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22/11/2016 | FRANCE | N°15-16647

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 novembre 2016, 15-16647


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 décembre 2014), que la société Time sport international, titulaire du brevet européen EP 0 682 885, délivré sous priorité d'une demande de brevet français n° 94 06014 et couvrant un dispositif de fixation occipitale pour casque, notamment de cycliste, a assigné la société Décathlon, ainsi que son fournisseur, la société Knauer, en contrefaçon de ce brevet ; que la société Time sport international ayant été mise en sauvegarde

et son dirigeant étant décédé, M. Y..., commissaire à l'exécution du plan de sauv...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 décembre 2014), que la société Time sport international, titulaire du brevet européen EP 0 682 885, délivré sous priorité d'une demande de brevet français n° 94 06014 et couvrant un dispositif de fixation occipitale pour casque, notamment de cycliste, a assigné la société Décathlon, ainsi que son fournisseur, la société Knauer, en contrefaçon de ce brevet ; que la société Time sport international ayant été mise en sauvegarde et son dirigeant étant décédé, M. Y..., commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde, et la société Administrateurs judiciaires partenaires, prise en la personne de M. X..., administrateur provisoire, sont intervenus aux débats ;
Attendu que la société Décathlon fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de nullité de la revendication 1 de ce brevet européen et de la condamner pour contrefaçon alors, selon le moyen :
1°/ que la revendication 1 du brevet français n° 94 06014 est ainsi rédigée : « dispositif de fixation occipitale réglable d'un casque, notamment d'un casque (10) de cycliste et plus particulièrement d'un adepte de vélo tout terrain, comprenant une coque (12) prévue pour s'adapter sur le crâne du cycliste, et des sangles (14) solidaires des parois latérales de cette coque et reliées de chaque côté en un point unique équipé d'un moyen de liaison amovible (16) à accrochage et décrochage rapides, caractérisé en ce qu'il comprend, à l'arrière du casque, un logement (18) prévu pour recevoir une platine (20) articulée, comportant une première pièce (24) solidaire du casque, une seconde pièce (22) articulée par rapport à la première avec des moyens de liaison (26) d'un patin d'appui occipital (28) et au moins une sangle occipitale (30) solidaire de la seconde pièce » ; que la revendication 9 de ce brevet couvre, quant à elle, un « dispositif de fixation occipitale réglable selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce que la sangle occipitale (30) est liée aux sangles latérales (14) et au moyen de liaison amovible à accrochage et décrochage rapide (16) » ; que la revendication 1 du brevet européen n° 0 682 885 se lit comme suit : « dispositif de fixation occipitale réglable d'un casque, notamment d'un casque (10) de cycliste et plus particulièrement d'un adepte du vélo tout terrain, comprenant une coque (12) prévue pour s'adapter sur le crâne du cycliste et des sangles (14) solidaires des parois latérales de cette coque et reliées de chaque côté en un point unique équipé d'un moyen de liaison amovible (16) à accrochage et décrochage rapides, comprenant une platine (20), solidaire et articulée par rapport au bord arrière de la coque (12) du casque (10), un patin d'appui occipital (28, 280, 380) et au moins une sangle occipitale (30), solidaire de ce patin d'appui occipital et de la platine, la sangle occipitale (30) est liée aux sangles latérales (14) et au moyen de liaison amovible à accrochage et décrochage rapide (16) de manière que lors de l'encliquetage du moyen de liaison amovible (16), la sangle occipitale assure une traction sur le patin occipital qui se trouve plaqué contre la partie occipitale basse sous l'occiput sans aucune possibilité de retrait. » ; qu'en retenant que la revendication 1 du brevet européen n° 0 682 885 reproduirait pour l'essentiel les revendications 1 et 9 du brevet français n° 94 06014, en y ajoutant la précision suivante « de manière que lors de l'encliquetage du moyen de liaison amovible (16), la sangle occipitale assure une traction sur le patin occipital qui se trouve plaqué contre la partie occipitale basse sous l'occiput sans aucune possibilité de retrait », cependant qu'à la différence de ces deux revendications du brevet français, le texte de la revendication 1 du brevet européen ne mentionne précisément ni la présence d'un logement prévu pour recevoir la platine, ni celle d'une première pièce de la platine solidaire du casque, ni celle de moyens de liaison de la platine avec le patin d'appui occipital, la cour d'appel a dénaturé le brevet européen n° 0 682 885, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'afin d'apprécier si une revendication déterminée d'un brevet européen peut bénéficier valablement de la priorité d'une demande antérieure, il convient uniquement de vérifier si l'homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble, ce qui implique que la revendication du brevet européen et la demande antérieure aient bien le même objet ; qu'il ne s'agit nullement de déterminer si l'invention couverte par la revendication du brevet européen témoigne d'une activité inventive au regard de la demande antérieure ou si, à la lecture de cette dernière, l'homme du métier est en mesure d'envisager, de manière évidente et sans effort technique, la solution technique revendiquée par le brevet européen ; qu'en retenant, par motifs propres, que la variante de réalisation couverte par le brevet européen, ne nécessitant pas la présence des caractéristiques tenant à la présence du logement et d'une première pièce de la platine, « pouvait à l'évidence être envisagée par l'homme du métier, sans effort technique, à la lecture du brevet », et par motifs adoptés, que la suppression du logement destiné à recevoir la platine et l'absence de prévision d'une liaison de la seconde pièce de la platine au patin d'appui occipital n'emporteraient aucune « activité inventive » par rapport à la demande antérieure de brevet français, la cour d'appel, qui a ainsi apprécié, de manière inopérante, l'activité inventive de la revendication 1 du brevet européen au regard du contenu de la demande française, a violé l'article 87 de la convention de Munich sur le brevet européen ;
3°/ que la revendication d'un brevet européen ne peut bénéficier de la priorité d'une demande de brevet antérieure qu'à la condition de porter sur la « même invention », ce qui suppose que l'homme du métier puisse, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble ; que la validité de la revendication de priorité doit s'apprécier distinctement pour chacune des revendications du brevet européen ; qu'il appartient ainsi aux juges du fond de vérifier si l'objet de la revendication du brevet européen en litige se retrouve dans la demande de brevet antérieure prise dans son ensemble, et non de déterminer si l'invention décrite dans cette demande antérieure se retrouve dans le brevet européen considéré dans son ensemble ; qu'en relevant que le mode de réalisation comprenant les caractéristiques de la demande française omises dans la revendication 1 du brevet européen n° 0 682 885 se trouverait, par ailleurs, énoncé dans le « préambule » (en réalité, la description) de ce brevet européen ainsi que dans sa revendication 2, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs inopérants, en violation de l'article 87 de la convention de Munich sur le brevet européen ;
4°/ que la revendication d'un brevet européen ne peut bénéficier de la priorité d'une demande de brevet antérieure qu'à la condition de porter sur la « même invention », ce qui suppose que l'homme du métier puisse, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble ; que les revendications dépendantes se contentent de décrire des modes de réalisation particuliers de l'invention dont l'objet est défini la revendication principale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la « variante de réalisation », qui ne nécessite pas la présence du logement et de la première pièce de la platine solidaire du casque, « du fait de la constitution de la seconde pièce en une sangle », était énoncée dans une revendication 9, dépendante de la revendication 1 du brevet européen, ce dont il résulte que ce mode particulier de réalisation, distinct de la revendication 1 de la demande française invoquée comme priorité, était également compris dans le périmètre de l'invention couverte par la revendication 1 du brevet européen ; qu'en se fondant néanmoins sur un tel constat pour retenir la validité de la priorité contestée, la cour d'appel s'est encore déterminée par un motif inopérant, en violation de l'article 87 de la convention de Munich sur le brevet européen ;
5°/ que la revendication d'un brevet européen ne peut bénéficier de la priorité d'une demande de brevet antérieure qu'à la condition que l'homme du métier puisse, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble ; que lorsque la revendication du brevet européen omet des caractéristiques de l'invention décrite dans la demande antérieure, il appartient aux juges du fond de rechercher, si ces caractéristiques étaient présentées comme essentielles dans cette demande antérieure, en procédant à une analyse de cette dernière prise dans son ensemble ; qu'en affirmant que le logement ne constituerait pas une caractéristique essentielle de l'invention couverte par la demande française et que « les caractéristiques essentielles du brevet français sont reprises dans le même agencement et avec les mêmes fonctions, en vue du même résultat technique », sans rechercher concrètement, au terme d'une analyse de la demande française prise dans son ensemble, si les trois éléments omis dans la revendication 1 du brevet européen n'étaient pas présentés, dans cette demande française, comme étant essentiels à l'exécution de l'invention et sans s'expliquer, à cet égard, sur le fait qu'ils étaient inclus dans la partie caractérisante de la revendication 1 du brevet français, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 87 de la convention de Munich sur le brevet européen ;
6°/ qu'afin d'apprécier la validité d'une revendication de priorité, il n'y a pas lieu d'établir une distinction entre des caractéristiques techniques en rapport avec la fonction et l'effet de l'invention et des caractéristiques sans rapport avec cette fonction et cet effet ; qu'en affirmant, pour dire que le logement destiné à recevoir la platine ne constituerait pas une caractéristique essentielle de l'invention couverte par la demande de brevet française, qu'un tel logement serait « dépourvu d'effet technique », la cour d'appel a violé l'article 87 de la Convention de Munich sur le brevet européen ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel n'a pas dénaturé le brevet européen n° 0 682 885, puisqu'elle a relevé, non pas que sa revendication n° 1 reprendrait à l'identique les revendications 1 et 9 du brevet français n° 94 06014, mais qu'elle les reproduit pour l'essentiel ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'après avoir exactement rappelé qu'il résulte de l'article 87 de la Convention de Munich sur la délivrance de brevets européens qu'une demande de brevet ne peut bénéficier de la priorité d'une demande antérieure que si celle-ci porte sur la même invention, c'est-à-dire si l'homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble, la cour d'appel, en retenant que ces conditions étaient remplies, a légalement justifié sa décision, abstraction faite de la référence inopérante, mais surabondante, à l'absence de nécessité d'une activité inventive de la part de l'homme de l'art ;
Attendu, en troisième lieu, qu'en l'état de cette constatation portant sur la reprise d'une même invention, les griefs des troisième et quatrième branches critiquent également des motifs surabondants ;
Attendu, en outre, que si l'absence de reprise des caractéristiques indispensables décrites dans le document de priorité implique que le bénéfice de cette priorité ne saurait être reconnu, puisque l'invention ne saurait être la même au sens de l'article 87 précité, la cour d'appel, en retenant que la protection portait, dans les deux cas, sur la combinaison des mêmes éléments, dont elle a apprécié les caractéristiques essentielles, a légalement justifié sa décision, sans être tenue de répondre à un détail d'argumentation des conclusions d'appel, qui se bornaient à observer qu'il n'était pas fortuit que le logement se trouve dans la partie caractérisante de la revendication 1 de la demande de brevet français ;
Et attendu, enfin, qu'en retenant, par motif adopté, que le logement destiné à recevoir la platine est dépourvu d'effet technique et ne constitue pas une caractéristique essentielle de l'invention, la cour d'appel n'a établi aucune distinction entre des caractéristiques techniques en rapport avec la fonction et l'effet de l'invention et des caractéristiques sans rapport avec cette fonction et cet effet, mais seulement fait ressortir que l'omission ou la reprise de ce détail était sans intérêt pour l'examen du bénéfice de priorité ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Décathlon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Time sport, à M. Y..., en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Time sport international et à la société Administrateurs judiciaires partenaires, en qualité d'administrateur provisoire de cette société, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Décathlon France.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Décathlon France de ses demandes en nullité de la revendication 1 du brevet européen n° 0 682 885 dont la société Time Sport International est titulaire, d'avoir, en conséquence, dit que la société Décathlon France a commis des actes de contrefaçon de ce brevet, de l'avoir condamnée au paiement de sommes, à titre de provisions et d'avoir ordonné, à son encontre, des mesures d'interdiction, de destruction et de publication ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société Décathlon demande à la cour de juger que la revendication n° 1 du brevet EP 0 682 885 ne peut bénéficier de la date de priorité de la demande française FR 94 06 014 du 10 mai 1994 en raison d'une absence d'identité d'invention ; qu'elle prétend que le périmètre de cette revendication aurait été élargi par l'omission de caractéristiques incluses dans la partie caractérisante de la revendication n° 1 du document de priorité, soit : * le logement, devenu optionnel, * la première pièce solidaire du casque, supprimée dans le nouveau mode de réalisation de la figure 5, * les moyens de liaison de la platine avec le patin d'appui occipital, et ce, dans le but de couvrir de nouveaux modes de réalisation et de revendiquer de nouvelles structures de casques ; qu'elle observe que les caractéristiques omises ont été déplacées dans la revendication n° 2 du brevet européen, que la revendication n° 9 du brevet européen vise à protéger le mode de réalisation de la figure 5 et que ces deux revendications sont rattachées directement à la revendication n° 1 ; qu'elle prétend que l'absence d'identité d'invention est par ailleurs confirmée par la poursuite des effets du brevet français après la fin de la procédure d'opposition du brevet européen ; qu'en réponse, la société Time sport soutient que c'est à bon droit que le tribunal a retenu l'existence de la priorité française en faveur du brevet européen, en relevant que dans les deux brevets, la protection porte sur les mêmes éléments, à savoir une platine solidaire du casque et articulée, un patin d'appui occipital et au moins une sangle occipitale solidaire de la platine, avec les mêmes fonctions et en vue du même résultat technique ; qu'elle fait valoir que ni le logement, ni la forme particulière de la platine ne constituent des éléments caractéristiques de l'invention, de sorte qu'il est indifférent qu'ils aient été reportés dans la revendication n° 2 ; qu'elle observe qu'au demeurant, la figure 5 fait apparaître un logement et une platine articulée, comportant une première pièce solidaire du casque et une deuxième pièce articulée par rapport à la première, la seule différence résidant dans le remplacement de la pièce ; qu'elle relève que la liaison de la sangle occipitale avec le patin et la platine est parfaitement mentionnée ; qu'elle ajoute que la reconnaissance par la société Time Sport de l'absence d'identité d'invention entre les deux titres ne peut être déduite du maintien des effets du brevet français ; que, ceci exposé, en vertu de l'article 87 de la Convention sur la délivrance de brevets européen, dite Convention de Munich (CBE) une demande de brevet ne peut bénéficier de la priorité d'une demande antérieure que si celle-ci porte sur la même invention, c'est-à-dire si l'homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble ; que par jugement du 23 novembre 1999, confirmé par arrêt du 18 octobre 2004, le tribunal de grande instance de Bordeaux a notamment déclaré nulle pour défaut de nouveauté la revendication n° 1 du brevet français n° 94 06014 du 10 mai 1994 rédigée comme suit : « Dispositif de fixation occipitale réglable d'un casque, notamment d'un casque (10) de cycliste et plus particulièrement d'un adepte de vélo tout terrain, comprenant une coque (12) prévue pour s'adapter sur le crâne du cycliste, et des sangles (14) solidaires des parois latérales de cette coque et reliées de chaque côté en un point unique équipé d'un moyen de liaison amovible (16) à accrochage et décrochage rapides, caractérisé en ce qu'il comprend, à l'arrière du casque, un logement (18) prévu pour recevoir une platine (20) articulée, comportant une première pièce (24) solidaire du casque, une seconde pièce (22) articulée par rapport à la première avec des moyens de liaison (26) d'un patin d'appui occipital (28) et au moins une sangle occipitale (30) solidaire de la seconde pièce » ; qu'il a toutefois déclaré valable la revendication n° 9 de ce brevet, rédigée comme suit : « Dispositif de fixation occipitale réglable selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce que la sangle occipitale (30) est liée aux sangles latérales (14) et au moyen de liaison amovible à accrochage et décrochage rapide (16) » dans sa combinaison avec la revendication n° 1, de sorte que, ces dispositions n'ayant pas été atteintes par l'arrêt de cassation partielle du 31 octobre 2006 (pourvoi n° 05-11. 149), il en ressort que le brevet français a été jugé valable dans la forme limitée (non inscrite au Registre national des Brevets) combinant les deux revendications ; que la revendication n° 1 du brevet européen reproduit pour l'essentiel les revendications n° 1 et 9 du brevet français, en y ajoutant la précision suivante « de manière que lors de l'encliquetage du moyen de liaison amovible (16), la sangle occipitale assure une traction sur le patin occipital qui se trouve plaqué contre la partie occipitale basse sous l'occiput sans aucune possibilité de retrait » ; que devant la cour, la société Décathlon ne reprend pas son argumentation selon laquelle cet ajout de la phrase finale ajouterait une caractéristique qui priverait le brevet de sa priorité ; qu'il ne peut être déduit de l'absence de mention du logement et de la première pièce de la platine, solidaire du casque, dans la revendication n° 1 du brevet européen, un élargissement de la protection, dès lors que la variante de réalisation sus-décrite, qui, du fait de la constitution de la seconde pièce de la platine en une sangle courte, ne nécessite pas la présence de ces caractéristiques, pouvait à l'évidence être envisagée par l'homme du métier, sans effort technique, à la lecture du brevet français ; qu'en outre, le mode de réalisation préférentiel mentionnant ces caractéristiques, comme la variante de réalisation, sont énoncés dans le préambule, avant d'être repris respectivement dans les revendications n° 2 et 9, dépendantes de la revendication n° 1 ; que, contrairement aux allégations de l'appelante, la revendication n° 1 du brevet européen prévoit comme le brevet français les moyens de liaison de la platine avec le patin d'appui occipital, lesquels peuvent s'entendre non seulement comme leur rattachement en un unique bloc monolithique, mais comme leur liaison au moyen de la sangle occipitale ; que le maintien des effets du brevet français par la société Time Sport à l'issue de la procédure d'opposition du brevet européen ne saurait valoir reconnaissance sans équivoque de l'absence d'identité d'invention entre les deux titres ; qu'en conséquence, il y a lieu d'approuver le tribunal d'avoir retenu que l'invention était bien divulguée sans ambiguïté et avec toutes ses caractéristiques essentielles dans la demande de brevet français du 10 mai 1994, qui recouvre la même invention que le brevet européen et en constitue la priorité ; (…) que la nouveauté de l'invention devant s'apprécier à la date de priorité du brevet européen, soit le 10 mai 1994, il y a lieu d'approuver le tribunal qui a retenu que la société Décathlon ne pouvait se prévaloir de l'antériorité constituée par le casque Folium de la société Time Sport, divulgué en mars 1995, pour combattre la nouveauté du brevet attaqué ; qu'il doit en être de même pour le casque Avenir VSR, nouvellement invoqué comme antériorité en cause d'appel, prétendument divulgué « avant le mois de mars 1995 » ;

ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QU'« en vertu de l'article 87 de la CBE une demande de brevet ne peut bénéficier de la priorité d'une demande antérieure que si celle-ci porte sur la même invention, c'est-à-dire si l'homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble ; qu'en l'espèce, il est constant que la première revendication du brevet européen reproduit les revendications 1 et 9 de la demande de brevet français mais le texte du brevet européen y ajoute la précision suivante : « de manière que lors de l'encliquetage du moyen de liaison amovible (16), la sangle occipitale assure une traction sur le patin occipital qui se trouve plaqué contre la partie occipitale basse sous l'occiput sans aucune possibilité de retrait » ; que la société Décathlon considère que le brevet européen diffère de la demande française par l'ajout d'un nouveau mode de réalisation, de passages entiers de description et le remaniement des revendications ; or, que les caractéristiques contenues dans la revendication n° 1 du brevet français se retrouvent dans les revendications 1 et 2 du brevet européen (notamment le logement prévu pour recevoir la platine) et la revendication n° 1 du brevet européen, reprend le texte des revendications 1 et 9 de la demande française ; que la défenderesse soutient que la nouvelle revendication n° 1 couvre des dispositifs de fixation dépourvus de logement recevant la platine, ce qui modifie sensiblement selon elle le périmètre de protection ; or, que dans les deux brevets, la protection porte sur la combinaison des mêmes éléments à savoir : une platine solidaire du casque et articulée, un patin d'appui occipital et au moins une sangle occipitale solidaire de la platine ; que le logement destiné à recevoir la platine est dépourvu d'effet technique et ne constitue pas une caractéristique essentielle de l'invention ; que par conséquent, le simple aménagement du texte préexistant n'emporte pas une activité inventive par rapport à la première demande et n'étend pas le champ de protection ; qu'en outre, l'absence de prévision d'une liaison de la seconde pièce de la platine au patin d'appui occipital dans le brevet européen n'entraîne à l'évidence aucune activité inventive dès lors que la platine est assujettie à l'ensemble formé par le patin et la sangle occipitale, conformément à la demande de brevet français qui prévoyait la solidarité de la platine et du patin ; que dès lors que les caractéristiques essentielles du brevet français sont reprises dans le même agencement et avec les mêmes fonctions, en vue du même résultat technique, le brevet européen recouvre la même invention que celle divulguée par la demande française, qui en constitue donc bien la priorité ; qu'à l'évidence, l'homme du métier pouvait, à la lecture du brevet français et sans effort technique, envisager un mode de réalisation sans logement pour la platine ou prévoir une platine constituée d'une sangle courte (prévue à la nouvelle revendication n° 9, supportée par la figure n° 5 ajoutée dans le titre européen), ces modes de réalisation particuliers reprenant les caractéristiques essentielles du brevet français ; qu'enfin, la précision finale de la revendication n° 1, selon laquelle « lors de l'encliquetage du moyen de liaison amovible (16), la sangle occipitale assure une traction sur le patin occipital qui se trouve plaqué contre la partie occipitale basse sous l'occiput sans aucune possibilité de retrait » correspond aux précisions contenues dans la description de la demande de brevet français du 10 mai 1994 selon laquelle « la sangle occipitale est liée aux sangles latérales et au moyen de liaison amovible à accrochage et décrochage rapide » (page 3, lignes 17 à 19) et la seconde pièce articulée de la platine et le patin d'appui occipital qui en est solidaire, s'orientent dans le plan longitudinal médian par pivotement autour de l'axe (1ère pièce de la platine – page 5) ; que la société Décathlon soutient que rien ne permettait de déterminer l'agencement de la sangle occipitale et du moyen de liaison amovible pour obtenir l'effet technique recherché et que les dessins, tronqués au point de liaison, n'enseignaient pas non plus cette caractéristique dans le premier brevet ; qu'elle en déduit que cet enseignement technique apparaît pour la première fois dans la demande de brevet européen ; que pourtant, à la lecture des mentions claires du brevet français rappelées ci-dessus, soutenues par les figures, il était évident pour l'homme du métier que le patin doit pivoter autour de l'axe pour venir s'appuyer sur l'occiput situé en avant de cet axe, afin de remplir sa fonction d'appui et de bloquer le casque, sous l'effet de la traction causée par l'encliquetage des sangles latérales, qui tirent alors sur la sangle occipitale grâce à leur liaison et donc sur le patin dont la sangle occipitale est solidaire ; que si le point de liaison de ces sangles n'est effectivement pas décrit dans le brevet français, il relève toutefois des connaissances techniques de l'homme du métier, ce que démontrent les documents antérieurs versés au débat pas les parties, en particulier les documents US 4 622 700 publié le 18 novembre 1986, US 4 703 879 publié le 3 novembre 1987 ou DE 9001607 publié le 17 mai 1990 ; qu'en conséquence, le brevet européen 885 ne rajoute aucune caractéristique essentielle à l'invention ayant fait l'objet de la demande de brevet français du 10 mai 1994 ni aucune nouveauté technique, puisqu'elle explicite un résultat technique qui s'y trouvait entièrement décrit ; que l'homme du métier pouvait parfaitement exécuter l'invention d'après les caractéristiques contenues dans le document antérieur ; que l'invention était donc bien divulguée sans ambiguïté et avec toutes ses caractéristiques essentielles dans la demande de brevet français n° 94 06014 du 10 mai 1994, qui recouvre la même invention que le brevet EP 885 et en constitue la priorité » ;
1°) ALORS QUE la revendication 1 du brevet français n° 94 06014 est ainsi rédigée : « dispositif de fixation occipitale réglable d'un casque, notamment d'un casque (10) de cycliste et plus particulièrement d'un adepte de vélo tout terrain, comprenant une coque (12) prévue pour s'adapter sur le crâne du cycliste, et des sangles (14) solidaires des parois latérales de cette coque et reliées de chaque côté en un point unique équipé d'un moyen de liaison amovible (16) à accrochage et décrochage rapides, caractérisé en ce qu'il comprend, à l'arrière du casque, un logement (18) prévu pour recevoir une platine (20) articulée, comportant une première pièce (24) solidaire du casque, une seconde pièce (22) articulée par rapport à la première avec des moyens de liaison (26) d'un patin d'appui occipital (28) et au moins une sangle occipitale (30) solidaire de la seconde pièce » ; que la revendication 9 de ce brevet couvre, quant à elle, un « dispositif de fixation occipitale réglable selon l'une quelconque des revendications précédentes, caractérisé en ce que la sangle occipitale (30) est liée aux sangles latérales (14) et au moyen de liaison amovible à accrochage et décrochage rapide (16) » ; que la revendication 1 du brevet européen n° 0 682 885 se lit comme suit : « dispositif de fixation occipitale réglable d'un casque, notamment d'un casque (10) de cycliste et plus particulièrement d'un adepte du vélo tout terrain, comprenant une coque (12) prévue pour s'adapter sur le crâne du cycliste et des sangles (14) solidaires des parois latérales de cette coque et reliées de chaque côté en un point unique équipé d'un moyen de liaison amovible (16) à accrochage et décrochage rapides, comprenant une platine (20), solidaire et articulée par rapport au bord arrière de la coque (12) du casque (10), un patin d'appui occipital (28, 280, 380) et au moins une sangle occipitale (30), solidaire de ce patin d'appui occipital et de la platine, la sangle occipitale (30) est liée aux sangles latérales (14) et au moyen de liaison amovible à accrochage et décrochage rapide (16) de manière que lors de l'encliquetage du moyen de liaison amovible (16), la sangle occipitale assure une traction sur le patin occipital qui se trouve plaqué contre la partie occipitale basse sous l'occiput sans aucune possibilité de retrait. » ; qu'en retenant que la revendication 1 du brevet européen n° 0 682 885 reproduirait pour l'essentiel les revendications 1 et 9 du brevet français n° 94 06014, en y ajoutant la précision suivante « de manière que lors de l'encliquetage du moyen de liaison amovible (16), la sangle occipitale assure une traction sur le patin occipital qui se trouve plaqué contre la partie occipitale basse sous l'occiput sans aucune possibilité de retrait », cependant qu'à la différence de ces deux revendications du brevet français, le texte de la revendication 1 du brevet européen ne mentionne précisément ni la présence d'un logement prévu pour recevoir la platine, ni celle d'une première pièce de la platine solidaire du casque, ni celle de moyens de liaison de la platine avec le patin d'appui occipital, la cour d'appel a dénaturé le brevet européen n° 0 682 885, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QU'afin d'apprécier si une revendication déterminée d'un brevet européen peut bénéficier valablement de la priorité d'une demande antérieure, il convient uniquement de vérifier si l'homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble, ce qui implique que la revendication du brevet européen et la demande antérieure aient bien le même objet ; qu'il ne s'agit nullement de déterminer si l'invention couverte par la revendication du brevet européen témoigne d'une activité inventive au regard de la demande antérieure ou si, à la lecture de cette dernière, l'homme du métier est en mesure d'envisager, de manière évidente et sans effort technique, la solution technique revendiquée par le brevet européen ; qu'en retenant, par motifs propres, que la variante de réalisation couverte par le brevet européen, ne nécessitant pas la présence des caractéristiques tenant à la présence du logement et d'une première pièce de la platine, « pouvait à l'évidence être envisagée par l'homme du métier, sans effort technique, à la lecture du brevet », et par motifs adoptés, que la suppression du logement destiné à recevoir la platine et l'absence de prévision d'une liaison de la seconde pièce de la platine au patin d'appui occipital n'emporteraient aucune « activité inventive » par rapport à la demande antérieure de brevet français, la cour d'appel, qui a ainsi apprécié, de manière inopérante, l'activité inventive de la revendication 1 du brevet européen au regard du contenu de la demande française, a violé l'article 87 de la Convention de Munich sur le brevet européen ;
3°) ALORS QUE la revendication d'un brevet européen ne peut bénéficier de la priorité d'une demande de brevet antérieure qu'à la condition de porter sur la « même invention », ce qui suppose que l'homme du métier puisse, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble ; que la validité de la revendication de priorité doit s'apprécier distinctement pour chacune des revendications du brevet européen ; qu'il appartient ainsi aux juges du fond de vérifier si l'objet de la revendication du brevet européen en litige se retrouve dans la demande de brevet antérieure prise dans son ensemble, et non de déterminer si l'invention décrite dans le cette demande antérieure se retrouve dans le brevet européen considéré dans son ensemble ; qu'en relevant que le mode de réalisation comprenant les caractéristiques de la demande française omises dans la revendication 1 du brevet européen n° 0 682 885 se trouverait, par ailleurs, énoncé dans le « préambule » (en réalité, la description) de ce brevet européen ainsi que dans sa revendication 2, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs inopérants, en violation de l'article 87 de la Convention de Munich sur le brevet européen ;
4°) ALORS QUE la revendication d'un brevet européen ne peut bénéficier de la priorité d'une demande de brevet antérieure qu'à la condition de porter sur la « même invention », ce qui suppose que l'homme du métier puisse, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble ; que les revendications dépendantes se contentent de décrire des modes de réalisation particuliers de l'invention dont l'objet est défini la revendication principale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la « variante de réalisation », qui ne nécessite pas la présence du logement et de la première pièce de la platine solidaire du casque, « du fait de la constitution de la seconde pièce en une sangle », était énoncée dans une revendication 9, dépendante de la revendication 1 du brevet européen, ce dont il résulte que ce mode particulier de réalisation, distinct de la revendication 1 de la demande française invoquée comme priorité, était également compris dans le périmètre de l'invention couverte par la revendication 1 du brevet européen ; qu'en se fondant néanmoins sur un tel constat pour retenir la validité de la priorité contestée, la cour d'appel s'est encore déterminée par un motif inopérant, en violation de l'article 87 de la Convention de Munich sur le brevet européen ;
5°) ALORS QUE la revendication d'un brevet européen ne peut bénéficier de la priorité d'une demande de brevet antérieure qu'à la condition que l'homme du métier puisse, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble ; que lorsque la revendication du brevet européen omet des caractéristiques de l'invention décrite dans la demande antérieure, il appartient aux juges du fond de rechercher, si ces caractéristiques étaient présentées comme essentielles dans cette demande antérieure, en procédant à une analyse de cette dernière prise dans son ensemble ; qu'en affirmant que le logement ne constituerait pas une caractéristique essentielle de l'invention couverte par la demande française et que « les caractéristiques essentielles du brevet français sont reprises dans la même agencement et avec les mêmes fonctions, en vue du même résultat technique », sans rechercher concrètement, au terme d'une analyse de la demande française prise dans son ensemble, si les trois éléments omis dans la revendication 1 du brevet européen n'étaient pas présentés, dans cette demande française, comme étant essentiels à l'exécution de l'invention et sans s'expliquer, à cet égard, sur le fait qu'ils étaient inclus dans la partie caractérisante de la revendication 1 du brevet français, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 87 de la Convention de Munich sur le brevet européen ;
6°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'afin d'apprécier la validité d'une revendication de priorité, il n'y a pas lieu d'établir une distinction entre des caractéristiques techniques en rapport avec la fonction et l'effet de l'invention et des caractéristiques sans rapport avec cette fonction et cet effet ; qu'en affirmant, pour dire que le logement destiné à recevoir la platine ne constituerait pas une caractéristique essentielle de l'invention couverte par la demande de brevet française, qu'un tel logement serait « dépourvu d'effet technique », la cour d'appel a violé l'article 87 de la Convention de Munich sur le brevet européen.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-16647
Date de la décision : 22/11/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 décembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 nov. 2016, pourvoi n°15-16647


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.16647
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