Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai sous le numéro 06DA00051, présentée pour la SCI CEDRIC, dont le siège est 33 rue Petit Many à Saint-Fuscien (80680), par la SCP Montigny, Doyen ; la SCI CEDRIC demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0300838 du 15 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2003 par lequel le maire d'Amiens lui a ordonné d'interrompre les travaux de la construction située 145 rue Saint-Fuscien à Amiens ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;
3°) de condamner la ville d'Amiens à lui verser une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le maire ne tient pas des articles L. 480-2 et L. 480-4 du code de l'urbanisme, qui concernent les seuls travaux entrepris en méconnaissance des titres Ier, IV et VI du code de l'urbanisme, le pouvoir d'interrompre des travaux de démolition, lesquels sont prévus par le titre III dudit code, et que le maire d'Amiens a, par l'arrêté attaqué, ordonné l'interruption d'une démolition ; que la signature de l'auteur de l'arrêté attaqué n'est pas lisible ; que le motif de l'arrêté attaqué tiré de l'absence d'un permis de démolir ne pouvait fonder légalement l'arrêté attaqué ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction litigieuse avait pour effet de créer une surface de plancher nouvelle et de changer la destination de la construction existante, et qu'ainsi le maire d'Amiens ne pouvait fonder son arrêté sur l'absence d'un permis de construire ; que les dispositions du plan d'occupation des sols n'ont pas été méconnues ; que, par un arrêté du 8 février 2002, le maire d'Amiens avait autorisé les travaux litigieux ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu le mémoire, enregistré le 23 mai 2006, présenté pour la ville d'Amiens, par la SCP Marguet, Hosten ; elle conclut au rejet de la requête et à ce que la SCI CEDRIC soit condamnée à lui verser la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que le maire d'Amiens n'a pas, par l'arrêté attaqué, ordonné l'interruption d'une démolition ; que la signature de l'auteur de l'arrêté attaqué est lisible ; que la construction litigieuse avait pour effet de changer la destination de la construction existante et qu'ainsi le maire d'Amiens pouvait fonder son arrêté sur l'absence d'un permis de construire ; que les travaux litigieux méconnaissaient les dispositions du plan d'occupation des sols ; que, par un arrêté du 8 février 2002, le maire d'Amiens n'avait pas autorisé les travaux litigieux ;
Vu l'ordonnance, en date du 6 juillet 2006 du président de la 1ère chambre portant clôture de l'instruction au 15 septembre 2006 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2006 par télécopie et régularisé le 2 octobre 2006 par la production de l'original, présenté par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ; il soutient que le maire d'Amiens était compétent pour ordonner l'interruption des travaux de construction entrepris ; que la circonstance que sa signature ne serait pas lisible est sans incidence sur la légalité dudit arrêté ; que les travaux entrepris ne correspondent pas à ceux qui ont été autorisés par la déclaration de travaux du 8 février 2002 ; que lesdits travaux nécessitaient un permis de construire ;
Vu l'ordonnance, en date du 27 septembre 2006 du président de la 1ère chambre portant réouverture de l'instruction ;
Vu l'ordonnance, en date du 2 octobre 2006 portant report de la clôture d'instruction au 4 octobre 2006 ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 4 octobre 2006 par télécopie et régularisé le 5 octobre 2006 par la production de l'original, présenté pour la SCI CEDRIC ; elle reprend les conclusions de sa requête initiale par les mêmes moyens ;
Vu, enregistrée le 23 juillet 2008, la décision n° 300026 du 25 juin 2008 par laquelle le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi en cassation présenté pour la SCI CEDRIC, représentée par son président directeur général en exercice, a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Douai du 19 octobre 2006 et renvoyé l'affaire devant la même Cour ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 15 décembre 2008 et régularisé par la production de l'original le 16 décembre 2008, présenté pour la SCI CEDRIC, qui conclut aux mêmes fins que sa requête initiale par les mêmes moyens ; que les travaux litigieux avaient été autorisés par le maire d'Amiens le 2 octobre 2001 et le 8 février 2002 ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 décembre 2008, présenté pour la commune d'Amiens, par Me Guilmain, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SCI CEDRIC une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; la commune soutient que les travaux entrepris excèdent ceux autorisés par l'arrêté du 2 octobre 2001 ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 janvier 2009, présenté pour la commune d'Amiens, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures ; la commune soutient que la gérante de la SCI CECRIC a été reconnue coupable par la Cour d'appel d'Amiens le 12 septembre 2007 du délit d'exécution de travaux non autorisés par un permis de construire ; que le juge judiciaire a qualifié dans une décision de justice devenue définitive les travaux entrepris comme n'étant manifestement pas conformes à ceux autorisés par les arrêtés du maire d'Amiens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller, les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Hiault, avocat, pour la SCI CEDRIC, et Me Guilmain, avocat, pour la commune d'Amiens ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme : L'interruption des travaux peut être ordonnée soit sur réquisition du ministère public agissant à la requête du maire, du fonctionnaire compétent ou de l'une des associations visées à l'article L. 480-1, soit, même d'office, par le juge d'instruction saisi des poursuites ou par le tribunal correctionnel. / L'autorité judiciaire statue après avoir entendu le bénéficiaire des travaux ou l'avoir dûment convoqué à comparaître dans les quarante-huit heures. La décision judiciaire est exécutoire sur minute et nonobstant toute voie de recours. / Dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 a été dressé, le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux. Copie de cet arrêté est transmise sans délai au ministère public. ; qu'aux termes de l'article L. 480-4 du même code : L'exécution de travaux ou l'utilisation du sol en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier, II, IV et VI du présent livre, par les règlements pris pour son application ou par les autorisations délivrées en conformité avec leurs dispositions (...) est punie d'une amende (...) ;
Considérant qu'un procès-verbal d'infraction pour construction sans autorisation a été dressé le 11 juillet 2002 à l'encontre la SCI CEDRIC par un agent assermenté du service du droit des sols de la commune d'Amiens, lequel procès-verbal a été transmis au procureur de la République le 18 juillet 2002 ; que, par l'arrêté attaqué du 19 février 2003, le maire d'Amiens a ordonné l'interruption des travaux et que, par le jugement attaqué du 15 novembre 2005, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de la SCI CEDRIC tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité externe :
Considérant que si la SCI CEDRIC soutient que le maire d'Amiens a, par l'arrêté attaqué, ordonné l'interruption d'une démolition, il s'est borné, par cet arrêté, après avoir constaté que les travaux avaient eu pour effet la démolition quasi-totale du bâtiment concerné, à ordonner l'interruption des travaux de construction entrepris ; que, par suite, la SCI CEDRIC n'est pas fondée à soutenir que le maire d'Amiens était incompétent pour ordonner l'interruption desdits travaux ;
Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. ; qu'il n'est pas contesté que le signataire de l'arrêté attaqué peut être identifié sans ambiguïté ; qu'ainsi, la circonstance que sa signature ne serait pas lisible est sans incidence sur la légalité dudit arrêté ;
Sur la légalité interne :
Considérant que, par le procès-verbal susmentionné, ont été relevées la démolition d'un local à usage mixte d'habitation et commercial à l'exception de la façade de la partie habitation, la reconstruction au même emplacement, dans la continuité du bâti et en limite latérale, d'un bâtiment en parpaing de neuf mètres cinquante de façade, cinq mètres de profondeur, quatre mètres vingt de haut au faîtage, trois mètres de hauteur à l'égout ; que, par l'arrêté attaqué, le maire d'Amiens a relevé que ces travaux étaient irréguliers, au motif qu'ils avaient été réalisés, en premier lieu, sans permis de démolir, en deuxième lieu, sans permis de construire, et en troisième lieu, en méconnaissance de l'article IV UB 7 du plan d'occupation des sols ;
Considérant, en premier lieu, que le maire ne tient pas des articles L. 480-2 et L. 480-4 du code de l'urbanisme, qui concernent les seuls travaux entrepris en méconnaissance des titres Ier, IV et VI du code de l'urbanisme, le pouvoir d'interrompre des travaux de démolition, lesquels sont prévus par le titre III dudit code ; qu'ainsi, il résulte des dispositions susmentionnées que le maire ne peut se fonder sur l'absence de permis de démolir pour ordonner l'interruption des travaux ; qu'ainsi, la SCI CEDRIC est fondée à soutenir que le motif de l'arrêté attaqué tiré de l'absence d'un tel permis ne pouvait fonder légalement l'arrêté attaqué ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de l'arrêt de la Cour d'appel d'Amiens en date du 12 septembre 2007, devenu définitif, reconnaissant le gérant de la SCI CEDRIC coupable des délits d'exécution de travaux non autorisés par un permis de construire que ces travaux ne correspondaient pas, de façon manifeste, à ceux décrits dans les deux déclarations de travaux (...) ; qu'ainsi, la SCI CEDRIC n'est pas fondée à soutenir que le maire d'Amiens ne pouvait fonder légalement son arrêté sur l'absence d'un permis de construire ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article IV UB 7 du plan d'occupation des sols : 2) Au-delà de la bande d'une profondeur de 12 mètres ou de 15 mètres, l'implantation des bâtiments en limite séparative (...) est autorisée si leur hauteur en limite n'excède pas 3,50 mètres ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal d'infraction ainsi que des photographies jointes, que la hauteur de la construction litigieuse était de quatre mètres vingt en limite séparative ; qu'ainsi, la construction litigieuse méconnaissait les dispositions précitées ; que, par suite, le maire d'Amiens pouvait légalement fonder son arrêté sur la méconnaissance de ces dispositions ;
Considérant enfin que si, par deux arrêtés, respectivement en date du 2 octobre 2001 et du 8 février 2002, le maire d'Amiens avait autorisé la réalisation de travaux visant la modification d'une façade sur cour consistant, après avoir abattu une partie de la façade existante, à remonter en parpaings celle-ci, à mettre en place une porte, une fenêtre et un volet roulant, à ravaler cette façade, à installer une porte fenêtre en lieu et place d'une fenêtre et de réparer la toiture, il n'avait pas autorisé la SCI CEDRIC à reconstruire le pignon du bâtiment ; qu'ainsi, la SCI CEDRIC n'est pas fondée à soutenir que les travaux litigieux avaient été autorisés ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SCI CEDRIC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2003 par lequel le maire d'Amiens lui a ordonné d'interrompre les travaux de la construction située 145 rue Saint-Fuscien à Amiens ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SCI CEDRIC la somme que la ville d'Amiens, qui n'a été appelée en la cause que pour produire des observations et n'a pas à ce titre acquis la qualité de partie, demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI CEDRIC est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la ville d'Amiens au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI CEDRIC, à la ville d'Amiens et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Copie sera transmise au préfet de la Somme.
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N°08DA01684 5