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04/01/2023 | FRANCE | N°20-17332;20-17334

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 janvier 2023, 20-17332 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 janvier 2023

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 3 F-D

Pourvois n°
C 20-17.332
E 20-17.334 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023

I - La société Massi

s import export Europe, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 20-17.332 contre un ar...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 janvier 2023

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 3 F-D

Pourvois n°
C 20-17.332
E 20-17.334 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023

I - La société Massis import export Europe, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 20-17.332 contre un arrêt n° RG 18/23115 rendu le 2 mars 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant :

1°/ au ministre des finances des comptes publics, domicilié [Adresse 2], agissant au nom de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DRNRED),

2°/ à la société Transports P. Fatton, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],

3°/ à M. [S] [B], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Massis import export Europe,

défendeurs à la cassation.

II - La société Massis import export Europe, société à responsabilité limitée unipersonnelle, a formé le pourvoi n° E 20-17.334 contre un arrêt n° RG 18/23083 rendu le 2 mars 2020 par la même cour d'appel, dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Transports P. Fatton, société anonyme,

2°/ à M. [S] [B], pris en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Massis import export Europe,

défendeurs à la cassation.

M. [B], ès qualités, a formé un pourvois incident contre chaque arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal et le demandeur au pourvoi incident n° C 20-17.332 invoquent, à l'appui de leur recours, deux moyens de cassation identiques, annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal et le demandeur au pourvoi incident n° E 20-17.334 invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation identique, annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la société Massis import export Europe et de M. [B], ès qualités, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du ministre des finances des comptes publics, agissant au nom de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Transports P. Fatton, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° C 20-17.332 et E 20-17.334 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Paris, 2 mars 2020, n° RG 18/23115 et n° RG 18/23083), la société Massis import export Europe (la société Massis), fournisseur et entrepositaire agréé de tabac à narguilé, importe des tabacs de pays tiers à l'Union européenne par l'intermédiaire de la société Transports P. Fatton (la société Fatton), commissionnaire en douanes.

3. Le 27 mai 2016, l'administration des douanes a notifié à la société Massis un avis de résultat d'enquête l'informant qu'elle envisageait de lui notifier des infractions de fausse déclaration de valeur en douane et d'irrégularité de nature à compromettre le recouvrement des droits et taxes. Celle-ci a produit des observations le 1er juillet 2016.

4. Après avoir, par lettre du 7 juillet 2016, informé la société Massis du rejet de ses observations, l'administration des douanes lui a, le 21 juillet 2016, notifié un procès-verbal d'infractions puis a émis à son encontre un avis de mise en recouvrement (AMR) des droits éludés.

5. L'administration des douanes ayant rejeté sa contestation, la société Massis l'a assignée en annulation de l'AMR, et la société Fatton en garantie.

6. Le 5 janvier 2017, la société Massis a assigné la société Fatton devant un tribunal de commerce afin de la voir condamner à lui fournir une caution bancaire du montant de l'AMR.

7. Un jugement du 28 novembre 2018 a arrêté le plan de sauvegarde de la société Massis, M. [B] étant désigné mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan.

Examen des moyens

Sur le second moyen des pourvois principal et incident n° C 20-17.332, ci-après annexés

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, des pourvois principal et incident n° C 20-17.332 rédigés en termes identiques, réunis

Enoncé du moyen

9. La société Massis et M. [B], ès qualités, font grief à l'arrêt de déclarer régulier l'AMR du 8 août 2016, alors :

« 1°/ qu'en application du principe du respect des droits de la défense et du contradictoire, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaître utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable ; qu'en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction applicable au litige, ce délai est fixé à trente jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observation dans le délai imparti ; que l'administration des douanes doit répondre à l'intéressé par une décision motivée sur les raisons pour lesquelles elle estime justifié le maintien de la décision lui faisant grief, et ce avant que ne soit dressé le procès-verbal de notification d'infractions, qui est précisément l'acte final faisant grief ; qu'en l'espèce, à l'avis de résultat de l'enquête du 7 juin 2016, la société Massis avait répondu par courrier du 1er juillet 2016, aux termes duquel elle remettait en cause point par point les conclusions de l'enquête qui lui avait été adressée ; que la cour d'appel a jugé que l'administration avait répondu à ce courrier du 1er juillet 2016, par courrier du 7 juillet 2016, dans un délai qui avait paru suffisant, de sorte que le respect du contradictoire avait été respectée ; qu'en statuant ainsi, cependant que le courrier du 7 juillet 2016 se bornait à indiquer de manière laconique que "les objections formulées ne sont pas de nature à remettre en cause les infractions ou la liquidation supplémentaire constatées par les enquêteurs de la IIème division d'enquête", de sorte qu'il ne pouvait s'agir d'une réponse motivée, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les droits de la défense et le principe du contradictoire et l'article 6 de la Conventionde sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ qu'en application du principe du respect des droits de la défense et du contradictoire, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaître utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable ; qu'en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction applicable au litige, ce délai est fixé à trente jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagées, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observation dans le délai imparti ; que l'administration des douanes doit répondre à l'intéressé par une décision motivée sur les raisons pour lesquelles elle estime justifié le maintien de la décision lui faisant grief, et ce avant que ne soit dressé le procès-verbal de notification d'infractions, qui est précisément l'acte final faisant grief ; qu'en l'espèce, à l'avis de résultat de l'enquête du 7 juin 2016, la société Massis avait répondu par courrier du 1er juillet 2016, aux termes duquel elle remettait en cause point par point les conclusions de l'enquête qui lui avait été adressée ; que la cour d'appel a jugé que l'administration avait répondu à ce courrier du 1er juillet 2016, par courrier du 7 juillet 2016, puis de manière motivée dans le procès-verbal de notification d'infractions du 21 juillet 2016, de sorte que le respect du contradictoire avait été respectée ; qu'en statuant ainsi, cependant que l'administration n'avait répondu de manière motivée au courrier du 7 juillet 2016 que dans le procès-verbal de notification d'infractions du 21 juillet 2016, et non avant que ne soit dressé cet acte faisant grief, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les droits de la défense et du contradictoire et l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

10. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que fait partie intégrante du respect des droits de la défense le droit d'être entendu, qui garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative, avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Selon cette jurisprudence, la règle selon laquelle le destinataire d'une décision faisant grief doit être mis en mesure de faire valoir ses observations avant que celle-ci soit prise a pour but de mettre l'autorité compétente à même de tenir utilement compte de l'ensemble des éléments pertinents (arrêts du 18 décembre 2008, Sopropé, C-349/07, points 37 et 49, du 5 novembre 2014, Mukarubega, C-166/13, points 46 et 47, et du 16 octobre 2019, Glencore Agriculture Hungary, C-189/18, point 41).

11. Après avoir énoncé que, selon l'article 67 A du code des douanes, dans sa version issue de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 alors applicable, la personne à qui est notifiée une décision qui lui fait grief dispose d'un délai de trente jours pour produire des observations, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que la société Massis a, le 1er juillet 2016, fait valoir ses observations à l'avis de résultat d'enquête que l'administration des douanes lui avait adressé le 27 mai 2016 et que l'administration des douanes les a explicitement rejetées par lettre du 11 juillet 2016.

12. L'arrêt relève encore que, lors de la notification du procès-verbal d'infractions au représentant légal de la société Massis, l'administration des douanes avait précisément repris les observations de cette dernière, motivant en fait et en droit les raisons pour lesquelles elle les rejetait, et retient que de nouvelles observations écrites auraient pu être produites par la société Massis à cette occasion et jusqu'à l'émission de l'AMR, intervenue le 8 août 2016.

13. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que le droit à être entendu prévu à l'article 67 A du code des douanes et les droits de la défense avaient été respectés.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, des pourvois principal et incident n° 20-17.332 rédigés en termes identiques, réunis

Enoncé du moyen

15. La société Massis et M. [B], ès qualités, font grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant déclaré régulier l'AMR du 8 août 2016 en la forme et sur le fond, alors « que les droits de la défense et de l'égalité des armes impliquent que le redevable soit informé de toute discussion de l'administration des douanes avec un tiers qui serait de nature à modifier ses droits, obligations et recours éventuel ; qu'en l'espèce, en jugeant que le fait que la société Massis n'ait pas été associée aux échanges entre l'administration des douanes et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane n'était pas de nature à entraîner la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l'émission de l'AMR du 8 août 2016, la cour d'appel a violé le principe du respect des droits de la défense ensemble celui de l'égalité des armes. »

Réponse de la Cour

16. Selon la jurisprudence constante de la Cour de justice, une violation des droits de la défense, en particulier du droit d'être entendu, n'entraîne l'annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l'absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent (arrêt du 18 juin 2020, Commission/RQ, C-831/18 P, point 105).

17. La Cour de justice a également jugé que l'opérateur qui a recours à un commissionnaire en douane, que ce soit dans le cadre d'une représentation directe ou indirecte, est en toute hypothèse débiteur de la dette douanière à l'égard des autorités douanières (arrêt du 13 septembre 2007, Common Market Fertilizers/Commission, C-443/05 P, point 186).

18. Ayant énoncé qu'un commissionnaire en douane agissant en représentation directe de la société importatrice n'est pas tenu au paiement de la dette douanière, et relevé que la société Massis agissait comme déclarant et était ainsi débitrice de la dette douanière, la cour d'appel en a exactement déduit que le fait que l'administration des douanes n'ait pas associé la société Massis à ses échanges avec la société Fatton était sans incidence sur la régularité de la procédure suivie à l'encontre de la première.

19. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen des pourvois principal et incident n° E 20-17.334 rédigés en termes identiques, réunis

Enoncé du moyen

20. La société Massis et M. [B], ès qualités, font grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant rejeté la demande de la société Massis de sa demande tendant à ce que la société Fatton fournisse des garanties pour le paiement de la dette douanière mise en recouvrement, alors que « la cassation entraîne l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'en cassant l'arrêt rendu le 2 mars 2020 par la cour d'appel de Paris (RG n° 18/23115), dans le cadre du pourvoi n° C 20-17.332, du chef du dispositif ayant mis hors de cause la société Fatton, la Cour de cassation censurera l'arrêt attaqué ayant rejeté les demandes de fourniture de garanties relatives aux dettes douanières dont se trouve tenue la société Fatton, ensemble avec la société Massis, et ce en application de l'article 625 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

21. Le pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 2 mars 2020 (RG n° 18/23115) étant rejeté, le moyen unique du pourvoi n° 20-17.334 est sans objet.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois principal et incident n° C 20-17.332 et les pourvois principal et incident n° E 20-17.334, formés par la société Massis import export Europe et par M. [B], en sa qualité de mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan de cette société ;

Condamne la société Massis import export Europe et M. [B], ès qualités, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la société Massis import export Europe et M. [B], ès qualités, et les condamne à payer au ministre des finances, au nom de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, la somme globale de 3 000 euros, et à la société Transports P. Fatton la somme globale de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens identiques produits AUX POURVOIS PRINCIPAL ET INCIDENT n° C 20-17.332 par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Massis import export Eu rope et pour M. [B], pris en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Massis import export Europe.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant déclaré régulier l'avis de mise en recouvrement n° 2016/29 du 8 août 2016 en la forme et sur le fond ;

Aux motifs que, « Maître [T] [U]-Selarl 2metassociés, ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe doit être mise hors de cause puisque le jugement prononcé le 28 novembre 2018 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère qui a arrêté le plan de sauvegarde de la société Massis Import Export Europe a mis fin à ses fonctions. A) Sur la procédure La société Massis Import Export Europe dite ci-après société Massis Distribution et les organes de sa procédure collective de sauvegarde demandent à la cour d'annuler la procédure de recouvrement en raison des violations suivantes au principe du contradictoire :
* La DNRED a fait preuve d'opacité dans la phase dite du droit d'être entendu (DEE) en dissimulant à la société MASSIS des échanges majeurs avec la société FATTON qui font grief.
* Après avoir pris connaissance des observations de la société MASSIS, la DNRED n'a pas motivé sa future prise de décision avant la notification d'infractions.
* La DNRED a, sciemment, créé un effet de surprise dans le procès-verbal de notification d'infraction alors que la procédure contradictoire du DEE vise à l'empêcher.
* La société MASSIS se trouvant seule débitrice au regard du procès-verbal, a dû répliquer « à chaud » à la fin de l'acte.

Il est également soutenu que la DNRED a manqué à son obligation de notifier la dette douanière au déclarant en douane ayant agi dans le cadre d'un mandat de représentation indirecte.

Est également invoquée l'impossibilité pour la Douane de statuer sur la contestation administrative contre l'AMR en cas de saisine de la CCED (commission de conciliation et d'expertise douanière).

Selon la directrice de la DNRED, les contestations ainsi soulevées ne seraient pas fondées.

Ceci étant observé, par de justes motifs que la cour adopte, les premiers juges, faisant application des articles 67 A à 67 D du code des douanes dans leur rédaction applicable au litige ont jugé que la procédure douanière mise en oeuvre n'avait pas porté atteinte au principe du contradictoire ; que la société Massis Distribution avait bénéficié du droit d'être entendue puisqu'elle avait reçu l'avis de résultat d'enquête le 7 juin 2016 et y avait répondu par courrier daté du 1er juillet 2016. Par courrier du 7 juillet 2016, la DNRED y a répondu dans un délai qui lui est apparu suffisant. Il a été également justement relevé que le procès-verbal de notification d'infractions du 21 juillet 2016 répond aux observations formulées par le conseil de la société Massy Distribution. Il a ainsi été caractérisé que le contradictoire avait été respecté dans la phase antérieure à l'émission de l'AMR le 8 août 2016. La société Massis Distribution est mal fondée à reprocher à la DNRED un défaut de réponse motivée avant la rédaction du procès-verbal de notification d'infractions.

Il doit ensuite être relevé que la société Fatton verse aux débats la représentation en douane qui lui a été consentie par la société Massis Distribution à effet du 20 janvier 2009 qui mentionne qu'elle relève de la représentation directe conformément à l'article 5.2 1er alinéa du code des douanes communautaire. Il s'en déduit que la société Patton n'est pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l'article 201 3°) du même code. La société Massis Distribution est ainsi mal fondée à soutenir que la DNRED aurait vicié la procédure de contrôle en refusant sciemment de retenir la responsabilité financière, pénale et douanière de la société Transports Fatton alors qu'elle agissait comme « déclarant » et donc, inévitablement codébiteur de la dette douanière au regard du code des douanes communautaires et qu'en refusant d'appliquer la responsabilité solidaire de la société Transports Fatton, la DNRED s'est sciemment privée du droit de recouvrer la dette auprès du déclarant et donc débiteur de la dette douanière et aurait ainsi porté atteinte à la protection des intérêts financiers de l'Union européenne.

Si la société Massis Distribution n'a pas été associée aux échanges passés entre la DNRED et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane, cette circonstance n'est pas de nature à entraîner la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l'émission de l'AMR du 8 août 2016.

Sur le grief relatif au fait que la DNRED a statué sur la contestation de l'AMR alors que la société Massis Distribution l'avait avisée le 24 août 2016 de ce qu'elle saisissait la commission de conciliation et d'expertise douanière (CCED), les premiers juges ont également justement relevé qu'il résultait de la combinaison des articles 345 alinéa 4 et 346 du code des douanes que "l'avis de mise en recouvrement peut être délivré avant la saisine de cette commission et avant qu'il n'ait été statué sur le recours éventuellement formé."

Il se déduit de ce qui précède que les contestations de la société Massis Distribution sur la régularité de la procédure doivent être rejetées ainsi que sa demande d'annulation de l'AMR n° 2016/29 pour violation du principe du contradictoire » ;

Et par motifs adoptés des premiers juges :

« II - Sur la régularité de la procédure douanière

1° Sur la violation du principe du contradictoire

En vertu du principe du respect des droits de la défense, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaître utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable.

En application des articles 67 A à 67 D du Code des douanes, dans leur version applicable aux faits de l'espèce, ce délai est fixé à 30 jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations dans le délai imparti.

Le non-respect des droits de la défense entraîne la nullité de l'AMR.

Force est de constater en l'espèce que le droit d'être entendu de la société MASSIS DISTRIBUTION a été respecté par l'administration des douanes puisque par courrier du 27 mai 2016, reçu le 7 juin 2016, cette dernière lui a adressé un avis de résultat d'enquête dans les formes prescrites par les dispositions précitées, et il n'est pas contesté que les actes de procédure figuraient en pièces annexes (pièce n° C 2 en demande).

La société MASSIS DISTRIBUTION avait donc jusqu'au 7 juillet 2016 pour communiquer ses observations écrites à l'administration, ce qu'elle a fait le 29 juin 2016 (sa pièce n° 3).

Contrairement à ce qui est allégué, les observations de la demanderesse ne sont pas restées sans réponse, puisqu'une lettre de l'administration des douanes rejetant explicitement les observations formulées dans son courrier du 29 juin 2016 lui a été adressée le 11 juillet 2016 (pièce n° 4 en demande).

Par ailleurs, l'analyse du procès-verbal de notification d'infractions, établi le 21 juillet 2016 (soit 18 jours avant l'émission de l'avis de mise en recouvrement litigieux) par l'administration des douanes en présence du conseil chargé de la défense des intérêts de la société MASSIS DISTRIBUTION, par l'intermédiaire de son représentant légal, permet de considérer que l'administration des douanes a dûment tenu compte de ces observations puisque, reprenant point par point les observations formulées par la demanderesse dans son courrier du 29 juin 2016 auquel elle se réfère explicitement au paragraphe III du PV intitulé "Constatations du service" (pièce n° 5 en demande), elle motive en fait et en droit tes raisons pour lesquels elle n'entend pas remettre en cause les conclusions de l'enquête.

De plus, il a même été permis à la demanderesse à cette occasion de formuler de nouveau ses observations par écrit, étant précisé par ailleurs que le droit d'être entendu tel que prévu par le Code des douanes au visa des dispositions précitées n'impose à l'administration aucun formalisme particulier à la réponse à apporter aux observations formulées par le redevable.

Par conséquent, la société MASSIS DISTRIBUTION a bien été mise en mesure, avant l'émission de l'AMR en date du 8 août 2016, d'être utilement entendue par les autorités douanières, compte tenu de ce qui précède, et notamment du délai écouté entre la date de la notification de l'avis de résultat d'enquête du 7 juin 2016 et la date à laquelle l'administration a pris sa décision (soit deux mois au total).

Dès lors, le moyen soulevé par la demanderesse tiré de la violation du principe général du respect des droits de la défense sera rejeté par le tribunal.

2° Sur la saisine de la CCED

La société MASSIS DISTRIBUTION fait encore grief à l'administration des douanes d'avoir émis un AMR le 8 août 2016 alors, pourtant, qu'elle l'avait informée de la saisine de la Commission de Conciliation d'Expertise Douanière (CCED) le 24 août 2016 et que celle-ci n'a encore notifié aucun avis aux parties à ce jour.

Il résulte, toutefois, de la combinaison de l'article 345 alinéa 4 du Code des douanes, selon lequel les recours prévus aux articles 346 et 347 ne suspendent pas l'exécution de l'avis de mise en recouvrement, et de l'article 346 du même code, qui a trait à la contestation de la créance devant être adressée à l'autorité ayant signé l'AMR et au délai donné au directeur régional des douanes pour statuer sur cette contestation, notamment en cas de saisine de la commission précité, que l'avis de mise en recouvrement peut être délivré avant la saisine de cette commission et avant qu'il n'ait été statué sur le recours éventuellement formé.

Ce grief sera donc également rejeté.

Enfin, il convient de souligner que l'avis de mise en recouvrement émis par l'administration des douanes n'encourt pas la nullité, nonobstant l'inexactitude de la dénomination sociale de la demanderesse qui y est renseignée, dès lors que cette dernière ne conteste pas l'avoir reçu à l'adresse indiquée et qu'il est établi qu'elle a été dûment informée du fait générateur de la créance lors de la signification du procèsverbal de constatation d'infractions visé par l'AMR, mentionnant sa véritable dénomination sociale (en l'occurrence, MASSIS IMPORT EXPORT EUROPE) et non plus seulement son nom d'enseigne (MASSIS DISTRIBUTION). Aucune confusion de débiteurs n'est donc rendue possible.

Compte tenu de l'ensemble des motifs qui précèdent, l'AMR n° 2016/29 du 8 août 2016 sera déclaré régulier en la forme » (jugement, p. 8 et s.) ;

Alors que, de première part, en application du principe du respect des droits de la défense et du contradictoire, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaitre utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable ; qu'en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction applicable au litige, ce délai est fixé à 30 jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaitre la décision envisagées, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaitre ses observation dans le délai imparti ; que l'administration des douanes doit répondre à l'intéressé par une décision motivée sur les raisons pour lesquelles elle estime justifié le maintien de la décision lui faisant grief, et ce avant que ne soit dressé le procès-verbal de notification d'infractions, qui est précisément l'acte final faisant grief ; qu'en l'espèce, à l'avis de résultat de l'enquête du 7 juin 2016, la société Massis avait répondu par courrier du 1er juillet 2016, aux termes duquel elle remettait en cause point par point les conclusions de l'enquête qui lui avait été adressée ; que la cour d'appel a jugé que l'administration avait répondu à ce courrier du 1er juillet 2016, par courrier du 7 juillet 2016 dans un délai qui avait paru suffisant, de sorte que le respect du contradictoire avait été respectée ; qu'en statuant ainsi, cependant que le courrier du 7 juillet 2016 se bornait à indiquer de manière laconique que « les objections formulées ne sont pas de nature à remettre en cause les infractions ou la liquidation supplémentaire constatées par les enquêteurs de la IIème division d'enquête », de sorte qu'il ne pouvait s'agir d'une réponse motivée, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les droits de la défense et le principe du contradictoire et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Alors que, de deuxième part, en application du principe du respect des droits de la défense et du contradictoire, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaitre utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable ; qu'en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction applicable au litige, ce délai est fixé à 30 jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaitre la décision envisagées, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaitre ses observation dans le délai imparti ; que l'administration des douanes doit répondre à l'intéressé par une décision motivée sur les raisons pour lesquelles elle estime justifié le maintien de la décision lui faisant grief, et ce avant que ne soit dressé le procès-verbal de notification d'infractions, qui est précisément l'acte final faisant grief ; qu'en l'espèce, à l'avis de résultat de l'enquête du 7 juin 2016, la société Massis avait répondu par courrier du 1er juillet 2016, aux termes duquel elle remettait en cause point par point les conclusions de l'enquête qui lui avait été adressée ; que la cour d'appel a jugé que l'administration avait répondu à ce courrier du 1er juillet 2016, par courrier du 7 juillet 2016, puis de manière motivée dans le procès-verbal de notification d'infractions du 2 juillet 2016, de sorte que le respect du contradictoire avait été respectée ; qu'en statuant ainsi, cependant que l'administration n'avait répondu de manière motivée au courrier du 7 juillet 2016 que dans le procès-verbal de notification d'infractions du 21 juillet 2016 et non avant que ne soit dressé cet acte faisant grief, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les droits de la défense et du contradictoire et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Alors que, de troisième part, les droits de la défense et de l'égalité des armes impliquent que le redevable soit informé de toute discussion de l'administration des douanes avec un tiers qui serait de nature à modifier ses droits, obligations et recours éventuel ; qu'en l'espèce, en jugeant que le fait que la société Massis n'ait pas été associée aux échanges entre la DNRED et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane n'était pas de nature à entrainer la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l'émission de l'AMR du 8 août 2016, la cour d'appel a violé le principe du respect des droits de la défense ensemble celui de l'égalité des armes.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande en garantie de la société Massis à l'encontre de la société Fatton ;

Aux motifs que, « Il doit ensuite être relevé que la société Fatton verse aux débats la représentation en douane qui lui a été consentie par la société Massis Distribution à effet du 20 janvier 2009 qui mentionne qu'elle relève de la représentation directe conformément à l'article 5.2 1er alinéa du code des douanes communautaire. Il s'en déduit que la société Patton n'est pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l'article 201 3°) du même code. La société Massis Distribution est ainsi mal fondée à soutenir que la DNRED aurait vicié la procédure de contrôle en refusant sciemment de retenir la responsabilité financière, pénale et douanière de la société Transports Fatton alors qu'elle agissait comme « déclarant » et donc, inévitablement codébiteur de la dette douanière au regard du code des douanes communautaires et qu'en refusant d'appliquer la responsabilité solidaire de la société Transports Fatton, la DNRED s'est sciemment privée du droit de recouvrer la dette auprès du déclarant et donc débiteur de la dette douanière et aurait ainsi porté atteinte à la protection des intérêts financiers de l'Union européenne.

Si la société Massis Distribution n'a pas été associée aux échanges passés entre la DNRED et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane, cette circonstance n'est pas de nature à entraîner la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l'émission de l'AMR du 8 août 2016.

(?)

Ainsi que ci-dessus relevé, la société Patton (sic) est intervenue dans le cadre d'une représentation directe au sens de l'article 5-2 du code des douanes communautaire. Il s'en déduit que la société Patton (sic) n'est pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l'article 201 3°) du même code. La société Massis Distribution est ainsi mal fondée à appeler en garantie la société Patton (sic) » ;

Et par motifs des premiers juges, éventuellement adoptés :

« En application de l'article 331 du Code de procédure civile, un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d'agir contre lui à titre principal. Il peut également être mis en cause par la partie qui y a intérêt, afin de lui rendre commun le jugement.

Faisant valoir que la société TRANSPORTS P. FATTON a agi suivant le mode de représentation indirecte lors du dédouanement des marchandises litigieuses, la société MASSIS DISTRIBUTION sollicite du tribunal que cette dernière soit tenue de garantir la dette douanière et fiscale dont elle serait redevable.

S'opposant à ladite prétention, la SA TRANSPORTS P. FATTON soutient a contrario avoir agi suivant le mode de représentation directe, et fournit le mandat de représentation, signé le 20 janvier 2009, en vertu duquel elle tient ses seuls engagements à l'égard de la société MASSIS DISTRIBUTION pour l'accomplissement des formalités douanières.

Aux termes de l'article 5 paragraphes 1 et 2 du Code des douanes communautaires, toute personne peut se faire représenter auprès des autorités douanières pour l'accomplissement des actes et formalités prévus par la réglementation douanière. La représentation peut être directe, dans ce cas le représentant agit au nom et pour le compte d'autrui ou indirecte, dans ce cas le représentant agit en son nom propre, mais pour le compte d'autrui. Les Etats membres peuvent se réserver le droit de faire, sur leur territoire, des déclarations en douane selon soit la modalité de la représentation directe, soit celle de la représentation indirecte, de sorte que le représentant doit être un commissionnaire en douane y exerçant sa profession.

En cas de représentation indirecte, celui qui a déclaré en son nom propre demeure tenu solidairement avec celui pour le compte de qui il a effectué la déclaration de la dette douanière. Il en est autrement en cas de représentation directe.

En l'espèce, il est constant que la SA TRANSPORTS P. FATTON a procédé aux déclarations en douane des marchandises litigieuses en sa qualité de commissionnaire de transport agréé en douane, entre le 13 juillet 2012 et le 11 avril 2016.

II n'est pas non plus contesté qu'au cours de la période non prescrite du contrôle douanier, la société TRANSPORTS P. FATTON a effectué 41 déclarations sous le code de la représentation indirecte (code 3), et seulement 3 déclarations sous le code de la représentation directe (code 2).

Il est par ailleurs acquis qu'après avoir pris connaissance du mandat de représentation que lui a communiqué la SA TRANSPORTS P. FATTON le 1er juillet 2016 par courrier recommandé, la Douane a fait fi de ces déclarations quant à son habilitation, considérant qu'il s'agissait là d'une erreur purement matérielle et a abandonné toutes poursuites en recouvrement de la dette douanière à son encontre (sa pièce annexe n° 3).

La société MASSIS DISTRIBUTION fait alors grief à la Douane d'avoir mis fin à la procédure de recouvrement à l'encontre de la société TRANSPORTS P. FATTON, au motif que l'inexactitude des mentions contenues dans les déclarations en douane engage la responsabilité du déclarant considéré alors comme le débiteur de la dette douanière, en application des articles 101-1 des DAC, 95-3 du Code des douanes national et 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaires.

Sur ce point, s'il est en effet admis que l'exactitude des mentions contenues dans les déclarations en douane sont certifiées sincères et engagent comme tel la responsabilité du déclarant sur le fondement des textes visés par la demanderesse dans ses dernières conclusions, encore faut-il que ce dernier ait agi en son nom propre et pour le compte d'autrui, comme il s'agit en cas de représentation indirecte.

L'article 26 de l'arrêté du 22 décembre 1998, pris en application du Code des douanes et relatif aux personnes habilitées à déclarer les marchandises en détail et à l'exercice de la profession de commissionnaire en douane, rappelle en effet que si le commissionnaire en douane agit en son nom propre, il le fait en qualité de déclarant en douane. S'il agit au contraire au nom et pour le compte de la personne habilitée à déclarer en douane, il te fait en qualité de simple mandataire, et n'est donc de ce fait pas tenu de la dette douanière au sens de l'article 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaires qui dispose que le débiteur est le déclarant.

D'où la nécessité pour celui qui agit pour le compte d'autrui de préciser dans la déclaration en douane de quel type de représentation il s'agit. Pour autant, et contrairement aux procès-verbaux de constat qui font foi jusqu'à inscription en faux, la déclaration en douane ne fait foi que jusqu'à preuve contraire à l'égard des autorités douanières puisque la réglementation douanière autorise le représentant à la rectifier, voire même l'invalider, après acceptation de celle-ci par les autorités douanières en cas d'inexactitude ou erreur manifeste en application des articles 65 et 66 du Code des douanes communautaire. Ces textes semblent avoir été institués par le législateur pour combattre la simple présomption posée à l'article 5 paragraphe 4 du même code.

D'ailleurs, force est de constater en l'espèce que l'administration des douanes a changé de position en abandonnant les poursuites à l'égard de la société TRANSPORTS P. FATTON bien avant qu'un procès-verbal de constat d'infractions ne lui soit notifié, ceci sur présentation par cette dernière de son mandat de représentation par courrier recommandé du 1er juillet 2016 (pièce annexe n° 2 de la DNRED).

Il ressort ainsi de la lecture du mandat produit par la SA TRANSPORTS P. FATTON, à effet au 20 janvier 2009, que la société MASSIS IMPORT EXPORT EUROPE a donné pouvoir à "la société FATTON agréée n° A 2143 pour (la) représenter auprès de l'Administration des Douanes dans le cadre de la représentation directe conformément à l'article 5.2.1er alinéa du Code des Douanes Communautaire". Il précise également que ladite société est habilitée à "signer en (son) nom et pour (son) compte toutes déclarations de douane à l'importation et à l'exportation". En outre, ce même contrat renvoie expressément aux conditions générales de vente de la Fédération des Entreprises de Transport et Logistique de France (TLF) qui indique à l'article 6.6 que "Le commissionnaire en douane agréé dédouane sous le mode de la représentation directe, conformément à l'article 5 du Code des Douanes Communautaire" (sa pièce n° 1 et pièce annexe n° 2 de la DNRED).

Ce contrat n'ayant pas été remis en cause par les parties prenantes depuis sa signature, il constitue un fait social opposable erga omnes par opposition aux simples déclarations en douane dont ta force probante s'en trouve amoindrie.

Dans ces conditions, il est incontestable que la société TRANSPORTS P. FATTON a agi, non pas en qualité de représentant indirect mais au contraire en qualité de simple mandataire ou représentant direct, et n'est donc pas, de ce fait, tenue au paiement de la dette douanière en tant que coobligée au sens des dispositions de l'article 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaires, visées à tort par la demanderesse dans ses dernières conclusions.
Compte tenu de ce qui précède, il est donc établi que l'administration des douanes n'avait pas l'obligation de notifier la dette douanière au commissionnaire en douane dont la société MASSIS DISTRIBUTION est seule redevable, et à laquelle le commissionnaire n'est pas solidairement tenu.

D'ailleurs, l'administration des douanes ne formule aucune demande à l'encontre de société TRANSPORTS P. FATTON dans ses dernières écritures, et rappelle à juste titre qu'elle n'est saisie que de l'AMR n° 2016/29 qui a seulement été notifié à la société MASSIS DISTRIBUTION pour les mêmes raisons que celles précédemment exposées.

Dès lors, l'appel en garantie formé par la société MASSIS DISTRIBUTION ne peut être que rejeté, et la société TRANSPORTS P. FATTON, mise hors de cause » ;

Alors que, d'une part, le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motif ; qu'en l'espèce, la société Massis faisait régulièrement valoir dans ses conclusions d'appel que le contrat de mandat signé le 20 janvier 2009, la liant à la société Fatton et stipulant une représentation directe, avait fait l'objet d'une novation entre les parties, en un contrat de représentation indirecte (conclusions, pp. 40-41) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant, car de nature à justifier l'appel en garantie dirigée contre la société Fatton, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors que, d'autre part, la cassation entraine, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'en cassant l'arrêt attaqué, la Cour de cassation censurera l'arrêt rendu le 2 mars 2020 par la cour d'appel de Paris (RG n° 18/23083) ayant rejeté les demandes de fourniture de garanties relatives aux dettes douanières dont se trouve solidairement tenue la société Fatton avec la société Massis, et ce en application de l'article 625 du code de procédure civile. Moyen identique produit AUX POURVOIS PRINCIPAL ET INCIDENT n° E 20-17.334 par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Massis import export Europe et M. [B], pris en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Massis import export Europe.

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant débouté la société Massis et Me [B] es qualités de leur demande tendant à ce que la société Fatton fournisse des garanties pour le paiement de la dette douanière mise en recouvrement à hauteur de 6.845.983 euros ;

Aux motifs que, « Maître [T] [U]-Selarl 2metassociés, ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe doit être mise hors de cause puisque le jugement prononcé le 28 novembre 2018 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère qui a arrêté le plan de sauvegarde de la société Massis Import Export Europe a mis fin à ses fonctions.

Par arrêt prononcé ce jour (le 9 mars 2020, 18/23115) la cour d'appel de Paris a jugé que la société Patton était intervenue dans le cadre d'une représentation directe au sens de l'article 5-2 du code des douanes communautaire et qu'il s'en déduisait que la société Patton n'était pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l'article 201 3°) du même code. Il a été jugé que la société Massis Distribution était mal fondée à appeler en garantie la société Patton, l'arrêt confirmant le jugement déféré ayant mis hors de cause la Société Transports P. Fatton.

Il se déduit de cette décision que la société Massy Distribution est mal fondée à demander à la société Fatton de fournir des garanties relatives à sa dette douanière puisque la société Fatton n'y est pas tenue ; que le jugement déféré doit être confirmé » ;

Et par motifs éventuellement adoptés des premiers juges :

« Faisant valoir que la société TRANSPORTS P. FATTON était codébitrice solidaire de la dette douanière dont elle est redevable à hauteur de 6.845.983€ au titre de L'AMR 11 0 2016/29 du 8 août 2016, et ce en application de l'article 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaire, la société MASSIS DISTRIBUTION l'a assignée à jour fixe devant le tribunal de commerce de Lyon, par exploit d'huissier du 5 janvier 2017, afin qu'elle fournisse, sous astreinte, au comptable des douanes chargé du recouvrement une garantie pour suspendre l'exécution de l'AMR en attendant l'issue de la présente instance introduite par-devant le tribunal de céans par exploits du 26 décembre 2016.

Considérant les demandes formées identiques devant les deux juridictions, le tribunal de commerce de Lyon s'est déclaré incompétent au profit de la juridiction de céans par jugement rendu le 27 septembre 2017.

Ce jugement de renvoi a certes été confirmé en appel mais la Cour d'appel de Lyon a toutefois considéré que les deux procédures ne visaient pas le même objet. En effet, force est de constater que la présente instance vise à rechercher la responsabilité de la société TRANSPORTS P. FATTON en cas de condamnation prononcée à l'encontre de la demanderesse (instance ouverte sous le R.G. n° 17/01492), alors que la procédure devant la juridiction commerciale portait sur l'exigence au profit de MASSIS DISTRIBUTION d'une caution ou d'une autre garantie immédiate à fournir par cette dernière eu égard au caractère exécutoire constitué par l'AMR (instance ouverte sous le R.G. n° 18/01649).

A cela, il convient d'ailleurs de préciser que dans l'une ou l'autre de ces procédures, aucune faute n'est reprochée par la société MASSIS DISTRIBUTION à la société TRANSPORTS P. FATTON dans les déclarations effectuées ou, plus généralement, dans le cadre du mandat exercé par cette dernière. C'est exclusivement en sa qualité de commissionnaire en douanes ayant déclaré sous le régime de la représentation indirecte que sa responsabilité est recherchée ainsi que le souligne la demanderesse elle-même dans ses deux derniers jeux de conclusions qu'elle a versés concomitamment à la procédure par voie de notification par RPVA le 4 mai 2018.

La société MASSIS DISTRIBUTION n'a pas maintenu sa demande de garanties sous astreinte à l'encontre de la société TRANSPORTS P. FATTON dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA te 12/06/2018 dans la présente procédure ouverte sous le R.G. n° 18/01649, ni n'a repris cette demande à l'audience de plaidoiries qui s'est tenue le 25 juin 2018 devant la formation collégiale de la 3ème chambre civile du tribunal de grande instance de Créteil. Partant, elle est réputée avoir abandonnée ladite prétention sans qu'il y ait lieu pour le tribunal d'avoir à statuer sur celle-ci, étant rappelé qu'il s'agit d'une procédure orale et que le tribunal est tenu par les dernières écritures et les observations formées par le requérant à l'audience.

Surabondamment, il est rappelé que par jugement rendu le même jour dans l'affaire n° 17/1492, le tribunal a mis hors de cause la société TRANSPORTS P. FATTON dans le recouvrement de la dette douanière au motif que celle-ci a agi suivant le mode de représentation directe lors du dédouanement de la marchandise litigieuse, et que de ce fait elle n'est pas tenue au paiement de la dette douanière en tant que coobligée, au sens de l'article 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaires.

Or, l'action de la demanderesse qui consiste à contraindre la société TRANSPORTS P. FATTON à fournir une caution ou autres garanties sous astreinte, vise l'obtention d'un sursis de paiement auprès du comptable des douanes chargé du recouvrement de la créance douanière.

L'article 348 du Code des douanes prévoit en effet la possibilité pour le redevable de bénéficier d'un sursis à paiement. Toutefois, une telle mesure n'est rendue possible que sur autorisation de l'administration des douanes, après que celui-ci en a expressément formulé la demande dans sa contestation de l'AMR et qu'il a présenté des garanties suffisantes (sous la forme de caution, consignation, valeurs mobilières, affectations hypothécaires ou encore nantissements de fonds de commerce) destinées à assurer le recouvrement de la créance contestée.
En outre, si rien ne s'oppose à ce qu'un commissionnaire en douane acquitte les droits en lieu et place du débiteur, et, sur ce fondement, mette en place les garanties prévues par l'article 348 du code précité, encore faut-il que celui-ci ait pris volontairement l'engagement de le faire, d'une part, et que, d'autre part, le sursis au paiement de la dette soit accordé à l'importateur par l'administration des douanes. Tel n'est pas non plus le cas en l'espèce.

En effet, s'il est bien établi que la société MASSIS DISTRIBUTION a formulé une demande de sursis à paiement dans la lettre de contestation de l'avis de mise en recouvrement n° 2016/29 qu'elle adressait à la recette régionale des douanes le 24 août 2016 (sa pièce n° 7), elle ne rapporte pas la preuve que cette dernière a répondu favorablement à sa demande ni celle d'un éventuel engagement formellement pris par la société TRANSPORTS P. FATTON sur ta mise en place des garanties prévues par l'article 348 du Code des douanes.

En tout état de cause, l'article 348 alinéa 1 er du même code précise que le redevable peut être autorisé à différer le paiement de la créance jusqu'à l'issue du litige, donc avant que le tribunal n'ait statué sur le fond. Par conséquent, l'utilité de recourir à cette voie de recours ne présente plus aucun intérêt à ce stade de la procédure.

Cet unique moyen soulevé par les parties sera donc rejeté » (jugement, p. 5 et s.) ;

Alors que, la cassation entraine l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'en cassant l'arrêt rendu le 2 mars 2020 par la cour d'appel de Paris (RG n° 18/23115), dans le cadre du pourvoi n° C 20-17.332, du chef du dispositif ayant mis hors de cause la société Fatton, la Cour de cassation censurera l'arrêt attaqué ayant rejeté les demandes de fourniture de garanties relatives aux dettes douanières dont se trouve tenue la société Fatton, ensemble avec la société Massis, et ce en application de l'article 625 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20-17332;20-17334
Date de la décision : 04/01/2023
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 mars 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 jan. 2023, pourvoi n°20-17332;20-17334


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Spinosi, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:20.17332
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