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14/03/2019 | FRANCE | N°18-10379

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 mars 2019, 18-10379


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 octobre 2017), que la société civile immobilière les Terres chaudes Bella Vista (la SCI), propriétaire de lots dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, a assigné le syndicat des copropriétaires en annulation de l'assemblée générale du 21 juin 2010, en invoquant le non-respect du délai de convocation prévu à l'article 9 du décret du 17 mars 1967 ; qu'en appel, elle a subsidiairement sollicité l'annulation de quinze résolutions ;r>
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 octobre 2017), que la société civile immobilière les Terres chaudes Bella Vista (la SCI), propriétaire de lots dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, a assigné le syndicat des copropriétaires en annulation de l'assemblée générale du 21 juin 2010, en invoquant le non-respect du délai de convocation prévu à l'article 9 du décret du 17 mars 1967 ; qu'en appel, elle a subsidiairement sollicité l'annulation de quinze résolutions ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la demande en annulation de l'assemblée générale, alors, selon le moyen, que le copropriétaire qui a été convoqué hors délai à une assemblée générale peut en demander l'annulation sans justifier d'un grief, peu important qu'il ait voté pour certaines résolutions ; qu'en estimant que le fait que la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista ait voté pour plusieurs résolutions lors de l'assemblée générale attaquée lui interdisait de se prévaloir de la tardiveté de sa convocation pour demander l'annulation de l'assemblée, la cour d'appel a violé les articles 42 de la loi du 10 juillet 1965 et 9 du décret du 9 mars 1967 ;

Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation d'une assemblée générale dès lors qu'il a voté en faveur de certaines des décisions prises et constaté que la SCI avait voté en faveur de plusieurs résolutions lors de l'assemblée générale du 21 juin 2010, sans que la mention en page trois du procès-verbal selon laquelle elle précisait que l'assemblée générale était entachée d'illégalité en raison du non-respect du délai de convocation lui ait conféré la qualité d'opposant ou de défaillant à l'ensemble des décisions prises, la cour d'appel en a exactement déduit que la demande était irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article 566 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande en annulation de diverses décisions adoptées au cours de l'assemblée générale, l'arrêt retient que la demande est nouvelle, comme n'ayant pas été présentée en première instance, et a été formée après l'expiration du délai de deux mois ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la demande subsidiaire en annulation de quinze décisions n'était pas virtuellement comprise dans la demande en annulation de l'assemblée générale et, dans l'affirmative, sans constater que cette demande initiale avait été formée hors délai, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable la demande de la société civile immobilière les Terres chaudes Bella Vista en annulation des décisions 5, 6, 7, 10, 11, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 29, 30, 31, 35 adoptées lors de l'assemblée générale du 21 juin 2010, l'arrêt rendu le 19 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne le syndicat des copropriétaires le National aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires le National et le condamne à payer à la société civile immobilière les Terres chaudes Bella Vista la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Occhipinti, avocat aux Conseils, pour la société Les Terres Chaudes Bella Vista.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista irrecevable en sa demande principale tendant à l'annulation de l'assemblée générale des copropriétaires du 21 juin 2010

AUX MOTIFS QUE selon l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants. Il ressort de ce texte qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation en son entier d'une assemblée générale alors qu'il a voté en faveur de certaines résolutions, ainsi que l'a jugé récemment la cour de cassation dans un arrêt du 24 mars 2015. En l'espèce, la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista qui sollicite l'annulation de l'assemblée qui s'est tenue le 21 juin 2010 a néanmoins voté pour un certain nombre de résolutions, sans que la mention en page 3 du procès-verbal selon laquelle elle tient à préciser que l'assemblée est entachée d'illégalité parce que le délai de convocation n'a pas été respecté" lui donne la qualité d 'opposant ou défaillant à toutes les décisions prises. La SCI Les Terres Chaudes Bella Vista doit donc être déclarée irrecevable en sa demande principale. Subsidiairement, elle demande l'annulation des résolutions contre lesquelles elle a voté. Une telle prétention, qui au demeurant n'est pas motivée sur le fond, est nouvelle comme n'ayant pas été présentée en première Instance et a été formée après l'expiration du délai susdit de deux mois de sorte qu'elle est frappée d'irrecevabilité. Par ailleurs, l'action en justice de la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista ne peut constituer un abus de droit dès lors que sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet, et ce, quelles que soient les précédentes procédures déjà initiées par elle, et alors même, sur le fond, que le syndicat ne fournit pas les pièces permettant de vérifier si le délai de convocation a été respecté ;

ALORS QUE le copropriétaire qui a été convoqué hors délai à une assemblée générale peut en demander l'annulation sans justifier d'un grief, peu important qu'il ait voté pour certaines résolutions ; qu'en estimant que le fait que la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista ait voté pour plusieurs résolutions lors de l'assemblée générale attaquée lui interdisait de se prévaloir de la tardiveté de sa convocation pour demander l'annulation de l'assemblée, la cour d'appel a violé les articles 42 de la loi du 10 juillet 1965 et 9 du décret du 9 mars 1967.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista irrecevable en sa demande subsidiaire tendant à l'annulation des résolutions n° 5, 6, 7, 10, 11, 19 à 24, 29 à 31 et 35 adoptées par l'assemblée générale des copropriétaires du 21 juin 2010

AUX MOTIFS QUE selon l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants. Il ressort de ce texte qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation en son entier d'une assemblée générale alors qu'il a voté en faveur de certaines résolutions, ainsi que l'a jugé récemment la cour de cassation dans un arrêt du 24 mars 2015. En l'espèce, la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista qui sollicite l'annulation de l'assemblée qui s'est tenue le 21 juin 2010 a néanmoins voté pour un certain nombre de résolutions, sans que la mention en page 3 du procès-verbal selon laquelle elle tient à préciser que l'assemblée est entachée d'illégalité parce que le délai de convocation n'a pas été respecté" lui donne la qualité d 'opposant ou défaillant à toutes les décisions prises. La SCI Les Terres Chaudes Bella Vista doit donc être déclarée irrecevable en sa demande principale. Subsidiairement, elle demande l'annulation des résolutions contre lesquelles elle a voté. Une telle prétention, qui au demeurant n'est pas motivée sur le fond, est nouvelle comme n'ayant pas été présentée en première Instance et a été formée après l'expiration du délai susdit de deux mois de sorte qu'elle est frappée d'irrecevabilité. Par ailleurs, l'action en justice de la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista ne peut constituer un abus de droit dès lors que sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet, et ce, quelles que soient les précédentes procédures déjà initiées par elle, et alors même, sur le fond, que le syndicat ne fournit pas les pièces permettant de vérifier si le délai de convocation a été respecté ;

1°) - ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas déclarer qu'une demande est irrecevable comme nouvelle en appel sans provoquer la discussion des parties sur ce point ; que le syndicat n'a pas fait valoir que la demande d'annulation des résolutions contre lesquelles la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista avait voté était irrecevable comme nouvelle en appel ;
qu'en soulevant ce moyen sans avoir provoqué la discussion des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°) - ALORS QUE les juges du fond ne peuvent soulever un moyen d'office sans provoquer la discussion des parties sur ce point ; que le syndicat n'a pas fait valoir que la demande d'annulation des résolutions contre lesquelles la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista avait voté était irrecevable formée plus de deux mois après leur notification ; qu'en soulevant ce moyen sans avoir provoqué la discussion des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°) - ALORS QUE la demande d'annulation des résolutions contre lesquelles la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista avait voté était fondée sur l'irrégularité de la convocation de cette dernière ; qu'en énonçant que cette demande n'était pas motivée au fond, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la SCI Les Terres Chaudes Bella Vista, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;

4°) - ALORS QUE lorsqu'un copropriétaire demande l'annulation d'une assemblée générale dans son entier en raison d'un vice de procédure, il attaque implicitement mais nécessairement toutes les résolutions votées lors de celle-ci ; qu'en déclarant la demande d'annulation irrecevable pour avoir été formée hors du délai de deux mois prévu pour ce faire, sans constater que la demande d'annulation de l'assemblée elle-même était tardive, la cour d'appel a violé l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-10379
Date de la décision : 14/03/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

APPEL CIVIL - Demande nouvelle - Prétention virtuellement comprise dans la demande originaire - Vérification nécessaire

COPROPRIETE - Syndicat des copropriétaires - Assemblée générale - Annulation demandée - Convocation irrégulière ou absence de convocation - Prescription de l'action - Détermination

Ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l'article 42 de la loi n° 65-557du 10 juillet 1965, ensemble l'article 566 du code de procédure civile, une cour d'appel qui déclare irrecevable la demande en annulation de diverses décisions adoptées au cours d'une assemblée générale, sans rechercher si cette demande subsidiaire n'était pas virtuellement comprise dans celle en annulation de l'assemblée générale et, dans l'affirmative, sans constater que cette demande initiale avait été formée hors délai


Références :

Sur le numéro 1 : Article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965

article 9 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967


Sur le numéro 2 : article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, ensemble l'article 566 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19 octobre 2017

N1 Sur la recevabilité de l'action en nullité d'une assemblée générale, à rapprocher : 3e Civ., 7 septembre 2011, pourvoi n° 10-18312, Bull. 2011, III, n° 139 (cassation partielle).N2 Sur la notion de demande nouvelle en appel, à rapprocher : 3e Civ., 25 février 2016, pourvoi n° 14-29760, Bull. 2016, III, n° 32 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 mar. 2019, pourvoi n°18-10379, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP Caston

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:18.10379
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