Vu, I, sous le n° 08DA00711, la requête enregistrée le 28 avril 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Robert , demeurant ..., par Me Bonnerre ; M. et Mme demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0700975 du 21 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2002 ;
2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;
Ils soutiennent qu'ils ont reçu de la mutuelle MCD une somme de 243 918 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, de carrière et de notoriété ; que l'exposant n'avait aucun droit sur le fichier client et ne pouvait donc obtenir de la part de la mutuelle, des indemnités sur la cession des droits du portefeuille comme le prétend sans fondement l'administration ; qu'il convient de reconnaître que la nature de l'indemnité versée par la mutuelle MCD est une indemnité correspondant à l'allocation de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de représentation ; que les prétentions de l'administration tendant à faire requalifier la nature de l'indemnité en « droit de créance sur les commissions afférentes au portefeuille » ne sont fondées ni en fait ni en droit ; que l'administration a confondu et assimilé le statut d'agent d'assurances qu'occupait l'exposant à sa mission de représentant de la mutuelle MCD ; que la convention du 12 novembre 1987 et le protocole transactionnel du 30 octobre 2002 indiquent très clairement que l'exposant dispose de la qualité de représentant en ce qui concerne ses relations contractuelles avec la mutuelle MCD ; que, par ailleurs, sur la feuille d'imposition pour 2002, l'administration a opéré d'elle-même la suppression des mentions afin de ne pas soumettre le contribuable à l'imposition des sommes mentionnées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il est patent que les fonctions exercées par le requérant pour le compte de la mutuelle MCD étaient celles d'un agent général d'assurances ; que ce statut est bien avéré par le protocole transactionnel du 30 octobre 2002 ; que le fait que la mutuelle MCD soit restée propriétaire du fichier des adhérents ne remet pas en cause la position de l'administration ; qu'eu égard à l'ensemble des missions qui lui avaient été confiées par la mutuelle MCD et l'exercice de son mandat pendant près de quinze ans, le requérant a nécessairement apporté une plus-value au fichier adhérent de celle-ci ; que l'indemnité perçue par le requérant à l'occasion de la cessation de ses fonctions correspond en réalité à la cession des droits de créance attachés à son portefeuille client ; que l'article L. 114-31 du code de la mutualité sur lequel se fondent les requérants est issu de la loi du 15 décembre 2005 postérieure à l'année en litige ; que le requérant n'exerçait ni les fonctions d'administrateur, ni celles de dirigeant salarié de la MCD ; que les requérants ne sont pas fondés à prétendre que l'indemnité litigieuse représenterait des dommages et intérêts qui auraient été versés en réparation d'un préjudice subi ; que le requérant ne précise d'ailleurs nullement quelle faute aurait pu commettre la mutuelle MCD à son égard, ni le préjudice qu'il estime avoir subi et justifiant l'octroi de la somme en litige ; que, dans l'hypothèse où la qualification de plus-value serait écartée, il n'en demeure pas moins que l'indemnité est néanmoins imposable en vertu des dispositions de l'article 93-1 du code général des impôts ; que, si les requérants soutiennent que l'administration aurait pris position en considérant l'indemnité perçue comme non imposable, ils n'apportent aucun élément justifiant leurs allégations ; qu'ils n'ont jamais établi qu'ils auraient exposé leur situation à l'administration et que cette dernière aurait pris position sur le caractère non imposable de l'indemnité perçue par le requérant à l'occasion de la cessation de son activité en 2002 ; qu'ils n'ont pas été en mesure de fournir une copie de leur demande écrite formulée antérieurement au dépôt de leur déclaration de revenus ; qu'ils n'ont pas plus été en mesure d'apporter un document écrit de l'administration établissant le traitement fiscal de l'indemnité en cause et pouvant valoir prise de position ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 29 août 2008, présenté pour M. et Mme Robert qui concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens ;
Vu, II, sous le n° 08DA01154, la requête enregistrée le 24 juillet 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Robert , demeurant ..., par Me Bonnerre ; M. et Mme demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0708513 du 7 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2002 ;
2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;
Ils soutiennent qu'ils ont reçu de la mutuelle MCD une somme de 243 918 euros au titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, de carrière et de notoriété ; que l'exposant n'avait aucun droit sur le fichier client et ne pouvait donc obtenir de la part de la mutuelle des indemnités sur la cession des droits du portefeuille comme le prétend sans fondement l'administration ; qu'il convient de reconnaître que la nature de l'indemnité versée par la mutuelle MCD est une indemnité correspondant à l'allocation de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de représentation ; que les prétentions de l'administration tendant à faire requalifier la nature de l'indemnité en « droit de créance sur les commissions afférentes au portefeuille » ne sont fondées ni en fait ni en droit ; que l'administration a confondu et assimilé le statut d'agent d'assurances qu'occupait l'exposant à sa mission de représentant de la mutuelle MCD ; que la convention du 12 novembre 1987 et le protocole transactionnel du 30 octobre 2002 indiquent très clairement que l'exposant dispose de la qualité de représentant en ce qui concerne ses relations contractuelles avec la mutuelle MCD ; que, par ailleurs, sur la feuille d'imposition pour 2002, l'administration a opéré d'elle-même la suppression des mentions afin de ne pas soumettre le contribuable à l'imposition des sommes mentionnées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'il est patent que les fonctions exercées par le requérant pour le compte de la mutuelle MCD étaient celles d'un agent général d'assurances ; que ce statut est bien avéré par le protocole transactionnel du 30 octobre 2002 ; que le fait que la mutuelle MCD soit restée propriétaire du fichier des adhérents ne remet pas en cause la position de l'administration ; qu'eu égard à l'ensemble des missions qui lui avaient été confiées par la mutuelle MCD et l'exercice de son mandat pendant près de quinze ans, le requérant a nécessairement apporté une plus-value au fichier adhérent de celle-ci ; que l'indemnité perçue par le requérant à l'occasion de la cessation de ses fonctions correspond en réalité à la cession des droits de créance attachés à son portefeuille client ; que l'article L. 114-31 du code de la mutualité sur lequel se fondent les requérants est issu de la loi du 15 décembre 2005 postérieure à l'année en litige ; que le requérant n'exerçait ni les fonctions d'administrateur, ni celles de dirigeant salarié de la MCD ; que les requérants ne sont pas fondés à prétendre que l'indemnité litigieuse représenterait des dommages et intérêts qui auraient été versés en réparation d'un préjudice subi ; que le requérant ne précise d'ailleurs nullement quelle faute aurait pu commettre la mutuelle MCD à son égard, ni le préjudice qu'il estime avoir subi et justifiant l'octroi de la somme en litige ; que, dans l'hypothèse où la qualification de plus-value serait écartée, il n'en demeure pas moins que l'indemnité est néanmoins imposable en vertu des dispositions de l'article 93-1 du code général des impôts ; que, si les requérants soutiennent que l'administration aurait pris position en considérant l'indemnité perçue comme non imposable, ils n'apportent aucun élément justifiant leurs allégations ; qu'ils n'ont jamais établi qu'ils auraient exposé leur situation à l'administration et que cette dernière aurait pris position sur le caractère non imposable de l'indemnité perçue par le requérant à l'occasion de la cessation de son activité en 2002 ; qu'ils n'ont pas été en mesure de fournir une copie de leur demande écrite formulée antérieurement au dépôt de leur déclaration de revenus ; qu'ils n'ont pas plus été en mesure d'apporter un document écrit de l'administration établissant le traitement fiscal de l'indemnité en cause et pouvant valoir prise de position ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 14 novembre 2008, présenté pour M. et Mme Robert qui concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la mutualité ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;
- les observations de Me Bonnerre, pour M. et Mme ;
- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. , agent général d'assurances domicilié à Cambrai (Nord), a perçu en 2002 une indemnité d'un montant de 243 918 euros de la part de la Mutuelle Chirurgico Dentaire (MCD) à l'occasion de sa cessation de fonctions ; qu'en 2005, l'administration a vérifié la situation fiscale personnelle de M. et Mme et a remis en cause la qualification fiscale de l'indemnité en question ; qu'elle en a déduit des redressements tant en matière d'impôt sur le revenu qu'en matière de contributions sociales qui ont été mis en recouvrement respectivement les 31 mai et 31 décembre 2006 ; que M. et Mme relèvent appel des jugements du Tribunal administratif de Lille en date des 21 février et 7 mai 2008 qui ont rejeté leurs demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2002 ;
Considérant que les requêtes susvisées de M. et Mme sont relatives à une même affaire et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;
Sur l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 93-1 du code général des impôts : « Le bénéfice à retenir dans les bases de l'imposition sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. Sous réserve des dispositions de l'article 151 sexies, il tient compte des gains ou des pertes provenant soit de la profession, soit des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession, soit des cessions de charges ou d'offices, ainsi que de toutes indemnités reçues en contrepartie de la cessation de l'exercice de la profession ou du transfert d'une clientèle » et qu'aux termes de l'article 93 quater du même code : « I - Les plus-values réalisées sur des immobilisations sont soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies. » ;
Considérant, d'une part, que M. fait valoir que l'indemnité transactionnelle perçue en 2002 visait à réparer le préjudice moral, de carrière et de notoriété qu'il a subi en raison de la résiliation par la mutuelle MCD de son mandat de correspondant local et qu'elle n'entrait donc pas dans l'assiette de l'impôt sur le revenu ; que s'il avait par ailleurs une activité d'agent général d'assurances, il n'avait qu'un mandat de représentation pour la mutuelle MCD, sa mission se limitant à l'encaissement des commissions auprès des adhérents pour le compte de celle-ci et au traitement des relations existant entre la mutuelle et les adhérents ; qu'il ne possédait aucune clientèle personnelle ; qu'il résulte toutefois des termes de la convention signée le 12 novembre 1987 entre la mutuelle MCD et M. que ce dernier avait pour tâche d'encaisser des cotisations auprès des adhérents et de recevoir les adhérents ainsi que les nouvelles adhésions et que sa rémunération était assise sur les cotisations statutaires et accessoires encaissées avec une dotation de 4,70 %, par la suite révisée, pour l'ensemble de ses frais de gestion administrative inhérents à l'exécution de cette convention ; que, dès lors, il peut être regardé comme agent d'assurances pour le compte de la mutuelle MCD et l'indemnité transactionnelle litigieuse peut être analysée comme la contrepartie de la cession du portefeuille de la clientèle dont il avait la charge ;
Considérant, d'autre part, que les requérants ne peuvent, en tout état de cause, utilement se prévaloir des dispositions de l'article L.114-31 du code de la mutualité relatives aux modalités de rémunération des administrateurs et dirigeants salariés des unions et des mutuelles, telles qu'issues de la loi n° 2005-1564 du 15 décembre 2005, dès lors que ces dispositions sont postérieures aux années d'imposition en litige ;
Sur le bénéfice de l'interprétation administrative de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : « Il ne peut être procédé à aucun rehaussement d'impositions si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal par un redevable de bonne foi et s'il est démontré que l'appréciation faite par le contribuable a été antérieurement formellement admise par l'administration à l'occasion d'une demande de renseignements, d'une vérification ou d'un contrôle. » ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : « La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal » ;
Considérant que M. et Mme font valoir que le service a formellement pris position sur le fondement des dispositions des articles L. 80 A et L. 80 B précitées du livre des procédures fiscales sur le caractère non imposable des sommes en cause ; qu'ils affirment en effet qu'un inspecteur des impôts, lors du dépôt de leur déclaration de revenus pour l'année 2002, aurait corrigé celle-ci en déclarant que l'indemnité litigieuse correspondait à la réparation d'un préjudice moral non imposable ; qu'en tout état de cause, à supposer les faits établis, cette intervention ne saurait être regardée comme une prise de position formelle de l'administration, faute pour eux de justifier que l'agent leur a exposé les motifs de la correction à laquelle il a procédé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Lille a rejeté leurs demandes ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes n° 08DA00711 et n° 08DA01154 présentées par M. et Mme sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Robert et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
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Nos08DA00711,08DA01154