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26/01/2005 | FRANCE | N°02-45655

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 janvier 2005, 02-45655


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X..., engagée en 1974 par le Syndicat de l'industrie hôtelière, a été en arrêt maladie à plusieurs reprises à partir de novembre 1994, puis, du fait de sa maladie, classée en invalidité le 22 novembre 1997 ; qu'entre-temps, le 18 avril 1997, la Chambre des professionnels indépendants de l'industrie hôtelière lui a notifié son licenciement fondé sur la nécessité de la remplacer ; que Mme X..., qui avait engagé une première action en 1996 en paiement de rap

pels de salaires ayant abouti à un premier jugement passé en force de chose jug...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X..., engagée en 1974 par le Syndicat de l'industrie hôtelière, a été en arrêt maladie à plusieurs reprises à partir de novembre 1994, puis, du fait de sa maladie, classée en invalidité le 22 novembre 1997 ; qu'entre-temps, le 18 avril 1997, la Chambre des professionnels indépendants de l'industrie hôtelière lui a notifié son licenciement fondé sur la nécessité de la remplacer ; que Mme X..., qui avait engagé une première action en 1996 en paiement de rappels de salaires ayant abouti à un premier jugement passé en force de chose jugée, a, en décembre 1997, saisi de nouveau le conseil de prud'hommes pour contester son licenciement, demander la condamnation de son employeur en paiement d'une rente d'invalidité jusqu'à son soixantième anniversaire et solliciter en cours d'instance d'autres rappels de salaires ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur qui reproche à la cour d'appel d'avoir décidé que le licenciement de Mme X... était sans cause réelle et sérieuse et invoque une violation des articles L. 122-14-3 et L. 122-45 du Code du travail :

Attendu que ce moyen est sans fondement dès lors que les énonciations de l'arrêt attaqué font apparaître que la nécessité du remplacement définitif de Mme X... n'était pas établie ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal de la salariée :

Vu l'article L. 143-14 du Code du travail, ensemble l'article R. 516-1 du même Code ;

Attendu que pour rejeter la demande de Mme X... tendant à l'attribution d'un rappel de salaires pour une période allant de 1994 à 1997, la cour d'appel énonce que cette demande formulée pour la première fois le 19 décembre 2001 est prescrite et qu'elle se heurte au principe de l'unicité de l'instance eu égard à la demande présentée en 1996 .

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, d'une part, le délai de la prescription ne court qu'à compter de la date d'exigibilité de chacune des fractions de la somme réclamée et alors que, d'autre part, la règle de l'unicité de l'instance ne pouvait être opposée à des créances nées ou révélées postérieurement au premier jugement du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen relevé d'office dans les conditions de l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile :

Vu les articles 1134, 1135 et 1147 du Code civil, ensemble l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;

Attendu que, s'agissant de sa demande tendant à la condamnation de l'employeur à lui verser, à titre de dommages-intérêts, une rente d'invalidité jusqu'à son soixantième anniversaire, Mme X... s'est fondée sur la circonstance que ce dernier avait manqué à son obligation de l'affilier à un régime de prévoyance complémentaire qui lui aurait permis de bénéficier d'une telle rente à la suite de son classement en invalidité le 22 novembre 1997 ; que l'arrêt attaqué a débouté Mme X... de cette demande par des motifs tirés de la circonstance qu'elle n'aurait pas eu droit à une telle rente du régime de prévoyance auquel elle aurait dû être affiliée dès lors que son contrat de travail avait été rompu avant sa mise en invalidité ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la rupture du contrat de travail procédant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ne pouvait être opposée à Mme X... pour la priver de la réparation du préjudice résultant des fautes commises par l'employeur dans l'exercice de ses obligations contractuelles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu à renvoi du chef faisant l'objet de cette cassation, la Cour de Cassation pouvant donner au litige sur ce point la solution appropriée par application de l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal :

Rejette le pourvoi incident de la Chambre des professionnels indépendants de l'hôtellerie ;

CASSE ET ANNULE, mais en ses seules dispositions ayant débouté Mme X... de ses demandes de rappel de salaires et de congés payés afférents et tendant à ce que la Chambre des professionnels indépendants de l'hôtellerie soit condamnée à lui verser, à titre de dommages-intérêts, une rente d'invalidité jusqu'à son soixantième anniversaire, l'arrêt rendu le 27 juin 2002, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi en ce qui concerne l'opposabilité à Mme X... de la date de son licenciement sans cause réelle et sérieuse au regard des droits dont elle a été privée au titre du régime de prévoyance auquel l'employeur aurait dû l'affilier ;

Dit que cette date n'est pas opposable à Mme X... et qu'en conséquence, la responsabilité de son employeur doit être appréciée comme si le jour de son classement en invalidité, le 22 novembre 1997, son contrat de travail était toujours en vigueur ;

Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Rennes, mais uniquement pour qu'elle statue sur les points restant en litige ;

Condamne la Chambre des professionnels indépendants de l'hôtellerie aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Chambre des professionnels indépendants de l'hôtellerie à payer à Mme X... la somme de 2 200 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 02-45655
Date de la décision : 26/01/2005
Sens de l'arrêt : Cassation partielle partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Salaire - Paiement - Prescription - Prescription quinquennale - Point de départ - Détermination.

1° PRESCRIPTION CIVILE - Prescription quinquennale - Article L - du Code du travail - Domaine d'application - Rappel de salaire - Date d'exigibilité - Portée.

1° En matière de demande de rappel de salaire le délai de prescription ne court qu'à compter de la date d'exigibilité de chacune des fractions de la somme réclamée.

2° PRUD'HOMMES - Procédure - Instance - Unicité de l'instance - Définition - Portée.

2° PRUD'HOMMES - Procédure - Instance - Unicité de l'instance - Conditions - Fondement postérieur à la saisine du conseil de prud'hommes - Applications diverses - Créances nées ou révélées postérieurement à un jugement définitif.

2° La règle de l'unicité de l'instance ne peut être opposée à des créances nées ou révélées postérieurement au premier jugement du conseil de prud'hommes.

3° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Responsabilité - Faute - Inexécution par l'employeur de ses obligations - Défaut d'affiliation à un régime de prévoyance complémentaire.

3° CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Opposabilité au salarié par l'employeur - Possibilité - Exclusion - Cas - Droit subordonné à l'existence d'un contrat en cours.

3° La rupture d'un contrat de travail procédant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être opposée à un salarié pour le priver de la réparation du préjudice résultant des fautes commises par l'employeur dans l'exercice de ses obligations contractuelles. Dès lors, ayant retenu qu'un employeur avait commis la faute de ne pas affilier un salarié à un régime de prévoyance complémentaire, encourt la cassation l'arrêt qui, pour le débouter de sa demande tendant à la réparation du préjudice résultant de cette faute, retient que les prestations liées à une invalidité du régime de prévoyance auquel il aurait dû être affilié ne concernaient que les salariés dont le contrat de travail n'est pas rompu et qu'en l'espèce ce salarié avait été licencié avant sa mise en invalidité.

4° PRUD'HOMMES - Cassation - Arrêt - Arrêt de cassation - Cassation avec renvoi limité - Applications diverses.

4° CASSATION - Arrêt - Arrêt de cassation - Cassation avec renvoi limité - Applications diverses - Matière prud'homale.

4° Il y a lieu à cassation partiellement sans renvoi d'un arrêt ayant décidé à tort de débouter un salarié de sa demande tendant à la réparation du préjudice que lui avait causé son employeur en ne respectant pas ses obligations contractuelles à son égard, la Cour de cassation pouvant mettre fin au litige de ce chef en décidant que l'employeur ne pouvait, pour échapper à sa responsabilité, opposer à son salarié la date de la rupture du contrat de travail, le renvoi étant limité aux points restant en litige.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 27 juin 2002

Sur le n° 2 : Dans le même sens que : Chambre sociale, 2002-11-19, Bulletin 2002, V, n° 346, p. 338 (cassation partielle sans renvoi). Sur le n° 3 : Sur l'impossibilité pour l'employeur de se prévaloir de la rupture du contrat intervenue sans cause réelle et sérieuse pour priver le salarié d'un droit subordonné à la condition d'un contrat en cours, dans le même sens que : Chambre sociale, 2004-09-29, Bulletin 2004, V, n° 234 (1), p. 219 (cassation partielle partiellement sans renvoi). Sur le n° 4 : Sur d'autres applications de renvoi limité, dans le même sens que : Chambre sociale, 2004-09-29, Bulletin 2004, V, n° 234 (2), p. 219 (cassation partielle partiellement sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jan. 2005, pourvoi n°02-45655, Bull. civ. 2005 V N° 26 p. 23
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 V N° 26 p. 23

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos.
Avocat général : M. Legoux.
Rapporteur ?: Mme Quenson.
Avocat(s) : la SCP Peignot et Garreau, la SCP Ancel et Couturier-Heller.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:02.45655
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