LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 juin 2020
Cassation partielle
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 555 F-D
Pourvoi n° U 17-24.189
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 JUIN 2020
La société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° U 17-24.189 contre l'arrêt rendu le 18 mai 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (2e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société [...], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] ,
2°/ à M. D... H..., domicilié [...] ,
3°/ à la société Massif marine, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] ,
4°/ à la société FHB, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, prise en la personne de M. G... R..., domicilié [...] , ès qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Massif marine,
5°/ à M. M... O..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Massif marine,
6°/ à M. T... K..., domicilié [...] , dont le siège est [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société [...],
défendeurs à la cassation.
Les sociétés [...] et Massif marine ont formé, chacune, un pourvoi incident contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
La société [...], demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
La société Massif marine, demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Touati, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Axa France IARD, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société [...], de Me Carbonnier, avocat de M. H..., de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Massif marine et de MM. R... et O..., ès qualités, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Touati, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 mai 2017), la société [...], constructeur de bateaux, assurée pour sa responsabilité civile par la société Axa France IARD (la société Axa), a vendu à la société Massif marine un voilier que cette dernière a ensuite vendu à M. H....
2. M. H..., ayant constaté, lors d'une navigation, la présence d'eau à l'intérieur du voilier qui lui avait été livré le 21 juillet 2010, en a informé au mois de février 2011 la société Massif marine, dont l'expert a conclu à un vice dans la conception et la réalisation de la liaison entre la coque et la quille du bateau.
3. La société [...] a été placée en liquidation judiciaire, le 14 décembre 2010, et M. K... a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire. Le 18 janvier 2011, un plan de cession de la société a été arrêté au bénéfice de la société Z... avec clause de substitution au profit de la société [...], qui s'est engagée à reprendre le service après-vente de la société [...].
4. Après avoir obtenu en référé l'organisation d'une expertise destinée à déterminer la cause et l'imputabilité des désordres affectant son bateau, M. H... a assigné la société Massif marine et son assureur, la société Groupama, devenue Helvetia, et sollicité la résolution de la vente du voilier ainsi que leur condamnation à lui rembourser le prix de vente de 200 684,12 euros et à lui payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts.
5. La société Massif marine a alors assigné en garantie la société Axa, assureur de la société [...].
Examen des moyens
Sur les troisième et quatrième branches du moyen unique du pourvoi principal de la société Axa, les trois moyens du pourvoi incident de la société [...] et le moyen unique du pourvoi incident de la société Massif marine, ci-après annexés
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur la première branche du moyen unique du pourvoi principal de la société Axa
Enoncé du moyen
7. La société Axa fait grief à l'arrêt de la condamner in solidum avec la société Massif marine à payer à M. H... la somme de 200 684,17 euros HT, sous déduction de la franchise contractuelle de 10 000 euros, celle de 133 084,49 euros, ainsi que celle de 60 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de la condamner à relever et garantir la société Massif marine des condamnations prononcées à son encontre au profit de M. H..., à l'exception de la franchise restant à la charge de cette société, et de la condamner à payer la somme de 2 000 euros à cette dernière au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens de première instance et d'appel comprenant les frais d'expertise judiciaire, alors « que lors de la résolution d'une vente, la restitution du prix reçu par le vendeur est la contrepartie de la remise de la chose par l'acquéreur et qu'ainsi, seul celui auquel la chose est rendue doit restituer à celui-ci le prix qu'il en a reçu ; que la restitution du prix ne constitue pas un préjudice indemnisable ; qu'en l'état d'une action rédhibitoire exercée par l'acquéreur final contre le vendeur intermédiaire, seul ce dernier peut être condamné à restituer le prix et est concerné par la remise de la chose, et l'assureur du vendeur initial ne peut être condamné à restituer le prix ou à garantir le vendeur intermédiaire ; qu'en l'espèce, la société Axa France IARD rappelait dans ses écritures qu'en qualité d'assureur responsabilité civile de la société [...], fabricant et vendeur initial du bateau, elle ne pouvait être condamnée, à la suite de la résolution de la vente entre la société Massif Marine et M. H..., à restituer à M. H... le prix de la vente puisqu'il incombait à la société Marine Massif, venderesse, seule, de restituer le prix de vente perçu ; que la cour d'appel a relevé que la société Axa France IARD était seulement assureur de responsabilité civile et que M. H... était fondé à obtenir la restitution du prix de son vendeur ; qu'en relevant ces éléments et en condamnant néanmoins la société Axa France IARD à payer à M. H... la somme de 200 684,17 euros HT au titre du prix d'acquisition du bateau, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil et l'article 1644 du même code dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 et l'article 1644 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause :
8. Selon le premier de ces textes, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Il résulte du second que, dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
9. L'arrêt, après avoir relevé que l'expert judiciaire avait mis en évidence des malfaçons et des non façons de fixation de la quille du bateau, et conclu qu'il s'agissait d'un désordre majeur affectant la solidité de celui-ci, qui ne répondait pas en l'état à l'usage auquel il était destiné, retient que la société [...] est responsable de l'ensemble des malfaçons de ce bateau.
10. L'arrêt rappelle ensuite qu'il résulte de l'article L. 124-3 du code des assurances que la victime d'un sinistre dispose d'un droit propre sur l'indemnité dont, en vertu du contrat d'assurance, l'assureur est tenu envers l'assuré.
11. Il retient enfin que, selon les dispositions non contestées du contrat d'assurance souscrit par la société [...], la garantie s'applique « contre les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant lui incomber en raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers y compris les clients (...) notamment du fait (
) Responsabilité civile après livraison / réception des travaux ou exécution des prestations : - [d'un défaut d'un bien livré résultant soit d'un vice de matière, soit] d'une erreur dans sa conception, sa préparation, sa fabrication, sa transformation (...) ».
12. En statuant ainsi, alors que la restitution du prix par le vendeur à la suite de la résolution de la vente ne constitue pas un préjudice indemnisable, en sorte que l'assureur de la société [...] ne pouvait, à la suite de la résolution de la vente conclue entre la société Massif Marine et M. H..., être condamné à payer à ce dernier une somme incluant le remboursement du prix du navire, et à garantir la société Massif Marine de cette condamnation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen unique du pourvoi principal, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Axa France IARD à payer à M. H... les sommes de 200 684,17 euros HT et de 133 084,49 euros, ainsi que celle de 60 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il la condamne à relever et garantir la société Massif marine des condamnations prononcées à son encontre au profit de M. H..., à l'exception de la franchise restant à la charge de la société Massif marine, et en ce qu'il la condamne à payer la somme de 2 000 euros à la société Massif marine au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens de première instance et d'appel comprenant les frais d'expertise judiciaire, l'arrêt rendu le 18 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;
Condamne la société [...], la société Massif marine, M. H..., et M. K..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société [...], aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum la société [...], la société Massif marine, et M. K..., ès qualités, à payer la somme globale de 3 000 euros à la société Axa France IARD ; rejette les autres demandes.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq juin deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif d'Avoir condamné in solidum la société Axa France Iard, sous déduction de la franchise de 10.000 euros, et la société Massif Marine à indemniser le préjudice de M. H... soit la somme de 200.684,17 euros HT outre intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2013, la somme de 133.084,49 euros avec intérêts à compter de l'arrêt, la somme de 60.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, d'Avoir condamné la société Axa France Iard à relever et garantir la société Massif Marine des condamnations prononcées à son encontre au profit de M. H... à l'exception de la franchise contractuelle restant à la charge de la société Massif Marine, d'Avoir condamné la société Axa France Iard à payer à la société Massif Marine la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et d'Avoir condamné la société Axa France Iard aux dépens de première instance et d'appel qui comprenaient les frais d'expertise judiciaire ;
AUX MOTIFS QUE sur la garantie de la société Axa France Iard, selon les dispositions du contrat responsabilité civile non contestées par l'assureur l'objet de cette garantie responsabilité civile vise « la garantie s'applique, dans la limite des sommes fixées par ailleurs et sous réserve des seules exclusions énumérées ci-après, contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant lui incomber en raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers y compris les clients du fait de l'exercice des activités garanties par le présent contrat y compris après livraison/réception des travaux ou exécution des prestations et notamment du fait des cas prévus ci-après : Responsabilité civile pendant l'exécution (
) des travaux ou prestations effectués dans le cadre des activités Responsabilité civile après livraison / réception des travaux ou exécution des prestations – d'un défaut d'un bien livré résultant soit d'un vice de matière, soit d'une erreur dans sa conception, sa préparation, sa fabrication, sa transformation, son stockage, son conditionnement, sa présentation, ses instructions d'emploi ou sa livraison – d'un défaut de sécurité du produit livré ou la prestation fournie, d'un défaut de conseil lors de la vente – d'un défaut dans la conception ou l'exécution de travaux ou de prestations effectués dans le cadre de ses activités » ; que la société d'assurance invoque des exclusions de garanties lesquelles sont opposables aux tiers bénéficiant de l'action directe ; que selon le dernier alinéa de l'article L 122-4 du code des assurances « les clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents » ; qu'il résulte de l'article L. 113-1 du code des assurances qu'il appartient à l'assureur qui invoque des clauses d'exclusion de rapporter la preuve que celles-ci ont été portées à la connaissance de l'assuré ; que la société Axa France Iard reconnaît que lors de la signature du contrat par la société [...] n'ont été visées au titre des conditions particulières que les conditions générales 460645 D qui concernent les conditions générales multirisques de l'entreprise », mais nullement les « conditions générales responsabilité civile entreprises référence 460642 B ; que dès lors qu'ont été remises à l'assuré des conditions générales qui ne correspondent pas à la police souscrite et même si des exclusions figurent dans ces conditions générales, l'assureur ne peut s'y référer ; qu'en conséquence, en application de l'article précité, la société Axa France Iard ne peut se prévaloir des exclusions de garanties, non portées à la connaissance de l'assuré et doit prendre en charge l'ensemble des conséquences du sinistre telles que définies au contrat, sauf franchise contractuelle de 10.000 euros, somme restant à la charge de l'assuré ; que la société Axa France Iard est condamnée in solidum avec la société Massif Marine à indemniser le préjudice de M. H... soit la somme de 200.684,17 euros HT, outre intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2013, la somme de 133.084,49 euros avec intérêts à compté de l'arrêt qui est attributif de droits ; qu'l convient de condamner in solidum la société Axa France Iard et la société Massif Marine à payer à M. H... une somme de 60.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que la société Axa France Iard est aussi condamnée à relever et garantir la société Massif Marine de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre sauf à déduire la franchise contractuelle de 10.000 euros qui restera à la charge de la société Massif Marine; que la demande présentée au titre des frais irrépétibles par la société Axa France Iard est rejetée ; que la société Axa France Iard est condamnée à payer à la société Massif Marine une somme de 2.000 euros ; que du fait de la résolution de la vente, M. H... est fondé d'obtenir de son vendeur la restitution du prix d'acquisition du bien, soit la somme de 200.684,17 euros HT, outre intérêts au taux légal à compter de la date d'assignation soit le 10 janvier 2013 ; que M. H... produit aux débats les factures pour l'achat de matériel nécessaire à la navigation, pour total de 28.908,05 euros ; que ce matériel étant devenu sans objet du fait de la résolution du contrat il est fondé à en demander le remboursement ; que de même il est fondé à obtenir la somme de 5.574,27 euros au titre des frais exposés en raison de son escale forcée au Cap-Vert du fait du risque de chavirement que présentait le navire ; que M. H... établit la perte de l'avitaillement du navire du fait de l'interruption du voyage, soit un montant de 1.000 euros, ses frais de rapatriement à Tahiti, son lieu de résidence pour un montant de 2.447,43 euros, -les frais d'assurance du voilier pendant l'immobilisation de celui-ci soit un montant total de 7.580,66 Euros, de août 2011 à août 2016, les frais de dépose de la quille facturés par la société [...] pour la réunion d'expertise du 29 juin 2012 soit un montant de 574,08 euros, le préjudice lié au congé sans solde pour convoyer le bateau, voyage qui n'a pas abouti : 10.000 euros ; que le préjudice matériel est fixé à la somme de (28908.05 + 5574.27 + 1000 + 2447.43 + 7580 + 574.08 + 10000) = 56.084,49 euros ; qu'il convient de rappeler que M. H..., qui après une escale aux îles Canaries, entreprenait la traversée de l'Atlantique vers la Martinique a constaté la présence d'eau de mer dans la cale, puis après assèchement a découvert des fissures le long d'une varangue et de l'empreinte de la quille ; qu'il s'est aperçu que la quille bougeait, provoquant la déformation de la coque à chaque mouvement du bateau et que de l'eau de mer pénétrait en grande quantité par les fissures, ce qui l'a contraint à rejoindre le Cap-Vert ; qu'il ne peut être contesté que cette voie d'eau n'a pu que fortement inquiéter M. H..., dont le voilier risquait de chavirer, ce qui lui a engendré un préjudice moral qui sera réparé par l'allocation d'une somme de 10.000 euros ; qu'au titre du préjudice de jouissance, il est constant que M. H... ne peut utiliser son navire depuis le jour du sinistre ; qu'il justifie que depuis 1989, il a toujours habité à bord des voiliers dont il a été successivement propriétaire ; qu'il produit des quittances de loyer pour un appartement qu'il a dû louer pour une somme de 922 euros par mois ; qu'en retenant une durée de 72 mois, le préjudice de jouissance est fixé à la somme de 67.000 euros ; qu'il convient de condamner la société Massif Marine à payer à M. H... la somme de 200.684,17 euros HT, outre intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2013 et la somme de 133.084,49 euros avec intérêts à compter de l'arrêt ;
ALORS DE PREMIERE PART QUE lors de la résolution d'une vente, la restitution du prix reçu par le vendeur est la contrepartie de la remise de la chose par l'acquéreur et qu'ainsi, seul celui auquel la chose est rendue doit restituer à celui-ci le prix qu'il en a reçu ; que la restitution du prix ne constitue pas un préjudice indemnisable ; qu'en l'état d'une action rédhibitoire exercée par l'acquéreur final contre le vendeur intermédiaire, seul ce dernier peut être condamné à restituer le prix et est concerné par la remise de la chose, et l'assureur du vendeur initial ne peut être condamné à restituer le prix ou à garantir le vendeur intermédiaire ; qu'en l'espèce, la société Axa France Iard rappelait dans ses écritures qu'en qualité d'assureur responsabilité civile de la société [...], fabricant et vendeur initial du bateau, elle ne pouvait être condamnée, à la suite de la résolution de la vente entre la société Massif Marine et M. H..., à restituer à M. H... le prix de la vente puisqu'il incombait à la société Marine Massif, venderesse, seule, de restituer le prix de vente perçu ; que la cour d'appel a relevé que la société Axa France Iard était seulement assureur de responsabilité civile et que M. H... était fondé à obtenir la restitution du prix de son vendeur ; qu'en relevant ces éléments et en condamnant néanmoins la société Axa France Iard à payer à M. H... la somme de 200.684,17 euros HT au titre du prix d'acquisition du bateau, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil et l'article 1644 du même code dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
ALORS DE DEUXIEME PART QUE, en toute hypothèse, lors de la résolution d'une vente, la restitution du prix reçu par le vendeur est la contrepartie de la remise de la chose par l'acquéreur et qu'ainsi, seul celui auquel la chose est rendue doit restituer à celui-ci le prix qu'il en a reçu ; que la restitution du prix ne constitue pas un préjudice indemnisable ; qu'en l'état d'une action rédhibitoire exercée par l'acquéreur final contre le vendeur intermédiaire, seul ce dernier peut être condamné à restituer le prix et est concerné par la remise de la chose, et l'assureur du vendeur initial ne peut être condamné à restituer le prix ou à garantir le vendeur intermédiaire ; qu'en l'espèce, la société Axa France Iard rappelait dans ses écritures qu'en qualité d'assureur responsabilité civile de la société [...], fabricant et vendeur initial du bateau, elle ne pouvait être condamnée, à la suite de la résolution de la vente entre la société Massif Marine et M. H..., à restituer à M. H... le prix de la vente puisqu'il incombait à la société Marine Massif, venderesse, seule, de restituer le prix de vente perçu ; que la cour d'appel a relevé que la société Axa France Iard était seulement assureur de responsabilité civile et que M. H... était fondé à obtenir la restitution du prix de son vendeur ; qu'en relevant ces éléments et en condamnant néanmoins la société Axa France Iard à payer à M. H... la somme de 200.684,17 euros HT au titre du prix d'acquisition du bien et en mettant ainsi en oeuvre un contrat d'assurance de responsabilité sans rechercher si ce contrat d'assurance garantissait, pour le cas de résolution de la vente pour vice caché, la restitution du prix, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE le juge doit s'abstenir de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que la société Axa France Iard reconnaissait « que lors de la signature du contrat par la société [...] n'[avaient] été visées au titre des conditions particulières que les conditions générales 460645 D qui concernent les « conditions générales multirisques de l'entreprise », mais nullement les « conditions générales responsabilité civile entreprises » référence 460642 B » pour en déduire dès lors que « la société Axa France Iard ne [pouvait] se prévaloir des exclusions de garanties non portées à la connaissance de l'assuré » ; qu'en statuant ainsi, tandis que la société Axa France Iard n'avait jamais reconnu dans ses écritures qu'elle n'avait pas porté à la connaissance de son assuré les conditions générales applicables à son contrat, mais seulement que le numéro des conditions générales responsabilité civile avait omis d'être mentionné dans les conditions particulières (ccl d'Axa, point n°23), la cour d'appel a dénaturé les écritures de la société Axa France Iard et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS DE QUATRIEME ET DERNIERE PART QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; qu'en l'espèce, la société Axa France Iard faisait valoir que, s'agissant du poste préjudice de jouissance, M. H... s'était logé à titre gratuit à Tahiti (ccl d'Axa, point n°27), ce que M. H... reconnaissait dans ses écritures (conclusions de M. H..., points n°140 et 141 : hébergement gratuit entre le 6 février 2011 et le 25 février 2013 location d'un appartement à compter du 25 septembre 2013) ; que pour allouer à M. H... la somme de 67.000 euros au titre du préjudice de jouissance, la cour d'appel a retenu qu'il produisait des quittances de loyer pour l'appartement qu'il avait dû louer, pour une somme de 922 euros par mois, et qu'il convenait de retenir une durée de 72 mois ; qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions de la société Axa France Iard qui faisait valoir que M. H... « s'était logé sans bourse délier », ce qui était reconnu par M. H..., de sorte que 72 mois ne pouvaient être retenus, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Moyens produits AU POURVOI INCIDENT par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société [...].
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société [...] de sa demande en paiement des frais de gardiennage du navire qui lui a été confié en tant que dirigée à titre principal contre M. D... H... ;
AUX MOTIFS QUE « par application de l'article 1184 du code civil, la résolution du contrat entraîne son anéantissement et la remise des choses en l'état antérieur, et M. H... n'a donc jamais été propriétaire du navire qui dès lors est resté la propriété de la société [...] cessionnaire des droits du constructeur dans le cadre du service aprèsvente ; qu'en conséquence, le fait que le bateau ait été remisé sur le site de la société [...], cessionnaire de la société [...], responsable de l'ensemble des malfaçons du navire, ne saurait donner lieu à une quelconque indemnisation de la part de M. H... » (cf. arrêt p. 10) ;
1°/ ALORS QUE c'est celui qui a confié un bien en dépôt, soit pour sa conservation soit en vue d'un travail, qui est tenu des frais qui en résultent, peu important qu'il soit ou non titulaire du droit de propriété sur ce bien ; qu'en s'abstenant de rechercher si, comme il était soutenu par la société [...] (conclusions pp. 18 à 22), M. H... avait conclu avec la société [...] un contrat de dépôt dans la perspective d'une expertise et d'une éventuelle réparation du navire, au motif inopérant que la résolution de la vente qu'elle prononçait emportait qu'il n'avait jamais été propriétaire du navire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1937 et 1947 du code civil ;
2°/ ALORS QU'au surplus, la résolution d'un contrat laisse subsister les actes d'administration effectués par celui dont le droit est résolu ; que les obligations issues d'un contrat de dépôt sont des actes d'administration ; que la cour d'appel ne pouvait statuer comme elle l'a fait sans violer l'article 1184 du code civil ;
3°/ ALORS QU'en énonçant que le navire serait « resté la propriété de la société [...], cessionnaire des droits du constructeur dans le cadre du service après-vente », ce que nulle partie n'avait soutenu, la résolution ne pouvant concerner que le vendeur, la société Massif Marine, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ ALORS QU'en outre, le cessionnaire d'une entreprise déclarée en liquidation judiciaire ne devient pas personnellement partie aux contrats qui avaient été conclus par cette entreprise, même s'il s'est engagé à assurer un service après-vente ; qu'en retenant qu' « en conséquence, le fait que le bateau ait été remisé sur le site de la société [...], cessionnaire de la société [...], responsable de l'ensemble des malfaçons du navire, ne saurait donner lieu à une quelconque indemnisation de la part de M. H... », la cour d'appel a violé l'article 1165 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société [...] de sa demande en paiement des frais de gardiennage du navire qui lui a été confié, en tant que dirigée à titre subsidiaire contre la société AXA France IARD ;
AUX MOTIFS QUE « la société AXA n'est tenue que par les clauses du contrat passé avec la société [...] dont le cessionnaire est la société [...] ; qu'aucune disposition de la police ne prévoit que la société AXA France IARD, qui n'a jamais conclu un contrat de dépôt avec la société [...], serait tenue de payer les frais de gardiennage et serait contrainte d'enlever le navire » (cf. arrêt p. 10) ;
ALORS QU'en se bornant à la simple affirmation que la société AXA France IARD « n'a jamais conclu un contrat de dépôt avec la société [...] », sans s'expliquer sur les conclusions et pièces par lesquelles la société [...] entendait établir que « c'est bien à la demande de la société AXA France IARD que la société [...] a rapatrié le navire sur son chantier », ce qui caractérisait un contrat de dépôt (conclusions pp. 23-24), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande formée par la société [...] à l'encontre de la société Massif Marine et tendant à l'enlèvement sous astreinte du navire et au remboursement des droits de douane ;
AUX MOTIFS QUE « la société [...] n'a formulé aucune demande envers la société Massif Marine dans l'instance engagée devant le tribunal de grande instance de Lille et cette société est fondée à se prévaloir de l'article 564 du code de procédure civile ; que les réclamations présentées par la société [...] envers la société Massif Marine sont irrecevables » (cf. arrêt p. 10) :
ALORS QUE les parties peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions pour faire juger les questions nées de la survenance d'un fait ;
que la société [...] faisait valoir que « si la cour prononçait la résolution de la vente, la société Massif Marine deviendrait propriétaire du navire, ce qui constituerait un fait nouveau justifiant la demande formulée à son encontre par la société [...] », pour en déduire que « à titre subsidiaire, et si la cour d'appel prononçait la résolution de la vente : dire et juger que la demande formulée par la société [...] à l'encontre de la société Massif Marine n'est pas irrecevable puisque la résolution de la vente entraîne l'existence d'un fait nouveau » ; qu'ayant prononcé la résolution de la vente et rejeté pour ce motif la demande formée contre M. H..., qui n'était plus propriétaire, la cour d'appel ne pouvait déclarer irrecevable la demande en tant que formée contre la société Massif Marine sans violer l'article 564 du code de procédure civile.
Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Massif marine.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif d'avoir condamné in solidum la société Massif Marine, avec la société Axa France Iard, sous déduction de la franchise de 10.000 euros, à indemniser le préjudice de M. H... soit la somme de 200.684,17 euros HT outre intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2013, la somme de 133.084,49 euros avec intérêts à compter de l'arrêt, la somme de 60.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE sur le préjudice de Monsieur H...,
Du fait de la résolution de la vente, Monsieur H... est fondé d'obtenir de son vendeur la restitution du prix d'acquisition du bien, soit la somme de 200.684,17 euros HT, outre intérêts au taux légal à compter de la date d'assignation soit le 10 janvier 2013. Monsieur H... produit aux débats les factures pour l'achat de matériel nécessaire à la navigation, pour total de 28.908,05 euros. Ce matériel étant devenu sans objet du fait de la résolution du contrat il est fondé à en demander le remboursement. De même il est fondé à obtenir la somme de 5.574,27 euros au titre des frais exposés en raison de son escale forcée au Cap-Vert du fait du risque de chavirement que présentait le navire. Monsieur H... établit :
- la perte de l'avitaillement du navire du fait de l'interruption du voyage, soit un montant de 1.000 euros,
- ses frais de rapatriement à Tahiti, son lieu de résidence pour un montant de 2.447,43 euros,
- les frais d'assurance du voilier pendant l'immobilisation de celui-ci soit un montant total de 7.580,66 Euros, de août 2011 à août 2016,
- les frais de dépose de la quille facturés par la société [...] pour la réunion d'expertise du 29 juin 2012 soit un montant de 574,08 euros,
- le préjudice lié au congé sans solde pour convoyer le bateau, voyage qui n'a pas abouti : 10.000 euros.
Le préjudice matériel est fixé à la somme de : (28908.05+5574.27+1000+2447.43+7580+574.08+10000) = 56.084,49 euros.
Il convient de rappeler que Monsieur H..., qui après une escale aux îles Canaries, entreprenait la traversée de l'Atlantique vers la Martinique a constaté la présence d'eau de mer dans la cale, puis après assèchement a découvert des fissures le long d'une varangue et de l'empreinte de la quille. Puis il s'est aperçu que la quille bougeait, provoquant la déformation de la coque à chaque mouvement du bateau et que de l'eau de mer pénétrait en grande quantité par les fissures, ce qui l'a contraint à rejoindre le Cap-Vert. Il ne peut être contesté que cette voie d'eau n'a pu que fortement inquiéter Monsieur H..., dont le voilier risquait de chavirer, ce qui lui a engendré un préjudice moral qui sera réparé par l'allocation d'une somme de 10.000 euros. Au titre du préjudice de jouissance, il est constant que M. H... ne peut utiliser son navire depuis le jour du sinistre. Il justifie que depuis 1989, il a toujours habité à bord des voiliers dont il a été successivement propriétaire. Il produit des quittances de loyers pour un appartement qu'il a dû louer pour une somme de 922 euros par mois. En retenant une durée de 72 mois, le préjudice de jouissance est fixé à la somme de 67.000 euros. Il convient de condamner la société Massif Marine à payer à M. H... la somme de 200.684,17 euros HT, outre intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2013 et la somme de 133.084,49 euros avec intérêts à compter de la présente décision qui est attributive de droits.
ALORS QU'en allouant à Monsieur H... la somme de 28.908,05 euros, motif pris que le matériel de navigation serait devenu sans objet du fait de la résolution du contrat, sans rechercher, comme elle y était invitée, par la société Massif Marine si ce matériel pouvait être réutilisé sur un autre navire ou revendu dès lors qu'il n'avait pas été perdu dans l'avarie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1641 et 1645 du code civil.