Vu la requête, enregistrée le 9 décembre 2010, présentée pour la société Howard Carter, dont le siège se situe 102, avenue du Roule à Neuilly-sur-Seine (92200), par la SELARL
Savin Martinet Associés ; la société Howard Carter demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0607781/1 du 1er octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Melun a fait partiellement droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier intercommunal de Créteil à lui verser la somme de 152 938,99 euros TTC correspondant au paiement des factures n° 2004006, 2004007 et 2004008, les sommes de 159 620,95 euros TTC à titre de dommages et intérêts pour résiliation injustifiée, et de 15 000 euros au titre de dommages et intérêts pour résiliation abusive, les intérêts moratoires arrêtés à la somme de 24 273,99 euros au 24 novembre 2006, à parfaire et, enfin, la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de condamner le centre hospitalier intercommunal (CHI) de Créteil à payer les factures n° 2004007 et 2004008 d'un montant total de 127 379,05 euros TTC et à lui verser la somme de 25 559,94 euros TTC correspondant au reliquat de la facture n°2004006 du
25 novembre 2004 ;
3°) de condamner ce centre hospitalier à lui verser une somme de 159 620,95 euros TTC à titre de dommages et intérêts pour résiliation injustifiée, et une somme de 15 000 euros au titre des dommages et intérêts pour résiliation abusive ;
4°) de condamner ce centre hospitalier à lui verser une somme de 50 969,74 euros au titre des intérêts moratoires arrêtés au 11 octobre 2010, à parfaire ;
5°) de mettre à la charge de ce centre hospitalier une somme de 8 000 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code des marchés publics ;
Vu le cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de prestations intellectuelles ;
Vu le cahier des clauses administratives particulières ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 2012 :
- le rapport de Mme Sirinelli, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public ;
1. Considérant qu'aux fins de mettre en place un système informatique de gestion intégrée de leurs deux établissements, les centres hospitaliers intercommunaux de Créteil et de Montreuil ont formé un groupement de commande, dont le centre hospitalier de Créteil était le mandataire, et sélectionné, par convention du 3 octobre 2003, la société IBM en qualité de maître d'oeuvre et d'intégrateur et, par convention du 8 octobre 2003, la société Howard Carter en qualité d'assistant au maître d'ouvrage ; que ce projet, baptisé " Arc-en-Ciel ", d'une durée de 24 mois, avait pour objet une refonte du système d'information hospitalier concernant la gestion administrative du patient, la gestion financière, économique et logistique, ainsi que la gestion des ressources humaines ; qu'après la résiliation, le 10 janvier 2005, du marché de la société Howard Carter, le centre hospitalier intercommunal de Créteil a, le 2 mai 2005, établi le décompte de résiliation ; que la société requérante a contesté ce décompte en demandant le paiement des factures n° 2004006, 2004007 et 2004008, ainsi que de la somme de 174 620,95 euros au titre de l'ensemble des préjudices subis du fait de la résiliation du contrat ; qu'elle relève appel du jugement du 1er octobre 2010 en tant que le Tribunal administratif de Melun n'a que partiellement fait droit à sa demande, en condamnant le centre hospitalier intercommunal de Créteil à lui payer, en sus de la provision de 40 000 euros versée à la suite d'une ordonnance en date du 7 février 2006 de la Cour de céans, une somme de 15 016 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts correspondants ; que le centre hospitalier demande pour sa part à la Cour, par la voie d'un recours incident, de condamner la société Howard Carter à lui reverser ces sommes ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le paiement des factures :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces contractuelles produites au dossier que la prestation d'assistance à maîtrise d'ouvrage confiée à la société Howard Carter avait pour objet de contrôler les activités du maître d'oeuvre et d'assurer une mission générale de suivi et de contrôle de l'avancement du projet comportant notamment la prévention de tout retard dans son exécution, pour un montant de 574 000 euros ; qu'il est constant que de premiers acomptes avaient été versés à la société, pour un total de 287 000 euros, et que le versement des sommes supplémentaires était conditionné par l'avancée des modules du projet dits GEF 2 et GRH ; qu'il résulte de l'instruction que la tranche dite GEF 1, concernant la comptabilité générale et budgétaire des deux établissements hospitaliers, qui devait prendre fin en février 2004, a connu, de mars à novembre 2004 des difficultés de démarrage et de fonctionnement rendant impossible l'utilisation normale du système par les utilisateurs et faisant obstacle au lancement de la tranche GEF 2 ; que les factures n°2004007 et 2004008, datée du
31 décembre 2004, d'un montant total de 127 379,05 euros TTC, sont respectivement libellées " acompte de 10% - suite à recette provisoire Vérification Aptitude de la sous tranche GEF2 Immobilisations " et " production juillet - décembre en sus du module immo de GEF2 ", et se rattachaient ainsi au module GEF 2, dont il est constant qu'il n'était pas opérationnel à la fin de l'année 2004, et pour lequel la société requérante ne justifie pas avoir produit les rapports de situation prévus par l'article XI.2 du cahier des clauses administratives particulières, dont la présentation conditionnait le versement du deuxième acompte et des suivants ; que, dans ces conditions, et nonobstant la circonstance que la société Howard Carter ait poursuivi ses activités pour le centre hospitalier jusqu'à la résiliation, le 10 janvier 2005, de la convention qui les liait, c'est à bon droit, et sans entacher son jugement de contradiction de motifs, que le tribunal a jugé que la société n'était pas fondée, en sus des sommes déjà reçues, à demander le paiement des deux factures en cause ;
3. Considérant, en second lieu, que les dysfonctionnements évoqués ci-dessus ont nécessité l'intervention d'un expert en informatique et en comptabilité qui, entre le
1er juillet 2004 et le 30 novembre 2004, a été chargé de rechercher, analyser et rectifier les erreurs commises dans le programme GEF 1 ; que la société Howard Carter demande le paiement de la facture n° 2004006 du 25 novembre 2004, d'un montant de 65 559,94 euros TTC, correspondant à la rémunération de ces prestations ; que, par ordonnance du 7 février 2006, la Cour de céans a, statuant en référé sur ce point, ordonné de verser à la société Howard Carter une somme de 40 000 euros TTC à titre de provision ; que le Tribunal administratif de Melun a, par le jugement attaqué, condamné le centre hospitalier intercommunal de Créteil à verser à la société la somme complémentaire de 15 016 euros TTC de ce chef ;
4. Considérant, d'une part, que la mission d'audit diligentée par la société Howard Carter, aux fins de rechercher, analyser et rectifier les dysfonctionnements de la tranche GEF 1, n'entrait pas dans la mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage confiée à la société requérante, consistant dans le suivi et le contrôle de l'avancement global du projet ; qu'il résulte, en outre, de l'instruction, et notamment de diverses correspondances produites par la société requérante, en particulier un courrier du 22 octobre 2004 émanant du groupement de commande, que le centre hospitalier avait donné son accord à l'intervention de l'expert comptable ; qu'ainsi, et alors que le caractère forfaitaire du marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage dont était titulaire la société Howard Carter ne faisait pas obstacle à l'indemnisation des prestations supplémentaires rendues nécessaires par les dysfonctionnements de la tranche GEF 1, le centre hospitalier intercommunal de Créteil n'est pas fondé à soutenir que la mission de cet expert ne pouvait faire l'objet d'une facturation au titre de prestations supplémentaires ;
5. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du contrat d'assistance technique conclut le 27 juin 2004 entre la société requérante et la société
Finance et performance, que les prestations de l'expert comptable étaient facturées à la société Howard Carter au tarif journalier de 900 euros hors taxes par jour pour les deux premiers jours consacrés à un audit général des comptes, puis de 960 euros hors taxes pour les jours suivants consacrés au redressements des comptes et à la rectification des dysfonctionnements ; que la société requérante, qui sollicite le versement d'une somme totale de 65 559 euros toutes taxes comprises sur la base de 48 journées à 1 142 euros hors taxes par jour, n'établit pas que le montant réel des prestations finalement payées à l'expert aurait été supérieur à ceux figurant dans le contrat susmentionné ; que, dans ces conditions, c'est par une juste évaluation que le tribunal a limité le montant des sommes dues à ce titre à la société Howard Carter à 46 000 euros hors taxes, soit 55 016 euros toutes taxes comprises ;
En ce qui concerne la résiliation du marché :
6. Considérant que l'acte d'engagement du marché déterminant la hiérarchie des pièces contractuelles qui lui étaient applicables prévoyait que le cahier des clauses administratives particulières primait le cahier des clauses administratives générales ; que les stipulations de l'article XVIII du cahier des clauses administratives particulières du marché en cause précisaient : " Il sera fait application des clauses de résiliation prévues aux articles 35 et suivants du CCAGPI. / En outre , le présent marché pourra être résilié, en cours d'exécution, dans les cas suivants : (...) en cas de défaillance du titulaire notamment du fait d'un retard égal ou supérieur à 15 jours sur la date prévue de la prestation (résiliation sur simple courrier) (...) " ; qu'en outre, il résulte de la combinaison des articles 35, 36 et 37 du cahier des clauses administratives générales " prestations intellectuelles " auquel se référait le marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage conclu avec la société requérante que, pour être prononcée aux torts du titulaire, la résiliation doit, après mise en demeure restée infructueuse, préciser le motif qui conduit la personne responsable du marché à en interrompre l'exécution ; qu'à défaut de mise en demeure et d'indication précise du motif en cause, la résiliation doit être regardée comme ayant été prononcée pour un motif étranger à la faute du titulaire du marché ;
7. Considérant, en l'espèce, que si la lettre du 10 janvier 2005 notifiant à la société requérante la résiliation du marché en cause fait état d'un certain nombre de carences dans la réalisation de la mission d'assistance confiée par le groupement de commande, elle ne mentionne clairement aucun des motifs énoncés à l'article 37 du cahier des clauses administratives générales " prestations intellectuelles " (CCAG PI), relatif à la résiliation aux torts du titulaire et évoque " les clauses prévues aux articles 35 et suivants du CCAG/PI ", sans mentionner spécifiquement l'article 37 ; qu'ainsi cette résiliation ne peut être regardée comme ayant été prononcée aux torts du titulaire ; qu'elle n'avait donc pas à être précédée de la mise en demeure prévue par l'article 37 du CCAG PI ; qu'enfin, alors que le centre hospitalier invoque dans ses écritures les stipulations de l'article XVIII précité du cahier des clauses administratives particulières qui, tout en se référant aux articles 35 et suivants du CCAG PI, offrent une possibilité de résiliation distincte, dans ses modalités, en cas de défaillance du titulaire, notamment du fait d'un retard égal ou supérieur à quinze jours sur la date prévue de la prestation, la société Howard Carter ne démontre pas qu'elle ne serait en rien responsable des retards importants et non contestés qu'a connu le projet " Arc-en-Ciel " et qu'en conséquence la résiliation prononcée dans ce cadre n'aurait pas été justifiée ; que, par suite, la société requérante ne peut soutenir ni que la résiliation du marché n'était pas fondée, ni que celle-ci a été prononcée dans des conditions irrégulières, et à demander pour ces motifs à être indemnisée ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Howard Carter n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a, eu égard à la provision de 40 000 euros qui lui a déjà été versée, limité le montant de la condamnation complémentaire du centre hospitalier intercommunal de Créteil à la somme de 15 016 euros toutes taxes comprises, et a rejeté le surplus de sa demande ; qu'enfin, le centre hospitalier n'est pas davantage fondé, au regard des développements qui précédent, à soutenir que c'est à tort que, par ce même jugement, le tribunal n'a pas entièrement rejeté les prétentions de la société ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que le centre hospitalier intercommunal de Créteil, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, soit condamné à verser à la société Howard Carter la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en outre, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société la somme demandée par le centre hospitalier au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
Article 1er : La requête de la société Howard Carter est rejetée.
Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par le centre hospitalier intercommunal de Créteil sont rejetées.
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N° 10PA05786