Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2022 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Par un jugement n° 2110016 du 25 mai 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 22DA01323 du 11 avril 2023, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de M. B..., annulé ce jugement et l'arrêté préfectoral en litige et enjoint au préfet du Nord de délivrer un certificat de résidence à l'intéressé.
Par un pourvoi, enregistré le 14 juin 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel formé par M. B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Adam, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de M. B... ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 mai 2024, présentée par l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que M. B..., ressortissant algérien, était titulaire, en raison de son état de santé, d'un certificat de résidence valable du 15 septembre 2018 au 14 septembre 2019, lequel a été renouvelé jusqu'au 17 janvier 2021. Par un jugement du 25 mai 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 décembre 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de renouveler ce titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 11 avril 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a annulé ce jugement et l'arrêté du préfet du Nord.
2. D'une part, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et des membres de leur famille : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et notamment de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont les documents produits par M. B... n'étaient pas de nature à remettre en cause l'exactitude, que l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié de son affection en Algérie. Par suite, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir qu'en jugeant que M. B... ne pouvait pas effectivement bénéficier d'un tel traitement, la cour administrative d'appel de Douai a dénaturé les pièces du dossier.
5. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
7. En premier lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., le tribunal administratif de Lille a répondu au moyen tiré de ce que l'arrêté qu'il conteste serait entaché d'erreur de fait. Le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait, pour ce motif, entaché d'irrégularité.
8. En second lieu, ainsi qu'il a été dit au point 4, il ressort des pièces du dossier que M. B... peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié de son affection en Algérie. Par suite, il n'est fondé à soutenir ni que le refus de certificat de résidence qui lui a été opposé aurait été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ni qu'en lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de son état de santé.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 11 avril 2023 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé.
Article 2 : La requête présentée par M. B... devant la cour administrative d'appel de Douai est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... devant le Conseil d'Etat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....