Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A...D..., M. et Mme B...et Michèle C...et les sociétés Arnaldo et Nouvelle Idéal Garage ont demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 9 avril 2010 par lequel le maire de Menton (Alpes-Maritimes) a autorisé la société civile immobilière (SCI) Riviera Beauvert à construire avenue Riviera, sur les parcelles cadastrées BI nos 301, 303, 304, 307, 308 et 309, un ensemble immobilier multifonctions, ainsi que les décisions implicites par lesquelles le maire de Menton a rejeté les recours gracieux formés par M. D...et par M. et Mme C... contre cet arrêté.
Par un jugement nos 1002273, 1003461, 1004157 du 4 juillet 2012, le tribunal administratif de Nice a déclaré la requête des sociétés Arnaldo et Nouvelle Idéal Garage irrecevable en tant qu'elle émanait de la seconde de ces sociétés et annulé l'arrêté du 9 avril 2010 ainsi que les deux décisions implicites rejetant les recours gracieux de M. D...et de M. et MmeC....
Par un arrêt nos 12MA03831, 12MA04542 du 5 décembre 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, rejeté l'appel formé par la SCI Riviera Beauvert contre le jugement du tribunal administratif de Nice du 4 juillet 2012 et, d'autre part, déclaré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande de cette société tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement.
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 février 2014, 7 mai 2014 et 1er décembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SCI Riviera Beauvert demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 5 décembre 2013 ;
2°) de mettre à la charge de M.D..., de M. et Mme C...et de la SCI Arnaldo la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Marc Thoumelou, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Jean Lessi, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la SCI Riviera Beauvert, à la SCP Bénabent, Jehannin, avocat de M. et MmeC..., et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la commune de Menton ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 9 avril 2010, le maire de Menton a accordé à la SCI Riviera Beauvert un permis de construire un ensemble immobilier composé de trois bâtiments comprenant des bureaux, des commerces, 117 logements et trois niveaux de sous-sols pour des parkings. Par un jugement du 4 juillet 2012, accueillant les demandes de M.D..., de M. et Mme C...et de la SCI Arnaldo, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté et les décisions rejetant les recours gracieux formés à son encontre. Par un arrêt du 5 décembre 2013, contre lequel la SCI Riviera Beauvert se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé contre ce jugement par cette SCI.
Sur les conclusions de M. et Mme C...tendant à ce qu'il n'y ait plus lieu à statuer :
2. M. et Mme C...font valoir qu'un nouveau permis, devenu définitif, a été accordé le 29 juin 2015 à la SCI Riviera Beauvert pour un projet de construction similaire à celui autorisé par le permis en litige, dont l'emprise se situe sur les mêmes parcelles. Toutefois, le permis du 29 juin 2015, délivré après l'annulation du permis du 9 avril 2010 par le jugement du tribunal administratif de Nice du 4 juillet 2012, n'a pas eu pour effet de retirer le permis en litige et ne modifie en rien l'état du droit résultant, en ce qui concerne cette décision, du jugement du tribunal administratif de Nice et de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille. Par suite, il n'est pas de nature à rendre sans objet le pourvoi en cassation formé par le bénéficiaire du permis annulé.
Sur le bien fondé du pourvoi :
3. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation ". Aux termes de l'article L. 600-5-1 du même code : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ".
4. Pour l'application des dispositions des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, le juge administratif doit, en particulier, apprécier si le vice qu'il a relevé peut être régularisé par un permis modificatif. Un tel permis ne peut être délivré que si, d'une part, les travaux autorisés par le permis initial ne sont pas achevés - sans que la partie intéressée ait à établir devant le juge l'absence d'achèvement de la construction ou que celui-ci soit tenu de procéder à une mesure d'instruction en ce sens - et si, d'autre part, les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité ne peuvent être regardées, par leur nature ou leur ampleur, comme remettant en cause sa conception générale. A ce titre, la seule circonstance que ces modifications portent sur des éléments tels que son implantation, ses dimensions ou son apparence ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce qu'elles fassent l'objet d'un permis modificatif.
5. Après avoir relevé que le permis en litige méconnaissait l'article UB 7 du règlement du plan d'occupation des sols de Menton, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, la cour a estimé que la régularisation de ce vice conduirait à un déplacement de l'implantation de la construction projetée d'au moins quatre mètres. En déduisant de ce déplacement que le vice ne pouvait être régularisé par la délivrance d'un permis modificatif, sans rechercher s'il était de nature à remettre en cause la conception générale du projet, la cour a commis une erreur de droit.
6. Il résulte de ce qui précède que la SCI Riviera Beauvert est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Le moyen d'erreur de droit retenu suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens du pourvoi.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la SCI Riviera Beauvert, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la SCI Riviera Beauvert présentées au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 5 décembre 2013 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : Les conclusions de la SCI Riviera Beauvert et de M. et Mme C...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SCI Riviera Beauvert et à M. et Mme B...et MichèleC....
Copie en sera adressée à la commune de Menton, à M. A...D...et à la SCI Arnaldo.