AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1002, alinéa 1er, du Code civil ;
Attendu que les dispositions testamentaires sont ou universelles ou à titre universel ou à titre particulier ; que l'institution de plusieurs légataires universels sans assignation de parts confère à tous des droits égaux et ne rend pas cette institution sans objet ;
Attendu que Marcelle X... est décédée le 26 novembre 1977, en laissant un testament olographe dans lequel elle a exprimé la volonté que M. Henri-Hugues X..., son neveu institué légataire universel, se charge, "le moment venu, de faire une dot très honorable à ses filles Laure et Françoise X... " alors mineures et que ses petites-nièces "aient une grande partie" de son patrimoine ; qu'un arrêt du 11 décembre 1992, ayant jugé que les legs consentis à Mlles Françoise et Laure X... constituaient des legs à titre universel, a été cassé par arrêt du 28 mars 1995 (Civ, 1re, pourvoi n° G 93-11.672) ; qu'un arrêt du 25 septembre 1996, ayant jugé, après avoir constaté le désistement de Mlle Françoise X..., que le legs consenti à Mlle Laure X... constituait un legs à titre particulier, a été cassé par arrêt du 16 mars 1999 (Civ, 1re, pourvoi n° Y 96 22 140) ; que l'arrêt attaqué a dit que Mlle Laure X... ne pouvait se prévaloir d'aucune disposition testamentaire valable, de nature à produire des effets juridiques ;
Attendu que, pour rejeter la qualification de legs universel invoquée par Mlle Laure X..., l'arrêt attaqué énonce que, dans son testament, Marcelle X... a institué légataire universel M. Henri-Hugues X..., seul visé en cette qualité soit expressément, soit implicitement, et que la situation faite à Mlles Laure et Françoise X... par la testatrice apparaît subordonnée au regard de celle consentie à M. Henri-Hugues X... auquel est conférée une grande liberté d'appréciation quant à la consistance et au montant du legs fait à ses filles et au moment de sa délivrance, ce dont il s'induit que la testatrice n'a pas entendu procéder à l'institution conjointe de légataires universels, alors au surplus que ces derniers, lorsqu'ils ne sont pas en concours avec un héritier réservataire, n'ont pas à se faire délivrer leurs legs mais, en cas de testament olographe, qui se rencontre en l'espèce, à se faire envoyer en possession ;
Qu'en se déterminant ainsi, tout en constatant, d'une part, que la qualification de legs n'avait jamais été remise en cause, d'autre part, que les qualifications de legs à titre universel et de legs à titre particulier avaient été rejetées par les arrêts des 28 mars 1995 et 16 mars 1999, de sorte qu'il ne pouvait s'agir que de legs universels conjoints sans assignation de parts, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à Mlle X... une somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille quatre.