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07/02/2019 | FRANCE | N°416612

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 07 février 2019, 416612


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 3 novembre 2014 par laquelle le président du conseil général de la Corrèze a rejeté son recours dirigé contre la décision de la caisse d'allocations familiales de la Corrèze du 26 juillet 2014 mettant fin à son droit au revenu de solidarité active. Par un jugement n° 1500659 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Par un pourvoi et un nouveau mémoire, enregistrés les 12 décembre 2017 et 12 avril 2018 au secrétariat

du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 3 novembre 2014 par laquelle le président du conseil général de la Corrèze a rejeté son recours dirigé contre la décision de la caisse d'allocations familiales de la Corrèze du 26 juillet 2014 mettant fin à son droit au revenu de solidarité active. Par un jugement n° 1500659 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Par un pourvoi et un nouveau mémoire, enregistrés les 12 décembre 2017 et 12 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à son avocat, la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie Sirinelli, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de MmeB..., et à la SCP Boutet, Hourdeaux, avocat du département de la Corrèze.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable au litige : " Toute personne résidant en France de manière stable et effective, dont le foyer dispose de ressources inférieures à un revenu garanti, a droit au revenu de solidarité active dans les conditions définies au présent chapitre. / (...) / Le revenu de solidarité active est une allocation qui porte les ressources du foyer au niveau du revenu garanti (...) ". Selon l'article L. 262-9 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012 : " Le montant forfaitaire mentionné au 2° de l'article L. 262-2 est majoré, pendant une période d'une durée déterminée, pour : / 1° Une personne isolée assumant la charge d'un ou de plusieurs enfants ; / (...) / Est considérée comme isolée une personne veuve, divorcée, séparée ou célibataire, qui ne vit pas en couple de manière notoire et permanente et qui notamment ne met pas en commun avec un conjoint, concubin ou partenaire de pacte civil de solidarité ses ressources et ses charges (...) ". Aux termes de l'article 515-8 du code civil : " Le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable au litige : " Le montant forfaitaire mentionné au 2° de l'article L. 262-2 applicable à un foyer composé d'une seule personne est majoré de 50 % lorsque le foyer comporte deux personnes. Ce montant est ensuite majoré de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer et à la charge de l'intéressé. Toutefois, lorsque le foyer comporte plus de deux enfants ou personnes de moins de vingt-cinq ans à charge, à l'exception du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin de l'intéressé, la majoration à laquelle ouvre droit chacun de ces enfants ou personnes est portée à 40 % à partir de la troisième personne ". Enfin, l'article R. 262-3 du même code dispose que : " Pour le bénéfice du revenu de solidarité active, sont considérés comme à charge : / 1° Les enfants ouvrant droit aux prestations familiales ; / 2° Les autres enfants et personnes de moins de vingt-cinq ans qui sont à la charge effective et permanente du bénéficiaire à condition, lorsqu'ils sont arrivés au foyer après leur dix-septième anniversaire, d'avoir avec le bénéficiaire ou son conjoint, son concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité un lien de parenté jusqu'au quatrième degré inclus (...) ".

2. Il résulte de ces dispositions que, pour le bénéfice du revenu de solidarité active, le foyer s'entend du demandeur, ainsi que, le cas échéant, de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin et des enfants ou personnes de moins de vingt-cinq ans à charge qui remplissent les conditions précisées par l'article R. 262-3 du code de l'action sociale et des familles. Pour l'application de ces dispositions, le concubin est la personne qui mène avec le demandeur une vie de couple stable et continue. Une telle vie de couple peut être établie par un faisceau d'indices concordants, au nombre desquels la circonstance que les intéressés mettent en commun leurs ressources et leurs charges.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme B...a déclaré à la caisse d'allocations familiales de la Corrèze, en août 2011, s'être séparée de son concubin, M.C..., père de son fils Théo, né en 1997, et a bénéficié du revenu de solidarité active en qualité de personne isolée. Par un jugement correctionnel du 29 mai 2012, M. C... a été reconnu coupable de faits de violence sur la personne de Mme B...ainsi que d'appels téléphoniques malveillants réitérés, au cours de la période d'août 2011 à janvier 2012, et a été placé sous le régime de la mise à l'épreuve pendant deux ans, avec l'obligation de s'abstenir d'entrer en relation avec la victime de l'infraction. A la suite d'un contrôle mené à l'automne 2013, la caisse d'allocations familiales a toutefois estimé que Mme B...avait repris une vie de couple avec M. C...à partir de septembre 2012 et, compte tenu de leurs ressources, a mis fin à son droit au revenu de solidarité active par une décision du 26 juillet 2014, confirmée sur recours préalable par le président du conseil général de la Corrèze le 3 novembre 2014. Pour juger que Mme B...et M. C...formaient un foyer au sens des dispositions de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles, le tribunal administratif de Limoges a considéré que les circonstances que M. C...était présent au domicile de MmeB..., en l'absence de celle-ci, lors de deux visites de contrôle en octobre et novembre 2013, qu'il avait déclaré l'adresse de ce domicile à sa banque et à deux administrations et qu'il avait effectué des achats réguliers dans différents commerces locaux permettaient de présumer l'existence d'une vie commune. Toutefois, eu égard à la situation particulière de MmeB..., les éléments ainsi relevés ne pouvaient suffire à caractériser la poursuite d'une vie de couple stable et continue au cours de la période à prendre en considération pour apprécier son droit au revenu de solidarité active. Par suite, le tribunal a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. Le moyen d'erreur de droit retenu suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire d'examiner l'autre moyen de son pourvoi.

5. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de MmeB..., dirigées contre l'Etat, qui n'est pas partie à la présente instance.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 2 novembre 2017 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Limoges.

Article 3 : Les conclusions de la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de MmeB..., présentées au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B...et au département de la Corrèze.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 416612
Date de la décision : 07/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 fév. 2019, n° 416612
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie Sirinelli
Rapporteur public ?: M. Charles Touboul
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX ; SCP BOUTET-HOURDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:416612.20190207
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