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10/09/2020 | FRANCE | N°19-17139

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 septembre 2020, 19-17139


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 septembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 481 F-D

Pourvoi n° X 19-17.139

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 SEPTEMBRE 2020

La société Pardès patrimoine, société civile immobilière,

dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° X 19-17.139 contre l'arrêt rendu le 30 janvier 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 3...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 septembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 481 F-D

Pourvoi n° X 19-17.139

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 SEPTEMBRE 2020

La société Pardès patrimoine, société civile immobilière, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° X 19-17.139 contre l'arrêt rendu le 30 janvier 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 3), dans le litige l'opposant à la société Micromania, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Game France, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dagneaux, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Pardès patrimoine, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Micromania, après débats en l'audience publique du 3 juin 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dagneaux, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 janvier 2019), le 8 février 2005, la société Pardès patrimoine a donné à bail à la société Game France, aux droits de laquelle se trouve la société Micromania, un immeuble pour une durée de douze années à compter du 15 mars 2005, moyennant un loyer annuel de 130 000 euros, hors taxes et hors charges.

2. Un jugement du 5 septembre 2012 a prononcé le redressement judiciaire de la société Game France.

3. Le 18 janvier 2013, la bailleresse a notifié à la locataire une demande de révision du loyer indexé, au visa de l'article L. 145-39 du code de commerce, et sollicité la fixation du loyer à la valeur locative.

4. Le 1er février 2013, un plan de cession partiel du fonds de commerce de la société Game France a été arrêté au profit de la société Micromania.

5. Le 23 septembre 2013, la société Pardès patrimoine a saisi le juge des loyers commerciaux en fixation du loyer révisé, qui, par jugement du 17 octobre 2014, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance, la société locataire s'étant prévalue du caractère illicite de la clause d'indexation et ayant sollicité le remboursement du trop versé au bailleur au titre de l'indexation.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. La société Pardès patrimoine fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de condamnation de la bailleresse à rembourser à la société locataire les sommes trop versées, puis, l'infirmant sur ce point, statuant à nouveau et y ajoutant, de déclarer la fin de non-recevoir présentée par la bailleresse recevable, dire que la société Micromania a un intérêt à agir, constater que la société Micromania, par conclusions régulièrement notifiées par le RPVA, a demandé la condamnation de la société Pardès patrimoine à lui payer la somme de 174 219,26 euros au titre des sommes trop-perçues pour la période écoulée entre le 1er février 2013 et le 1er trimestre 2017 inclus, condamner la société Pardès patrimoine à verser à la société Micromania cette somme avec intérêts au taux légal à compter de la date de notification des conclusions de la société Micromania chiffrant la demande de restitution, puis condamner la société Pardès patrimoine à verser à la société Micromania la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, alors :

« 1°/ qu'hors les cas où la clause déclarée non écrite présente un caractère essentiel à l'équilibre du contrat ou ne peut être détaché des autres stipulations contractuelles, cette sanction n'affecte pas les autres clauses de la convention légalement formée ; qu'en considérant que la clause d'indexation devait être, en son entier, réputée non écrite au seul motif que « l'exclusion d'un ajustement à la baisse du loyer présente un caractère essentiel, la clause litigieuse précisant avec netteté que l'application de ladite clause ne devant en aucune manière se traduire par une diminution de loyer » sans dire en quoi, en l'absence de toute manifestation de volonté expresse en ce sens, la clause litigieuse déclarée non écrite était essentielle à l'équilibre du contrat et sans constater par ailleurs que cette clause, qui, dans son dernier alinéa, écartait tout ajustement du loyer à la baisse, ne pouvait être détachée des autres stipulations convenues par les parties au titre de l'indexation du loyer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article L. 112-1 du code monétaire et financier.

2°/ que, par dérogation à l'article L. 145-38 du code de commerce, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire ; que dans l'hypothèse où la clause d'indexation est déclarée non écrite en ce qu'elle exclut, en cas de baisse de l'indice, toute diminution du loyer, les parties demeurent en droit, en cas variation de plus quart du loyer par le jeu de l'indexation, de solliciter du juge la fixation du loyer révisé à la valeur locative ; qu'en énonçant que la clause d'échelle mobile ayant été déclarée non écrite en ce qu'elle excluait en cas de baisse de l'indice l'ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l'indice publié dans le même temps, « les dispositions de l'article L. 145-39 du code de commerce ne pouvaient trouver à s'appliquer de sorte que la société Pardès patrimoine devait être déboutée de sa demande tendant à voir fixer à la valeur locative le prix du loyer révisé », quand ces dispositions d'ordre public permettent à chacune des parties, dès lors que le bail stipule une clause d'indexation, de solliciter du juge la fixation du loyer révisé à la valeur locative en cas d'augmentation ou de diminution de plus du quart du loyer par le jeu de cette clause, la cour d'appel a violé l'article L. 145-39 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

7. D'une part, ayant exactement retenu que le propre de la clause d'indexation est de faire varier le loyer à la hausse ou à la baisse et souverainement relevé que la clause d'indexation figurant au bail excluait, en cas de baisse de l'indice, tout ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l'indice publié dans le même temps et qu'elle stipulait expressément que son application ne devait pas se traduire par une diminution de loyer, de sorte que l'exclusion d'un ajustement à la baisse du loyer présentait un caractère essentiel, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que la clause devait être réputée non écrite en son entier, a, par ces motifs, légalement justifié sa décision de ce chef.

8. D'autre part, ayant retenu que l'article L. 145-39 du code de commerce autorisait « en outre et par dérogation à l'article L. 145-38 » les clauses d'indexation qui avaient pour objet de faire évoluer le montant du loyer en fonction d'un indice de référence de manière automatique et que, la clause d'indexation ayant été déclarée réputée non écrite, les dispositions de l'article L. 145-39 n'étaient pas applicables, la cour d'appel, qui a rejeté la demande du bailleur sur le fondement de ce texte, a légalement justifié sa décision.

Sur le second moyen, ci-après annexé

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Pardès patrimoine aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Pardès patrimoine et la condamne à payer à la société Micromania la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par
M. Echappé, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour la société Pardès patrimoine.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de condamnation de la bailleresse à rembourser à la société locataire les sommes trop versées, puis, l'infirmant sur ce point, statuant à nouveau et y ajoutant, déclaré la fin de non-recevoir présentée par la bailleresse recevable, dit que la société Micromania a un intérêt à agir, constaté que la société Micromania, par conclusions régulièrement notifiées par le RPVA, a demandé la condamnation de la société Pardès Patrimoine à lui payer la somme de 174.219,26 euros au titre des sommes trop-perçues pour la période écoulée entre le 1er février 2013 et le 1er trimestre 2017, inclus, condamné la société Pardès Patrimoine à verser à la société Micromania la somme de 174.219,26 euros outre les intérêts au taux légal à compter de la date de notification des conclusions de la société Micromania, chiffrant la demande de restitution, puis condamné la société Pardès Patrimoine à verser à la société Micromania la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Aux motifs propres qu'en l'espèce, il est constant que le contrat de bail intervenu le 8 février 2005 entre la SCI Pardès Patrimoine et la société Game France était à effet au 15 mars 2005 ; que ce contrat stipule en son article 6 intitulé « Loyer » que : « IV. Le loyer est indexé sur l'indice national du coût de la construction publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques, base 100 au 4ème trimestre 1953, soit l'indice au 1er trimestre 2004 : 1225. Le loyer sera indexé annuellement au 1er janvier de chaque année et pour la première fois le 1er janvier de chacune des années suivantes. Etant ici précisé que si le nouvel indice de référence ci-dessus visé venait à être inférieur à l'indice de référence le dernier appliqué, le loyer ne serait pas minoré, mais, dans tous les cas, il restera au moins égal au dernier loyer augmenté. Si l'indice visé au présent article venait à cesser de faire l'objet d'une publication par l'INSEE, les parties décident de se référer à toute autre disposition de l'indice retenu qui serait assurée par tel organisme public ou privé des statistiques choisi par elles d'un commun accord ou, faute d'accord, désigné par le président du tribunal de commerce de Paris. Si les calculs effectués en application des dispositions ci-dessus avaient pour résultat la détermination d'un loyer inférieur à celui du dernier pratiqué, c'est ce dernier loyer qui resterait en vigueur, l'application de la clause ne devant en aucune façon se traduire par une diminution de loyer » ; que la cour rappelle qu'en application de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, tel que le bail commercial, prévoyant la prise en compte, dans l'entier déroulement du contrat, d'une période de variation indiciaire supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision ; qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, cette clause, qui organise une indexation annuelle à compter du 1er janvier 2006 alors que le bail est à effet du 15 mars 2005 crée, lors de la première année du bail, une période de variation indiciaire d'un an, supérieure à la durée écoulée depuis la date d'effet du bail, soit du 8 mois et 15 jours ; que cependant, la cour relève que seule la stipulation qui crée la distorsion prohibée est réputée non écrite et qu'en l'espèce, la clause prévoit un premier ajustement, illicite mais ponctuel tenant à la prise d'effet du bail en cours d'année civile tandis que les périodes de référence suivantes ont la même durée ; que dès lors, la clause d'indexation ne peut pas être réputée non écrite en son entier pour ce motif ; qu'à titre subsidiaire, la société Micromania soutient que la clause d'indexation est non-écrite car elle fausse l'application de l'article L. 145-39 du code de commerce et est contraire aux dispositions de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier dans la mesure où prévoyant un loyer plancher elle est contraire au principe d'automaticité et de réciprocité découlant de cet article et qu'elle crée en outre une distorsion évidente entre la période d'indexation et la variation de l'indice, ce à quoi s'oppose la société bailleresse ; que la cour rappelle que le propre d'une clause d'échelle mobile est de faire varier à la hausse et à la baisse et que la clause figurant au bail, écartant toute réciprocité de variation, fausse le jeu normal de l'indexation ; qu'en effet, cette clause est de nature à créer un effet de rattrapage condamné par l'article L. 112-1 du code monétaire et financier ; qu'en conséquence, doit être déclarée non-écrite une clause d'indexation qui exclut la réciprocité de la variation et stipule que le loyer ne peut être révisé qu'à la hausse ; qu'en l'espèce, la clause exclut, en cas de baisse de l'indice, l'ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l'indice publié dans le même temps ; que par ailleurs, l'exclusion d'un ajustement à la baisse du loyer, présentant un caractère essentiel, la clause litigieuse précisant avec netteté « que l'application de ladite clause ne devant en aucune manière se traduire par une diminution de loyer », la clause d'indexation doit être, en son entier, réputée non écrite ; qu'en conséquence, la clause d'indexation stipulée au bail être déclarée non-écrite en son entier ; que selon l'article L. 145-39 du code de commerce : « En outre, et par dérogation à l'article L. 145-38, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire » ; qu'en l'espèce, la clause d'échelle mobile ayant été déclarée non-écrite, les dispositions de l'article L. 145-39 du code de commerce ne peuvent trouver à s'appliquer et il convient de débouter la bailleresse en sa demande de voir fixer à la valeur locative le prix du loyer révisé ; que le loyer ayant été appelé et payé après application de la clause d'indexation litigieuse, le preneur est bien fondé à solliciter la condamnation du bailleur à lui reverser les sommes trop versées ; qu'en première instance, la demande de remboursement du trop versé avait été présentée par la société locataire, mais cette demande avait été déclarée irrecevable par les premiers juges car non chiffrée ; que dans le corps de ses conclusions la société bailleresse soulève le caractère irrecevable de la demande en paiement de la somme de 174.219,26 euros formée en cause d'appel compte tenu de sa nouveauté ; que la cour relève que cette demande n'est pas reprise au dispositif des conclusions ; qu'elle rappelle que n'étant tenue de statuer que sur les demandes figurant au dispositif des conclusions des parties en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle n'est pas tenue de statuer sur cette demande ; qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la demande de remboursement du trop-perçu irrecevable faute de chiffrage, ce motif ne rendant pas irrecevable sa demande ; qu'en cause d'appel, la société locataire demande la condamnation de la bailleresse à lui verser la somme de 174.219,26 euros pour la période écoulée entre le mois de février 2013 et le premier trimestre 2017, inclus ; qu'à titre subsidiaire, la société bailleresse conteste le décompte de la société locataire qui serait selon elle erroné pour l'année 2013 ; que la cour constate qu'il résulte des pièces produites par la société locataire qu'elle s'est acquittée pour la période écoulée entre le 1er février 2013 et le 31 décembre suivant de la somme de 151.171,42 euros [27.485,71 + 3 x 41.228,57] alors qu'elle n'était redevable pendant cette période que de la somme de 119.166,66 euros [130.000/12 x 11] ; que c'est donc à juste titre que la société locataire chiffre les sommes trop versées à la somme de 32.004,76 euros HT ; que pour les années suivantes, le trop versé s'élève aux sommes suivantes : 2014 : 41.600 euros, 2015 : 44.677,56 euros, 2016 : 44.677,56 euros, 1er trimestre 2017 : 11.169,39 euros ; que le total du trop versé est en conséquence de 174.219,26 euros HT ; qu'en conséquence, il convient de condamner la société bailleresse à verser à la société locataire ladite somme augmentée des intérêts au taux légal, à compter de la demande chiffrée qui en a été faite par la société locataire par les conclusions régulièrement notifiées par le RPVA ; que la société bailleresse succombant dans ses demandes doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel ; que le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu'il a condamné la société bailleresse à payer à la société locataire une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile,

1° Alors en premier lieu qu'hors les cas où la clause déclarée non écrite présente un caractère essentiel à l'équilibre du contrat ou ne peut être détaché des autres stipulations contractuelles, cette sanction n'affecte pas les autres clauses de la convention légalement formée ; qu'en considérant que la clause d'indexation devait être, en son entier, réputée non écrite au seul motif que « l'exclusion d'un ajustement à la baisse du loyer présente un caractère essentielle, la clause litigieuse précisant avec netteté que l'application de ladite clause ne devant en aucune manière se traduire par une diminution de loyer » sans dire en quoi, en l'absence de toute manifestation de volonté expresse en ce sens, la clause litigieuse déclarée non écrite était essentielle à l'équilibre du contrat et sans constater par ailleurs que cette clause, qui, dans son dernier alinéa, écartait tout ajustement du loyer à la baisse, ne pouvait être détachée des autres stipulations convenues par les parties au titre de l'indexation du loyer (article 6 IV du bail), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article L. 112-1 du code monétaire et financier,

2° Alors en second lieu que par dérogation à l'article L. 145-38 du code de commerce, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire ; que dans l'hypothèse où la clause d'indexation est déclarée non écrite en ce qu'elle exclut, en cas de baisse de l'indice, toute diminution du loyer, les parties demeurent en droit, en cas variation de plus quart du loyer par le jeu de l'indexation, de solliciter du juge la fixation du loyer révisé à la valeur locative ; qu'en énonçant que la clause d'échelle mobile ayant été déclarée non écrite en ce qu'elle excluait en cas de baisse de l'indice l'ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l'indice publié dans le même temps, « les dispositions de l'article L. 145-39 du code de commerce ne pouvaient trouver à s'appliquer de sorte que la société Pardès Patrimoine devait être déboutée de sa demande tendant à voir fixer à la valeur locative le prix du loyer révisé », quand ces dispositions d'ordre public permettent à chacune des parties, dès lors que le bail stipule une clause d'indexation, de solliciter du juge la fixation du loyer révisé à la valeur locative en cas d'augmentation ou de diminution de plus du quart du loyer par le jeu de cette clause, la cour d'appel a violé l'article L. 145-39 du code de commerce.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de condamnation de la bailleresse à rembourser à la société locataire les sommes trop versées, puis, l'infirmant sur ce point, et, statuant à nouveau et y ajoutant, déclaré la fin de non-recevoir présentée par la société bailleresse recevable, et, après avoir dit que la société Micromania a un intérêt à agir, constaté que la société Micromania, par conclusions régulièrement notifiées par le RPVA, a demandé la condamnation de la société Pardès Patrimoine à lui payer la somme de 174.219,26 euros au titre des sommes trop-perçues pour la période écoulée entre le 1er février 2013 et le 1er trimestre 2017, inclus, condamné la société Pardès Patrimoine à verser à la société Micromania la somme de 174.219,26 euros outre les intérêts au taux légal à compter de la date de notification des conclusions de la société Micromania, chiffrant la demande de restitution, puis condamné la société Pardès Patrimoine à verser à la société Micromania la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Aux motifs propres qu'en l'espèce, il est constant que le contrat de bail intervenu le 8 février 2005 entre la SCI Pardès Patrimoine et la société Game France était à effet au 15 mars 2005 ; que ce contrat stipule en son article 6 intitulé « Loyer » que : « IV. Le loyer est indexé sur l'indice national du coût de la construction publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques, base 100 au 4ème trimestre 1953, soit l'indice au 1er trimestre 2004 : 1225. Le loyer sera indexé annuellement au 1er janvier de chaque année et pour la première fois le 1er janvier de chacune des années suivantes. Etant ici précisé que si le nouvel indice de référence ci-dessus visé venait à être inférieur à l'indice de référence le dernier appliqué, le loyer ne serait pas minoré, mais, dans tous les cas, il restera au moins égal au dernier loyer augmenté. Si l'indice visé au présent article venait à cesser de faire l'objet d'une publication par l'INSEE, les parties décident de se référer à toute autre disposition de l'indice retenu qui serait assurée par tel organisme public ou privé des statistiques choisi par elles d'un commun accord ou, faute d'accord, désigné par le président du tribunal de commerce de Paris. Si les calculs effectués en application des dispositions ci-dessus avaient pour résultat la détermination d'un loyer inférieur à celui du dernier pratiqué, c'est ce dernier loyer qui resterait en vigueur, l'application de la clause ne devant en aucune façon se traduire par une diminution de loyer » ; que la cour rappelle qu'en application de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, tel que le bail commercial, prévoyant la prise en compte, dans l'entier déroulement du contrat, d'une période de variation indiciaire supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision ; qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, cette clause, qui organise une indexation annuelle à compter du 1er janvier 2006 alors que le bail est à effet du 15 mars 2005 crée, lors de la première année du bail, une période de variation indiciaire d'un an, supérieure à la durée écoulée depuis la date d'effet du bail, soit du 8 mois et 15 jours ; que cependant, la cour relève que seule la stipulation qui crée la distorsion prohibée est réputée non écrite et qu'en l'espèce, la clause prévoit un premier ajustement, illicite mais ponctuel tenant à la prise d'effet du bail en cours d'année civile tandis que les périodes de référence suivantes ont la même durée ; que dès lors, la clause d'indexation ne peut pas être réputée non écrite en son entier pour ce motif ; qu'à titre subsidiaire, la société Micromania soutient que la clause d'indexation est non-écrite car elle fausse l'application de l'article L. 145-39 du code de commerce et est contraire aux dispositions de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier dans la mesure où prévoyant un loyer plancher elle est contraire au principe d'automaticité et de réciprocité découlant de cet article et qu'elle crée en outre une distorsion évidente entre la période d'indexation et la variation de l'indice, ce à quoi s'oppose la société bailleresse ; que la cour rappelle que le propre d'une clause d'échelle mobile est de faire varier à la hausse et à la baisse et que la clause figurant au bail, écartant toute réciprocité de variation, fausse le jeu normal de l'indexation ; qu'en effet, cette clause est de nature à créer un effet de rattrapage condamné par l'article L. 112-1 du code monétaire et financier ; qu'en conséquence, doit être déclarée non-écrite une clause d'indexation qui exclut la réciprocité de la variation et stipule que le loyer ne peut être révisé qu'à la hausse ; qu'en l'espèce, la clause exclut, en cas de baisse de l'indice, l'ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l'indice publié dans le même temps ; que par ailleurs, l'exclusion d'un ajustement à la baisse du loyer, présentant un caractère essentiel, la clause litigieuse précisant avec netteté « que l'application de ladite clause ne devant en aucune manière se traduire par une diminution de loyer », la clause d'indexation doit être, en son entier, réputée non écrite ; qu'en conséquence, la clause d'indexation stipulée au bail être déclarée non-écrite en son entier ; que selon l'article L. 145-39 du code de commerce : « En outre, et par dérogation à l'article L. 145-38, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire » ; qu'en l'espèce, la clause d'échelle mobile ayant été déclarée non-écrite, les dispositions de l'article L. 145-39 du code de commerce ne peuvent trouver à s'appliquer et il convient de débouter la bailleresse en sa demande de voir fixer à la valeur locative le prix du loyer révisé ; que le loyer ayant été appelé et payé après application de la clause d'indexation litigieuse, le preneur est bien fondé à solliciter la condamnation du bailleur à lui reverser les sommes trop versées ; qu'en première instance, la demande de remboursement du trop versé avait été présentée par la société locataire, mais cette demande avait été déclarée irrecevable par les premiers juges car non chiffrée ; que dans le corps de ses conclusions la société bailleresse soulève le caractère irrecevable de la demande en paiement de la somme de 174.219,26 euros formée en cause d'appel compte tenu de sa nouveauté ; que la cour relève que cette demande n'est pas reprise au dispositif des conclusions ; qu'elle rappelle que n'étant tenue de statuer que sur les demandes figurant au dispositif des conclusions des parties en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle n'est pas tenue de statuer sur cette demande ; qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la demande de remboursement du trop-perçu irrecevable faute de chiffrage, ce motif ne rendant pas irrecevable sa demande ; qu'en cause d'appel, la société locataire demande la condamnation de la bailleresse à lui verser la somme de 174.219,26 euros pour la période écoulée entre le mois de février 2013 et le premier trimestre 2017, inclus ; qu'à titre subsidiaire, la société bailleresse conteste le décompte de la société locataire qui serait selon elle erroné pour l'année 2013 ; que la cour constate qu'il résulte des pièces produites par la société locataire qu'elle s'est acquittée pour la période écoulée entre le 1er février 2013 et le 31 décembre suivant de la somme de 151.171,42 euros [27.485,71 + 3 x 41.228,57] alors qu'elle n'était redevable pendant cette période que de la somme de 119.166,66 euros [130.000/12 x 11] ; que c'est donc à juste titre que la société locataire chiffre les sommes trop versées à la somme de 32.004,76 euros HT ; que pour les années suivantes, le trop versé s'élève aux sommes suivantes : 2014 : 41.600 euros, 2015 : 44.677,56 euros, 2016 : 44.677,56 euros, 1er trimestre 2017 : 11.169,39 euros ; que le total du trop versé est en conséquence de 174.219,26 euros HT ; qu'en conséquence, il convient de condamner la société bailleresse à verser à la société locataire ladite somme augmentée des intérêts au taux légal, à compter de la demande chiffrée qui en a été faite par la société locataire par les conclusions régulièrement notifiées par le RPVA ; que la société bailleresse succombant dans ses demandes doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel ; que le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu'il a condamné la société bailleresse à payer à la société locataire une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile,

1° Alors en premier lieu que le juge ne peut, sans violer le principe du contradictoire, relever d'office un moyen de droit sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations ; qu'en énonçant que « la cour relève que la demande de la société bailleresse [qui soulève le caractère irrecevable de la demande en paiement de la somme de 174.219,26 euros formée en cause d'appel compte tenu de sa nouveauté] n'est pas reprise au dispositif des conclusions, elle rappelle que n'étant tenue de statuer que sur les demandes figurant au dispositif des conclusions des parties en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle n'est pas tenue de statuer sur cette demande » la cour d'appel s'est fondée sur un motif de droit relevé d'office en violation de l'article 16 du code de procédure civile,

2° Alors en deuxième lieu que le juge ne peut dénaturer les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions des parties ; qu'en énonçant que la demande fondée sur le caractère irrecevable de la demande en paiement de la somme de 174.219,26 euros formée en cause d'appel compte tenu de sa nouveauté « n'est pas reprise au dispositif des conclusions » quand le dispositif des conclusions d'appel de la société Pardès Patrimoine notifiées par RPVA le 4 août 2017 faisait expressément état du visa : « Vu l'article 564 du nouveau code de procédure civile » avant de demander à la cour d'appel de « Rejeter l'intégralité des demandes de la société comme étant non fondées » d'où il résultait que la cour d'appel était tenue de statuer sur l'application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de la société Pardès Patrimoine en violation de l'article 4 du code de procédure civile,

3° Alors en troisième lieu que dans ses conclusions d'appel, la société Pardès Patrimoine faisait valoir que « la société Micromania sollicite, aux termes du dispositif de ses conclusions, la condamnation de la société Pardès patrimoine au remboursement du montant de l'indexation, que la société Micromania ne prend pas la peine de motiver cette demande dans le corps de ses conclusions, ni de présenter un chiffrage au Tribunal, que dès lors, c'est à juste titre que le tribunal de grande instance de Paris, dans son jugement en date du 9 mars 2016, a jugé que « faute pour la SAS Micromania de motiver cette demande dans le corps de ses conclusions et de la chiffrer, cette demande sera déclarée irrecevable », que dans ses conclusions d'appelant, la société Micromania demande pour la première fois à la Cour de condamner la société Pardès Patrimoine à rembourser le trop-perçu à la société Micromania, soit la somme de 174.219,26 €, qu'or cette demande de condamnation à la somme de 174.219,26 € étant nouvelle et invoquée pour la première fois lors de la procédure d'appel, la Cour n'a pas d'autre choix que de déclarer cette demande irrecevable, qu'à défaut la cour priverait Pardès Patrimoine du double degré de juridiction, principe essentiel de la procédure judiciaire française qui garantit l'équité pour les justiciables, que par conséquent il est demandé à la cour d'appel de céans de déclarer irrecevable la demande de la société Micromania de condamner la société Pardès Patrimoine au paiement de la somme de 174.219,26 €, cette demande étant nouvelle au stade de l'appel » ; que dans le dispositif de ses conclusions, la société Pardès Micromania visait expressément les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile puis demandait en particulier à la cour d'appel de « rejeter l'intégralité des demandes de la société Micromania comme étant non fondées » ; qu'en énonçant que « faute de reprise dans le dispositif de ces conclusions de la demande d'irrecevabilité de la demande en paiement de la somme de 174.219,26 euros formée en cause d'appel compte tenu de sa nouveauté, la cour n'est pas tenue de statuer sur cette demande » sans rechercher si, éclairée à la lumière des motifs de ces conclusions, la référence expresse ainsi faite dans le dispositif aux dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ne saisissait pas la cour d'appel d'un moyen d'irrecevabilité fondé sur le caractère nouveau, et partant irrecevable, de la demande présentée pour la première fois en cause d'appel par la société Micromania en cause d'appel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 4 et 954, alinéa 3, du code de procédure civile,

4° Alors en quatrième lieu que l'objet du litige est fixé par les prétentions respectives des parties ; que si une demande non chiffrée n'est pas, de ce seul fait, irrecevable, encore faut-il que cette demande soit déterminable au regard des éléments figurant dans les écritures du demandeur et des pièces versées aux débats ; qu'en se bornant à énoncer, pour infirmer le jugement entrepris en ce qu'il avait déclaré irrecevable faute de chiffrage la demande de la société Micromania ainsi formulée : « Rembourser le montant de l'indexation outre les intérêts », que « ce motif ne rendait pas irrecevable la demande » sans rechercher, bien qu'y ayant été invitée, si au regard des conclusions en défense n° 4 déposées par la société Micromania devant le tribunal de grande instance de Paris, cette demande n'était pas dépourvue de toute motivation relative à l'existence et à la détermination d'un trop-versé dû au preneur au titre de l'indexation du loyer et ne venait s'appuyer sur aucun élément de preuve de sorte que la demande telle que formulée dans le dispositif des écritures de la société Micromania n'était pas déterminable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 4 et 122 du code de procédure civile,

5° Alors en cinquième lieu que doit être déclarée irrecevable une demande formulée dans des termes généraux, vagues ou dépourvus de la précision nécessaire pour permettre au juge saisi d'exercer son office ; qu'en énonçant « qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la demande de remboursement du trop perçu irrecevable faute de chiffrage, ce motif ne rendant pas irrecevable sa demande » quand la demande telle que formulée dans le dispositif des conclusions en défense n° 4 de la société Micromania : « Rembourser le montant de l'indexation outre les intérêts » devait être déclarée irrecevable en raison de son caractère vague et général, la cour d'appel a violé les articles 4, 31 et 122 du code de procédure civile,

6° Alors en sixième lieu que la recevabilité de la demande s'apprécie au jour de son introduction ; qu'en énonçant qu'il convient de condamner la société bailleresse à verser à la société locataire la somme de 174.219,26 euros HT augmentée des intérêts au taux légal à compter de la demande chiffrée qui en a été faite par la société locataire par les conclusions régulièrement notifiées par le RPVA, la cour d'appel s'est placée à une date autre que celle de l'introduction de la demande pour apprécier la recevabilité de celle-ci en violation des articles 4, 31 et 122 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-17139
Date de la décision : 10/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 sep. 2020, pourvoi n°19-17139


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.17139
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