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21/10/2009 | FRANCE | N°322287

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 21 octobre 2009, 322287


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 novembre et 8 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe C, demeurant ... ; M. C demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 7 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 pour l'élection des conseillers municipaux dans la commune de Cannes, à l'inéligibilté de M. Bernard A et au rejet de son compte de campagn

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2°) de mettre à la charge de M. A le versement de la somme de 6 000...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 novembre et 8 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe C, demeurant ... ; M. C demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 7 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 pour l'élection des conseillers municipaux dans la commune de Cannes, à l'inéligibilté de M. Bernard A et au rejet de son compte de campagne ;

2°) de mettre à la charge de M. A le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hugues Ghenassia de Ferran, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de M. C et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Monod, Colin, avocat de M. C et à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A ;

Considérant que, à l'issue du second tour des opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 dans la ville de Cannes pour le renouvellement du conseil municipal, la liste conduite par M. Bernard A a remporté les élections avec 40,70 % des votes tandis que la liste de M. C recueillait 37,12 % des suffrages ; que M. C fait appel du jugement du 7 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa protestation tendant à l'annulation de cette élection, à l'inéligibilité et au rejet du compte de campagne de M. A ;

Considérant que les griefs, qui ne sont pas d'ordre public, sont irrecevables en appel s'ils n'ont pas été soulevés en première instance ou, s'ils l'ont été, lorsqu'ils ne sont repris devant le Conseil d'État qu'après l'expiration du délai d'appel d'un mois à compter de la notification du jugement comportant l'indication de ce délai en application des dispositions de l'article R. 123 du code électoral ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. A :

Considérant que le grief tiré de ce que le maintien par M. B de sa candidature au deuxième tour des élections municipales de Cannes aurait constitué une manoeuvre de nature à fausser le résultat de l'élection, l'intéressé ne pouvant ignorer que son compte de campagne ne manquerait pas d'être rejeté et qu'il serait déclaré inéligible, est soulevé pour la première fois en appel et pour ce motif, irrecevable ;

Considérant, de même, que dans sa requête en appel enregistrée dans le délai d'un mois prévu par les dispositions rappelées ci-dessus, le requérant a fait valoir que les mesures prises par le conseil municipal de Cannes peu de temps avant les opérations électorales contestées, et consistant à accorder la gratuité des transports par autobus à certaines catégories d'habitants de la commune, avaient le caractère de dépenses électorales exposées en méconnaissance de l'article L. 52-12 du code électoral ; que ce n'est qu'ultérieurement, dans un mémoire enregistré le 13 mai 2009, que ces mêmes faits ont été qualifiés par le requérant de manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin ; que ce dernier grief, différent du précédent, a été présenté après l'expiration du délai d'appel d'un mois fixé par les dispositions de l'article R. 123 du code électoral ; qu'il est, par suite, irrecevable ;

Sur les irrecevabilités soulevées d'office :

Considérant que les griefs tirés, d'une part, de ce que certaines signatures figurant sur les listes d'émargement du second tour des élections municipales de Cannes seraient différentes de celles portées sur les listes du premier tour, d'autre part, de ce qu'au cours des opérations électorales du second tour l'urne du bureau de vote n°1 aurait été ouverte irrégulièrement, n'ont pas été soulevés dans le mémoire introductif du 7 novembre 2008 mais, pour la première fois, dans le mémoire complémentaire du 8 décembre 2008 ; que, par suite, ces griefs sont irrecevables pour tardiveté au regard des dispositions précitées de l'article R. 123 du code électoral ;

Sur le grief tiré des irrégularités du financement de la campagne de M. A :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4. Sont réputées faites pour son compte les dépenses exposées directement au profit du candidat et avec l'accord de celui-ci, par les personnes physiques qui lui apportent leur soutien, ainsi que par les partis et groupements politiques qui ont été créés en vue de lui apporter leur soutien ou qui lui apportent leur soutien. Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs ou indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié (...) ; que selon l'article L. 52-8 de ce même code : (...) / Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués (...) ;

Considérant que la mesure annoncée par un courrier du maire de Cannes du 4 janvier 2008, signé en sa qualité de président du centre communal d'action sociale, et consistant à étendre la gratuité du transport par autobus aux habitants de la commune non imposables, de plus de 65 ans, selon des modalités qui ont été ensuite améliorées par lettre du 4 février 2008, ne peut s'analyser, alors d'ailleurs qu'elle avait été envisagée dès le mois de novembre 2006, comme une dépense exposée en vue de favoriser l'élection de M. A ; qu'il suit de là que cette mesure ne peut être regardée comme constituant une dépense électorale au sens de l'article L. 52-12 du code électoral, qui aurait dû figurer dans le compte de campagne de M. A et ne constitue pas non plus un don d'une personne morale prohibé par les dispositions de l'article L. 52-8 du même code ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa protestation ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. C demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : la requête de M. C est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe C, à M. Bernard A, à Mme Apolline D, à M. Jean-Raymond B et à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 322287
Date de la décision : 21/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ÉLECTIONS ET RÉFÉRENDUM - DISPOSITIONS GÉNÉRALES APPLICABLES AUX ÉLECTIONS - FINANCEMENT ET PLAFONNEMENT DES DÉPENSES ÉLECTORALES - DONS - ABSENCE - MESURE DE GRATUITÉ DES TRANSPORTS PAR AUTOBUS AU BÉNÉFICE DES HABITANTS DE LA COMMUNE NON IMPOSABLES DE PLUS DE 65 ANS.

28-005-04-01 Une mesure consistant à étendre la gratuité du transport par autobus aux habitants de la commune non imposables de plus de 65 ans ne constitue pas un don d'une personne morale prohibé par l'article L. 52-8 du code électoral.

ÉLECTIONS ET RÉFÉRENDUM - DISPOSITIONS GÉNÉRALES APPLICABLES AUX ÉLECTIONS - FINANCEMENT ET PLAFONNEMENT DES DÉPENSES ÉLECTORALES - COMPTE DE CAMPAGNE - DÉPENSES - ABSENCE - MESURE DE GRATUITÉ DES TRANSPORTS PAR AUTOBUS AU BÉNÉFICE DES HABITANTS DE LA COMMUNE NON IMPOSABLE DE PLUS DE 65 ANS.

28-005-04-02-04 Une mesure consistant à étendre la gratuité du transport par autobus aux habitants de la commune non imposables de plus de 65 ans ne peut s'analyser comme une dépense exposée en vue de favoriser l'élection, devant figurer au compte de campagne en application de l'article L. 52-12 du code électoral.

ÉLECTIONS ET RÉFÉRENDUM - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - VOIES DE RECOURS - APPEL - IRRECEVABILITÉ DES GRIEFS NOUVEAUX EN APPEL OU - S'ILS ONT ÉTÉ PRÉSENTÉS EN PREMIÈRE INSTANCE - NON REPRIS DANS LE DÉLAI D'APPEL DE L'ARTICLE R - 123 DU CODE ÉLECTORAL [RJ1].

28-08-06 Les griefs qui ne sont pas d'ordre public sont irrecevables en appel s'ils n'ont pas été soulevés en première instance ou, s'ils l'ont été, lorsqu'ils ne sont repris devant le Conseil d'État qu'après l'expiration du délai d'appel d'un mois à compter de la notification du jugement comportant l'indication de ce délai en application des dispositions de l'article R. 123 du code électoral.


Références :

[RJ1]

Ab. jur., sur ce point, 17 mars 1972, Elections cantonales de Lantosque, n° 81948, p. 229.


Publications
Proposition de citation : CE, 21 oct. 2009, n° 322287
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Hugues Ghenassia de Ferran
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU ; SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP MONOD, COLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:322287.20091021
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