LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
SH
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 3 juillet 2024
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 395 F-B
Pourvoi n° H 23-15.715
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 3 JUILLET 2024
1°/ La société FCM services, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ la société Alliance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], agissant en qualité de mandataire judiciaire de la société FCM Services,
3°/ la société BCM, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société FCM services,
ont formé le pourvoi n° H 23-15.715 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2023 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), dans le litige les opposant à la société Fraikin Assets, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], défenderesse à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société FCM services, de la société Alliance, ès qualités et de la société BCM, ès qualités, de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de la société Fraikin Assets, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 mai 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles,10 janvier 2023), un jugement du 29 mars 2019, a condamné la société FCM services (la société FCM) à payer à la société Fraikin Assets la somme de 64 887,40 euros et a ordonné la compensation de cette somme avec celles de 6 793,75 euros et de 22 391,23 euros que la société FCM avait versées à la société Fraikin Assets à titre de dépôts de garantie. Contestant être débitrice d'une quelconque somme envers la société Fraikin Assets, la société FCM a fait appel du jugement.
2. Un jugement du 26 novembre 2019 du tribunal de commerce ayant mis la société FCM en redressement judiciaire, le conseiller de la mise en état a constaté l'interruption d'instance.
3. Le 19 mai 2021, la société Fraikin Assets, qui n'avait pas déclaré sa créance dans les deux mois de la publication d'ouverture de la procédure collective, a demandé au juge-commissaire du tribunal de commerce de Nanterre d'être relevée de forclusion puis a, le 14 novembre 2021, formé opposition à l'ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté sa demande.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société FCM fait grief à l'arrêt de relever la société Fraikin Assets de la forclusion, alors « que les créanciers, qui n'ont pas déclaré leurs créances dans les délais prévus à l'article L. 622-24 du code de commerce, ne peuvent être relevés de leur forclusion que s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ou qu'elle est due à une omission du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6 du code de commerce ; que le débiteur ne commet pas une omission lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6 du code de commerce, lorsqu'il ne mentionne pas, dans cette liste, le nom d'une personne, dont il conteste être le débiteur d'une quelconque créance, peu important qu'un jugement ait retenu que cette personne détient une créance à l'égard du débiteur, dès lors que celui-ci a interjeté appel de ce jugement ; qu'il en résulte que l'absence de mention sur la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6 du code de commerce d'une personne qui se prétend créancier du débiteur, qui n'a pas déclaré sa créance dans les délais prévus à l'article L. 622-24 du code de commerce, n'a pas pour conséquence le relevé de forclusion de cette personne, lorsque le débiteur conteste être le débiteur d'une quelconque créance à l'égard de cette personne, peu important qu'un jugement ait retenu que cette personne détient une créance à l'égard du débiteur, dès lors que celui-ci a interjeté appel de ce jugement ; qu'en énonçant, par conséquent, pour relever la société Fraikin Assets de la forclusion prévue à l'article L. 622-24 du code de commerce, qu'il ressortait de la liste des créanciers de la société Fcm, transmise au juge-commissaire de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de la société FCM services, qui avait signé l'état des créances le 26 août 2020, que la société Fraikin Assets n'y figurait pas, que la société FCM ne pouvait valablement soutenir qu'elle n'avait pas à mentionner la société Fraikin Assets sur la liste des créances dès lors qu'une condamnation, faisant l'objet d'un appel, avait été prononcée et qu'aucun arrêt définitif n'était intervenu, que les dispositions relatives à la procédure collective sont en outre d'ordre public et que la remise par le débiteur de la liste de ses créanciers à l'administrateur et au mandataire judiciaire en application de l'article L. 622-6 du code de commerce est une obligation légale, quand la société FCM contestait être la débitrice d'une quelconque créance à l'égard de la société Fraikin Assets, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 622-6, L. 622-24, L. 622-26 et R. 622-5 du code de commerce, dans leur rédaction applicable à la cause. »
Réponse de la Cour
5. En premier lieu, il résulte de l'article L. 622-24 du code de commerce que la créance portée par le débiteur, conformément à l'obligation que lui fait l'article L. 622-6 du même code, à la connaissance du mandataire judiciaire dans le délai de l'article R. 622-24 du même code, si elle fait présumer la déclaration de sa créance par son titulaire, dans la limite du contenu de l'information donnée au mandataire judiciaire, ne vaut pas reconnaissance par le débiteur du bien-fondé de cette créance, de sorte qu'il peut ultérieurement la contester.
6. En second lieu, selon l'article L. 622-26 du code de commerce, l'omission du créancier par le débiteur sur la liste prévue à l'article L. 622-6 précité permet à ce créancier d'être de plein droit relevé de la forclusion par le juge-commissaire.
7. Ayant relevé que la société Fraikin Assets ne figurait pas sur la liste des créanciers, l'arrêt retient exactement que la demande de relevé de forclusion de celle-ci doit être accueillie, la société FCM ne pouvant valablement soutenir qu'elle n'avait pas à la mentionner sur la liste de ses créanciers au motif qu'il ne peut lui être imposé de déclarer pour le compte d'un créancier une créance dont elle conteste l'existence.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société FCM services aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille vingt-quatre.