AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 882 du code civil ;
Attendu que ce texte ne concerne que les créanciers d'un copartageant et non ceux du débiteur qui fait donation de ses biens ;
Attendu que M. René X..., propriétaire d'un élevage agricole a conclu le 15 juin 1981, avec M. Y..., un contrat d'entreprise en vue de la fourniture et du montage d'une installation de bio-gaz ; que se plaignant d'un mauvais fonctionnement de l'installation, M. René X... a, en juin 1986, assigné M. Y... en résolution du contrat ; que par acte notarié du 2 septembre 1986, M. Y... a fait donation partage à ses cinq enfants, de la nue-propriété de différents biens immobiliers, se réservant l'usufruit gratuit et viager sur les biens donnés, des donations antérieurement consenties à certains enfants y étant expressément incorporées ; qu'un redressement judiciaire a été prononcé en avril 1988 à l'encontre de M. Y... et de son épouse ; que par arrêt confirmatif du 20 novembre 1996, la cour d'appel a fait droit à la demande de résolution et condamné M. Y... à restituer le montant du prix ainsi qu'à payer des dommages-intérêts ; qu'en septembre 1998 M. René X..., représenté par le commissaire à l'exécution du plan, a assigné les consorts Y... sur le fondement de l'action paulienne aux fins d'obtenir la "révocation" de l'acte de donation-partage du 2 septembre 1986 ;
Attendu que pour rejeter la demande, l'arrêt attaqué retient qu'aux termes de l'article 882 du code civil, les créanciers, à défaut d'une demande d'intervention au partage ou de l'existence d'une opposition, ne peuvent attaquer un partage consommé, que ce texte exclut l'exercice d'une action paulienne à l'encontre d'un acte de partage et qu'il n'est pas soutenu et encore moins démontré que le partage litigieux ait eu lieu hâtivement en vue d'empêcher l'opposition et l'intervention de M. René X... et que, dès lors, sa demande qui tend à remettre en cause l'équilibre d'un partage n'est pas recevable ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé ledit texte ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen de ce fait inopérant :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne les consorts Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille six.