LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant souverainement retenu que la chose cédée était constituée de lots à construire, relevé que vingt ans après le protocole du 10 février 1982, qui ne comportait aucune indication de l'emplacement des lots dans les différentes tranches à réaliser, le lotissement n'était toujours pas créé, et retenu, par motifs non critiqués, qu'après la signature de l'acte de vente de 1992, la commune, loin de mettre en cause la validité de cette vente, entendait obtenir la signature d'un acte complémentaire portant transfert sur la Société d'aménagement et d'exploitation de la Roque de la charge de l'engagement de cession et que les parties s'étaient rapprochées en vue de conclure une transaction permettant à la commune de recevoir l'indemnisation de la non réalisation de l'engagement de cession, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a pu en déduire que le protocole n'était pas un acte translatif de propriété ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la commune de Roquefort-les-Pins aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour la commune de Roquefort-les-Pins
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Commune de ROQUEFORT-LES-PINS de ses demandes tendant à voir constater la cession intervenue à son profit en conséquence d'un protocole d'accord du 10 février 1982 et à l'annulation d'une cession subséquente du 30 décembre 1992 ;
AUX MOTIFS QUE la Société SPADA, propriétaire de différentes parcelles exploitées à usage de carrière sur la Commune de ROQUEFORT-LES-PINS, pour une surface totale de 37 ha 50 a et 22 ca, a conclu avec cette dernière un protocole en date du 10 février 1982 aux termes duquel il était convenu qu'en contrepartie de l'obtention de l'autorisation d'augmenter de manière substantielle la production annuelle de la carrière (de 1.000.000 tonnes à 1.800.000 tonnes) grâce à un avis favorable émis par le maire de la commune, la Société SPADA prenait l'engagement ferme et irrévocable de céder gratuitement à la commune, en toute propriété, dans le délai de trois mois de l'achèvement complet de l'exploitation de la carrière, une portion de terrain fixée à 7 ha de la superficie planifiée, sous réserve de son classement en zone NA, la surface cédée étant ramenée à 4 ha dans le cas de non inscription du terrain dans cette zone ; que, suivant acte authentique en date du 30 décembre 1992, la SOCIETE D'AMENAGEMENT ET D'EXPLOITATION DE LA ROQUE (SAER) a acquis auprès de la Société SPADA un terrain sur la Commune de ROQUEFORT-LES-PINS d'une superficie de 44 ha 77 a 26 ca englobant les parcelles objets du protocole du 10 février 1982, moyennant le prix de 52.000.000 F, dans le but d'aménager une partie des terrains dans le cadre de l'extension de SOPHIA ANTIPOLIS, mais également d'exploiter un fonds de commerce de décharge ; que le financement de cette opération a été réalisé grâce à une ouverture de crédit de la LYONNAISE DE BANQUE à hauteur de 15.000.000 F et de la BPCA à hauteur de 16.500.000 F, lesquelles ont donné lieu à l'inscription d'hypothèques au profit des banques sur les biens ainsi acquis ; que la Commune de ROQUEFORT-LES-PINS demande à la Cour, à titre principal, de constater que la cession serait parfaite à son profit par l'effet du protocole du 10 février 1982 et d'ordonner en conséquence la réitération forcée devant notaire à l'effet de procéder à l'acte de cession, après avoir opéré mainlevée des inscriptions d'hypothèque grevant les parcelles à détacher ; que c'est cependant en vain que la Commune de ROQUEFORT-LES-PINS soutient que la cession prévue dans ce protocole serait parfaite au sens de l'article 1583 du Code civil et que la vente consentie au profit de la SAER en 1992 serait nulle comme conclue en violation du contrat de cession existant, l'acquéreur n'ayant pu, dit-elle, ignorer ce transfert de propriété, nonobstant le défaut de publicité du protocole à la Conservation des hypothèques ; que l'article 1583 du Code civil prévoit en effet que la vente est parfaite entre les parties et que la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ; que cela suppose que l'objet de la cession ait été déterminé ou soit déterminable, ce qui n'est pas le cas dans le protocole du 10 février 1982 puisque la chose cédée est constituée de lots de lotissements à créer, sur des terrains non encore constructibles, devant bénéficier d'une inscription en zone NA à définir, et sans aucune indication de leur emplacement dans les différentes tranches à réaliser ; qu'il est d'ailleurs justement fait observer que les modifications du POS permettant le changement de zonage des terrains n'ont été adoptées qu'en mars 2002, soit plus de vingt ans après la signature du protocole et que le lotissement n'est toujours pas créé ; que le protocole doit, en conséquence, s'analyser comme un engagement de faire et non comme un acte translatif de propriété ; qu'il doit être relevé à cet égard que les parties, y compris la Commune de ROQUEFORT-LES-PINS, avaient bien procédé à la même analyse juridique du protocole puisque, dans les suites de la signature de l'acte de vente par la Société SPADA à la SAER, la commune, loin de mettre en cause la validité de cette vente, entendait obtenir la signature d'un acte complémentaire portant transfert sur la SAER de la charge de l'engagement de cession pris par la Société SPADA ; que la même analyse a guidé les parties lorsqu'elles se sont également rapprochées, entre 1995 et 1997, en vue de conclure une transaction permettant à la commune de recevoir l'indemnisation de la non réalisation de l'engagement de cession ; qu'il était alors considéré que la vente de 1992 était intervenue sans qu'aient été repris les engagements pris par la Société SPADA à l'égard de la commune et que le non respect de cette obligation de faire justifiait le versement d'une indemnité dont le montant avait été soumis à l'avis du Service des domaines ; que, certes, les différents projets transactionnels n'ont pas été suivis d'effets, mais que leur lecture permet d'éclairer sur la nature et la portée du protocole de 1982 et de retenir qu'il comportait un engagement de faire à la charge de la Société SPADA mais qu'il ne valait pas acte de cession ; qu'il convient en conséquence de débouter la Commune de ROQUEFORT-LES-PINS de ses demandes formées à titre principal en réitération forcée de la cession de 7 ha à son profit et en annulation de la vente intervenue le 30 décembre 1992 au profit de la SAER (arrêt, p. 6 à 8) ;
1°) ALORS QUE la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ; qu'en écartant l'existence d'une cession qui aurait pu résulter du protocole d'accord du 10 février 1982 en tant que l'objet de la cession n'était pas déterminé ou déterminable et que ce protocole devait s'analyser comme un engagement de faire et non comme un acte translatif de propriété, tout en relevant que ledit protocole prévoyait la cession « d'une portion de terrain fixée à 7 ha de la superficie planifiée, sous réserve de son classement en zone NA, la surface cédée étant ramenée à 4 ha dans le cas de non inscription du terrain dans cette zone », la Cour d'appel a violé les articles 1583 et 1589 du Code civil ;
2°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; que, dans ses écritures d'appel, la Commune de ROQUEFORT-LES-PINS faisait notamment valoir que la cession intervenue le 30 décembre 1992 devait être annulée à raison de la fraude entachant cet acte, et ce par application du principe fraus omnia corrumpit ; qu'en ne répondant par aucun motif à ce moyen tiré de la fraude, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.