LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que l'association Blonde d'Aquitaine sélection a pour objet l'amélioration et le développement de la race bovine Blonde d'Aquitaine et la société Blonde génétique exploite la station raciale de Casteljaloux ; que la SCEA Plante Moulet (la SCEA) a mis en pension, auprès de la société Blonde génétique, un veau dénommé Nil qui a été certifié et vendu pour le compte de son propriétaire à M. X... ; que le contrat de mise en pension contenait une clause compromissoire ; qu'ayant constaté que certains des veaux issus de Nil n'étaient pas conformes aux caractéristiques de la race et se trouvaient exclus de toute certification, M. X... a, au vu d'un rapport d'expertise judiciaire, saisi un tribunal de grande instance d'une demande en résolution de la vente et en paiement de diverse sommes ; que la SCEA a appelé en garantie la société Blonde génétique et l'association Blonde d'Aquitaine sélection ; que l'arrêt attaqué a prononcé la résolution de la vente du taureau Nil aux torts de la SCEA, condamné la SCEA à rembourser à M. X... le prix de vente de Nil et condamné M. X... à restituer le taureau, condamné la société Blonde génétique à rembourser à la SCEA le montant de la commission perçue et les frais de mise en pension de l'animal, condamné in solidum la SCEA avec la société Blonde génétique et l'association France Blonde d'Aquitaine sélection à payer diverses sommes à M. X... et condamné solidairement la société Blonde génétique et l'association France Blonde d'Aquitaine sélection à relever indemne la SCEA du montant des condamnations dont elle est l'objet ;
Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, qui est recevable :
Vu le principe compétence-compétence selon lequel il appartient à l'arbitre de statuer, par priorité sur sa propre compétence sauf nullité ou inapplicabilité manifeste de la clause d'arbitrage ;
Attendu que, pour écarter le moyen tiré de l'existence d'une clause compromissoire figurant à l'article 15 du contrat de mise en pension, opposé par la société Blonde génétique à l'action dirigée à son encontre par la SCEA, l'arrêt retient que l'arbitre n'a pas été saisi, que seul M. X... est à l'origine du litige et que la clause compromissoire n'est opposable ni à M. X... ni à l'association France Blonde d'Aquitaine sélection, la SCEA n'intervenant que pour défendre à une action engagée contre elle ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir le caractère manifeste de la nullité ou de l'inapplicabilité de la clause d'arbitrage, seule de nature à faire obstacle à la compétence prioritaire de l'arbitre pour statuer sur l'existence, la validité et l'étendue de la convention d'arbitrage liant la SCEA et la société Blonde génétique, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en ses trois branches, ci-après annexé :
Attendu que ces griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Et attendu que la Cour de cassation est en mesure de mettre fin au litige ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la SCEA Plante Moulet à l'égard de la société Blonde génétique et a condamné celle-ci à rembourser à la SCEA le montant de la commission perçue ainsi que la somme de 919,27 euros et à la relever indemne du montant des condamnations prononcées contre elle : dépréciation des issues, frais d'analyse et de secrétariat, frais d'entretien, dépens frais irrépétibles, l'arrêt rendu le 17 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Renvoie les parties à mieux se pourvoir ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Blonde génétique et l'association France Blonde d'Aquitaine sélection
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société BLONDE GENETIQUE à rembourser à la SCEA PLANTE MOULET le montant de la commission perçue sur la vente, et de l'avoir condamnée in solidum avec la SCEA PLANTE MOULET et l'association BLONDE D'AQUITAINE au paiement des sommes de 10.284 euros au titre de la dépréciation des issus, 2.613 euros pour les frais d'analyse et de secrétariat, 2.902,50 euros pour les frais d'entretien et de l'avoir condamnée solidairement avec l'Association France BLONDE D'ACQUITAINE SELECTION à relever indemne la SCEA PLANTE MOULET des condamnations prononcées contre elle,
AUX MOTIFS QUE la société BLONDE GENETIQUE soutient que la SCEA PLANTE MOULET est irrecevable à agir contre elle en raison de la clause compromissoire figurant à l'article 15 du contrat de mise en pension ; qu'il sera toutefois relevé que seul Monsieur X... est à l'origine du présent litige ; que la clause compromissoire n'est opposable ni à Monsieur X... ni à l'UPRA ; que la SCEA PLANTE MOULET n'intervient dans ce dossier que pour défendre à une action engagée contre elle, dès lors l'irrecevabilité sera rejetée ; que la SCEA PLANTE MOULET elle aussi en cause d'appel modifie le fondement juridique de sa demande à l'égard de la société BLONDE GENETIQUE et de l'Association France BLONDE D'ACQUITAINE SELECTION pour argumenter sur le fondement de l'article 1147 du code civil ; qu'elle est sur ce point recevable à le faire puisqu'elle se trouve dans un lien contractuel avec ces deux organismes : la société BLONDE GENETIQUE par le biais du contrat de mise en pension et du mandat de vente, l'Association France BLONDE D'ACQUITAINE SELECTION par la cotisation versée pour l'inscription sur le livre généalogique,
1) ALORS QUE le contrat de pension liant la SCEA PLANTE MOULET à la société BLONDE GENETIQUE prévoyait une procédure d'arbitrage pour la résolution des litiges entre la société et ses utilisateurs ; que la clause ne distinguait pas selon que le conflit était généré directement entre la société et un éleveur ou n'était que la conséquence d'un conflit opposant l'éleveur à un tiers ; qu'en retenant une distinction selon que la demande était formée à titre principal par l'éleveur, initiateur de la procédure, ou seulement à titre d'appel en garantie dans le cadre d'une procédure introduite par un tiers, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2) ALORS QU'il appartient au seul arbitre de se prononcer sur sa compétence ; qu'en présence d'une clause d'arbitrage qui n'est pas manifestement nulle ou manifestement non applicable, le juge doit se dessaisir au profit de l'arbitre qui a compétence exclusive pour se prononcer sur sa compétence ; qu'en écartant cependant la clause d'arbitrage, la cour d'appel a violé l'article 1458 du code de procédure civile, ensemble le principe compétence-compétence.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société BLONDE GENETIQUE à rembourser à la SCEA PLANTE MOULET le montant de la commission perçue sur la vente, et de l'avoir condamnée in solidum avec la SCEA PLANTE MOULET et l'association BLONDE D'AQUITAINE au paiement des sommes de 10.284 euros au titre de la dépréciation des issus, 2.613 euros pour les frais d'analyse et de secrétariat, 2.902,50 euros pour les frais d'entretien et de l'avoir condamnée solidairement avec l'Association France BLONDE D'ACQUITAINE SELECTION à relever indemne la SCEA PLANTE MOULET des condamnations prononcées contre elle,
AUX MOTIFS QU'en cause d'appel, c'est sur le fondement de l'article 1382 du code civil que Monsieur X... soutient son argumentation ; qu'il est recevable à le faire dès lors qu'il ne s'agit pas d'une prétention nouvelle, et dès lors qu'il n'y a pas cumul de responsabilité ; qu'il agit sur le fondement de la responsabilité contractuelle à l'égard de la SCEA PLANTE MOULET et de la responsabilité délictuelle à l'égard des tiers au contrat ; qu'au fond, il résulte clairement des éléments versés au dossier que le comportement de la société BLONDE GENETIQUE et de l'association BLONDE D'AQUITAINE est constitutif d'une faute à l'égard de Monsieur X... ; qu'en effet, des propres conclusions de la société BLONDE GENETIQUE, il résulte que sa mission est de qualifier et de commercialiser pour le compte des éleveurs des animaux répondant à des critères raciaux et ce faisant, de toucher une commissions de 7% ; que l'association BLONDE D'AQUITAINE de son côté gère un livre généalogique ; que ce sont précisément les méthodes mises en oeuvre pour ce faire et qui ont été stigmatisées par l'expert ; que l'association BLONDE D'AQUITAINE ne se donne pas les moyens d'éviter ce genre de problèmes, en se contentant d'une sélection phénotypique et laissant sans état d'âme la progéniture d'animaux non conformes rester dans le circuit du Herd Book ; que le professeur Y... relève un mode de financement archaïque qui fonde la sélection uniquement sur l'aspect de l'animal au moment de la confirmation et de la conformité de ses ascendants direct ; qu'il est admise par les statuts de l'association BLONDE D'AQUITAINE de confirmer un animal dont les frères et soeurs présentent des anomalies, de rejeter ses produits qui ne sont pas conformes, tout en laissant en circulation la progéniture présentant une apparence de conformité ; que précisément, Nil a une soeur présentant la même affection que lui ; que l'expert ajoute que «l'association BLONDE D'AQUITAINE fonctionne de façon très imprudente… son statut est dangereux à l'heure actuelle où les éleveurs achètent des animaux de grande valeur, fruits d'une sélection qu'ils considèrent comme sérieuse, pour améliorer leurs troupeaux ; qu'en cas de problème, ils se retrouvent confrontés à des sujets «détériorateurs» qui leur font perdre une saison de production et désorganisent leur troupeau en le privant de femelles de remplacement pendant une année» ; que Monsieur X... démontre ainsi que ces deux organismes ont commis une faute en permettant la confirmation d'un animal non conforme ; que cette faute lui a causé un préjudice puisque précisément l'animal certifié étant non conforme, il a donné naissance à des veaux non conformes ne pouvant être certifiés et donc lui causant ainsi un préjudice financier important ; que la faute des organismes est directement à l'origine de son préjudice et il convient dès lors de les condamner in solidum avec l'éleveur à le réparer (…) qu'ainsi qu'il a été démontré plus haut, ces deux organismes ont failli dans l'exécution de leur obligation, l'association BLONDE D'AQUITAINE en inscrivant sur son livre un animal non conforme et la société BLONDE GENETIQUE en certifiant un animal non conforme ; que les méthodes utilisées par ces deux organismes sont fautives, imprudentes et laxistes ainsi que l'indique l'expert, et elles sont directement à l'origine du préjudice subi par la SCEA PLANTE MOULET qui se trouve elle-même poursuivie et condamnée pour avoir vendu un taureau non conforme ; que ces deux organismes seront dès lors condamnés à garantir la SCEA PLANTE MOULET de toutes les condamnations prononcées contre elle à titre de dommages et intérêts,
1) ALORS QUE les statuts et le règlement technique de l'association BLONDE D'AQUITAINE ont été agréés par le Ministère de l'agriculture, qui a ainsi validé la méthode de certification utilisée par l'association ; que pour retenir la responsabilité de l'association BLONDE D'AQUITAINE et de la société BLONDE GENETIQUE, la cour d'appel n'a pas constaté qu'elles ne respectaient pas leur réglementation technique, mais que cette dernière, prévoyant un contrôle seulement visuel et ne tenant compte que des ascendants et pas des frères et soeurs, était insuffisante ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il le lui était demandé (conclusions p. 20), si le fait que ces méthodes aient été agréés par l'Etat et soient conformes aux obligations légales et réglementaires en la matière, n'excluait pas toute faute de leur part à raison de la méthode utilisée, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE pour retenir la faute de la société BLONDE GENETIQUE et de l'association BLONDE D'AQUITAINE, la cour d'appel a énoncé qu'elles avaient fait preuve d'imprudence en se livrant seulement à un contrôle visuel des animaux ; que c'est pourtant au regard de manifestations physiques externes que se définit la race «Blonde d'aquitaine», de sorte que les critères de sélection ne peuvent qu'être visuels et qu'on ne voit pas quels autres critères pourraient être pertinents ; que s'agissant des frères et soeurs, la certification étant délivrée avant la mise en reproduction, leur prise en compte serait en tout état de cause inopérante; qu'en retenant la responsabilité des exposantes, tant contractuelle à l'égard de la SCEA PLANTE MOULET que délictuelle à l'égard de Monsieur X..., sans expliquer en quoi la méthode utilisée par elle était insuffisante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1147 du code civil ;
3) ALORS QU'en n'expliquant pas en quoi la méthode utilisée était insuffisante et en quoi une autre méthode aurait permis de détecter, s'agissant précisément de Nil, l'anomalie dont il semble être atteint, quand la cause de cette anomalie reste à ce jour inconnue, l'expert ayant évoqué une cause génétique sans pouvoir la préciser et sans même mettre hors de cause les vaches de Monsieur X..., dont l'expert relève au contraire qu'elles pourraient avoir participé au dommage en ce qu'elles présentaient une prédisposition génétique, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé le lien de causalité entre la faute retenue et le préjudice de Monsieur X..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.