Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures
1° M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, les arrêtés des 10 juillet 2008 et 5 juillet 2010 par lesquels le maire de Montigny-lès-Metz (Moselle) a accordé à la société MDB promotion un permis de construire un immeuble composé de deux logements sur un terrain situé 1 rue Charles de Gaulle ainsi qu'un permis de construire modificatif et, d'autre part, la décision du maire de cette commune rejetant son recours gracieux dirigé contre ce permis modificatif.
2° Mme F...C...a demandé à ce tribunal d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, ces mêmes arrêtés ainsi que l'arrêté du 5 mai 2011 par lequel le maire de Montigny-lès-Metz a accordé à la société MDB un permis de construire modificatif et, d'autre part, la décision du maire rejetant son recours gracieux dirigé contre le premier permis modificatif.
Par un jugement n°s 0803759, 0804207, 0804439, 1005539, 1006131 et 1103429 du 29 mai 2012, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Par un arrêt n° 12NC01346 du 22 mai 2014, la cour administrative d'appel de Nancy a, à la demande de Mme C...et de M.E... :
- annulé, d'une part, ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 mai 2012 en tant qu'il statue sur les demandes de Mme C...et, d'autre part, les arrêtés des 10 juillet 2008, 5 juillet 2010 et 5 mai 2011 du maire de Montigny-lès-Metz accordant ces permis de construire à la société MDB promotion ;
- rejeté les conclusions de M.E.lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier
Procédures devant le Conseil d'Etat
1° Sous le n° 382976, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 juillet et 16 octobre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Montigny-lès-Metz demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 1er, 3 et 5 de cet arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 22 mai 2014 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de MmeC... ;
3°) de mettre solidairement à la charge de Mme C...et de M. B...E...la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 382977, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 juillet et 21 octobre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société MDB promotion et M. D...A..., agissant en qualité de liquidateur de cette dernière, demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 1er, 2 et 5 de ce même arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 22 mai 2014 ;
2°) de mettre à la charge de Mme C...et de M. B...E...la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- l'ordonnance n° 2006-1527 du 8 décembre 2005 ;
- l'ordonnance n° 2011-1916 du 22 décembre 2011 ;
- le décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yannick Faure, auditeur,
- les conclusions de M. Jean Lessi, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Marlange de la Burgade, avocat de la commune de Montigny-lès-Metz, à Me Ricard, avocat de Mme C... et de M.E..., et à la SCP Didier, Pinet, avocat de la société MDB promotion et de M.A... ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que le maire de la commune de Montigny-lès-Metz a délivré à la société MDB promotion un permis de construire un immeuble à usage d'habitation au 1 rue Charles de Gaulle, par un arrêté du 10 juillet 2008, puis deux permis de construire modificatifs, par des arrêtés des 5 juillet 2010 et 5 mai 2011 ; que, par un jugement du 29 mai 2012, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les requêtes de M. E...et de Mme C...tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de ces trois arrêtés ; que, par un arrêt du 22 mai 2014, la cour administrative d'appel de Nancy, après avoir partiellement annulé ce jugement, a annulé ces arrêtés du maire de la commune de Montigny-lès-Metz et rejeté les conclusions présentées par M.E... ; que, par deux pourvois qu'il y a lieu de joindre, la commune de Montigny-lès-Metz, d'une part, et la société MDB promotion et M.A..., agissant en qualité de liquidateur de cette dernière, d'autre part, demandent l'annulation des articles 1er, 2, 3 et 5 de cet arrêt ;
Sur les pourvois de la commune de Montigny-lès-Metz et de la société MDB promotion et de M.A..., ès qualité de liquidateur :
En ce qui concerne la régularité de l'arrêt :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ; que, selon l'article R. 613-4 du même code : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges d'appel qu'alors que la date de clôture de l'instruction avait été fixée par ordonnance du président de la formation de jugement au 14 mars 2013, un mémoire en réplique a été produit par les appelants le 8 mars précédent ; que ce mémoire, qui se bornait à produire de nouvelles attestations à l'appui d'une argumentation déjà développée tant devant les premiers juges que devant la cour, a été communiqué le jour même à la société et à la commune intimées ; qu'il ne ressort pas des pièces de la procédure devant les juges d'appel que la société MDB promotion n'aurait pas disposé d'un délai suffisant pour répliquer à ce mémoire, alors au surplus qu'elle n'a sollicité ni avant la date de clôture de l'instruction, ni même ultérieurement, avant que l'affaire ne soit inscrite à l'audience, la réouverture de l'instruction ; que la société MDB promotion et son liquidateur ne sont, dès lors, par fondés à soutenir que le caractère contradictoire de l'instruction a été méconnu ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'arrêt :
S'agissant du bien-fondé de l'arrêt en tant qu'il écarte la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance de MmeC... :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 " ; que, selon l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) " ; que l'article A. 424-18 de ce code précise que : " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent... " ; que s'il incombe au bénéficiaire d'un permis de construire de justifier qu'il a bien rempli les formalités d'affichage prescrites par les dispositions précitées, le juge doit apprécier la continuité de l'affichage en examinant l'ensemble des pièces qui figurent au dossier qui lui est soumis ;
5. Considérant qu'en jugeant qu'il était établi que l'affichage sur le terrain du permis de construire initial du 10 juillet 2008 avait été interrompu pendant plusieurs jours et que la période continue de deux mois d'affichage n'avait ainsi débuté que le 22 août 2008, la cour, qui s'est fondée sur l'ensemble des pièces figurant au dossier qui lui était soumis, a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit ;
S'agissant du bien-fondé de l'arrêt en tant qu'il statue sur la légalité des arrêtés du maire de Montigny-lès-Metz :
6. Considérant qu'aux termes de l'article R* 315-1 du code de l'urbanisme, en vigueur jusqu'au 1er octobre 2007 : " Constitue un lotissement au sens du présent chapitre toute division d'une propriété foncière en vue de l'implantation de bâtiments qui a pour objet ou qui, sur une période de moins de dix ans, a eu pour effet de porter à plus de deux le nombre de terrains issus de ladite propriété (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme, applicable du 1er octobre 2007 au 1er mars 2012, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 22 décembre 2011 relative à certaines corrections à apporter au régime des autorisations d'urbanisme : " Constitue un lotissement l'opération d'aménagement qui a pour objet ou qui, sur une période de moins de dix ans, a eu pour effet la division, qu'elle soit en propriété ou en jouissance, qu'elle résulte de mutations à titre gratuit ou onéreux, de partage ou de locations, d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments " ;
7. Considérant que s'il résulte de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme que la division en deux lots d'une propriété foncière en vue d'y implanter un bâtiment était, à la date de délivrance du permis de construire initial, soumise aux règles régissant les lotissements, ces dispositions n'ont eu ni pour objet, ni pour effet de subordonner à une autorisation ou à une déclaration les divisions foncières opérées antérieurement à leur entrée en vigueur et qui n'étaient pas alors soumises à une telle autorisation ou déclaration ; que, dès lors, en jugeant que la division en deux lots de la parcelle cadastrée n° 10, destinée à permettre la réalisation d'une opération de construction sur le lot formé des parcelles cadastrées n°s 186 et 187, constituait à elle seule un lotissement soumis, en vertu des dispositions réglementaires prises pour l'application de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme, à une déclaration préalable, alors même qu'elle avait relevé que cette division avait été effectuée en 2006, soit antérieurement à l'entrée en vigueur de ces dispositions et à une date où une division en deux lots n'était pas constitutive d'un lotissement en vertu des dispositions précitées de l'article R* 315-1 du code de l'urbanisme, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des pourvois dirigés contre le même motif de l'arrêt, que ce motif n'est pas de nature à justifier légalement l'annulation du permis de construire du 10 juillet 2008 modifié ;
8. Mais considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 9 du règlement du plan d'occupation des sols applicable à la zone UI, dans laquelle est situé le terrain d'assiette du projet litigieux : " L'emprise au sol des constructions ne peut excéder 40 % de la superficie totale de l'unité foncière " ;
9. Considérant que la cour a relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que le parking de onze places prévu par le projet litigieux, dont la dalle supérieure " dépasse sensiblement " le niveau du sol naturel, ne pouvait être regardé comme entièrement réalisé en sous-sol ; qu'en en déduisant, pour l'application des dispositions précitées de l'article 9 du règlement du plan d'occupation des sols applicable à la zone UI, que ce parking constituait une construction dont l'emprise au sol devait être prise en compte, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;
10. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 du règlement du plan d'occupation des sols applicable à la zone UI : " Toute construction doit être implantée en recul de 5 m minimum par rapport à l'alignement ou à la limite qui s'y substitue et respecter toute marge de recul particulière (...) " ; que si ces dispositions, dont l'objet est lié à des préoccupations d'hygiène, d'urbanisme et de protection du voisinage, ne s'appliquent pas à la partie souterraine d'un bâtiment qui ne dépasse pas le niveau du sol naturel, il n'en va pas de même lorsque ce bâtiment excède significativement ce niveau ; que, dès lors, en jugeant par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que la dalle mentionnée au point 9, située dans la marge de recul ainsi définie, méconnaissait les dispositions de cet article, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;
11. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 11 de ce même règlement, relatif à l'aspect extérieur des constructions : " (...) Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de prescriptions spéciales si la construction, par sa situation, son architecture, ses dimensions ou son aspect extérieur est de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants. Tout bâtiment doit être considéré comme un élément devant participer à la définition d'une composition plus globale, à savoir la rue, la place, l'ilot / (...) Façades et matériaux de façades : / - le traitement architectural de la façade doit s'harmoniser à l'ensemble constitué par les façades des bâtiments voisins (...) le rythme des percements et leur proportion doit faire référence à la diversité observée sur les constructions anciennes, sans pour cela être une reconduction de ces modèles (...) / toitures : la toiture des constructions doit être de définition semblable aux autres toitures de la rue ou de l'ilot (orientation des différents pans de toiture, surface, pente, complexité de volumétrie, raccordements, matériaux) (...) " ;
12. Considérant qu'en jugeant que la conception du projet litigieux ne faisait pas référence aux constructions anciennes situées à sa proximité immédiate, en particulier en ce qui concerne, d'une part, le rythme et la proportion des percements en façade et, d'autre part, l'orientation et la surface des toitures, et qu'elle méconnaissait dès lors les dispositions de cet article, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sur les quatre motifs retenus par la cour administrative d'appel de Nancy, conformément aux dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, trois motifs justifient légalement l'annulation du permis de construire du 10 juillet 2008 modifié par les permis des 5 juillet 2010 et 5 mai 2011 ; que, par suite, les pourvois de la commune de Montigny-lès-Metz, d'une part, et de la société MDB promotion et de son liquidateur, d'autre part, dirigés contre les articles 1er, 2, 3 et 5 de l'arrêt attaqué, doivent être rejetés ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. E...dirigées contre l'article 4 du même arrêt, présentées dans l'hypothèse où il serait fait droit aux pourvois en ce qui concerne la recevabilité de la demande de Mme C...devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par la commune de Montigny-lès-Metz, d'une part, et par la société MDB promotion ainsi que par M. A..., agissant en qualité de liquidateur de cette dernière, d'autre part ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. E...à ce même titre ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Montigny-lès-Metz et de M.A..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société MDB promotion, la somme de 1 500 euros chacun à verser à Mme C...à ce même titre ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les pourvois de la commune de Montigny-lès-Metz et de la société MDB promotion et de M.A..., ès qualité de liquidateur, sont rejetés.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M.E.lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier
Article 3 : La commune de Montigny-lès-Metz et M.A..., ès qualité de liquidateur de la société MDB promotion, verseront chacun une somme de 1 500 euros à Mme C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de M. E...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Montigny-lès-Metz, à la société MDB promotion, à M. D...A..., ès qualité de liquidateur de cette dernière, à Mme F... C...et à M. B...E.lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier
Copie en sera adressée à la ministre du logement et de l'habitat durable.