LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen pris en sa première branche :
Vu les articles 4 et 12 du code de procédure civile, ensemble l'article 215, alinéa 3, du code civil ;
Attendu que le 13 septembre 2005, Mme X... et son fils, M. Y..., se déclarant célibataire, ont consenti une promesse de vente aux époux Z... portant sur une maison à usage d'habitation située à Argenteuil dont ils sont propriétaires ; que les vendeurs ayant refusé de réitérer la vente par acte authentique, les époux Z... les ont assignés aux fins de voir déclarer la vente parfaite, ordonner la remise des clefs sous astreinte et condamner les vendeurs au paiement de l'indemnité prévue par la clause pénale ; qu'un jugement du 2 octobre 2006 a fait droit à cette demande ; que Mme A... épouse de M. Y... est intervenue volontairement en cause d'appel aux fins de voir débouter les époux Z... de leurs demandes en faisant valoir que son mari ne pouvait disposer, sans son consentement, de ce bien qui constitue le logement familial ;
Attendu que pour débouter Mme A... de sa demande,
l'arrêt retient que tout en contestant la validité de l'acte conclu sans son accord, celle-ci n'invoque pas, par voie d'exception, la nullité de la vente au sens de l'article 215, alinéa 3, de ce texte mais demande seulement à la cour de constater qu'elle s'oppose à la vente du domicile conjugal et que dès lors sa demande ne s'analyse pas en une action en nullité prévue par ce texte ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'en concluant au rejet des demandes des époux Z... tendant à voir obtenir la réalisation forcée de la vente sur le fondement de l'article 215, alinéa 3, du code civil, au motif que l'acte de vente conclu sans son accord ne serait pas valable, Mme A... exerçait l'action en nullité prévue par ce texte, la cour d'appel n'a pas donné à la prétention de Mme A... son exacte qualification et a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 octobre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne les époux Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des époux Z... et les condamne à payer à Mme A... la somme totale de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils pour Mme A...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a déclaré mal fondée l'intervention volontaire de Mme Zined A..., épouse de M. Hocine Y..., demandant à ce qu'il soit constaté qu'elle s'oppose à la vente du domicile conjugal, conformément à l'article 215 alinéa 3 du Code civil, et invitant le juge à débouter M. et Mme Z... de leur demande tendant à voir ordonner la réalisation forcée de la vente ;
AUX MOTIFS QUE « selon l'article 215 du Code civil, « Les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie. La résidence de la famille est au lieu qu'ils choisissent d'un commun accord. Les époux ne peuvent l'un sans l'autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni. Celui des deux qui n'a pas donné son consentement à l'acte peut en demander l'annulation ; l'action en nullité lui est ouverte dans l'année à partir du jour où il a eu connaissance de l'acte, sans pouvoir jamais être intentée plus d'un an après que le régime matrimonial s'est dissous » ; qu'en l'espèce, Mme Zined A... épouse de M. Hocine Y..., mariée depuis le 27 avril 1998, soutient que son mari a conclu une promesse e vente avec les époux Z... concernant la maison lui appartenant indivisément avec sa mère, à concurrence de 65 % pour sa mère, Mme Aïcha X... veuve de M. Mohamed Y..., et à concurrence de 35 % pour lui, et constituant le logement de la famille, sans qu'elle donne son accord à l'acte de cession ; que la promesse de vente valant vente au sens de l'article 1589 du Code civil, constitue un acte de disposition des droits par lequel est assuré le logement de la famille ; que Mme Zined A... épouse de M. Hocine Y..., tout en contestant la validité de l'acte conclu sans son accord, n'invoque pas par voie d'exequatur la nullité de la vente au sens de l'article 215, alinéa 3, du Code civil, mais demande seulement à la Cour de constater qu'elle « s'oppose à la vente du domicile conjugal » ; que dès lors, sa demande ne s'analysant pas en une action en nullité expressément prévue à l'article précité, Mme Zined A... épouse de M. Hocine Y... doit être déclarée mal fondée en son intervention volontaire, sans qu'il y ait lieu de rechercher si le bien vendu constitue le domicile familial (…) » (arrêt, p. 9, avant-dernier et dernier § et p. 10, § 1, 2 et 3) ;
ALORS QUE dans leurs conclusions d'appel, M. et Mme Z... se bornaient à contester, pour s'opposer aux demandes de Mme A..., que le domicile conjugal fût fixé dans l'immeuble faisant l'objet du litige (conclusions du 6 septembre 2007, p. 3, 4 et 5) ; que Mme X... et M. Y... n'ont formulé aucune observation en ce qui concerne l'intervention volontaire de Mme A... (conclusions du 27 mars 2007) ; qu'en opposant à l'intervention volontaire de Mme A... la circonstance que tout en contestant la validité de l'acte conclu sans son accord, Mme A... ne se prévalait pas de la nullité de la vente, même par voie d'exception, et que par suite elle ne pouvait être admise à s'opposer à la vente du domicile conjugal, les juges du fond ont relevé un moyen d'office, sans rouvrir les débats pour permettre aux parties de s'expliquer, et ont dès lors violé l'article 16 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a déclaré mal fondée l'intervention volontaire de Mme Zined A..., épouse de M. Hocine Y..., demandant à ce qu'il soit constaté qu'elle s'oppose à la vente du domicile conjugal, conformément à l'article 215, alinéa 3, du Code civil, et invitant le juge à débouter M. et Mme Z... de leur demande tendant à voir ordonner la réalisation forcée de la vente ;
AUX MOTIFS QUE « selon l'article 215 du Code civil, « Les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie. La résidence de la famille est au lieu qu'ils choisissent d'un commun accord. Les époux ne peuvent l'un sans l'autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni. Celui des deux qui n'a pas donné son consentement à l'acte peut en demander l'annulation ; l'action en nullité lui est ouverte dans l'année à partir du jour où il a eu connaissance de l'acte, sans pouvoir jamais être intentée plus d'un an après que le régime matrimonial s'est dissous » ; qu'en l'espèce, Mme Zined A... épouse de M. Hocine Y..., mariée depuis le 27 avril 1998, soutient que son mari a conclu une promesse e vente avec les époux Z... concernant la maison lui appartenant indivisément avec sa mère, à concurrence de 65 % pour sa mère, Mme Aïcha X... veuve de M. Mohamed Y..., et à concurrence de 35 % pour lui, et constituant le logement de la famille, sans qu'elle donne son accord à l'acte de cession ; que la promesse de vente valant vente au sens de l'article 1589 du Code civil, constitue un acte de disposition des droits par lequel est assuré le logement de la famille ; que Mme Zined A... épouse de M. Hocine Y..., tout en contestant la validité de l'acte conclu sans son accord, n'invoque pas par voie d'exequatur la nullité de la vente au sens de l'article 215, alinéa 3, du Code civil, mais demande seulement à la Cour de constater qu'elle « s'oppose à la vente du domicile conjugal » ; que dès lors, sa demande ne s'analysant pas en une action en nullité expressément prévue à l'article précité, Mme Zined A... épouse de M. Hocine Y... doit être déclarée mal fondée en son intervention volontaire, sans qu'il y ait lieu de rechercher si le bien vendu constitue le domicile familial (…) » (arrêt, p. 9, avant-dernier et dernier § et p. 10, § 1, 2 et 3) ;
ALORS QUE, premièrement, la nullité découlant de l'article 215 du Code civil peut être invoquée, soit dans le cadre d'une demande, soit dans le cadre d'une exception ; que dans ses conclusions du 5 septembre 2007, Mme A... se prévalait de l'irrégularité de l'acte, du fait de son absence d'intervention, et sollicitait en conséquence le rejet de la demande de M. et Mme Z... tendant à ce que la vente fasse l'objet d'une exécution forcée (conclusions du 5 septembre 2007) ; que du fait même que l'irrégularité était invoquée dans le cadre de l'argumentaire développé par Mme A..., les juges du fond devaient considérer qu'ils étaient en présence d'une exception de nullité et qu'en décidant le contraire, ils ont violé les articles 215 du Code civil, 4 et 71 du Code de procédure civile ;
Et ALORS QUE, deuxièmement et en tout cas, l'irrégularité liée à l'absence de consentement peut être invoquée comme moyen de défense par l'époux qui n'a pas participé à l'acte pour s'opposer à l'exécution de l'acte irrégulièrement passé ; qu'en décidant le contraire pour refuser à Mme A... le droit d'invoquer l'irrégularité de l'acte au regard de l'article 215 du Code civil pour s'opposer à la réalisation forcée de la vente, les juges du fond ont violé l'article 215 du Code civil.