Vu la requête, enregistrée le 21 mars 2008, présentée pour la COMMUNE DE LAMASTRE (Ardèche) ;
La COMMUNE DE LAMASTRE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0507681 du Tribunal administratif de Lyon
du 24 janvier 2008 qui, à la demande de la société Tracoulon et de M. A, a annulé, en premier lieu, l'arrêté du 3 juin 2005 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis de construire à cette société et, en second lieu, la décision implicite rejetant le recours gracieux des susnommés ;
2°) de rejeter la demande de la société Tracoulon et de M. A devant le Tribunal administratif ;
3°) de condamner ces derniers à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient que :
- en indiquant, dans sa demande de permis de construire de régularisation, que cette demande porte sur cinq logements destinés à une occupation personnelle, alors qu'il s'agit en réalité de six gîtes proposés à la location estivale, outre un bureau de réception, la société Tracoulon a commis une fraude manifeste ; que le maire pouvait donc requalifier le projet ; que le Tribunal a commis une erreur de droit en estimant que les constructions réalisées ne peuvent être regardées comme relevant d'une activité hôtelière au sens du plan d'occupation des sols, ce plan ne définissant pas l'activité hôtelière ; qu'en outre, le refus peut seulement se fonder sur un changement de destination, quelle que soit sa nature, dès lors que seuls les travaux d'aménagement et d'extension mesurée des constructions à usage d'habitation sont autorisés en zone ND ; que les six gîtes saisonniers destinés à une exploitation commerciale ne peuvent être considérés comme étant à usage d'habitation ; que le pétitionnaire a volontairement caché la destination réellement envisagée ; que le fait d'aménager des gîtes et un bureau de réception dans un bâtiment anciennement à usage d'habitation constitue un changement de destination ; que cet aménagement caractérise l'existence d'un établissement para-hôtelier ; que l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols n'autorise pas les changements de destination ; que, par suite, le maire ne pouvait que rejeter l'autorisation qui était sollicitée ;
- le système d'assainissement autonome envisagé, qui est prévu pour cinq logements et 23 habitants, est insuffisant, s'agissant de six logements, pour une capacité d'accueil de 43 personnes ; que ce système n'est pas conforme aux préconisations des hydrogélogues et ne respecte pas les conditions de l'avis favorable de la DDASS du 6 avril 2005 ; que le dossier de permis de construire ne précise pas le mode d'évacuation des eaux usées du snack-bar ; que, du fait de ces insuffisances, le risque de contamination des sources d'eau potable et des lieux de baignade est évident ; que le risque existant pour la salubrité publique justifiait un refus sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- par substitution de motif, le permis aurait également pu être rejeté en raison du fait que la demande aurait dû porter sur l'ensemble des travaux qui ont été réalisés sans autorisation, lesquels comprennent l'atelier pédagogique, le bureau de réception et le snack-bar ; que, toutefois, de tels équipements ne sont pas autorisés en zone ND ; que le maire ne pouvait donc que rejeter la demande, s'agissant de plus d'un permis de régularisation ;
Vu le jugement attaqué ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 18 mai 2009, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 juin 2009 ;
Vu le mémoire, enregistré le 10 juin 2009, présenté pour la société Tracoulon
et M. A, qui demandent à la Cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner la COMMUNE DE LAMASTRE à leur verser à chacun une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société Tracoulon et M. A soutiennent que :
- l'arrêté attaqué, dont la signature est illisible, porte la mention le maire , sans indication du nom et du prénom du signataire ; que, par suite, cet arrêté méconnaît les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- en l'absence de fraude, le maire de la COMMUNE DE LAMASTRE et le Tribunal ont dénaturé les faits ; que le Tribunal n'a pas expliqué quels sont les critères matériels et juridiques qui lui permettent d'affirmer que les logements seraient en réalité des gîtes ; qu'il existe sur la propriété plusieurs constructions parfaitement distinctes ; que l'on ne saurait exiger une régularisation de travaux sur des constructions qui ne sont pas concernées par la demande de permis de construire ; que la régularité du 6ème logement est sans incidence, dès lors que celui-ci ne se trouve pas dans les bâtiments faisant l'objet de cette demande ; que l'atelier pédagogique, qui est situé dans un garage qui a été autorisé par un permis de construire du 19 avril 1988, constitue, de même, une construction totalement indépendante et étrangère à la demande de permis litigieuse ; qu'en outre, cette construction était de nouveau utilisée comme garage à la date de cette demande ; que le snack-bar constitue également une construction totalement indépendante et étrangère à ladite demande ; que le bureau de rangement est en réalité un simple local affecté au rangement ; que la demande porte bien sur cinq logements destinés à l'usage personnel des pétitionnaires ; qu'aucune pièce du dossier ne mentionne la présence sur place de personnes étrangères à la famille des pétitionnaires ; qu'il n'est pas contestable que la vocation des deux corps de bâtiment en question est l'habitation, depuis l'origine ou au moins depuis plusieurs décennies ; qu'ainsi, la demande est conforme aux dispositions de l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols ;
- ils sont recevables et fondés à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de la délibération du 15 novembre 2001 approuvant la révision du plan d'occupation des sols, dès lors que le refus de permis attaqué se fonde sur des dispositions illégales ; qu'en premier lieu, contrairement à ce qu'imposaient les dispositions alors applicables de l'article R. 123-11 du code de l'urbanisme, l'arrêté du 3 août 2001 relatif à l'enquête publique a seulement fait l'objet d'un affichage en mairie ; qu'en deuxième lieu, le classement des parcelles cadastrées 542, 544, 545 et 546 en zone ND est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que ces parcelles aurait dû faire l'objet d'un classement en zone NB ; que cette erreur affecte également les versions antérieures du plan d'occupation des sols ; qu'en troisième lieu, la rédaction de l'article ND 1, qui est intervenue dans l'unique but de nuire à leurs intérêts et d'interdire toute régularisation, est entachée de détournement de pouvoir ; que le principe d'impartialité a également été méconnu ; que, par suite, l'administration aurait dû instruire la demande de permis au regard de la version de l'article ND 1 résultant du plan approuvé le 12 février 1988, laquelle autorise cette demande ; qu'enfin, l'article ND 4 du règlement ne peut imposer de produire une étude particulière pour l'assainissement autonome ; que, dès lors, l'administration aurait dû instruire ladite demande au regard de l'article ND 4 résultant du plan approuvé le 12 février 1988, qui ne permet pas de refuser le permis demandé ;
- M. A est de nationalité hollandaise, contrairement à ses voisins ; que le maire a conservé une vive rancoeur à l'égard de celui-ci ; que le principe d'impartialité a été méconnu ;
- dans les circonstances de l'espèce, l'article L. 421-2-5 du code de l'urbanisme s'opposait à ce que le maire se prononce sur la demande ; que le conseil municipal aurait dû désigner un autre de ses membres pour statuer sur la demande ;
- l'arrêté attaqué est entaché de détournement de pouvoir, le maire ayant usé de ses pouvoirs pour un motif étranger au droit de l'urbanisme, à seules fins de donner satisfaction aux voisins du projet et d'empêcher toute régularisation ;
- la demande d'assainissement autonome, qui est incluse dans le dossier de la demande de permis de construire, est suffisante ; que les études qui ont été réalisées par Géo + pour le compte de la commune ne permettent pas de conclure à l'impossibilité d'un système d'assainissement autonome sur le terrain d'assiette du projet ; que les secteurs NDp, correspondant aux secteurs de protection des captages d'eau potable, sont éloignés de plusieurs kilomètres ; que la demande d'un assainissement autonome a été accompagnée des études Géo + et Idées Eaux, d'éléments explicatifs et d'une étude spécifique qui a été réalisée par la société Eparco Assainissement ; que, sur cette base, l'ingénieur d'études sanitaires de la DDASS a rendu un avis favorable le 6 avril 2005 ; que le maire ne pouvait exiger une étude de faisabilité, les articles R. 421-2 et suivants du code de l'urbanisme énumérant limitativement les pièces qui doivent être jointes à une demande de permis de construire ; qu'au surplus, une telle étude ne peut être exigée en l'espèce, le terrain d'assiette du projet n'étant pas situé en secteur NDp et le projet ne pouvant être qualifié d'établissement autre que les maisons d'habitation au sens de l'article ND 4 ; qu'enfin, ladite étude a bien été réalisée ; que le principe de précaution ne peut être invoqué pour la délivrance d'une autorisation d'urbanisme ; que le système d'assainissement prévu, qui est conforme aux études précitées, comporte des garanties suffisantes ; que le projet est ainsi conforme aux dispositions de l'article ND 4 ; qu'aucune circonstance susceptible de démontrer la simple éventualité d'un risque pour la salubrité publique n'est démontrée ; qu'en tout état de cause, la bâtisse, dénommée snack-bar, est totalement indépendante de la demande ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 24 juin 2009, la clôture de l'instruction a été reportée au 16 septembre 2009 ;
Vu les mémoires, enregistrés les 31 août et 4 septembre 2009, présentés pour la COMMUNE DE LAMASTRE, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
La commune soutient en outre que :
- le nouveau moyen en appel, tiré de la méconnaissance de l'article 4 de la loi
du 12 avril 2000 est irrecevable, aucun moyen de légalité externe n'ayant été soulevé devant le Tribunal ; qu'en outre, au regard du changement de destination opéré et de l'insuffisance du traitement des eaux usées, le maire était en situation de compétence liée pour rejeter la demande ; que ledit nouveau moyen est, par suite, inopérant ; qu'enfin, la signature qui figure sur l'arrêté attaqué est parfaitement lisible ; que M. A, qui avait précédemment reçu de nombreux courriers signés par le maire, connaissait la signature de ce dernier ; que, dès lors, le vice n'est pas substantiel ;
- les dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme font obstacle à ce que soit invoqué, par voie d'exception, le moyen tiré de l'insuffisance de la publicité de l'arrêté d'ouverture de l'enquête publique ; qu'en outre, cet arrêté a bien fait l'objet des publicités requises ;
- les parcelle cadastrée 542, 544, 545 et 546 sont comprises dans un ensemble boisé plus vaste, qui correspond parfaitement à la définition de la zone ND ; que le classement dans cette zone de ces parcelles n'est donc pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en outre, le même classement de 1988 et 1983 serait également illégal ; qu'il appartiendrait alors aux intimés de démontrer que le permis aurait pu être délivré sur le fondement de dispositions antérieures ;
- rien ne permet d'affirmer que le maire aurait pris l'arrêté litigieux sans l'impartialité requise ;
- il appartient au maire de délivrer les permis de construire ; que l'on ne voit pas comment le conseil municipal aurait pu légalement déléguer cette compétence à un autre élu ;
- l'arrêté attaqué, qui se fonde sur la seule application du plan d'occupation des sols, n'est entaché d'aucun détournement de pouvoir ;
- elle a choisi de modifier l'article ND 1 pour n'autoriser que l'aménagement et l'extension mesurée des constructions à usage d'habitation, afin de préserver le caractère de la zone et éviter le développement d'autres vocations ; que ce resserrement et cette clarification des possibilités de construction se sont accompagnés d'une réduction des espaces concernés, afin de ne maintenir en zone ND que les secteurs méritant une protection ;
- conformément aux dispositions de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme, les constructions indivisibles doivent faire l'objet d'un permis de construire unique ; qu'en l'espèce, les gîtes, la salle d'activité, le bureau de réception et le snack-bar forment un tout indivisible, l'ensemble de ces constructions n'ayant qu'une seule finalité économique et se trouvant liées ; que la destination de ces bâtiments doit être appréhendée globalement ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 septembre 2009, présenté pour la société Tracoulon et M. A, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
La société Tracoulon et M. A soutiennent en outre que :
- ils ont bien soulevé des moyens de légalité externe devant le Tribunal, tirés du défaut d'impartialité et de l'incompétence du maire au regard des dispositions de l'article L. 421-2-5 du code de l'urbanisme ;
- le maire n'était pas en situation de compétence liée, dès lors qu'il a porté une appréciation sur les faits de l'espèce, en estimant qu'il y a un changement de destination et que le traitement des eaux usées est insuffisant ;
- contrairement à ce que soutient la commune, la signature qui figure sur l'arrêté attaqué n'est pas lisible et cette signature ne correspond pas à la signature portée par le maire sur des documents dont il a eu précédemment connaissance ;
- il n'a jamais été constaté la présence sur place de 43 personnes et le fonctionnement d'une quelconque salle d'activité, d'un quelconque snack-bar ou d'un quelconque bureau de réception ; qu'ils contestent avoir réalisé illégalement de telles constructions, dont les décisions du juge pénal ne font d'ailleurs jamais état ; que la commune ne saurait se prévaloir d'une prétendue indivisibilité des constructions ;
- les dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme ne sont pas applicables dans l'hypothèse, comme en l'espèce, d'une méconnaissance substantielle ou d'une violation des règles de l'enquête publique ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 24 septembre 2009, la clôture de l'instruction a été reportée au 30 octobre 2009 ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 octobre 2009, présenté pour la société Tracoulon
et M. A, tendant aux mêmes fins que précédemment, la demande de condamnation au titre de l'article L. 761-1 étant portée à 2 500 euros, et en outre à ce que, subsidiairement, la Cour ordonne une visite des lieux en application de l'article R. 622-1 du code de justice administrative ;
La société Tracoulon et M. A soutiennent, en outre, que des constructions ont été réalisées illégalement par le précédent propriétaire ; que ces constructions, qui étaient présentes lors de l'acquisition du terrain, ont été pour la plupart détruites, seule subsistant une minorité d'entres-elles, et notamment le bungalow, qualifié de manière erronée de 6ème gîte, et la construction faussement dénommée snack-bar ; que la demande de permis porte seulement sur les deux bâtiments principaux d'habitation, à l'exclusion des constructions annexes, qui sont indépendantes et, par suite, divisibles ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 octobre 2009, présenté pour la COMMUNE DE LAMASTRE, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
La commune soutient, en outre, que les intimés ne démontrent pas que la salle d'activité, le bureau de réception, le snack-bar et le 6ème gîte auraient été réalisés avant l'acquisition du terrain ; qu'en tout état de cause, aucun permis n'a été déposé pour modifier la destination de ces constructions ; que la destination desdites constructions les rend interdépendantes de la construction objet du permis litigieux, en raison d'une entité économique unique existant avec les gîtes ; qu'ainsi, un permis de construire aurait dû être déposé pour l'ensemble des bâtiments ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 2 novembre 2009, la clôture de l'instruction a été reportée au 3 décembre 2009 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mai 2010 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les observations de Me Chapouan, avocat de la COMMUNE DE LAMASTRE, et celles de Me Gaucher, avocat de la Société Tracoulon et de M. A ;
- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;
- la parole ayant à nouveau été donnée aux parties présentes ;
Considérant que la société Tracoulon a déposé une demande de permis de construire pour la création de deux logements saisonniers en sus de trois logements existants , aux fins d'occupation personnelle, sur un terrain situé en zone ND au plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE LAMASTRE ; que, par son arrêté attaqué, le maire de cette commune a requalifié la demande, qu'il a regardée comme visant en réalité à aménager six gîtes locatifs saisonniers dans des bâtiments existants ; qu'après avoir ainsi opéré cette requalification, le maire a rejeté la demande de permis, au double motif que le système d'assainissement autonome prévu est de nature à porter atteinte à la salubrité publique, en méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, et que le projet n'est pas conforme à l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols, qui permet seulement l'aménagement et l'extension mesurée des constructions à vocation d'habitation existantes, et non l'aménagement de gîtes, qui ne peuvent être assimilés à des habitations ; que, par son jugement attaqué, à la demande de M. A, gérant de la société Tracoulon, et de cette dernière, le Tribunal a estimé que le maire a pu légalement retenir que le projet consiste à créer des gîtes, mais a toutefois censuré ces deux motifs, puis a enfin jugé qu'il ne pouvait faire droit à la substitution de motif, fondée sur la fraude entachant la demande de permis, sollicitée par la commune en défense ; qu'en conséquence, le Tribunal a annulé le refus de permis de construire attaqué et la décision implicite rejetant le recours gracieux de la société Tracoulon et de M. A ; que, par la présente requête, la COMMUNE DE LAMASTRE relève appel de ce jugement ;
Considérant, en premier lieu, qu'un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire ; que la circonstance que ces plans pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés et affectés à un usage non conforme au plan d'occupation des sols, n'est pas, par elle-même, sauf cas de fraude, de nature à affecter la légalité du permis ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, ainsi que M. A l'a, d'ailleurs, lui-même admis dans un procès-verbal de gendarmerie, cinq gîtes destinés à la location ont été construits sans autorisation dans les deux bâtiments qui font l'objet de la demande de permis de construire litigieuse ; que, toutefois, les plans de cette demande, qui vise à régulariser la situation de ces bâtiments, concernent bien des logements ; qu'aucun élément suffisamment certain ne peut permettre de penser que la société Tracoulon n'aurait pas l'intention d'utiliser ces logements à des fins d'occupation personnelle, comme l'indique la demande, mais projetterait, en réalité, de les utiliser comme des gîtes saisonniers ; que, d'ailleurs, le cas échéant, une telle affectation, non conforme au permis de construire, serait susceptible d'entraîner une sanction pénale ; que, par suite, c'est à tort que le maire de la COMMUNE DE LAMASTRE a estimé que la demande, qui, contrairement à ce que soutient cette commune, n'est pas entachée de fraude, devait être regardée comme visant à l'aménagement de gîtes destinés à la location ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols, sont notamment autorisés en zone ND : L'aménagement et l'extension mesurée des constructions à vocation d'habitation existantes (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que les deux bâtiments sur lesquels porte la demande de permis de construire étaient antérieurement à usage d'habitation et, bien qu'ayant récemment été transformés en gîtes, ont conservé leur vocation d'habitation ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, le projet a pour objet d'aménager des logements dans ces bâtiments ; qu'en conséquence, le motif précité de l'arrêté attaqué, tiré de ce que les dispositions précitées ne sauraient autoriser la construction de gîtes saisonniers, est entaché d'illégalité ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique ;
Considérant que le projet, qui prévoit un assainissement autonome, a été réalisé à la suite d'une étude de mars 2001 du bureau Géo +, sur la faisabilité d'assainissement autonome pour la réhabilitation d'un ensemble de logements , qui a conclu, sous réserve du respect de certaines prescriptions, à la faisabilité d'un dispositif d'assainissement autonome pour cinq habitations regroupées sur le terrain d'assiette du projet ; que cette étude a été soumise au bureau Idées Eaux, lequel, dans un rapport du 13 juin 2002, a estimé que le mode d'assainissement autonome et son dimensionnement proposés par le bureau d'études Géo + nous paraissent bien adaptés au projet et a simplement recommandé, selon le principe de précaution , de déplacer le dispositif épurateur à l'Est du terrain ; que, sur la base de ces éléments, l'ingénieur d'études sanitaires de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales a émis un avis favorable le 6 avril 2005 ; que, pour justifier, malgré ces précautions, l'opposabilité des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, la COMMUNE DE LAMASTRE se borne, pour l'essentiel, à faire valoir que, contrairement à ce qui a ainsi été recommandé, le dispositif épurateur prévu par le projet est situé sur la parcelle cadastrée 544, à l'Ouest des constructions, et non dans la partie Est du terrain d'assiette du projet ; qu'en l'absence de tout élément circonstancié, cette seule affirmation n'est toutefois pas de nature à permettre d'établir l'existence de risques particuliers pour la salubrité publique ; que, si la commune évoque aussi le fait que le dossier de permis ne précise pas le mode d'évacuation des eaux usées du snack-bar présent sur le site, laquelle se ferait dans un étang utilisé pour la baignade, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet inclurait la construction d'un snack-bar ; qu'aucun élément sérieux ne peut permettre de penser que le système d'assainissement autonome qu'inclut le projet ne permettrait pas d'assurer un assainissement satisfaisant des logements projetés et, par suite, serait susceptible d'entraîner des risques pour la salubrité publique ; qu'il s'ensuit qu'en opposant au projet lesdites dispositions, le maire de la COMMUNE DE LAMASTRE a commis une erreur d'appréciation ;
Considérant, en dernier lieu, qu'en appel, la COMMUNE DE LAMASTRE invoque une substitution de motif en faisant valoir que la demande de permis de construire aurait dû porter sur l'ensemble des travaux qui ont été réalisés sans autorisation sur le terrain d'assiette du projet, lesquels comprendraient un atelier pédagogique, un bureau de réception et un snack-bar ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet prendrait appui sur ces constructions ou serait matériellement lié à ces dernières ; qu'en tout état de cause, la demande pouvait donc porter sur les deux seuls bâtiments à l'intérieur desquels se situent les logements ; que, si la commune, qui se prévaut de l'unité économique et fonctionnelle de l'ensemble constitué par les gîtes et les constructions annexes précitées, invoque également le fait que des constructions indivisibles doivent faire l'objet d'un permis de construire unique, cependant, en tout état de cause, ainsi qu'il a été dit précédemment, le projet porte sur des logements, et non sur des gîtes ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la COMMUNE DE LAMASTRE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 3 juin 2005 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis de construire à la société Tracoulon et la décision implicite rejetant le recours gracieux de cette société et de M. A ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Tracoulon et M. A, qui ne sont pas, dans la présente instance, partie perdante, soient condamnés à payer à la COMMUNE DE LAMASTRE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme quelconque au bénéfice de la société Tracoulon et de M. A sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE LAMASTRE est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Tracoulon et de M. A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE LAMASTRE, à la Société Tracoulon et à M. Cornelis A.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2010, à laquelle siégeaient :
M. Bézard, président de chambre,
M. Fontbonne, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 juin 2010.
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N° 08LY00643
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