REJET et CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- X... David,
- le Groupe d'assurances mutuelles de France (GAMF), partie intervenante,
contre un arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 12 juin 1987, qui, après relaxe du premier nommé, poursuivi pour homicide et blessures involontaires, s'est prononcé sur les réparations civiles et a dit l'assureur tenu à garantie.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le pourvoi de X... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
Sur le pourvoi du GAMF :
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article L. 113-8 du Code des assurances, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, rejetant l'exception de non-garantie pour fausse déclaration intentionnelle, a été déclaré opposable au GAMF ;
" aux motifs que " l'exception de non-garantie pour fausse déclaration volontaire, quand bien même elle pourrait être opposée à l'assuré, ne saurait l'être à un conducteur tiers par rapport au contrat, qui conduit le véhicule avec l'assentiment de l'assuré, dès lors que la police prévoit une clause autorisant le " prêt de volant " ; qu'en l'espèce, David X... conduisait une automobile appartenant à Anne-Marie Y... mais faisant l'objet d'un contrat d'assurance souscrit par Thierry Z..., son utilisateur habituel ; que le contrat liant Thierry Z... à la compagnie d'assurance GAMF comportant une clause " prêt de volant ", il s'ensuit que c'est à tort que cette dernière se prévaut de l'exception de non-garantie " (cf. arrêt p. 8) ;
" alors que la nullité du contrat d'assurance est opposable à tout bénéficiaire de la garantie de l'assureur ; que la cour d'appel qui, pour rejeter l'exception de non-garantie pour fausse déclaration intentionnelle invoquée par le GAMF, a déclaré que l'exception ne saurait être opposée qu'à l'assuré et non pas à un conducteur tiers qui conduit le véhicule avec l'assentiment de l'assuré, en raison d'une clause autorisant le prêt de volant, a violé, par refus d'application, l'article L. 113-8 du Code des assurances ;
" alors qu'en écartant l'exception de non-garantie pour fausse déclaration intentionnelle, au seul prétexte du prêt de la voiture, sans rechercher si le contrat d'assurance n'était pas nul pour fausses déclarations intentionnelles de l'assuré, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 113-8 du Code des assurances " ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles L. 113-2, 2° et L. 113-8 du Code des assurances, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, rejetant l'exception de non-garantie pour fausse déclaration intentionnelle, a été déclaré opposable au GAMF ;
" aux motifs que " l'opinion du risque que peut avoir l'assureur en cas de prêt de volant n'est pas affectée par le fait que l'assuré a fait une fausse déclaration l'ayant trompé sur l'importance du risque garanti lorsque le souscripteur conduit lui-même ; qu'en l'espèce, David X... conduisait une automobile appartenant à Anne-Marie Y... mais faisant l'objet d'un contrat d'assurance souscrit par Thierry Z..., son utilisateur habituel ; que le contrat liant Thierry Z... à la compagnie d'assurance GAMF comportant une clause " prêt de volant ", il s'ensuit que c'est à tort que cette dernière se prévaut de l'exception de non-garantie " (cf. arrêt, p. 8) ;
" alors que l'opinion qu'a l'assureur du risque s'apprécie, au jour de la conclusion du contrat, suivant les déclarations de l'assuré et l'étendue de la garantie réclamée, même si le risque omis a été sans influence sur le sinistre survenu ultérieurement ; qu'en prenant en considération un seul élément de cette opinion, intervenu postérieurement à la conclusion du contrat, à savoir le " prêt de volant ", sans rechercher l'opinion globale qu'avait l'assureur du risque tel que défini par l'assuré au moment de la conclusion du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-2, 2° et L. 113-8 du Code des assurances " ;
Ces moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que la nullité d'un contrat d'assurance est opposable à tout bénéficiaire de la garantie stipulée ;
Attendu, en outre, que la réticence ou fausse déclaration intentionnelle du souscripteur, de nature à changer l'objet du risque ou à en diminuer l'opinion pour l'assureur, est une cause de nullité du contrat, alors même que le risque omis ou dénaturé a été sans influence sur le sinistre ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué que Z... a souscrit auprès du GAMF une police d'assurance automobile en omettant de déclarer, d'une part, qu'il avait fait l'objet d'une suspension de son permis de conduire, d'autre part, que le véhicule assuré appartenait, non à lui-même, mais à sa concubine ;
Attendu que ladite voiture, conduite par X... à qui elle avait été prêtée, a été impliquée dans un accident au cours duquel A..., conducteur d'une autre automobile, a été tué ; que sur les poursuites engagées contre X... du chef d'homicide involontaire, et sur les constitutions de partie civile des ayants droit de la victime, le GAMF est intervenu, soulevant une exception de nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle du souscripteur ;
Attendu que, pour rejeter les prétentions de l'assureur, la juridiction du second degré énonce que " l'exception de non-garantie pour fausse déclaration volontaire, quand bien même elle pourrait être opposée à l'assuré, ne saurait l'être à un conducteur tiers par rapport au contrat, qui conduit le véhicule avec l'assentiment de l'assuré, dès lors que la police prévoit une clause autorisant le prêt du volant " ; qu'elle ajoute que " l'opinion du risque que peut avoir l'assureur en cas de prêt de volant n'est pas affectée par le fait que l'assuré a fait une fausse déclaration l'ayant trompé sur l'importance du risque garanti lorsque le souscripteur conduit lui-même " ;
Mais attendu qu'en se déterminant de la sorte, alors que le moyen opposé par le GAMF était une exception de nullité du contrat, opposable à tout bénéficiaire de la garantie, et qu'il appartenait aux juges de rechercher, sans avoir égard aux circonstances du sinistre, si Z... avait, de mauvaise foi, fait une fausse déclaration ayant changé l'objet du risque ou diminué l'opinion que pouvait en avoir l'assureur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi de X... ;
Sur le pourvoi du GAMF :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, en date du 12 juin 1987, mais seulement en ce qu'il a dit la décision opposable au Groupe d'assurances mutuelles de France et a mis hors de cause le Fonds de garantie automobile, et pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi dans la limite de la cassation prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon.