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29/05/2024 | FRANCE | N°42400299

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 mai 2024, 42400299


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


SH






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 29 mai 2024








Rejet




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 299 FS-D


Pourvoi n° W 23-16.487








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________



r> ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 MAI 2024


1°/ M. [F] [IO], domicilié [Adresse 11],


2°/ Mme [IH] [IO], épouse [Y], domiciliée [Adresse 9] (Royaume-Uni),


3°/ M. [IP] [IO], domicilié [Adr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

SH

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 mai 2024

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 299 FS-D

Pourvoi n° W 23-16.487

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 MAI 2024

1°/ M. [F] [IO], domicilié [Adresse 11],

2°/ Mme [IH] [IO], épouse [Y], domiciliée [Adresse 9] (Royaume-Uni),

3°/ M. [IP] [IO], domicilié [Adresse 8],

4°/ M. [K] [IO], domicilié [Adresse 20],

5°/ M. [IK] [W] [IO], domicilié [Adresse 19],

6°/ Mme [I] [IO], épouse [A], domiciliée [Adresse 14],

7°/ Mme [V] [IO], épouse [IL], domiciliée [Adresse 2],

8°/ M. [II] [IO], domicilié [Adresse 26],

9°/ Mme [J] [IO], épouse [IE], domiciliée [Adresse 16],

10°/ M. [D] [IO], domicilié [Adresse 3],

11°/ M. [UK] [IO], domicilié [Adresse 24],

12°/ M. [UD] [IO],

13°/ M. [B] [IO],

14°/ M. [E] [IO],

15°/ M. [L] [IO],

16°/ Mme [UJ] [IO],

tous cinq domiciliés [Adresse 8],

17°/ Mme [UL] [IO], épouse [Z],

18°/ M. [C] [Z],

tous deux domiciliés [Adresse 10],

19°/ M. [UT] [Z], domicilié [Adresse 22],

20°/ M. [S] [Z], domicilié [Adresse 13],

21°/ M. [P] [Z], domicilié [Adresse 10],

22°/ M. [CV] [IO], domicilié [Adresse 18],

23°/ Mme [O] [IN],

24°/ M. [IF] [IN],

25°/ Mme [UO] [IN],

tous trois domiciliés [Adresse 27],

26°/ M. [U] [Y], domicilié [Adresse 9], (Royaume-Uni),

27°/ la société Saint-Eloi, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 7],

28°/ M. [UP] [IN], domicilié [Adresse 6],

ont formé le pourvoi n° W 23-16.487 contre l'arrêt rendu le 30 mars 2023 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 2), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [X] [IO], domicilié [Adresse 12], en son nom personnel et en sa qualité de président du Conseil d'Administration de la société Sager et co-gérant de la société Gercap et administrateur de la société [IO] frères,

2°/ à M. [IJ] [IO], domicilié [Adresse 4], en son nom personnel et en qualité de directeur général et administrateur de la société Sager, de directeur général délégué et administrateur de la société Les Aulnes, et de président de la société [IO] frères,

3°/ à M. [W] [IO], domicilié [Adresse 15], en son nom personnel et en qualité de président directeur général de la société les Aulnes,

tous trois pris en qualité d'ayant-droit de [CS] [H], co-gérante de Gercap,

4°/ à la société [IO] frères, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], prise tant en son nom personnel que venant aux droits des sociétés Sager, Gercap, Les Aulnes, et Saphir,

5°/ à Mme [M] [IO], épouse [CU], domiciliée [Adresse 5],

6°/ à M. [UI] [IO], domicilié [Adresse 21],

7°/ à M. [US] [IO], domicilié [Adresse 23],

8°/ à M. [R] [IO], domicilié [Adresse 17],

9°/ à M. [G] [T] [IO], domicilié [Adresse 25],

tous cinq pris en leur nom personnel et en qualité d'ayant-droit de [CS] [H], co-gérante de Gercap,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [F] [IO], de Mme [IH] [IO], épouse [Y], de MM. [IP], [K], et [IK] [IO], de Mme [I] [IO], épouse [A], de Mme [V] [IO], épouse [IL], de M. [II] [IO], de Mme [J] [IO], épouse [IE], de MM. [D], [UK], [UD], [B], [E], et [L] [IO], de Mme [UJ] [IO], de Mme [UL] [IO], épouse [Z], de MM. [C], [UT], [S] et [P] [Z], de M. [CV] [IO], de Mme [O] [IN], de M. [IF] [IN], de Mme [UO] [IN], de M. [Y], de la société Saint-Eloi, et de M. [UP] [IN], de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société [IO] frères, ès qualités, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [X] [IO], ès qualités, de M. [IJ] [IO], ès qualités, et de M. [W] [IO], ès qualités, de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de Mme [M] [IO] et de M. [UI] [IO], et l'avis de M. Bonthoux, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 avril 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Daubigney, Ducloz, M. Alt, Mme de Lacaussade, M. Thomas, conseillers, Mme Vigneras, M. Maigret, conseillers référendaires, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 mars 2023) et les productions, le capital de la société [IO] frères était, en 2011, détenu par trois sociétés holdings, dont la société Sager, laquelle avait notamment pour associés les sociétés Gercap et Les Aulnes, Mme [IH] [IO] et ses descendants avec une société holding, la société Saint-Eloi, et MM. [F] et [IP] [IO].

2. Lors d'une assemblée générale du 2 décembre 2011, les associés de la société Sager ont approuvé la fusion-absorption de leur société par la société [IO] frères.

3. Les associés de la société [IO] frères ont également approuvé l'opération lors d'une assemblée tenue le même jour.

4. La société Saint-Eloi, Mme [IH] [IO] et MM. [F] et [IP] [IO] ont assigné la société [IO] frères, en son nom et comme venant aux droits des sociétés Sager, Gercap et Les Aulnes, ainsi que MM. [X], [IJ] et [W] [IO] et [CS] [H], en leur qualité d'anciens dirigeants ou administrateurs des sociétés Sager, Gercap, [IO] frères et Les Aulnes, en annulation de l'assemblée générale de la société Sager du 2 décembre 2011.

5. MM. [K], [IK], [II], [D], [UK], [UD], [B], [E], [L] et [CV] [IO], M. [Y], MM. [C], [UT], [S] et [P] [Z], M. [IF] [IN], Mmes [I], [V], [J], [UL] et [UJ] [IO], Mmes [O] et [UO] [IN], et M. [N] [IN] et Mme [UN] [IO], en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur [UP] [IN], sont intervenus volontairement à l'instance.

6. [CS] [H] est décédée le 2 mai 2019. Ses ayants droit, MM. [X], [IJ], [W], [UI], [US], [R], [G] [IO] et Mme [M] [IO] ont été appelés à l'instance.

7. Par un arrêt du 30 septembre 2021, la cour d'appel de Douai a rejeté la demande d'annulation de l'assemblée générale de la société Sager du 2 décembre 2011, constaté l'irrégularité entachant l'assemblée générale de la société [IO] frères du même jour tenant à l'absence de communication de l'avis du comité d'entreprise, accordé un délai pour porter remède à cette irrégularité et dit que l'affaire serait à nouveau évoquée lors d'une audience ultérieure. Cet arrêt fait l'objet des pourvois n° 22-13.710 et 22-13.786.

8. Lors d'une assemblée générale du 8 avril 2022, les associés de la société [IO] frères ont, au vu de l'avis du comité d'entreprise du 21 octobre 2011, voté la fusion-absorption de la société Sager par leur société.

9. La société [IO] frères a, dans ses conclusions du 1er décembre 2022, soulevé une fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande d'annulation de son assemblée générale du 2 décembre 2011.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches

Enoncé du moyen

11. MM. [F], [IP], [K], [IK], [II], [D], [UK], [UD], [B], [E], [L] et [CV] [IO], M. [Y], MM. [C], [UT], [S] et [P] [Z], MM. [IF] et [UP] [IN], Mmes [IH], [I], [V], [J], [UL] et [UJ] [IO], Mmes [O] et [UO] [IN] et la société Saint-Eloi font grief à l'arrêt de rejeter leur fin de non-recevoir, de déclarer la demande tendant à voir prononcer la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [IO] frères du 2 décembre 2011 prescrite, et en conséquence, de dire sans objet leurs demandes visant à : - dire et juger au vu des diligences effectuées que : - par assemblée générale extraordinaire du 3 décembre 2021, la société [IO] frères a remédié à l'irrégularité retenue par la cour en son arrêt du 30 septembre 2021 affectant le vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 de la société [IO] frères ; - par vote souverain l'assemblée générale extraordinaire de l'assemblée générale de la société [IO] frères a valablement rejeté les résolutions 1, 3 et 7 à savoir notamment le « projet de fusion entre les sociétés Roquettes frères, Sager, Sogep et Sofip au moyen de l'absorption des sociétés Sager, Sogep et Sofip par la société, et de son avenant en date à Lestrem du 2 novembre 2011 » et les projet de statuts et de règlement intérieur ; et qu'en conséquence, ayant épuisé les causes de l'arrêt du 30 septembre 2021, la société [IO] frères ne pouvait valablement procéder à une deuxième délibération en date du 8 avril 2022 ayant le même objet, et en conséquence : « - dire et juger que l'AGE du 3 décembre 2021 se substitue à cette date à l'AGE irrégulière du 2 décembre 2011 et/ou annule et remplace l'AGE irrégulière du 2 décembre 2011 ; - écarter, et dire et juger sans effets le vote des résolutions 1 à 8 adoptées lors de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 en application de l'arrêt du 30 septembre 2021 ; - débouter la société [IO] frères de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; - condamner la société [IO] frères à procéder à ses frais, à l'exécution des délibérations régulièrement adoptées par l'AGE du 3 décembre 2021, et notamment à procéder à la ré-immatriculation de la société Sager avec les mêmes statuts, les mêmes actionnaires - ou leurs ayant-droits ou leurs ayant-causes en cas de mutation intervenue entre le 2 décembre 2011 et la date de ré-immatriculation - et les mêmes dirigeants- ou ayants droits- que ceux en fonction au moment de la réalisation au greffe du tribunal de commerce des formalités liées à la dissolution de cette société, sous peine d'astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification de la décision à intervenir », ainsi que les demandes des consorts [CU]-[IO] visant à « constater la nullité de ladite assemblée générale du 2 décembre 2011 et ordonner la remise en état ; dire que seuls les statuts applicables à la SA [IO] sont ceux appliqués antérieurement au 2 décembre 2011 », et de rejeter la « demande » « subsidiaire, et au regard du préjudice engendré par l'application de la fusion, [de] renvoyer les parties pour leur permettre de fixer leur préjudice », alors :

« 2°/ que dans le dispositif de son précédent arrêt du 30 septembre 2021, la cour d'appel de Douai avait notamment "constat[é] l'irrégularité entachant l'assemblée générale extraordinaire de la société [IO] frères du 2 décembre 2011 pour absence de communication de l'avis du comité d'entreprise extraordinaire de la société [IO] à l'assemblée", et "accord[é] un délai pour porter remède à cette irrégularité et dit en conséquence qu'il serait organisé par les organes de la société [IO] Frères, dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt par la partie la plus diligente, une nouvelle assemblée générale extraordinaire, à laquelle sera convoquée l'intégralité des actionnaires actuels de la société, avec pour ordre du jour le vote, au vu de l'avis du comité central d'entreprise du 21 octobre 2011, sur les résolutions telles que soumises à l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011" ; que ces chefs de dispositif tranchant une partie du principal étaient revêtus de l'autorité de chose jugée et excluaient que la recevabilité de la demande tendant à l'annulation de l'assemblée générale de la société [IO] frères du 2 décembre 2011 puisse être remise en cause, notamment au regard de la prescription ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 4 de ce code et l'article 1355 du code civil ;

3°/ que dans les motifs de son précédent arrêt du 30 septembre 2021, la cour d'appel de Douai avait retenu que "s'agissant d'une disposition impérative [l'article L. 225-105 du code de commerce], prévoyant une nullité de plein droit, la cour ne peut que constater l'irrégularité affectant les délibérations de l'assemblée générale extraordinaire de la société [IO] frères portant sur la fusion de ce chef, d'autant que nul ne dénie aux appelants, devenus actionnaires directs de cette dernière société depuis par le biais même de cette opération, l'intérêt d'en solliciter la nullité. Quant à la prescription opposée par la société [IO] frères dans son dispositif à toutes les demandes en nullité des vingt-trois intervenants volontaires, contrairement aux motifs qui la cantonne à la demande de nullité de l'assemblée générale de la société Sager, elle ne saurait faire obstacle à l'annulation de l'assemblée générale extraordinaire de la société [IO]. En effet, ce moyen ne concerne que les intervenants, dont il a été précédemment rappelé qu'étant accessoire, leur action se greffe sur l'action principale des quatre demandeurs initiaux, dépendant dès lors de la recevabilité de cette action principale. Or, s'agissant de l'action principale des 4 demandeurs initiaux, à savoir la société Saint Éloi, [F] [IO], [IH] [IO] épouse [Y] et [IP] [IO], nul ne soutient qu'elle soit prescrite pour avoir été formée par voie de conclusions plus de six mois après la dernière inscription au registre du commerce (L. 235-9 al 2), le juge ne pouvant suppléer d'office le moyen résultant de la prescription, fusse cette règle d'ordre public. Enfin, quand bien même les demandes des intervenants auraient été déclarées irrecevables ou prescrites, l'effet erga omnes de cette sanction serait amené à jouer" ; qu'en jugeant qu' "il ne [pouvait] être soutenu" qu'elle se serait déjà prononcée, dans son arrêt du 30 septembre 2021, "en tout ou partie, sur les conséquences juridiques à tirer des faits constatés" et qu'elle aurait reconnu implicitement la recevabilité de la demande de nullité, puisqu'au contraire, aux termes de ses motifs, la cour a souligné que s'agissant de l'action principale des quatre demandeurs, sur laquelle se greffe l'action des intervenants volontaires, "nul ne soutient qu'elle soit prescrite pour avoir été formée par voie de conclusions plus de six mois après la dernière inscription au registre du commerce (L. 235-9 al 2), le juge ne pouvant suppléer d'office le moyen résultant de la prescription, fusse cette règle d'ordre public", quand dans son précédent arrêt du 30 septembre 2021, elle avait relevé qu'aucune des parties défenderesses ne soulevait la prescription de la demande d'annulation de l'assemblée générale de la société [IO] frères du 2 décembre 2011, et avait "constat[é] l'irrégularité entachant l'assemblée générale extraordinaire de la société [IO] frères du 2 décembre 2011 pour absence de communication de l'avis du comité d'entreprise extraordinaire de la société [IO] à l'assemblée", statuant ainsi sur le principal, la cour d'appel a méconnu la portée de l'arrêt du 30 septembre 2021, et violé l'article 4 du code de procédure civile, ensemble l'article 480 de ce code et l'article 1355 du code civil ;

4°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et les moyens invoqués au soutien de celles-ci ; que dans leurs conclusions, ils demandaient à la cour d'appel, "sur la réouverture des débats et statuant à nouveau", de "juger les conclusions d'intimé du 3 [lire : 30] novembre 2022 de [IO] frères, en leurs prétentions nouvelles, sans lien avec les "diligences effectuées" et donc l'évolution du litige, irrecevable" ; qu'ils faisaient en particulier valoir que la réouverture des débats par l'arrêt du 30 septembre 2021 portait uniquement sur la question de la régularisation de la cause de nullité affectant l'assemblée générale de la société [IO] frères du 2 décembre 2011, et qu'en demandant à la cour d'appel de déclarer irrecevable comme prescrite la demande d'annulation de cette assemblée, la société [IO] frères "tente d'obtenir de la cour la réformation de son propre arrêt du 30 septembre 2021, de surcroît signifié, et présente des prétentions nouvelles sans lien avec les "diligences qui auraient été éventuellement effectuées", que "par son arrêt du 30 septembre 2021, la cour a déjà jugé de la recevabilité et du bien-fondé des demandes de nullité des AGE de Sager et de [IO] frères du 2 décembre 2011 présentées par les concluants. Sur ces points non seulement les débats sont clos mais encore tranchés. La révocation de telle ou telle ordonnance de clôture ne peut avoir pour effet d'ouvrir une voie de réformation de l'arrêt sur la recevabilité de l'action ou sur une prétendue mauvaise interprétation des dispositions par la cour du code de commerce. (?) La société [IO] frères est donc, en application de l'article 444 du code de procédure civile, irrecevable à soutenir des prétentions nouvelles sans lien avec les "diligences qui auront éventuellement été effectuées" tel que la prescription de l'action des concluants à l'égard des délibérations de l'AGE du 2 décembre 2011 de [IO] frères (?)" ; et que "en l'espèce, l'arrêt du 30 septembre 2021, après avoir statué sur les fins de non-recevoir, "constate l'irrégularité entachant l'assemblée générale extraordinaire de la société [IO] frères du 2 décembre 2011 pour absence de communication de l'avis du comité d'entreprise extraordinaire de la société [IO] à l'assemblée" ; et accorde un délai pour y remédier, de sorte qu'il a implicitement et nécessairement jugé recevable l'action des concluants contre l'AGE du 2 décembre 2011 de [IO] frères. Dès lors, les nouvelles demandes se heurtent à l'autorité de chose jugée" ; qu'en jugeant qu'elle n'était saisie d'aucune demande d'irrecevabilité de la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande d'annulation de la société [IO] frères du 2 décembre 2011, la cour d'appel, qui a dénaturé les conclusions des exposants et méconnu l'objet du litige dont elle était saisie, a violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

12. Après avoir énoncé que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif, les motifs d'un jugement en étant dépourvus fussent-ils le soutien nécessaire de la décision, et qu'un dispositif ambigu, obscur ou incomplet peut être interprété à la lumière des motifs sans pour autant conférer à ceux-ci l'autorité de la chose jugée, l'arrêt retient exactement que, dans son arrêt du 30 septembre 2021, la cour d'appel ne s'est pas prononcée sur la demande d'annulation de l'assemblée générale de la société [IO] frères du 2 décembre 2011 et sa recevabilité, ayant seulement constaté son irrégularité.

13. De ces constatations et appréciations rendant inopérant le grief de la quatrième branche, la cour d'appel a exactement déduit qu'aucune autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 30 septembre 2021 ne pouvait s'opposer à l'examen de la recevabilité de la demande d'annulation de l'assemblée générale de la société [IO] frères du 2 décembre 2011.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

15. MM. [F], [IP], [K], [IK], [II], [D], [UK], [UD], [B], [E], [L] et [CV] [IO], M. [Y], MM. [C], [UT], [S] et [P] [Z], MM. [IF] et [UP] [IN], Mmes [IH], [I], [V], [J], [UL] et [UJ] [IO], Mmes [O] et [UO] [IN] et la société Saint-Eloi font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande d'annulation du vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale du 8 avril 2022 et de rejeter la demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur la validité de la partie extraordinaire de l'assemblée générale de la société [IO] frères du 8 avril 2022, alors :

« 1°/ que les parties sont recevables à présenter des demandes nouvelles en lien avec un moyen ayant fait l'objet d'une réouverture des débats ; qu'en l'espèce, par arrêt du 30 septembre 2021, la cour d'appel de Douai, après avoir constaté l'irrégularité de l'assemblée générale de la société [IO] frères du 2 décembre 2011, a accordé un délai pour porter remède à cette irrégularité, et a "dit que l'affaire serait à nouveau évoquée à l'audience du 30 juin 2022 à 13h30 en collégialité, avec réouverture des débats sur ce seul point, au vu des diligences qui auraient éventuellement été effectuées, afin de se prononcer sur la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [IO] frères du 2 décembre 2011" ; que par arrêt du 6 octobre 2022, la cour d'appel de Douai a ordonné la réouverture des débats, "avec révocation de l'ordonnance de clôture initialement intervenue le 8 avril 2021, à l'audience du jeudi 15 décembre 2022, afin de recueillir les observations des parties sur le caractère nul et non avenu de l'ordonnance de clôture du 21 juin 2022, et pour trancher la question posée par l'arrêt du 30 septembre 2021" ; que pour déclarer irrecevable la demande des exposants tendant à voir prononcer la nullité du vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 de la société [IO] frères, la cour d'appel a retenu que cette demande était nouvelle en cause d'appel ; qu'en statuant de la sorte, quand cette demande tendait à voir juger que ces délibérations n'avaient pu régulariser la cause de nullité de l'assemblée générale de la société [IO] frères du 2 décembre 2011, et était ainsi recevable comme entrant dans le champ de la réouverture des débats ordonnée par la cour d'appel dans ses deux arrêts du 30 septembre 2021 et 6 octobre 2022, la cour d'appel a violé les articles 4 et 444 du code de procédure civile, ensemble l'article 564 du même code ;

2°/ que sont recevables les demandes, même formulées pour la première fois devant la cour d'appel, tendant à faire juger les questions nées de la survenance ou de la révélation d'un fait ; qu'en jugeant que la demande des exposants tendant à l'annulation des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 ne pouvait être considérée comme « en lien avec la survenance et la révélation d'un fait », « au vu de sa présentation autonome aux termes du dispositif (?), en faisant une demande indépendante sans lien avec la demande de nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 », quand cette demande, quelle que soient les modalités de sa présentation, tendait à faire juger les questions nées du vote des délibérations de l'assemblée générale du 2 décembre 2021, la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile, ensemble l'article 4 du même code. »

Réponse de la Cour

16. L'arrêt ayant déclaré prescrite l'action en annulation de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011, c'est à bon droit qu'il en a déduit que l'examen des différentes assemblées réalisées au cours du processus de régularisation de cette assemblée était devenu sans objet.

17. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. [F], [IP], [K], [IK], [II], [D], [UK], [UD], [B], [E], [L] et [CV] [IO], M. [Y], MM. [C], [UT], [S] et [P] [Z], MM. [IF] et [UP] [IN], Mmes [IH], [I], [V], [J], [UL] et [UJ] [IO], Mmes [O] et [UO] [IN] et la société Saint-Eloi aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées, d'une part, par MM. [F], [IP], [K], [IK], [II], [D], [UK], [UD], [B], [E], [L] et [CV] [IO], M. [Y], MM. [C], [UT], [S] et [P] [Z], MM. [IF] et [UP] [IN], Mmes [IH], [I], [V], [J], [UL] et [UJ] [IO], Mmes [O] et [UO] [IN] et la société Saint-Eloi, d'autre part par MM. [X], [IJ], [W], [G], [R] et [US] [IO], et enfin par M. [UI] [IO] et Mme [M] [IO], et condamne MM. [F], [IP], [K], [IK], [II], [D], [UK], [UD], [B], [E], [L] et [CV] [IO], M. [Y], MM. [C], [UT], [S] et [P] [Z], MM. [IF] et [UP] [IN], Mmes [IH], [I], [V], [J], [UL] et [UJ] [IO], Mmes [O] et [UO] [IN] et la société Saint-Eloi à payer à la société [IO] frères la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400299
Date de la décision : 29/05/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 30 mars 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 mai. 2024, pourvoi n°42400299


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Alain Bénabent, SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400299
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