AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que la société de droit gabonais "Navifret", affréteur du navire "Rhodos III", a souscrit en 1996 une police d'assurance corps auprès des compagnies gabonaises Assinco et Ogar ; que le navire ayant sombré le 15 février 1999 à Douala, par acte du 2 novembre 1999, la société "Navifret" a cédé à son président directeur général, M. X..., ses droits et actions résultant des polices d'assurance; que les compagnies ayant refusé de lui régler les indemnités dues, il les a fait assigner en paiement, le 2 décembre 1999, devant le tribunal de commerce de Marseille en se prévalant de sa nationalité française ; que ces sociétés, dont le siège social était fixé au Gabon, ont opposé l'incompétence de la juridiction saisie au profit du tribunal de Libreville en soutenant que la cession était irrégulière et frauduleuse en vue de créer un élément de rattachement artificiel pour les soustraire à leur juges naturels ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 janvier 2001) d'avoir rejeté cette exception d'incompétence, alors, selon le moyen, qu'en refusant, d'une part, de se prononcer sur la fraude invoquée à raison du but poursuivi et des conditions dans lesquelles l'acte de cession est intervenu, et, d'autre part, de trancher la question de fond, dès lors que le point de procédure l'imposait, la cour d'appel a violé les articles 14 du Code civil et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que la compétence internationale des tribunaux français, par application de l'article 14 du Code civil, est fondée non sur les droits nés des faits litigieux mais sur la nationalité des parties, sauf preuve d'une fraude destinée à donner artificiellement compétence à la juridiction française pour soustraire le débiteur à ses juges naturels ;
qu'ayant exactement retenu qu'en cet état de la procédure, elle n'avait pas à statuer sur la validité de la cession des droits mais seulement sur la fraude procédurale aux règles de compétence internationale, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a souverainement estimé que cette preuve n'était pas rapportée ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés ASSINCO et OGAR aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille quatre.