LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 juin 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 497 F-D
Pourvoi n° N 21-15.735
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 15 JUIN 2022
1°/ M. [J] [H],
2°/ Mme [F] [U], épouse [H],
domiciliés tous deux [Adresse 2], [Localité 1],
ont formé le pourvoi n° N 21-15.735 contre l'arrêt rendu le 1er mars 2021 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Galgon 2005, société civile de construction vente, dont le siège est [Adresse 5], [Localité 3],
2°/ à la société Omnium finance, société par actions simplifiée, dont le siège est 11 avenue Parmentier, [Localité 4],
3°/ à la société My money bank, société anonyme, dont le siège est [Adresse 7], [Localité 6], anciennement dénommée Ge money bank,
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Brun, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de M. et Mme [H], de Me Haas, avocat de la société Omnium finance, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Galgon 2005, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société My money bank, après débats en l'audience publique du 10 mai 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Brun, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 1er mars 2021), suivant contrat préliminaire du 1er juin 2006 et acte de vente en l'état futur d'achèvement du 12 décembe 2006, M. et Mme [H] (les acquéreurs) ont acquis de la société civile de construction-vente Galgon 2005 (la SCCV) une villa et un parking extérieur à titre d'investissement locatif bénéficiant d'un régime de défiscalisation.
2. Ils ont financé cette acquisition, proposée par le groupe Omnium, en souscrivant un emprunt auprès de la société My Money Bank (le prêteur).
3. Faute d'obtenir la défiscalisation espérée, M. et Mme [H] ont assigné la SCCV, la société Omnium finance et le prêteur en nullité de la vente pour dol, nullité du prêt et indemnisation.
Examen des moyens
Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen Enoncé du moyen
5. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de nullité de la vente, alors :
« 1°/ qu'en retenant, pour débouter les consorts [H] de leur action en nullité de la vente, que les documents remis à l'acheteur ne révèlent aucune exagération, sans rechercher, comme elle y était invité, si les époux [H] n'avait pas été trompés par les affirmations de la plaquette commerciale, laquelle, pour convaincre les acquéreurs potentiels d'investir, leur assurait une forte demande locative et un placement sûr et rentable à court terme permettant de constituer un patrimoine immobilier sécurisant, ne présentait pas l'investissement comme ayant une rentabilité garantie, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ qu'en retenant qu'aucune faute dolosive n'était démontrée quant au potentiel locatif de la villa, tout en relevant qu'en l'absence de location, le loyer de la maison des époux [H] avait dû subir une baisse de 8 %, et que la maison avait été louée durant 69 mois entre août 2008 et mai 2017, autrement dit qu'elle n'avait pas été louée pendant 43 mois, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3°/ que les juges sont tenus de procéder à une analyse, fût-elle sommaire, des pièces soumises à leur examen ; qu'en retenant que l'absence potentiel locatif de la villa n'était pas démontrée, sans avoir analysé même sommairement le courrier du 19 février 2010 adressé par la société Avantim aux époux [H], lequel énonçait que « depuis plusieurs mois, votre logement a été proposé à notre service commercial et malgré tous les moyens mis en oeuvre pour le promouvoir, presse écrite, publicité électronique partenariat, publicité radio, publipostage, celui n'a fait l'objet d'aucune réservation », alors que cette pièce démontrait une telle absence de potentiel, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ qu'en estimant qu'aucune tromperie sur la valeur du bien n'était caractérisée, motif pris que les acquéreurs ne démontraient pas que le prix de 192 870 € acquitté ne correspondait pas à la valeur du bien en 2006, eu égard à l'état du marché immobilier local, quand il appartenait à la SCCV Galgon 2005 de démontrer que le prix de vente correspondait au prix de marché, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause. » Réponse de la Cour
6. La cour d'appel a rappelé, à bon droit, que le dol s'appréciait à la date de la convention et que la charge de sa preuve pesait sur celui qui l'invoquait.
7. Elle a relevé que, si la plaquette commerciale remise aux acquéreurs, décrivant le programme proposé, la commune dans laquelle il était implanté et les possibilités fiscales offertes, présentait l'investissement comme « de qualité, dans un vignoble de renommée mondiale », offrant « aux investisseurs l'opportunité d'un placement idéal, sûr et rentable à court terme, gage d'un niveau de défiscalisation important, tout en constituant à long terme un patrimoine immobilier sécurisant », les acquéreurs avaient souscrit à une garantie « absence de locataire », n'avaient subi qu'une baisse de 8 % du loyer initialement prévu, avaient pu louer le bien soixante-neuf mois sur une période de cent cinq et le louaient depuis le 31 mai 2017.
8. Elle a souverainement retenu, d'une part, que les acquéreurs ne démontraient pas qu'à la date de la vente, le potentiel locatif sur la commune, où se situait leur bien, était déjà obéré ou en passe de l'être, ce potentiel étant soumis à des aléas et variations connus de tous, profane ou non, d'autre part, sans inverser la charge de la preuve, que les acquéreurs ne démontraient pas que la valeur du bien lors de la vente ne correspondait pas au prix qu'ils en avaient payé.
9. En l'état de ces énonciations et appréciations, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise et qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle écartait comme non probants, a pu en déduire que la preuve d'un dol n'était pas rapportée de sorte que la demande de nullité de la vente devait être rejetée.
10. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme [H] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [H]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. [J] [H] et Mme [F] [U] épouse [H] font grief à l'arrêt attaqué de les AVOIR déboutés de leur action en nullité de la vente.
ALORS DE PREMIERE PART QU'en retenant, pour débouter les consorts [H] de leur action en nullité de la vente, que les documents remis à l'acheteur ne révèlent aucune exagération, sans rechercher, comme elle y était invité (conclusions d'appel des exposants, p. 19, in limine), si les époux [H] n'avait pas été trompés par les affirmations de la plaquette commerciale, laquelle, pour convaincre les acquéreurs potentiels d'investir, leur assurait une forte demande locative et un placement sûr et rentable à court terme permettant de constituer un patrimoine immobilier sécurisant, ne présentait pas l'investissement comme ayant une rentabilité garantie, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
ALORS DE DEUXIEME PART QU'en retenant qu'aucune faute dolosive n'était démontrée quant au potentiel locatif de la villa, tout en relevant qu'en l'absence de location, le loyer de la maison des époux [H] avait dû subir une baisse de 8%, et que la maison avait été louée durant 69 mois entre août 2008 et mai 2017, autrement dit qu'elle n'avait pas été louée pendant 43 mois, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
ALORS DE TROISIEME PART QUE les juges sont tenus de procéder à une analyse, fût-elle sommaire, des pièces soumises à leur examen ; qu'en retenant que l'absence potentiel locatif de la villa n'était pas démontrée, sans avoir analysé même sommairement le courrier du 19 février 2010 adressé par la société Avantim aux époux [H] (pièce n°13 produite par les exposants), lequel énonçait que « depuis plusieurs mois, votre logement a été proposé à notre service commercial et malgré tous les moyens mis en oeuvre pour le promouvoir, presse écrite, publicité électronique partenariat, publicité radio, publipostage, celui n'a fait l'objet d'aucune réservation », alors que cette pièce démontrait une telle absence de potentiel, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
ALORS DE QUATRIEME PART QU'en estimant qu'aucune tromperie sur la valeur du bien n'était caractérisée, motif pris que les exposants ne démontraient pas que le prix de 192.870 € acquitté ne correspondait pas à la valeur du bien en 2006, eu égard à l'état du marché immobilier local, quand il appartenait à la SCCV Galgon 2005 de démontrer que le prix de vente correspondait au prix de marché, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
M. [J] [H] et Mme [F] [U] épouse [H] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables les demandes formées à l'encontre de la Sas Omnium Finance pour défaut de qualité à défendre ;
ALORS QU'en déclarant irrecevables les demandes à l'encontre de la Sas Omnium Finance pour défaut de qualité à défendre, sans avoir recherché, comme elle y était invitée, si l'un des trois associés de la Sccv Galgon 2005 était une société détenue à 100 % par l'associé unique Omnium Finance et si l'assurance locative avait été mise en place par cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
M. [J] [H] et Mme [F] [U] épouse [H] font grief à l'arrêt attaqué de les AVOIR déboutés de leurs demandes à l'encontre de la société My Money Bank ;
ALORS QUE la banque qui consent un prêt à un emprunteur non averti est tenue à son égard, lors de la conclusion du contrat, d'un devoir de mise en garde en considération des charges du prêt, de ses capacités financières et des risques d'endettement nés de l'octroi du prêt ; que le banquier doit prendre en compte le taux d'endettement des emprunteurs et l'évolution prévisible de leurs revenus ; qu'en rejetant la demande de dommages et intérêts des emprunteurs en relevant que la situation des exposants devait être appréciée à la date d'octroi du prêt, quand les emprunteurs faisaient valoir (conclusions d'appel, p. 26, § 5), que la durée de remboursement s'élevait à vingt-huit ans et que l'un d'eux sera à la retraite quand il restera encore au moins dix annuités à rembourser, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause.