Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juillet et 6 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE ID TOAST, dont le siège est ... ; la SOCIETE ID TOAST demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler sans renvoi l'arrêt du 20 mai 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Douai, faisant droit à l'appel formé par la commune de Saint-Valéry-en-Caux à l'encontre du jugement du 24 septembre 2001 du tribunal administratif de Rouen ayant annulé, à la demande de la société, les délibérations du conseil municipal n°s 11, 21, 22, 23 et 24 du 19 mars 1999 et enjoint au maire de cette commune de saisir le juge du contrat aux fins de résolution des marchés conclus en application de ces délibérations, a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par la société devant le tribunal ;
2°) de confirmer le jugement du tribunal administratif de Rouen du 24 septembre 2001 ayant annulé les délibérations du 19 mars 1999 et enjoint au maire de saisir le juge du contrat aux fins de résolution des marchés de travaux conclus en application de ces délibérations ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Frédéric Tiberghien, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de la SOCIETE ID TOAST, de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la commune de Saint-Valéry-en-Caux et de la SCP Boutet, avocat de la communauté de communes de la Côte d'Albâtre,
- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que pour infirmer l'annulation, prononcée par le jugement du 24 septembre 2004 du tribunal administratif de Rouen, de cinq délibérations du 19 mars 1999 par lesquelles le conseil municipal de Saint-Valéry-en-Caux avait décidé de financer le projet d'extension des locaux de la société Symphonie situés dans la zone industrielle ouest de cette commune, la cour administrative d'appel de Douai s'est fondée sur ce que la SOCIETE ID TOAST ne justifiait pas d'un intérêt lui donnant qualité pour contester ces délibérations ; que la société ID toast se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, d'une part, que la SOCIETE ID TOAST était installée depuis juillet 1991 dans des locaux situés dans la zone d'activité industrielle de Sasseville spécialement conçus pour elle et qui lui étaient loués par le district de Paluel, d'autre part, que la société Symphonie a décentralisé en juillet 1996 son activité, directement concurrente de celle d'ID TOAST, dans un atelier relais que la commune de Saint-Valéry-en-Caux lui a loué dans sa zone industrielle ouest ; que cette commune, par les cinq délibérations contestées du 19 mars 1999, a approuvé le projet d'extension de l'usine relais présenté par la société Symphonie, décidé de financer ce projet et autorisé le maire à passer les conventions et marchés de travaux correspondants ; qu'eu égard à la proximité des installations de ces deux sociétés concurrentes et à l'effet produit sur leur marché et dans leur zone de chalandise par l'octroi à la société Symphonie de cette nouvelle aide indirecte, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce en estimant que la seule qualité de commerçant de la SOCIETE ID TOAST ne lui conférait pas un intérêt direct et actuel pour contester les délibérations litigieuses ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler son arrêt ;
Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la SOCIETE ID TOAST justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour contester les cinq délibérations litigieuses, du 19 mars 1999 ; que ces délibérations ne présentent pas le caractère de décisions préparatoires ; qu'elles font par suite grief à la société requérante ;
Considérant que, selon l'article 4 de ses statuts, dans leur rédaction applicable en 1999, la compétence du district de Paluel pour ce qui concerne le développement économique couvre, d'une part, la création et la gestion de la zone d'activités de Sasseville et de toute nouvelle zone d'activités qui viendrait à être implantée sur le territoire des communes membres, et d'autre part, toute action destinée à favoriser l'implantation et le développement d'entreprises ; que la compétence pour entreprendre et financer les actions visées à ce titre a ainsi été transférée au district sur l'ensemble de son territoire y compris dans les zones d'activité déjà aménagées, dont les communes membres avaient conservé la gestion ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que même si la gestion de la zone industrielle ouest de Saint-Valéry-en-Caux, créée à l'initiative de la commune avant la création du district en 1981, n'était pas, en mars 1999, assurée par le district de Paluel, ce dernier était seul compétent pour décider, le cas échéant, de favoriser le développement de l'entreprise Symphonie implantée sur le territoire de la commune de Saint-Valéry-en-Caux ; qu'en approuvant les travaux d'extension de l'usine relais proposés par cette société et en décidant de les financer sous forme d'aide indirecte, le conseil municipal de Saint-Valéry-en-Caux a empiété sur les compétences du district telles qu'elles résultaient de ses statuts ; que la commune précitée n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Rouen a annulé les cinq délibérations du 19 mars 1999 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Saint-Valéry-en-Caux la somme de 2 500 euros que la SOCIETE ID TOAST demande en application de ces dispositions ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que les sommes de 4 000 euros et de 2 500 euros que la commune de Saint-Valéry-en-Caux et la communauté de communes de la côte d'Albâtre demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens soient mises à la charge de la SOCIETE ID TOAST qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai en date du 20 mai 2003 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la commune de Saint-Valéry-en-Caux devant la cour administrative d'appel de Douai est rejetée.
Article 3 : La commune de Saint-Valéry-en-Caux versera à la SOCIETE ID TOAST la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Saint-Valéry-en-Caux et de la communauté de communes de la côte d'Albâtre présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ID TOAST, à la société Symphonie, à la communauté de communes de la côte d'Albâtre, à la commune de Saint-Valéry-en-Caux et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.