CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Antoine,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Bastia, chambre correctionnelle, en date du 8 décembre 1999, qui, pour soustraction ou destruction d'un bien par dépositaire public et travail clandestin, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement avec sursis, à 50 000 francs d'amende et à l'interdiction des droits visés par l'article 131-26, alinéa 1er, 1° à 4°, du Code pénal pour une durée de 2 ans et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 410 à 417, 460, 591 à 593 du Code de procédure pénale, méconnaissance des droits de la défense :
" en ce que la cour d'appel a jugé Antoine X..., par arrêt qualifié de contradictoire, en l'absence du prévenu et hors la présence de ses conseils, qui n'ont pu se faire entendre ;
" aux motifs que régulièrement cité une première fois, Antoine X... avait sollicité un renvoi pour opération chirurgicale, qui lui avait été accordé ; qu'il avait sollicité un nouveau renvoi en raison du fait qu'il se trouvait à Marseille à la suite de l'opération et était incapable de se rendre à Bastia ; que le conseil du prévenu avait produit des documents prouvant que son client était bien à Marseille pour y subir un traitement ; que le ministère public et les parties civiles s'étaient opposés à cette nouvelle demande de renvoi ; que le prévenu n'établissait pas que le traitement suivi rendait impossible sa présence à la barre ; que l'affaire avait donc été maintenue hors la présence de ses conseils, non recevables à le représenter au sens de l'article 411 du Code de procédure pénale ;
" 1° alors que le prévenu ne peut être jugé contradictoirement en son absence que s'il a été régulièrement cité à personne ; qu'aucun élément du dossier ne permet de constater qu'Antoine X... a été cité à personne pour comparaître à l'audience du 17 novembre 1999, où sa cause a été débattue ;
" 2° alors que, en toute hypothèse, tout prévenu doit pouvoir être défendu par un avocat ; que ce droit absolu ne saurait être subordonné à la présence du prévenu devant le juge correctionnel ; que la cour d'appel ne pouvait déclarer que les conseils du prévenu étaient "non recevables à le représenter" et juger l'affaire sans les entendre en leurs moyens de défense ;
" 3° alors que, en jugeant un homme de 76 ans, qui apportait la preuve du traitement qui l'empêchait d'assister à son procès, hors sa présence et sans même donner la parole à ses avocats, la cour d'appel a manqué à l'obligation d'assurer à ce prévenu un procès équitable " ;
Vu les articles 410 et 412 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que le prévenu, cité à personne, qui n'a pas comparu mais a fourni une excuse reconnue valable, ne peut être jugé contradictoirement, en cas d'absence à l'audience ultérieure à laquelle l'affaire a été renvoyée, que s'il a été régulièrement cité à personne pour cette nouvelle audience ou s'il est établi qu'il a eu connaissance de la citation ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, cité à personne à l'audience du 8 septembre 1999, Antoine X... a fait connaître par l'intermédiaire de son avocat que, devant subir une intervention chirurgicale, il ne pourrait être présent ; qu'après avoir admis la validité de l'excuse invoquée, les juges ont ordonné le renvoi de l'affaire à l'audience du 17 novembre 1999 ; qu'à cette date, l'avocat du prévenu a sollicité un nouveau renvoi en faisant état du traitement suivi par ce dernier dans un établissement de soins à la suite de son opération ;
Attendu que, pour écarter cette excuse et statuer contradictoirement à l'égard du prévenu, en application de l'article 410 du Code de procédure pénale, les juges, après avoir relevé que l'affaire avait été " contradictoirement renvoyée " à l'audience du 17 novembre 1999, retiennent que le prévenu ne justifiait pas que son traitement médical rendît impossible sa présence à l'audience de renvoi ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'en l'absence du prévenu à l'audience du 8 septembre 1999, l'affaire n'avait pu être renvoyée contradictoirement à celle du 17 novembre suivant et alors qu'aucune citation à comparaître à cette audience n'avait été délivrée à la personne du prévenu, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bastia, en date du 8 décembre 1999 ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.