AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile :
Vu les articles R. 621-1 du Code pénal, 29 de la loi du 29 juillet 1881, ensemble l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que les abus de la liberté d'expression, prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 et par l'article R. 621-1 du Code pénal, ne peuvent être poursuivis et réparés sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que Mme X..., qui exploitait une pharmacie, a fait constater par un huissier de justice, les 26 avril et 2 octobre 1995, qu'étaient affichés dans la salle d'attente du cabinet médical de M. Y..., médecin installé dans la même commune, successivement deux documents manuscrits signés de M. Y... ; qu'estimant que ces affiches portaient atteinte à son honneur et à sa considération, Mme X... a fait assigner M. Y..., sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, par acte d'huissier de justice du 21 juillet 1995, puis a présenté une demande additionnelle en réparation de son préjudice ; qu'en raison de propos que Mme X... avait tenus à des clients de sa pharmacie sur ses compétences de médecin, M. Y... a formé une demande reconventionnelle en réparation de son préjudice, sur le fondement du même texte ;
Attendu que pour condamner M. Y... à payer à Mme X... une certaine somme à titre de dommages-intérêts et Mme X... à payer à M. Y... une certaine somme au même titre, l'arrêt se fonde sur les dispositions de l'article 1382 du Code civil ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le deuxième des textes susvisés par refus d'application et le dernier par fausse application ;
Et vu l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que la prescription prévue par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 n'a pu être interrompue par des actes fondés à tort sur l'article 1382 du Code civil ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mars 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
CONSTATE l'extinction des actions par la prescription ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens tant devant les juges du fond que devant la Cour de Cassation ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille quatre.