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06/09/2010 | FRANCE | N°07MA01397

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 06 septembre 2010, 07MA01397


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 20 avril 2007 sous n°07MA01397, présentée pour la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE, représentée par son maire, par la SCP d'avocats Charrel et associés ;

La COMMUNE DE FLEURY D'AUDE demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0204820 du 29 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes n° 02/006771 d'un montant de 2 286 735,26 euros émis à son encontre par le département de l'A

ude le 6 août 2002 ;

2°) de constater la nullité de la convention de mandat e...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 20 avril 2007 sous n°07MA01397, présentée pour la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE, représentée par son maire, par la SCP d'avocats Charrel et associés ;

La COMMUNE DE FLEURY D'AUDE demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0204820 du 29 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes n° 02/006771 d'un montant de 2 286 735,26 euros émis à son encontre par le département de l'Aude le 6 août 2002 ;

2°) de constater la nullité de la convention de mandat en date du 24 mai 1988 et de ses deux avenants ainsi que de la convention de cession de créance ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler ledit titre de recettes ;

4°) de mettre à la charge du département de l'Aude une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tant que de besoin, les dépens ;

..................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2010 :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq, rapporteur,

- les conclusions de Mlle Josset, rapporteur public,

- les observations de Me SOULET de la SCP Charrel et associés, avocat pour la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE, représentée par son maire en exercice ;

Considérant que par une convention en date du 9 février 1988, reconduite le 13 mai 1988, la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE a confié au syndicat mixte d'aménagement et de développement de la Basse Vallée de l'Aude (SMABVA) une mission de conseil pour la création d'un jardin aquatique à Saint-Pierre, près du rocher de la Batterie, destiné à favoriser l'animation de la commune ; que la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE a confié, par marché en date du 31 mars 1988, la maîtrise d'oeuvre de cet ouvrage à la société Rougerie puis, par convention en date du 25 mai 1988, en a délégué la maîtrise d'ouvrage à la société d'économie mixte d'équipement et d'aménagement de l'Aude, devenue Aude Aménagement ; que la société Aude Aménagement a cédé, pour un montant de 15 MF, soit 2 286 735,26 euros, la créance qu'elle détenait à l'encontre de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE au département de l'Aude, lequel a été subrogé dans les droits de la société cédante ; que, par un jugement en date du 29 décembre 2006, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté la requête présentée par la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE tendant à l'annulation du titre de recette n° 02/006771, d'un montant de 2 286 735,26 euros, émis à son encontre par le département de l'Aude le 6 août 2002 ;

Sur la recevabilité des conclusions de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE tendant à la constatation de la nullité de la convention de mandat en date du 25 mai 1988 et de ses deux avenants et de la convention de cession de créance du 27 décembre 1995:

Considérant que les conclusions de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE tendant à la constatation de la nullité de la convention de mandat conclue par elle-même et la société d'économie mixte d'équipement et d'aménagement de l'Aude le 25 mai 1988 et de ses deux avenants ainsi que de la convention de cession de créance conclue entre la société Aude Aménagement et le département de l'Aude le 27 décembre 1995 ont été présentées pour la première fois devant le juge d'appel ; qu'elles ne sont, par suite, pas recevables ;

Sur les conclusions du département de l'Aude tendant à la condamnation de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE à lui verser le montant de la créance due, à savoir la somme de 2 286 735,26 euros, sur le fondement de l'enrichissement sans cause :

Considérant que la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE soutient que la convention de mandat en date du 25 mai 1988 et ses deux avenants, ainsi que la convention de cession de créance du 27 décembre 1995 sont nuls ; que le département de l'Aude demande, à titre subsidiaire, la condamnation de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE à lui verser le montant de la créance due, à savoir la somme de 2 286 735,26 euros, sur le fondement de l'enrichissement sans cause ;

Considérant que, d'une part, il résulte de l'instruction que la convention de mandat liant la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE à la société d'économie mixte d'équipement et d'aménagement de l'Aude a été conclue le 25 mai 1988, soit postérieurement à la transmission au contrôle de légalité le 24 mai 1988 de la délibération du 13 mai 1988 du conseil municipal autorisant sa signature ; que le moyen tiré de la nullité de cette convention doit donc être écarté ; que, d'autre part, doit l'être également le moyen tiré de la nullité des deux avenants à cette convention, dès lors que ces avenants ne constituent aucunement, en tout état de cause, le fondement juridique du titre de recette litigieux, avec lequel ils sont sans lien ; que, par suite et enfin, le moyen tiré de la nullité, par voie de conséquence de celle de la convention de mandat du 25 mai 1988 et de ses deux avenants, de la convention de cession de créance en date du 27 décembre 1995 doit aussi être écarté ; qu'ainsi les conclusions susmentionnées, présentées par le département de l'Aude à titre subsidiaire sur le fondement de l'enrichissement sans cause, doivent être rejetées, dés lors que les conventions précitées ne sont pas nulles ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que les premiers juges ont, en rejetant comme étant mal fondés les moyens relatifs à la régularité formelle du titre litigieux et comme étant irrecevables les moyens relatifs au bien-fondé de ce titre, répondu à l'ensemble des moyens soulevés en première instance par la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE ; qu'ils n'ont ainsi pas entaché leur jugement d'omission à statuer ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le titre de recette litigieux mentionne les références de la collectivité émettrice et celle de la collectivité débitrice, le montant de 2 286 735,26 euros et l'indication opération jardin aquatique : récupération créance sur commune de Fleury (voir note jointe) ; que la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE s'est vue notifier le 29 novembre 1999 par exploit d'huissier la convention de cession de créance conclue entre la société Aude Aménagement et le département de l'Aude le 27 décembre 1995 ainsi, notamment, qu'un extrait du registre des délibérations du conseil général de l'Aude en date du 13 octobre 1995 et le décompte n° 24 FF de l'opération jardin aquatique en date du 7 janvier 1991 ; qu'il ressort de ces documents que la créance cédée correspond, dans son principe et son montant, au rachat par le département de l'Aude, subrogé dans les droits de la société Aude Aménagement, de la créance détenue par celle-ci sur la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE et relative au préfinancement de la somme avancée par cette société à cette dernière ; qu'ainsi, les bases de liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle le titre litigieux a été émis devaient être regardées comme ayant été, préalablement à la notification de ce titre à la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE, portées à la connaissance de celle-ci, ainsi que l'ont retenu à juste titre, et sans renverser la charge de la preuve, les premiers juges ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article R. 421-1 du code de justice administrative dispose que Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ; qu'il résulte de ces dispositions que le délai de deux mois qu'elles fixent ne s'applique pas aux demandes présentées en matière de travaux publics, même si ces demandes sont dirigées contre une décision administrative notifiée au demandeur ; que constituent de telles demandes celles qui sont dirigées contre les actes tendant à percevoir tout ou partie des sommes nécessaires au financement de travaux publics, lorsque ces demandes ne sont pas régies par des dispositions spéciales ;

Considérant que le titre de recette en cause a été émis le 6 août 2002 par le département de l'Aude à l'encontre de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE dans le cadre d'un litige né de l'exécution de travaux publics et opposant le cessionnaire d'une créance au maître de l'ouvrage ; que la demande de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE constitue ainsi une demande présentée en matière de travaux publics qui n'est pas régie par des dispositions spéciales ; que, dès lors, la juridiction administrative peut être saisie d'un tel litige sans qu'ait à être respecté le délai fixé par les dispositions précitées du code de justice administrative ; que, par suite, la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a estimé que les moyens relatifs à la contestation du principe et du montant de la créance du département de l'Aude qu'elle a présentés dans son mémoire enregistré le 24 janvier 2003 et qui étaient fondés sur une cause juridique distincte de celle du moyen soulevé dans la demande introductive d'instance, avaient été présentés après l'expiration du délai de recours contentieux et constituaient une demande nouvelle qui, étant tardive, n'était pas recevable ;

Considérant que le fait, pour le juge de première instance, d'écarter à tort un moyen comme irrecevable ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation du jugement par le juge d'appel saisi d'un moyen en ce sens ; qu'il appartient seulement à ce dernier, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel qui est résulté de l'introduction de la requête, et après avoir, en répondant à l'argumentation dont il était saisi, relevé cette erreur, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen écarté à tort comme irrecevable, puis, le cas échéant, sur les autres moyens invoqués en appel ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la convention de cession de créance conclue entre la société Aude Aménagement et le département de l'Aude le 27 décembre 1995 a été, en application de l'article 1690 du code civil, régulièrement notifiée au comptable de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE le 29 novembre 1999 par exploit d'huissier ; que, par ailleurs, en l'absence de caractère novatoire de la créance, aucune délibération du conseil municipal de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE n'était requise ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la cession de créance intervenue ne lui serait pas opposable ;

Considérant, en quatrième lieu, que, si la Cour de céans a, par un arrêt en date du 27 mars 2006 n° 02MA00977, devenu définitif, condamné la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE à payer la somme de 538 660 euros à la société Aude Aménagement, il résulte de l'instruction que cette condamnation ne concerne pas la cession de créance en litige ; que, dès lors, le moyen tiré de l'autorité de chose jugée attachée audit arrêt du 27 mars 2006 doit être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, que la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE soutient que la réalité de la créance n'est pas établie ; qu'il appartient au juge, saisi d'une demande dirigée contre un titre de recettes, de vérifier que, à la date à laquelle il statue, la créance a un caractère exigible, certain et liquide ;

Considérant que pour justifier de la créance litigieuse, le département de l'Aude produit un état d'engagements comptables n° 24 FF retraçant les prestations commandées ; qu'un tel document constitue un commencement de preuve de la créance du département de l'Aude ; que toutefois, en l'absence d'autres pièces justificatives, et alors que la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE soutient avoir réglé directement certaines sommes, l'état du dossier ne permet pas à la Cour de déterminer, à la date à laquelle elle statue, dans quelle mesure la créance du département de l'Aude présente un caractère exigible, certain et liquide ; que, par suite, il y a lieu pour la Cour, avant de statuer sur la demande de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE tendant à l'annulation du titre de recettes n° 02/006771 d'un montant de 2 286 735,26 euros émis à son encontre par le département de l'Aude le 6 août 2002, d'ordonner une expertise aux fins précisées dans le dispositif du présent arrêt et de réserver, jusqu'en fin d'instance, tous les moyens et conclusions sur lesquels il n'est pas statué par la présente décision ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE tendant à la constatation de la nullité de la convention de mandat en date du 24 mai 1988 et de ses deux avenants et de la convention de cession de créance sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions du département de l'Aude tendant à la condamnation de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE à lui verser la somme de 2 286 735,26 euros sur le fondement de l'enrichissement sans cause sont rejetées.

Article 3 : Avant de statuer sur la demande de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE tendant à l'annulation du titre de recettes n° 02/006771 d'un montant de 2 286 735,26 euros émis à son encontre par le département de l'Aude le 6 août 2002, il sera procédé à une expertise, par un expert-comptable, en vue de :

- de se faire communiquer, et de prendre connaissance, outre du décompte n° 24 FF, de tous les documents utiles, notamment comptables, de toutes les factures, ainsi que des rapports d'expertises antérieurement déposés et des décisions de justice afférents au contentieux relatif au jardin aquatique de la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE ;

- de fournir tous les éléments factuels et comptables utiles à la détermination de la créance du département de l'Aude après prise en compte des différentes condamnations prononcées, ainsi que des sommes directement payées par la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE et de celles payées par la société Aude Aménagement, maître d'oeuvre délégué, pour le compte du maître d'ouvrage et correspondant pour tout ou partie aux sommes figurant sur le décompte n° 24 FF et, enfin, dresser un ou plusieurs états récapitulatifs des sommes en cause et en faire la synthèse ;

- s'il y a lieu, de faire toutes autres constatations nécessaires, d'enregistrer les observations de tout intéressé et d'annexer à son rapport tout document utile.

Article 4 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-1 à R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 5 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE FLEURY D'AUDE, au département de l'Aude et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.

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jb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA01397
Date de la décision : 06/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: Melle JOSSET
Avocat(s) : SCP CHARREL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-09-06;07ma01397 ?
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