La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/1990 | FRANCE | N°88-40189

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 décembre 1990, 88-40189


.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 7 décembre 1987), que M. X..., embauché le 19 mars 1975 en qualité de manutentionnaire par la société Helminger, a reçu, alors qu'il était salarié protégé, notification de son employeur, par lettre du 3 juillet 1985, qu'il prenait acte de la rupture de son contrat de travail, qui lui était imputable en raison de sa détention pour une durée non encore déterminée et le plaçait, de ce fait, dans l'impossibilité d'exécuter ledit contrat jusqu'à une date imprévisible ;

Attendu que la société

Mory TNTE, qui venait aux droits de la société Helminger, fait grief à l'arrêt d'avoir co...

.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 7 décembre 1987), que M. X..., embauché le 19 mars 1975 en qualité de manutentionnaire par la société Helminger, a reçu, alors qu'il était salarié protégé, notification de son employeur, par lettre du 3 juillet 1985, qu'il prenait acte de la rupture de son contrat de travail, qui lui était imputable en raison de sa détention pour une durée non encore déterminée et le plaçait, de ce fait, dans l'impossibilité d'exécuter ledit contrat jusqu'à une date imprévisible ;

Attendu que la société Mory TNTE, qui venait aux droits de la société Helminger, fait grief à l'arrêt d'avoir constaté la nullité du licenciement de M. X... et d'avoir condamné l'employeur à payer à ce dernier des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de licenciement ainsi qu'une somme au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile alors que, d'une part, les juges du fond sont tenus de s'expliquer sur la valeur et la portée des moyens dont ils sont saisis ; qu'en s'abstenant de répondre aux moyens selon lesquels la société faisait valoir, d'une part, qu'elle n'avait jamais invoqué la force majeure comme cause de rupture du contrat de travail, et que, d'autre part, la durée de l'incarcération de M. X... était indéterminée à la date où elle avait pris acte de l'inexécution par ce dernier de son contrat, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé, par suite, l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors que, d'autre part, la société n'a jamais soutenu que l'incarcération de M. X... était constitutive d'un cas de force majeure ; que, se fondant sur la règle dégagée par la jurisprudence de la Cour de Cassation, elle a invoqué une règle de droit selon laquelle la rupture du contrat de travail est imputable au salarié lorsque celui-ci fait l'objet d'une mesure d'incarcération de durée indéterminée, pour soutenir que le contrat était rompu ; qu'en énonçant que la société ne pouvait arguer de la force majeure, la cour d'appel a, par ces motifs adoptés, dénaturé les conclusions et par suite, statué en violation de l'article 1134 du Code civil ; alors qu'ensuite et en toute hypothèse, lorsque le salarié cesse d'exécuter son contrat de travail, à raison d'une mesure de détention dont la durée est indéterminée, la rupture de contrat lui est imputable ; qu'en se fondant sur la circonstance que l'absence du salarié n'était pas constitutive d'un cas de force majeure pour en déduire qu'elle n'était pas fondée à prendre acte de la rupture du contrat de travail imputable au salarié, la cour d'appel, qui se devait seulement d'apprécier si la mesure de détention était d'une durée indéterminée au moment où l'employeur a constaté la rupture, a, par motifs adoptés, violé l'article L. 122-4 du Code du travail ; alors que, de plus, lorsque le salarié cesse d'exécuter son contrat de travail, à raison d'une mesure de détention dont la durée est indéterminée, la rupture du contrat lui est imputable ; qu'en estimant que la société ne pouvait prendre acte de la rupture et l'imputer à son salarié dans la mesure où elle avait été de courte durée, la cour d'appel, qui devait seulement pour se prononcer, examiner si au moment où l'employeur constatait la rupture, la durée

de l'incarcération était ou non indéterminée, a violé l'article L. 122-4 du Code du travail ; alors qu'en outre, et en toute hypothèse, en se contentant de constater seulement que le 17 juin 1985, le père du salarié avait indiqué à la société Helminger, que son fils souhaitait prendre ses congés payés immédiatement, lesquels s'imputeraient sur la durée de la détention qui ne pouvait être que passagère, pour déclarer que la rupture ne pouvait être imputable au salarié, sans rechercher ou constater si, au moment où l'employeur a pris la décision de constater la rupture du contrat de travail, le 3 juillet 1985, la durée de la détention n'était pas indéterminée, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 122-4 du Code du travail ; alors qu'enfin, lorsque la rupture du contrat de travail est fondée sur l'absence du salarié et n'est pas imputable à l'employeur, laquelle entraîne de facto la cessation des fonctions représentatives de ce dernier au sein de l'entreprise, il n'y a pas lieu de mettre en oeuvre la procédure instituée par les articles L. 436-1 et R. 436-1 du Code du travail ; qu'en déclarant nul et de nul effet, le licenciement de M. X..., pour n'avoir pas été précédé de l'observation des formalités protectrices des représentants du personnel, la cour d'appel a violé ensemble, les articles L. 122-4, L. 436-1 et R. 436-1 du Code susvisé ;

Mais attendu que, sauf manifestation de volonté non équivoque du salarié de donner sa démission, le contrat de travail d'un salarié protégé ne peut être rompu que par un licenciement ; que la cour d'appel a jugé à bon droit que l'employeur ayant mis en oeuvre la procédure de licenciement à l'encontre de M. X... sans respecter les dispositions des articles L. 436-1 et R. 436-1 du Code du travail qui lui font obligation de solliciter préalablement l'autorisation de l'inspecteur du Travail et l'avis du comité d'entreprise, le licenciement du salarié était nul ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 88-40189
Date de la décision : 19/12/1990
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Salarié protégé - Mesures spéciales - Inobservation - Salarié détenu pour une durée indéterminée - Portée

REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Licenciement - Mesures spéciales - Inobservation - Salarié détenu pour une durée indéterminée - Portée

Un employeur ayant mis en oeuvre la procédure de licenciement à l'encontre d'un salarié protégé, en raison de sa détention pour une durée indéterminée, sans respecter les dispositions du Code du travail qui lui font obligation de solliciter préalablement l'autorisation de l'inspecteur du Travail, c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que le licenciement était nul.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 07 décembre 1987


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 déc. 1990, pourvoi n°88-40189, Bull. civ. 1990 V N° 686 p. 414
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1990 V N° 686 p. 414

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Cochard
Avocat général : Avocat général :M. Graziani
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Renard-Payen
Avocat(s) : Avocats :Mme Roue-Villeneuve, la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1990:88.40189
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award