LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi provoqué, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 16 janvier 2008), que M. X... a été blessé dans un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Mme Y..., assurée auprès de la société La Sauvegarde (l'assureur) ; que M. X... a assigné cette conductrice et son assureur en indemnisation de son préjudice, en présence de la Caisse des dépôts et consignations (CDP) et de la Caisse nationale de prévoyance (CNP) qui lui avaient versé des prestations ; que par un arrêt du 16 février 2002, Mme Y... a été condamnée à indemniser M. X... à hauteur de la moitié de ses préjudices ;
Attendu que la CDP et la CNP font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes de remboursement de certaines prestations et de refuser de les imputer sur l'indemnité réparant le poste de préjudice correspondant aux pertes de gains professionnels futurs subis par la victime, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte de l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 modifiée, ensemble l'article 1252 du code civil, que la victime subrogeante, lorsqu'elle n'a reçu du tiers payeur qu'une indemnisation partielle, peut obtenir du responsable, par préférence au tiers payeur, paiement du solde de l'indemnité qui lui est allouée en réparation de son préjudice ; que, dès lors, en jugeant que l'intégralité de l'indemnité mise à la charge du responsable était due à M. X..., la cour d'appel a violé l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 modifiée, ensemble l'article 1252 du code civil ;
2°/ que lorsque la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, n'a été indemnisée qu'en partie, elle peut exercer ses droits contre le responsable, pour ce qui lui reste dû, par préférence au tiers payeur dont elle n'a reçu qu'une indemnisation partielle ; d'où il suit que le droit de préférence de la victime ne peut s'exercer que sur le montant de l'indemnité mise à la charge du responsable et non sur l'intégralité de son préjudice ; qu'en décidant que l'intégralité de l'indemnité mise à la charge du responsable devait revenir à M. X..., au motif que son préjudice (en ce compris sa fraction non indemnisable) était supérieur à cette indemnité, la cour d'appel a violé l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, modifiée, et l'article 1252 du code civil ;
3°/ que le principe de la réparation intégrale du préjudice interdit d'allouer à la victime une somme supérieure au montant de son préjudice réparable ; qu'en allouant à M. X..., outre les prestations versées par la CNP et la CDC constituant des paiements anticipés de son préjudice réparable, ce qui justifie la subrogation de ces derniers dans les droits de la victime contre le responsable, l'intégralité du montant de son préjudice réparable, la cour d'appel a violé les articles 1er et 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
Mais attendu que, selon le deuxième alinéa de l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985, conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été indemnisée qu'en partie ; qu'en ce cas, elle peut exercer ses droits contre le responsable, pour ce qui lui reste dû, par préférence au tiers payeur dont elle n'a reçu qu'une indemnisation partielle ; qu'il en résulte que le droit de préférence de la victime doit s'exercer, poste par poste, sur l'indemnité due par le responsable, pour la part du poste de son préjudice que ne réparent pas les prestations versées, le solde de l'indemnité étant, le cas échéant, alloué au tiers payeur ;
Et attendu que l'arrêt retient exactement que le poste de préjudice correspondant aux pertes de gains professionnels futurs subis par la victime s'élève à la somme de 197 600 euros ; qu'après limitation du droit à indemnisation de la victime, l'indemnité due s'élève à la somme de 98 800 euros ; que, compte tenu des indemnités journalières servies par la CNP à hauteur de 11 840,12 euros, de la pension servie par la CDC à hauteur de 46 139,07 euros, le montant du préjudice non réparé subi par la victime s'élève à la somme de 139 620,81 euros ; que le recours de la victime étant prioritaire sur l'indemnité de droit commun, il est dû à M. X... la somme de 98 800 euros, aucun solde ne restant pour la CNP et la CDC ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Caisse des dépôts et consignations et la Caisse nationale de prévoyance aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives de la Caisse des dépôts et consignations et de la Caisse nationale de prévoyance ; les condamne, in solidum, à payer à M. X... la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par Me Odent, avocat aux Conseils pour la Caisse des dépôts et consignations, demanderesse au pourvoi principal
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS de ses demandes de remboursement de la pension versée à M. X... ;
AU MOTIF QUE le total des pertes de gains professionnels s'élève à 197.636,60 € arrondis à 197.600 € ; qu'après limitation du droit à indemnisation, l'indemnité de droit commun s'élève à 98.818,30 €, arrondie à 98.800 € ; que le préjudice subi par M. X... s'élève à 139.620,81 € (197.600 € moins 11.840,12 € d'indemnités journalières servies par la CNP jusqu'au 29 février 2004 moins 46.139,07 € de pension servie par la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS à compter du 1er mars 2004) ; que le recours de la victime étant prioritaire sur l'indemnité de droit commun, il est dû à M. X... la somme de 98.800 €, aucun solde ne restant pour la CNP et la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS ;
ALORS QU'il résulte de l'article 31 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 modifiée, ensemble l'article 1252 du code civil, que la victime subrogeante, lorsqu'elle n'a reçu du tiers payeur qu'une indemnisation partielle, peut obtenir du responsable, par préférence au tiers payeur, paiement du solde de l'indemnité qui lui est allouée en réparation de son préjudice ; que, dès lors, en jugeant que l'intégralité de l'indemnité mise à la charge du responsable était due à M. X..., la cour d'appel a violé l'article 31 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 modifiée, ensemble l'article 1252 du code civil.
Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils pour la Caisse nationale de prévoyance, demanderesse au pourvoi provoqué
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR limité la demande de remboursement des indemnités journalières versées par la C.N.P. à Monsieur X... à la somme de 17.870,91 € au titre de la perte de gains professionnels actuels et de l'AVOIR débouté du surplus de ses demandes.
AUX MOTIFS QU'au titre de la perte de gains professionnels actuels, M. X... a formé des réclamations de ce chef jusqu'au 29 février 2004 correspondant à la fin du versement des indemnités journalières, soit au-delà de la date de consolidation du 1er juillet 2002 ; qu'en recadrant la demande à la date de consolidation, il s'avère que durant cette période de 36 mois, M. X... a touché des indemnités journalières de 35.741,81 € ; qu'au vu du montant du salaire réclamé sur une base mensuelle de 881,83 €, il n'est pas justifié de perte de salaire restant à charge de la victime ; que ce poste correspond donc au montant des indemnités journalières de 35.741,81 € ; qu'après limitation du droit à indemnisation de la victime, il est dû à la CNP la somme de 17.870,91 € ;
ET QUE au titre des préjudices patrimoniaux après consolidation, le total des pertes de gains professionnels s'élève à 197.636,60 € arrondis à 197.600 € ; qu'après limitation du droit à indemnisation, l'indemnité de droit commun s'élève à 98.818,30 €, arrondie à 98.800 € ; que le préjudice subi par M. X... s'élève à 139.620,81 € (197.600 € moins 11.840,12 € d'indemnités journalières servies par la CNP jusqu'au 29 février 2004 moins 46.139,07 € de pension servie par la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS à compter du 1er mars 2004) ; que le recours de la victime étant prioritaire sur l'indemnité de droit commun, il est dû à M. X... la somme de 98.800 €, aucun solde ne restant pour la CNP et la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS ;
1°/ ALORS QUE lorsque la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, n'a été indemnisée qu'en partie, elle peut exercer ses droits contre le responsable, pour ce qui lui reste dû, par préférence au tiers payeur dont elle n'a reçu qu'une indemnisation partielle ; d'où il suit que le droit de préférence de la victime ne peut s'exercer que sur le montant de l'indemnité mise à la charge du responsable et non sur l'intégralité de son préjudice ; qu'en décidant que l'intégralité de l'indemnité mise à la charge du responsable devait revenir à M. X..., au motif que son préjudice (en ce compris sa fraction non indemnisable) était supérieur à cette indemnité, la Cour d'appel a violé l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, modifiée, et l'article 1252 du Code civil ;
2°/ ALORS QUE le principe de la réparation intégrale du préjudice interdit d'allouer à la victime une somme supérieure au montant de son préjudice réparable ; qu'en allouant à M. X..., outre les prestations versées par la C.N.P. et la C.D.C. constituant des paiements anticipés de son préjudice réparable, ce qui justifie la subrogation de ces derniers dans les droits de la victime contre le responsable, l'intégralité du montant de son préjudice réparable, la Cour d'appel a violé les articles 1er et 4 de la loi du 05 juillet 1985.