pas succédé aux droits du titulaire de la convention initiale et ayant refusé la conclusion d'une nouvelle convention, occupait sans titre la dépendance du domaine public, ce qui rend inopérant les autres moyens de la requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code du domaine de l'Etat ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2011 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- les observations de Me Chetrite, représentant la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT et celles de Me Balique, représentant la Compagnie Nationale du Rhône (CNR);

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Chetrite et à Me Balique ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2111-7 du code général de la propriété des personnes publiques, en vigueur à la date de lecture du jugement attaqué : Le domaine public fluvial est constitué des cours d'eau (...) appartenant à l'Etat, aux collectivités territoriales et à leurs groupements, et classés dans leur domaine public fluvial ; qu'aux termes de l'article L. 2111-10 du même code : Le domaine public fluvial artificiel est constitué : 1° Des canaux et plans d'eau appartenant à une personne publique mentionnée à l'article L. 2111-7 (...) et classés dans son domaine public fluvial (...) 3° Des biens immobiliers appartenant à l'une de ces personnes publiques et concourant au fonctionnement d'ensemble des ports intérieurs (...) ; qu'aux termes de l'article L. 2122-1 dudit code : Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public (...) ;

Considérant que les terrains situés rue de Dôle sont compris dans le périmètre concédé par l'Etat à la CNR et bordent la darse n° 2 ; que leur situation les destine à concourir aux activités de manutention et de logistique nécessaires à l'activité du port fluvial ; que la parcelle cadastrée section 07CH numéro 3 appartenant au domaine public fluvial de l'Etat, le Tribunal n'a pas entaché son jugement d'irrégularité en se reconnaissant compétent pour statuer sur la demande d'expulsion présentée par la CNR ;

Sur le fond du litige :

En ce qui concerne l'expulsion :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 34-2 du code du domaine de l'Etat, applicable à la date de cession des éléments du fonds de commerce de l'amodiataire : Les droits, ouvrages, constructions et installations (...) ne peuvent être cédés (...) pour la validité du titre restant à courir (...) qu'à une personne agréée par l'autorité compétente, en vue d'une utilisation compatible avec l'affectation du domaine public occupé ; qu'aux termes de l'article R. 57-7 du même code : I - Préalablement à la signature de tout contrat ayant pour objet (...) la transmission entre vifs (...) du droit réel qui a été conféré par un titre d'occupation du domaine public en cours de validité, la personne physique ou morale qui, par l'effet de ce contrat, se trouvera (...) substituée au titulaire de ce titre doit être agréée par l'autorité qui l'a délivré (...) III - Le silence gardé pendant un délai de trois mois à compter de la date de l'avis de réception de la demande par l'autorité à laquelle elle a été adressée vaut agrément de la cession du droit réel aux conditions convenues entre les parties ;

Considérant que si la CNR a été informée de ce que le Tribunal de commerce avait autorisé, dans le cadre de la liquidation de la société Le Safran Lyon Edouard Herriot, la vente à deux personnes physiques ou à toute personne morale qui leur succéderait, des éléments du fonds de commerce de la société mise en liquidation, notamment du droit d'occuper la parcelle cadastrée section 07CH numéro 3 amodiée pour 25 ans par convention du 15 octobre 1998, elle n'a été saisie d'aucune demande d'agrément de ces deux cessionnaires en qualité d'occupants de la parcelle pour la période restant à courir ni, a fortiori, de la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT, nouvellement constituée ; que le délai d'agrément tacite de trois mois décompté à partir, non du porté à connaissance de l'autorisation de cession du titre d'occupation domaniale mais de la notification au gestionnaire de la demande d'agrément du cessionnaire, n'ayant pas couru, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir de l'acquisition tacite d'un titre à occuper ladite parcelle ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions précitées des articles L. 34-2 et R. 57-7 du code du domaine de l'Etat ayant pour objet de préserver les droits du gestionnaire du domaine public, le moyen tiré de l'atteinte portée à la continuité de la mission de service public que la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT assurerait sur le site, est inopérant ;

Considérant, en troisième lieu, que les mises en recouvrement de redevances depuis 2002 n'ont eu d'autre objet, et n'ont pu avoir d'autre effet, que d'indemniser l'autorité gestionnaire de l'indisponibilité du bien que la requérante occupait, d'ailleurs, à son seul profit ; que n'ayant pu acquérir du fait de ce paiement aucun droit patrimonial à se maintenir sur la parcelle, elle ne saurait utilement se prévaloir de l'atteinte aux droits protégés par l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour contester son expulsion ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT occupant sans titre la parcelle cadastrée section 07CH numéro 3, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaquée, le Tribunal a ordonné sous astreinte son expulsion ;

En ce qui concerne la contestation de l'indemnité de 58 068,99 euros :

Considérant que les conclusions susvisées de la requête ne sont appuyées d'aucun moyen et doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT doivent être rejetées ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la CNR et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT versera à la Compagnie Nationale du Rhône une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE SAFRAN PORT EDOUARD HERRIOT, à la Compagnie Nationale du Rhône et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2011 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Arbarétaz, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 février 2011.

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N° 09LY00848


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00848
Date de la décision : 17/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : CHETRITE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-02-17;09ly00848 ?
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