AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office dans les conditions de l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile :
Vu les articles 16, 17 et 25, II, 2 de la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 ;
Attendu que, selon le dernier de ces textes, sous réserve des accords amiables déjà intervenus et des décisions judiciaires irrévocables, seront applicables aux successions ouvertes au 4 décembre 2001 et n'ayant pas donné lieu à partage avant cette date, les dispositions relatives aux nouveaux droits successoraux des enfants naturels dont le père ou la mère était, au temps de la conception, engagé dans les liens du mariage ;
Attendu que Jean-Paul X... est décédé le 9 décembre 1992, en laissant pour lui succéder sa fille Brigitte, née le 10 mai 1952 de son mariage célébré le 1er juillet 1949 avec Juliette Y..., décédée le 11 juin 1992, sa fille Nathalie, née le 27 décembre 1968 de sa liaison avec Mme Z..., et son fils Guillaume, né le 6 juillet 1975 de sa liaison avec Mme A... ; que le tribunal de grande instance a déclaré nulles les donations consenties par Jean-Paul X... à son fils Guillaume par la personne interposée de Mme A... ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, la cour d'appel énonce que la nullité édictée par l'article 911 du Code civil sanctionne la violation d'une incapacité spéciale de recevoir privant la personne visée du droit de bénéficier d'une libéralité et que tel est le cas de M. Guillaume X... puisque, en sa qualité d'enfant adultérin, il ne peut recevoir dans la succession de son père plus que la moitié de la part à laquelle il aurait eu droit si tous les enfants eussent été légitimes et que les donations par interposition ont eu pour effet de faire échec aux règles relatives à la dévolution successorale ; qu'en se déterminant ainsi, alors que, le jour où elle s'est prononcée, les dispositions relatives aux nouveaux droits successoraux des enfants adultérins étaient applicables à la succession de Jean-Paul X..., la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il ait lieu de statuer sur les moyens du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 janvier 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille quatre.