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21/02/2025 | FRANCE | N°472675

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 21 février 2025, 472675


Vu la procédure suivante :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 5 mai 2020 par laquelle Pôle emploi a confirmé, sur son recours gracieux, l'interruption du versement de l'allocation de solidarité spécifique et, d'autre part, d'enjoindre à Pôle emploi de lui verser les sommes qu'il estimait lui être dues au titre de cette allocation pour la période du 1er septembre 2019 au 31 octobre 2022, ses droits ayant été ouverts rétroactivement à compter du 1er juin 2019 par une décision modificativ

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Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 5 mai 2020 par laquelle Pôle emploi a confirmé, sur son recours gracieux, l'interruption du versement de l'allocation de solidarité spécifique et, d'autre part, d'enjoindre à Pôle emploi de lui verser les sommes qu'il estimait lui être dues au titre de cette allocation pour la période du 1er septembre 2019 au 31 octobre 2022, ses droits ayant été ouverts rétroactivement à compter du 1er juin 2019 par une décision modificative du 17 novembre 2020. Par un jugement n° 2004655 du 30 janvier 2023, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 5 mai 2020 ainsi que la décision du 17 novembre 2020 en tant qu'elle met fin aux droits de M. B... à l'allocation de solidarité spécifique après le 31 août 2019, enjoint à Pôle emploi de rétablir M. B... dans ses droits à cette allocation pour la période du 1er septembre 2019 au 31 mars 2020 et de lui verser les sommes correspondantes et renvoyé M. B... devant Pôle emploi pour la détermination de ses droits à cette allocation à compter du 31 mars 2020.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 avril et 3 juillet 2023, Pôle emploi demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyril Noël, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boullez, avocat de l'opérateur France Travail et à la SCP Boucard-Maman, avocat de Traore A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les droits de M. B... à l'allocation de solidarité spécifique ont été ouverts à compter du 7 octobre 2019, pour une durée de six mois, par une décision du 24 octobre 2019 du directeur de l'agence Pôle emploi de Noisy-le-Grand. Le versement de cette allocation a été interrompu à compter de janvier 2020. Par une décision du 5 mai 2020, prise sur recours gracieux de M. B..., Pôle emploi a confirmé l'interruption du versement de cette allocation au motif que celle-ci ne pouvait être cumulée avec son activité d'auto-entrepreneur au-delà de trois mois. Par une décision modificative du 17 novembre 2020, ses droits ont été ouverts rétroactivement à compter du 1er juin 2019, au lendemain de la fin de ses droits à l'allocation d'aide au retour à l'emploi, et le montant de l'allocation de solidarité spécifique qui lui était due a été recalculé pour la période de trois mois de versement de cette allocation à compter de cette nouvelle date. Pôle emploi se pourvoit en cassation contre le jugement du 30 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 5 mai 2020 ainsi que la décision du 17 novembre 2020 en tant qu'elle met fin aux droits de M. B... à l'allocation de solidarité spécifique après le 31 août 2019, enjoint à Pôle emploi de rétablir M. B... dans ses droits à cette allocation pour la période du 1er septembre 2019 au 31 mars 2020 et de lui verser les sommes correspondantes et renvoyé M. B... devant Pôle emploi pour la détermination de ses droits à cette allocation à compter du 31 mars 2020.

2. Les travailleurs privés d'emploi qui ont épuisé leurs droits à l'allocation d'assurance ont droit, sur le fondement de l'article L. 5423-1 du code du travail, s'ils remplissent des conditions d'activité antérieure et de ressources, au bénéfice de l'allocation de solidarité spécifique. Celle-ci peut, en vertu de l'article L. 5425-1 du même code, se cumuler avec les revenus tirés d'une activité occasionnelle ou réduite dans des conditions et limites fixées par décret en Conseil d'Etat. Aux termes de l'article R. 5425-2 de ce code : " Lorsque le bénéficiaire de l'allocation de solidarité spécifique reprend une activité professionnelle salariée ou non salariée, la rémunération tirée de l'exercice de cette activité est intégralement cumulée avec le versement de l'allocation de solidarité spécifique pendant une période de trois mois, consécutifs ou non, dans la limite des droits aux allocations restants. / Tout mois civil au cours duquel une activité même occasionnelle ou réduite a été exercée est pris en compte pour le calcul de cette période ".

3. Il résulte de ces dispositions que celles-ci s'appliquent lorsque le bénéficiaire de l'allocation de solidarité spécifique reprend une activité professionnelle, quels que soient les revenus perçus de cette activité et alors même que l'intéressé n'en tirerait aucune rémunération. L'inscription de sa micro-entreprise sur le répertoire national des entreprises suffit, en principe, à caractériser la reprise d'une activité professionnelle par l'entrepreneur individuel bénéficiaire de l'allocation de solidarité spécifique, sauf à ce qu'il établisse l'absence d'activité effective de la micro-entreprise inscrite en justifiant, notamment, d'un chiffre d'affaires nul.

4. Pour juger que M. B... était fondé à demander l'annulation des décisions interrompant le versement de l'allocation de solidarité spécifique à compter du 1er septembre 2019 et la reprise du versement de cette allocation à compter de cette date, le tribunal administratif a jugé que celui-ci pouvait cumuler le versement de cette allocation avec l'exercice d'une activité professionnelle dès lors que cette dernière ne lui procurait aucune rémunération. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui revenait de rechercher si M. B... établissait l'absence d'activité effective de sa micro-entreprise sur la période en litige, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que Pôle emploi est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Pôle emploi, devenu l'opérateur France Travail, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Pôle emploi au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 30 janvier 2023 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Montreuil.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par Pôle emploi au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à l'opérateur France Travail et à M. A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 29 janvier 2025 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Edouard Geffray, Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, M. Jean-Dominique Langlais, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat ; M. Cyril Noël, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 21 février 2025.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Cyril Noël

Le secrétaire :

Signé : M. Hervé Herber


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 472675
Date de la décision : 21/02/2025
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 fév. 2025, n° 472675
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyril Noël
Rapporteur public ?: M. Mathieu Le Coq
Avocat(s) : SCP BOULLEZ ; SCP BOUCARD-CAPRON-MAMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:472675.20250221
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