LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, après avis de la première chambre civile :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 12 mars 2009), que, le 30 avril 2004, M. et Mme X... se sont rendus cautions solidaires des engagements de la société Pub roulante envers la banque Scalbert Dupont Crédit industriel de Normandie (le CIN) dont M. X... était le gérant ; qu'en raison de la défaillance de la société, qui a fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 8 février 2006, le CIN a assigné les cautions en exécution de leurs engagements ;
Attendu que le CIN fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré nuls les engagements de caution souscrits par M. et Mme X... et d'avoir rejeté les autres demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la nullité d'un engagement de caution, pris par acte sous seing privé par une personne physique envers un créancier professionnel, n'est pas encourue lorsque la mention manuscrite apportée sur l'engagement de caution, sans être strictement identique aux mentions prescrites par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, s'en rapproche néanmoins très largement et est parfaitement conforme à l'esprit de la loi dès lors qu'elle reflète incontestablement la parfaite information dont avait bénéficié la caution quant à la nature et la portée de son engagement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que les mentions manuscrites apposées par M. et Mme X... sur leurs engagements de caution étaient fortement semblables à celles prévues par la loi, en ce qu'elles reprenaient à tout le moins tous les termes prescrits par les articles susvisés, la cour d'appel a violé les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ;
2°/ que l'absence de mention, dans le contrat de prêt, de l'identité de l'ensemble des personnes physiques se portant cautions n'est pas une cause de nullité de l'engagement de caution régularisé séparément ; qu'en prononçant la nullité des engagements de caution de M. et Mme X..., motif pris de ce que le contrat de prêt signé par les parties ne prévoyait que la caution personnelle et solidaire de M. X... pour la seule somme de 51 900 euros, tout en constatant que tant M. X... que Mme X... s'étaient expressément engagés en qualité de caution, par un acte séparé, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ;
Mais attendu que la nullité d'un engagement de caution souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel est encourue du seul fait que la mention manuscrite portée sur l'engagement de caution n'est pas identique aux mentions prescrites par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, à l'exception de l'hypothèse dans laquelle ce défaut d'identité résulterait d'erreur matérielle ;
Attendu qu'ayant relevé que les mentions manuscrites signées de M. et Mme X... n'étaient pas conformes aux prescriptions des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation édictées à peine de nullité, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; que le moyen, qui s'attaque en sa seconde branche à des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Banque Scalbert Dupont - CIN aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour la Banque Scalbert Dupont - CIN
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré nuls les engagements de caution souscrits par M. et Mme X... et débouté les parties de leurs autres demandes ;
Aux motifs que « il résulte de l'article L 341-2 du code de la consommation, tel qu'issu de la loi du 1er août 2003 entrée en vigueur le 5 février 2004, et donc applicable en la cause, que toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de …. Couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant, les pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n'y satisfait pas lui-même". Il résulte de l'article L. 341-3 du code de la consommation, issu de la même loi et également applicable, que lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : "En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X…, je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X…". Ces dispositions d'ordre public, qui conditionnent la validité des actes de cautionnement de la personne physique même avertie au respect des formalités prescrites, ne laissent aucune possibilité d'appréciation au juge sur la portée de l'engagement de la personne concernée. Or, l'engagement de caution de M. Stéphane X... porte la mention manuscrite suivante : "Après avoir reçu toute information sur la nature et l'étendue des obligations que je contracte, je soussigné, Stéphane X..., déclare me porter caution solidaire du règlement de la somme de quatre-vingt six mille cinq cent euros 86.500 € et incluant principal, intérêt et le cas échéant pénalités ou intérêts de retard ce pendant la durée du prêt majorée de 24 mois en vertu du prêt professionnel (…) de 86.500 € ci-dessus consenti à la société Pub Roulante par le CIN. Je m'engage à payer au CIN les sommes dues sur mes revenus et mes biens si la société Pub Roulante n'y satisfait pas elle-même. En renonçant au bénéfice de discussion et division visé à l'article 2021 du code civil et en m'obligeant solidairement avec la société Pub Roulante, je m'engage à régler le CIN sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement la société Pub Roulante". L'engagement de caution de Mme Michèle X... porte la mention manuscrite suivante : "Après avoir reçu toute information sur la nature et l'étendue de mon obligation que je contracte, je soussigné, Michèle X..., née Y..., déclare me porter caution solidaire du règlement de la somme de cinquante et un mille neuf cent euros 51.900 € et incluant principal, intérêt et le cas échéant pénalités ou intérêts de retard ce pendant la durée du prêt majorée de 24 mois en vertu du prêt professionnel (…) de 86.500 € ci-dessus consenti à la société Pub Roulante par le CIN. Je m'engage à payer au CIN les sommes dues sur mes revenus et mes biens si la société Pub Roulante n'y satisfait pas elle-même. En renonçant au bénéfice de discussion et division visé à l'article 2021 du code civil et en m'obligeant solidairement avec la société Pub Roulante, je m'engage à régler le CIN sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement la société Pub Roulante". Ainsi, outre le fait que le contrat de prêt signé par les parties le 30 avril 2004 ne prévoyait que la caution personnelle et solidaire du seul M. Stéphane X..., avec l'accord de son épouse, et pour la seule somme de 51.900 €, force est de constater que, même si elles contiennent les dispositions principales, les mentions manuscrites signées de M. et Mme X... ne sont pas conformes aux prescriptions des articles susvisés prévues à peine de nullité. Dès lors, les engagements de cautions en cause doivent être déclarés nuls » (arrêt, p.4, derniers §§, p. 5) ;
Alors, d'une part, que la nullité d'un engagement de caution, pris par acte sous seing privé par une personne physique envers un créancier professionnel, n'est pas encourue lorsque la mention manuscrite apportée sur l'engagement de caution, sans être strictement identique aux mentions prescrites par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, s'en rapproche néanmoins très largement et est parfaitement conforme à l'esprit de la loi dès lors qu'elle reflète incontestablement la parfaite information dont avait bénéficié la caution quant à la nature et la portée de son engagement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que les mentions manuscrites apposées par les époux X... sur leurs engagements de caution étaient fortement semblables à celles prévues par la loi, en ce qu'elles reprenaient à tout le moins tous les termes prescrits par les articles susvisés, la cour d'appel a violé les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ;
Alors, d'autre part, que l'absence de mention, dans le contrat de prêt, de l'identité de l'ensemble des personnes physiques se portant cautions n'est pas une cause de nullité de l'engagement de caution régularisé séparément ; qu'en prononçant la nullité des engagements de caution des époux X..., motif pris de ce que le contrat de prêt signé par les parties ne prévoyait que la caution personnelle et solidaire de M. Stéphane X... pour la seule somme de 51.900 euros, tout en constatant que tant M. X... que Mme X... s'étaient expressément engagés en qualité de caution, par un acte séparé, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation.