AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er mars 2001), que Mme X... est salariée depuis 1978 de l'Association pour l'organisation de l'accueil des personnalités étrangères, aux droits de laquelle a succédé l'association EGIDE, en qualité d'accompagatrice-interprète chargée d'effectuer des missions ponctuelles d'accueil de personnalités étrangères ; que, le 21 novembre 2000, à la suite d'un accord d'entreprise du 24 octobre 2000 prévoyant pour les accompagnateurs-interprètes, qualifiés de cadres, l'établissement d'un forfait en jours, l'employeur a proposé à la salariée un avenant à son contrat de travail stipulant un forfait annuel de jours travaillés ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée reproche à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé qu'elle était liée à l'Association par un contrat de travail à temps plein alors, selon le moyen, que le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit qui mentionne notamment la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue ainsi que la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'en l'absence d'écrit, il appartient à l'employeur, qui se prévaut d'un contrat à temps partiel, de rapporter la preuve non seulement de la durée exacte du travail convenu, mais également de sa répartition sur les jours de la semaine ou le mois ;
qu'en se bornant à relever, pour retenir que Mme X... était liée à l'employeur par un contrat de travail à temps partiel, que ladite salariée avait travaillé depuis son embauche en moyenne 80 heures par mois et que l'employeur avait prévu qu'un tableau serait mis à la disposition des accompagnateurs-interprètes pour lui permettre d'indiquer leurs disponibilités, en sorte que Mme X... pouvait vaquer à ses occupations entre deux missions, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que la durée exacte du travail avait été convenue entre l'employeur et la salariée ni qu'un accord était intervenu entre eux sur la répartition de ce travail sur les jours de la semaine ou le mois, s'est prononcée par une motivation inopérante et a, ce faisant, privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 212-4-3 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, relevant que selon le décompte mensuel des heures de travail de la salariée, cette dernière avait travaillé depuis son embauche en moyenne 80 heures et que l'Association avait prévu qu'un tableau sur lequel étaient indiquées les périodes de travail et les disponibilités des accompagnateurs interprètes pouvait être mis à jour par ceux-ci et consulté par les services, ce dont il résultait que les salariés n'étaient pas placés dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme ils devaient travailler ni qu'ils devaient se tenir constamment à la disposition de l'employeur, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que Mme X... reproche encore à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande relative à l'application de l'accord d'entreprise, alors, selon le moyen :
1 / que les règles applicables en matière de travail à temps partiel supposent que soit précisée contractuellement la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, un tel statut étant incompatible avec une convention de forfait annuel, laquelle suppose que les horaires de travail du salarié ne puissent être déterminés du fait notamment du degré d'autonomie dont il bénéficie dans l'organisation de son emploi du temps ; qu'en estimant que la proposition faite à Mme X... de signer une convention de forfait jours comportant une durée annuelle de 138 jours pour l'année 2001 n'était pas incompatible avec le maintien d'un contrat de travail à temps partiel, cependant que ces deux statuts sont inconciliables, la cour d'appel a violé les articles L. 212-4-3 et L. 212-15-3 du Code du travail ;
2 / que la convention de forfait jours ne peut concerner que des cadres dont la durée de travail ne peut être prédéterminée du fait de la nature de leurs fonctions, des responsabilités qu'ils exercent et du degré d'autonomie dont ils bénéficient dans l'organisation de leur emploi du temps, ces conditions étant cumulatives ; qu'en estimant que les interprètes acccompagnateurs répondaient à ces trois critères, dont notamment celui relatif à l'autonomie dans l'organisation de l'emploi du temps, tout en constatant qu'ils intervenaient selon le programme établi à la demande de la puissance invitante, ce dont il résultait qu'ils ne disposaient d'aucune autonomie réelle, la cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en évinçaient, violant ainsi l'article L. 212-15-3 du Code du travail ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en application de l'article L. 212-15-3 III du Code du travail, une convention de forfait en jours peut être conclue pour certains cadres pour un nombre de jours inférieur au plafond de 217 jours prévu par ce texte ; qu'en second lieu, l'arrêt relève que si la salariée, qui a le statut de cadre, intervient selon un programme préétabli, elle est habilitée, sous réserve de l'impact financier des mesures proposées nécessitant l'accord de l'employeur, à prendre toute initiative de nature à "optimiser" le séjour des invités ; que la cour d'appel a pu en déduire que la durée du temps de travail de la salariée ne pouvait être prédéterminée, compte tenu de la nature de ses fonctions, des responsabilités exercées et de l'autonomie dont elle bénéficiait dans l'organisation de son emploi du temps ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille trois.