Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le
23 août 2004, présentée pour la COMMUNE DU PORTEL, Hôtel de Ville, rue Carnot à Le Portel (62480), représentée par son maire, par Me X... ; la COMMUNE DU PORTEL demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 01-2558 du 22 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille a annulé, à la demande de la société Transports en commun de la région boulonnaise, l'arrêté du maire de la commune en date du 9 avril 2001 en tant qu'il interdit la circulation des véhicules de transport en commun boulevard d'Arras et l'a condamnée à verser à ladite société la somme de
500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande présentée par cette société devant le Tribunal administratif de Lille ;
3°) de condamner la société Transports en commun de la région boulonnaise à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La COMMUNE DU PORTEL soutient que c'est à tort que le Tribunal a considéré que cet arrêté était entaché de détournement de pouvoir ; que, d'une part en effet, l'interdiction de circulation faite aux véhicules de transport en commun sur le boulevard d'Arras n'a eu aucune incidence sur la desserte du quartier d'Henriville ; que, d'autre part, les travaux d'aménagement du boulevard d'Arras et de l'avenue de Béthune n'ont pas été engagés en vue de modifier un axe de circulation dans le seul dessin de contraindre la société Transports en commun de la région boulonnaise à desservir un quartier ; qu'en troisième lieu, le jugement attaqué est entaché de contradiction dès lors qu'il permet un trafic considérable sur l'axe litigieux alors que les premiers juges ont nécessairement admis que la topographie des lieux imposait des mesures de sécurité justifiant l'interdiction de circulation des véhicules de plus de 3,5 tonnes qui n'a pas été annulée ; qu'enfin, des considérations objectives de sécurité ont présidé à l'arrêté municipal du 9 avril 2001 dès lors que la modification du profil du boulevard d'Arras et de l'avenue de Béthune, compte tenu de la nouvelle largeur de ces voies, rendait délicate leur usage par des véhicules de plus de 3,5 tonnes et/ou de transports en commun, notamment pour leur croisement ainsi que l'implantation d'un arrêt pour l'embarquement et le débarquement des passagers ; que l'arrêt d'un autobus, qui aurait bloqué la circulation, ne pouvait être autorisé sauf à inciter des comportements dangereux de la part des automobilistes ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 12 janvier 2005, le mémoire en défense, présenté pour la société Transports en commun de la région boulonnaise, dont le siège social est sis ..., par Me Z... ; la société Transports en commun de la région boulonnaise demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) et de condamner la commune requérante à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient qu'un acte administratif est entaché de détournement de pouvoir dès lors qu'une prérogative légalement détenue par une autorité administrative est utilisée pour parvenir à un objectif autre que ceux au service desquels elle est mise ; qu'en l'espèce, le maire du Portel a utilisé son pouvoir de police à des fins qui lui sont étrangères, peu important le point de savoir si ces fins sont on non estimables ; que la motivation de l'arrêté a pour objet de masquer ce détournement ; qu'en effet, lors de la réunion de la commission des transports urbains de la communauté d'agglomération du 8 juin 2000, soit six semaines seulement avant l'arrêté d'interdiction initial, le maire a fait valoir que si la desserte du quartier d'Henriville n'était pas maintenue, il prendrait un arrêté pour que les bus ne passent plus par le boulevard d'Arras et soient ainsi obligés de passer par le quartier d'Henriville afin de satisfaire la population qui y habite ; que la modification relative à la sécurité n'a été avancée qu'après ; que les documents relatifs aux travaux d'aménagement du boulevard d'Arras mentionnent la circulation des bus, dont il n'était nullement prévu la suppression ; que le maire peut maintenir l'interdiction relative aux poids lourds afin de limiter l'importance de la circulation sur cette voie ; que les véhicules de ramassage des ordures ménagères doivent effectuer de nombreux arrêts ;
Vu, enregistré le 23 mars 2005, le mémoire présenté pour la COMMUNE DU PORTEL, concluant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2005 à laquelle siégeaient
M. Gipoulon, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et Mme Eliot, conseiller :
- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur ;
- les observations de Me Y..., pour la COMMUNE DU PORTEL et de Me Z..., pour la société Transports en commun de la région boulonnaise ;
- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, d'une part, que les documents préparatoires élaborés dans le cadre des travaux d'aménagement du boulevard d'Arras de la COMMUNE DU PORTEL, qui étudient pourtant les principes directeurs et les conséquences de ces travaux, ne mentionnent nullement la suppression de la circulation des véhicules de transport en commun sur ladite voie, d'autre part, que le maire de la COMMUNE DU PORTEL a déclaré lors de la réunion de la commission des transports de la communauté d'agglomération du Boulonnais du 8 juin 2000, qu'il prendrait, si cette communauté décidait de supprimer la ligne de bus desservant le quartier d'Henriville, un arrêté pour que les bus ne passent plus par le boulevard d'Arras et soient ainsi obligés de passer par le quartier d'Henriville afin de satisfaire la population qui y habite ; qu'il résulte de ces circonstances que, contrairement à ce que soutient la COMMUNE DU PORTEL, qui ne peut utilement se prévaloir du fait, postérieur à la décision attaquée, que le nouveau trajet de la ligne de bus n'assurerait pas la desserte du quartier précité, et peu important que les travaux d'aménagement du boulevard n'aient effectivement pas été décidés dans le but de modifier les axes de circulation des véhicules de transports en commun, que la décision d'interdire la circulation des véhicules de transport en commun sur le boulevard d'Arras a eu pour motif déterminant, non pas de remédier aux difficultés de la circulation alléguées par la commune mais de préserver les intérêts des habitants du quartier d'Henriville en terme d'accès au service public de transports ; que, par suite, en édictant cette interdiction, le maire de la COMMUNE DU PORTEL, qui n'est pas en charge de l'organisation des transports urbains, laquelle relève des compétences de la communauté d'agglomération du Boulonnais, a agi dans un intérêt autre que ceux de la sécurité et de la commodité de circulation dans la commune, pour la sauvegarde desquels lui sont conférés les pouvoirs de police dont il a fait usage ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges, qui n'étaient saisis que de l'interdiction faite aux véhicules de transport en commun et n'avaient pas à se prononcer sur celle relative aux véhicules de plus de 3,5 tonnes, ont annulé ladite interdiction ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DU PORTEL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du maire du 9 avril 2001 en tant qu'il interdit la circulation des véhicules de transport en commun boulevard d'Arras ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que l'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;
Considérant que lesdites dispositions font obstacle à ce que la société Transports en commun de la région boulonnaise, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la COMMUNE DU PORTEL la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les conclusions tendant à cette fin doivent, par suite, être rejetées ;
Considérant qu'il y a lieu, en revanche, en application desdites dispositions, de condamner la COMMUNE DU PORTEL à payer à la société Transports en commun de la région boulonnaise la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DU PORTEL est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DU PORTEL est condamnée à verser à la société Transports en commun de la région boulonnaise la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DU PORTEL, à la société Transports en commun de la région boulonnaise et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.
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N°04DA00741