LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la Caisse nationale de prévoyance assurances de ce qu'elle se désiste de son pourvoi dirigé contre la caisse régionale de Crédit agricole mutuel d'Aquitaine ;Attendu, selon l'arrêt attaqué, que pour garantir le remboursement de trois emprunts souscrits en 1993, 2006, et 2008 auprès du Crédit agricole mutuel d'Aquitaine, M. X... a adhéré à une assurance de groupe auprès de la Caisse nationale de prévoyance (l'assureur) garantissant, notamment, les risques d'incapacité temporaire totale, sauf affections rachidiennes, étant précisé que cette réserve ne s'appliquait pas en cas d'accident ; que victime, le 9 mai 2008, d'un accident du travail, pris en charge à ce titre par les organismes sociaux, M. X... a demandé à l'assureur sa garantie, telle que prévue au contrat ; Sur le premier moyen, tel que reproduit en annexe :Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le condamner à prendre en charge à hauteur de 50 % le prêt souscrit en 2008, et dans sa totale globalité celui souscrit en 2006 ;
Mais attendu que l'arrêt ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que l'affection litigieuse résulte directement de l'action soudaine d'une cause extérieure, la cour d'appel en a exactement déduit, sans dénaturation des documents de la cause, ni inversion de la charge de la preuve, qu'il s'agissait d'un accident au regard de la définition des conditions générales du contrat ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen : Vu l'article 1134 du code civil ; Attendu que pour condamner l'assureur à prendre en charge à hauteur de 50 % le prêt souscrit en 2008 et dans sa globalité celui souscrit en 2006, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés que M. X... se trouve, à la suite de l'accident, dans l'incapacité, reconnue médicalement, d'exercer son activité professionnelle d'une quelconque façon ; que le contrat ayant été souscrit lorsqu'il exerçait son activité de viticulteur, l'incapacité au sens du contrat devait être comprise comme celle qui empêchait l'assuré d'exercer cette profession ; que l'incapacité, définie contractuellement, est celle privant le souscripteur d'effectuer son activité professionnelle au jour du contrat ; que cette activité manuelle, dont la part administrative est secondaire, exige d'être en bonne condition physique ; que l'expert judiciaire est catégorique : M. X... ne peut pas se livrer à son activité professionnelle habituelle sur sa propriété ; Qu'en statuant ainsi, alors, selon la définition, claire et précise de l'état d'ITT, que la garantie de l'assureur n'était contractuellement acquise que si l'assuré était dans l'incapacité médicalement reconnue d'exercer une activité quelconque, la cour d'appel, qui a ajouté une restriction que la police ne prévoyait pas, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société CNP assurances à prendre en charge à hauteur de 50 % le prêt numéro 00049183855 et dans sa totalité le prêt numéro 36443999801 souscrit auprès de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel d'Aquitaine, l'arrêt rendu le 15 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour la Caisse nationale de prévoyance assurances.PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société CNP ASSURANCES à prendre en charge à hauteur de 50 % le prêt n° 00049183855 et dans sa totale globalité le prêt n° 36443999801 souscrits par M. Laurent X... auprès de la CRCAM d'AQUITAINE et ce, à compter du 10 août 2008 ;
AUX MOTIFS QUE comme l'a rappelé le premier juge, les contrats d'assurance litigieux garantissent les prêts souscrits auprès du crédit agricole en cas d'incapacité temporaire totale et invalidité totale et définitive, si ceux-ci ne résultent pas d'affections rachidiennes, cette réserve ne s'appliquant toutefois pas en cas d'accident, défini comme toute atteinte corporelle résultant directement de l'action soudaine d'une cause extérieure et non intentionnelle de l'assuré ;que M. X... demandant la prise en charge à ce titre des conséquences d'une affection rachidienne survenue, selon l'assuré, le 9 mai 2008 alors qu'il tentait d'atteler un outil à son tracteur, le premier juge a relevé à juste titre que le docteur Y... indiquait, dans un certificat du 10 avril 2009, avoir opéré M. X... des suites de cet accident, et que ce praticien certifiait que cette affection était sans relation avec la hernie discale opérée en 1998 ; que si l'expert judiciaire indique pour sa part que l'événement du 9 octobre (9 mai en réalité) « a eu un effet révélateur d'une pathologie préexistante » et qu'il « est bien difficile dans ces conditions de retenir l'hypothèse de l'action soudaine d'une cause extérieure » (p. 11 du rapport), il n'exclut pas pour autant de façon formelle que l'affection subie le 9 mai 2008 par l'assuré résulte d'un accident au sens du contrat ;qu'à cet égard, l'expert note par ailleurs que « l'accident du 9 mai 2008 a entraîné un lumbago aigu chez un homme qui avait déjà des antécédents de lombo sciatique datant de 1998, parfaitement guéris d'après ses déclarations (p. 8 du rapport) ;qu'il considère certes que le « long passé lombalgique » de M. X... vient « un peu » contredire les déclarations de l'assuré sur sa guérison et sur sa capacité d'effectuer toutes sortes d'efforts professionnels depuis l'opération pratiquée en 1998, mais précise cependant qu'il ne dispose d'aucune pièce médicale entre le mois d'octobre 1998 et la date du 9 juin 2008 (rapport p.9) de sorte qu'en définitive, les allégations de M. X... ne sont pas contredites objectivement par l'expertise ; que l'expert indique même en réponse à la question du Tribunal relative à l'existence de problèmes de santé préexistants à l'événement motivant l'expertise, que « les suites de la hernie discale opérée en 1998 n'interfèrent pas avec la pathologie lombaire symptomatique depuis 2008, et origine de l'incapacité actuelle » (rapport p. 11) ;que l'expert estime qu'à la lumière des antécédents lombalgiques de M. X..., « la cause externe est pour le moins venue déstabiliser une pathologie interne » et que « s'il y a eu accident, celui-ci n'a donc eu qu'un effet révélateur » (rapport p. 9) ; que cependant, comme l'objecte à juste titre le docteur Z... dans sa lettre du 6 mai 2010, une telle constatation conduit à considérer que l'arrêt de travail consécutif à l'atteinte corporelle du 9 mai 2008 résulte directement de l'action soudaine de la cause extérieure dont l'expert reconnaît ainsi implicitement l'existence ; qu'en effet, l'expert ne démontre ni même n'affirme qu'en l'absence de la contrainte résultant de l'effort de soulèvement déclaré par l'assuré, et dont il n'est pas contesté qu'elle ait provoqué l'affection qui est à l'origine de l'arrêt de travail, M. X... aurait nécessairement développé une telle pathologie en raison de son état de santé antérieure ; qu'il résulte donc de ces éléments, auxquels s'ajoute la prise en charge de l'affection au titre de la législation sur les accidents du travail, que l'affection litigieuse résulte directement de l'action soudaine d'une cause extérieure, de sorte que c'est à juste titre que le premier juge a estimé qu'il s'agissait d'un accident au regard de la définition des conditions générales du contrat » ;ET AUX MOTIFS QUE que les pièces produites par les parties rapportent l'engagement contractuel de CNP ASSURANCES à garantir les prêts souscrits par M. X... sous les références n° 3644399801 et 00049183855 des risques suivants : décès ou perte totale d'autonomie, incapacité temporaire totale et invalidité totale et définitive, si ceux-ci ne résultent pas d'affections rachidiennes ; que les contrats souscrits ont cependant précisé que cette dernière réserve ne s'appliquait pas en cas d'accident défini comme toute attente corporelle résultant directement de l'action soudaine d'une cause extérieure et non intentionnelle de l'assuré ;que M. X... a entendu faire valoir ces dispositions contractuelles à l'occasion d'un incident survenu le 9 mai 2008 au cours duquel, alors qu'il attelait une tondeuse à un tracteur, il a chuté suite à une violente douleur dorsale, entraînant un arrêt immédiat du travail en raison d'un lumbago très douloureux puis une intervention chirurgicale en août 2008 pour une arthrose lombaire ; qu'afin de vérifier si cette affection pouvait permettre d'ouvrir les droits à garantie, la présente juridiction a ordonné une expertise à laquelle il faut se référer, celle-ci reposant sur un examen minutieux de M. X..., et ayant motivé des conclusions qui, dans leur ensemble, ne font pas l'objet de critiques par les parties ; que l'incident souffert par M. X..., de nature rachidienne, a conduit l'expert à se prononcer sur deux éléments fondamentaux au regard du contrat d'assurance pour permettre de retenir l'accident ouvrant droit à indemnisation : - l'extériorité de la pathologie soufferte et sa soudaineté - la non intentionnalité que des pièces du dossier, il s'évince que la réalité de l'accident du travail est patente et confirmée par le certificat médical du docteur A... en date du 9 mai 2008. Sur cette base, M. B..., expert commis, affirme dans ses conclusions « il existait bien un état antérieur connu au moins depuis 1998 sans doute à l'origine d'un long passé de lombalgies. Les suites d'une hernie discale, opérée en 1998, n'interfèrent pas avec la pathologie lombaire symptomatique depuis 2008 et origine de l'incapacité actuelle » ; que l'expert souligne donc que les souffrances endurées sont en lien direct avec l'accident de mai 2008 et trouvent dans celui-ci une cause externe et soudaine à son actuelle pathologie, sans relation directe avec la pathologie soufferte dix années auparavant ;que le premier critère est donc rapporté ;que le second l'est tout autant car l'expert est formel sur ce point en indiquant : « il est certain que la lombalgie n'est pas d'origine intentionnelle » ; 1°) ALORS QUE l'affection de l'assuré ne résulte pas directement de l'action soudaine d'une cause extérieure lorsqu'elle trouve son origine dans les prédispositions de cet assuré plus que dans toute autre cause ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'expert avait clairement indiqué que l'événement du 9 mai 2008 n'a eu qu'un effet révélateur d'une pathologie préexistante de M. X... ; qu'en énonçant néanmoins que l'affection de M. X... avait un caractère accidentel, au sens de la définition contractuelle de l'accident, au motif que l'événement du 9 mai 2008 avait provoqué cette affection et qu'il n'est pas établi qu'il aurait nécessairement développé une telle pathologie en raison de son état de santé antérieur, la Cour d'Appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant les articles L. 113-5 du Code des assurances et 1134 du Code civil ; 2°) ALORS QUE l'expert judiciaire dans sa réponse au dire du docteur Z... avait clairement énoncé que : « La pathologie lombaire et la longue évolution sont bien d'origine interne avec aggravation des antécédents non pas de discopathie, mais d'instabilité lombaire avec spondyolisthésis déjà connu. Il est certain que sans pathologie préexistante, portant sur une instabilité vertébrale, la pathologie lombaire de M. X... n'aurait pas eu l'ampleur actuelle : le traumatisme initial était bénin, surtout chez un homme particulièrement charpenté. Les conséquences douloureuses et l'évolution prolongée ne peuvent s'expliquer que par une fragilité lombaire liée à l'état antérieur » ; qu'en énonçant néanmoins que l'arrêt de travail de M. X... consécutif à l'atteinte corporelle du 9 mai 2008 résulte directement de l'action soudaine de la cause extérieure dont l'expert reconnait ainsi implicitement l'existence, la Cour d'Appel a dénaturé par omission la réponse de l'expert au dire du docteur Z..., violant l'article 1134 du Code civil ; 3°) ALORS QUE dès lors que le caractère accidentel de l'affection constitue une des conditions d'acquisition de la garantie, il appartient à celui qui réclame le bénéfice de la garantie d'établir que sont remplies les conditions requises par le contrat d'assurance pour que joue cette garantie ; qu'en énonçant que l'affection de M. X... résultait directement de l'action soudaine d'une cause extérieure, au motif que l'expert ne démontre pas que sans l'événement du 9 mai 2008, M. X... aurait nécessairement développé avec telle pathologie, la Cour d'Appel a renversé la charge de la preuve, violant l'article 1315 du Code civil ; 4°) ALORS QUE l'appréciation du caractère accidentel d'une atteinte corporelle de l'assuré doit être effectuée par rapport à la seule stipulation contractuelle définissant la notion d'accident dans le contrat d'assurance de personne ; qu'en se fondant sur la prise en charge de l'affection de M. X... au titre de la législation sur les accidents du travail, pour conforter sa décision selon laquelle cette affection était bien d'origine accidentelle, la Cour d'Appel a violé les articles L. 113-5 du Code des assurances et 1134 du Code civil ; 5°) ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QU'une atteinte corporelle ne présente pas un caractère accidentel si par son action, l'assuré en est pour tout ou partie à l'origine ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que c'est la contrainte résultant de l'effort de soulèvement déclaré par M. X... qui a provoqué son affection ; qu'en énonçant néanmoins que cette affection avait un caractère accidentel, la Cour d'Appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant les articles L. 113-5 du Code des assurances et 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société CNP ASSURANCES à prendre en charge à hauteur de 50 % le prêt n° 00049183855 et dans sa totale globalité le prêt n° 36443999801 souscrits par M. Laurent X... auprès de la CRCAM d'AQUITAINE et ce, à compter du 10 août 2008 ;AUX MOTIFS QUE « Répondant à la question du tribunal sur l'incapacité résultant pour M. X... de l'accident, l'expert a indiqué que « actuellement, du fait de ses lombalgies, M. X... (était) totalement incapable de se livrer à son activité professionnelle habituelle qui (imposait) des contraintes rachidiennes » et que « la seule activité à laquelle il (pouvait) se livrer (était) d'ordre intellectuel : surveillance, administration, à condition de pouvoir changer fréquemment de position » (rapport p. 12) ; qu'il ne résulte pas de ces conditions que M. X... soit atteint d'une invalidité totale et définitive (ITD) au sens des conditions générales du contrat garantissant cet état d'invalidité ; qu'il en résulte en revanche que M. X... se trouve, à la suite de l'accident, dans l'incapacité, reconnue médicalement, d'exercer son activité professionnelle d'une quelconque façon, le premier juge ayant considéré à juste titre que le contrat ayant été souscrit lorsqu'il exerçait son activité de viticulteur, l'incapacité au sens du contrat devait être comprise comme celle qui empêchait l'assuré d'exercer cette profession ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. B... a dû également se prononcer sur l'invalidité de M. X... ; qu'il indique, dans ses conclusions, que M. X... est incapable de se livrer à son activité professionnelle habituelle qui impose des contraintes rachidiennes ; que la seule activité possible est de nature intellectuelle ; que la société CNP ASSURANCES veut trouver dans cette analyse, qui laisse au patient la possibilité d'exercer une activité intellectuelle de direction ou d'administration, la non démonstration d'une incapacité totale temporaire ou définitive et par suite une cause d'exclusion au droit à garantie ;que ce moyen sera écarté car l'incapacité telle que définie contractuellement doit s'analyser comme était celle privant le souscripteur d'effectuer son activité professionnelle au jour du contrat ; qu'en l'espèce, M. X... a souscrit cette assurance pour les risques d'invalidité à l'occasion de sa profession de viticulteur ; que cette activité manuelle, dont la part administrative n'est que secondaire, exige de son titulaire d'être en bonne condition physique ; que l'expert judiciaire est catégorique : M. X... ne peut pas se livrer à son activité professionnelle habituelle sur sa propriété ; que les conditions d'accès à l'assurance étant réunies, c'est donc à bon droit que M. X... entend obtenir la mise en oeuvre du contrat de garantie des deux prêts contractés ; ALORS QUE le contrat d'assurance définit l'état d'I.T.T. de l'assuré, notamment lorsque « il se trouve à la suite d'un accident ou d'une maladie, dans l'incapacité, reconnue médicalement, d'exercer une activité quelconque, professionnelle ou non, même à temps partiel » ; qu'en affirmant que le contrat ayant été souscrit lorsque M. X... exerçait son activité de viticulteur, l'incapacité au sens du contrat devait être comprise comme celle qui empêchait l'assuré d'exercer cette profession, la Cour d'Appel a dénaturé la clause claire et précise définissant l'I.T.T. du contrat d'assurance, violant l'article 1134 du Code civil.