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27/06/2023 | FRANCE | N°21BX01645

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 27 juin 2023, 21BX01645


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MM. C... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2018 par lequel le maire de Lanton a refusé de leur délivrer un permis de construire pour la construction d'une maison individuelle sur un terrain situé 1 avenue Albert Pitres.

Par un jugement n° 1902316 du 18 février 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 avril 2021 et le 2

5 avril 2023 ainsi qu'un mémoire non communiqué, enregistré le 25 mai 2023, MM. A..., représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MM. C... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2018 par lequel le maire de Lanton a refusé de leur délivrer un permis de construire pour la construction d'une maison individuelle sur un terrain situé 1 avenue Albert Pitres.

Par un jugement n° 1902316 du 18 février 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 avril 2021 et le 25 avril 2023 ainsi qu'un mémoire non communiqué, enregistré le 25 mai 2023, MM. A..., représentés par Me Lourme, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 février 2021 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Lanton du 13 décembre 2018 ;

3°) d'enjoindre à la commune de délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Lanton une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier pour méconnaissance du contradictoire en l'absence de communication de la requête au préfet, qui doit être considéré comme une partie en raison de l'obligation de recueillir son avis conforme en application de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme ;

- la compétence de l'auteur de cet arrêté n'est pas établie ; il ne comporte pas le visa de la délégation et la signature n'est pas identifiable ;

- l'avis conforme du préfet est illégal dès lors que leur parcelle ne fait pas partie du site inscrit par l'arrêté interministériel du 16 septembre 1942 dans lequel elle n'est pas visée ; en outre, elle se situe en zone urbanisée et ne peut donc être considérée comme se situant dans une partie naturelle d'un site inscrit et au vu de son environnement elle ne peut être regardée comme constituant un espace remarquable devant être protégé au sens de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme ;

- la constructibilité du site est établie par le certificat d'urbanisme délivré le 15 mars 2017 qui n'évoquait pas l'existence d'un espace remarquable ;

- le projet est légal au regard des dispositions du règlement nationale d'urbanisme.

Par des mémoires en défense enregistrés le 19 décembre 2022 et le 27 avril 2023, la commune de Lanton, représentée par le cabinet HMS Atlantique avocats, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des consorts A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

- les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,

- les observations de Me Lourme, représentant MM. A... et de Me Cordier-Amour, représentant la commune de Lanton.

Une note en délibéré présentée par Me Lourme, pour MM. A... a été enregistrée le 2 juin 2023.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A... et M. B... A... ont sollicité le 8 octobre 2018 la délivrance d'un permis de construire pour la réalisation d'une maison individuelle sur un terrain situé 1 avenue Albert Pitres à Lanton. Par un arrêté du 13 décembre 2018, le maire de Lanton a refusé de leur délivrer le permis de construire demandé. MM. A... relèvent appel du jugement du 18 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 174-1 du code de l'urbanisme : " Les plans d'occupation des sols qui n'ont pas été mis en forme de plan local d'urbanisme, en application du titre V du présent livre, au plus tard le 31 décembre 2015 sont caducs à compter de cette date, sous réserve des dispositions des articles L. 174-2 à L. 174-5. / La caducité du plan d'occupation des sols ne remet pas en vigueur le document d'urbanisme antérieur. / A compter du 1er janvier 2016, le règlement national d'urbanisme mentionné aux articles L. 111-1 et L. 422-6 s'applique sur le territoire communal dont le plan d'occupation des sols est caduc ". Aux termes de l'article L.422-5 du même code : " Lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : / a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu (...) ".

3. Le plan d'occupation des sols de la commune de Lanton étant devenu caduc le 27 mars 2017, et le préfet ayant suspendu en application de l'article L. 153-25 du code de l'urbanisme le plan local d'urbanisme adopté par délibération du 29 août 2018 par un arrêté du 28 septembre 2018, la commune n'était pas couverte par un document d'urbanisme et le règlement national d'urbanisme s'appliquait sur son territoire à la date de l'arrêté en litige, par l'effet des dispositions de l'article L. 174-1 du code de l'urbanisme. Ainsi, en application de l'article L. 422-5 de ce code, le maire de Lanton a recueilli l'avis conforme du préfet de la Gironde, lequel a émis un avis défavorable le 30 octobre 2018 au motif que le projet des pétitionnaires, bien que situé dans une partie urbanisée de la commune, n'est pas conforme aux dispositions de la loi littoral dès lors qu'il est intégré dans le site inscrit " Bois de pins entourant la plage de Taussat-les-bains " et dans une zone boisée proche du littoral, qui constitue un espace remarquable au sens de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme.

4. Selon l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques (...) ". L'article R. 121-4 du même code prévoit que : " En application de l'article L. 121-23, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral et sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : (...) 7° Les parties naturelles des sites inscrits ou classés en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l'environnement, des parcs nationaux créés en application de l'article L. 331-1 du code de l'environnement et des réserves naturelles instituées en application de l'article L. 332-1 du code de l'environnement (...) ".

5. Les parties naturelles des sites inscrits ou classés en application de la loi du 2 mai 1930 sont présumées constituer des sites ou paysages remarquables. Toutefois, si cette qualification présumée est contestée, leur caractère remarquable doit être justifié. Pour apprécier si les parcelles en cause présentent le caractère de site ou paysage remarquable à protéger au sens des dispositions précitées, l'autorité compétente ne peut se fonder sur leur seule continuité avec un espace présentant un tel caractère, sans rechercher si elles constituent avec cet espace une unité paysagère justifiant dans son ensemble cette qualification de site ou paysage remarquable à préserver.

6. Il est que constant le site du " Bois de pins entourant la plage de Taussat-les-Bains ", correspondant à l'ancien village de Taussat, situé au nord de la commune de Lanton, a été inscrit au titre de l'article L. 341-1 du code de l'environnement par arrêté ministériel du 16 septembre 1942. Les requérants soutiennent que leurs parcelles ne sont pas incluses dans le site inscrit par cet arrêté en faisant valoir que leur famille ne fait pas partie des propriétaires mentionnés par cet arrêté alors qu'elle les possédait déjà à cette date et que les documents historiques indiquent que le Chalet Pitres édifié sur cette parcelle a été construit sur l'ancienne tuilerie qui figure sur cette carte en dehors du périmètre. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la carte annexée à l'arrêté du 16 septembre 1942 très sommaire et non datée, ne correspond pas à la situation existante à la date de l'arrêté dès lors que les propriétaires mentionnés, Joseph de Courcy et le général d'Elloy sont décédés en 1920 et 1917. Au vu de son caractère peu fiable, et alors que les brochures de sociétés historiques produites par les parties font état de plusieurs tuileries successives et que les différentes cartes anciennes, peu précises, ne permettent pas de déterminer leur emplacement exact, la seule circonstance que la carte annexée à l'arrêté mentionne l'existence d'une tuilerie en dehors du périmètre ne permet pas de considérer que la parcelle en litige n'y aurait pas été incluse. Ces éléments ne sont dès lors pas de nature à remettre en cause le bien-fondé de l'inclusion par la DREAL des parcelles litigieuses dans la proposition de périmètre de site inscrit figurant sur son site, et consultable en ligne, qui a été établi sur le fondement de l'arrêté de 1942 et de la base de données parcellaire, laquelle retrace l'historique du parcellaire cadastral. Par suite, ce moyen doit être écarté.

7. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle BC 293 sur laquelle s'implante le projet, est vierge de toute construction et recouverte d'un boisement de qualité, qui se poursuit sur les vastes parcelles situées de part et d'autre qui sont peu densément construites et bordent le rivage du bassin d'Arcachon. En outre, il ressort des vues versées au dossier que le prolongement du site inscrit, situé au nord-est au-delà du boulevard de la plage et de l'allée Albert Pitres est resté majoritairement à l'état naturel et comporte également des boisements quand bien même une partie est constituée de parcelles anciennement agricoles de moindre qualité non boisées. Enfin, cette partie sud-est n'est séparée de la partie nord-ouest encore densément boisée de ce site inscrit que par une étroite bande urbanisée située entre le boulevard Charles de Gaulle et la piste cyclable. Dans ces conditions, quand bien même la pointe où se trouve la parcelle en litige est située entre deux zones urbanisées de la commune, elle constitue une partie naturelle d'un site inscrit. Compte tenu de ce caractère naturel et au regard de la qualité du boisement de ces parcelles situées en bordure du bassin d'Arcachon, qui s'inscrivent dans la façade végétale du quartier ancien, et dont la fiche de l'Atlas des sites inscrits d'Aquitaine souligne la nécessité de le préserver du fait de son caractère remarquable, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant qu'elles constituaient un espace remarquable au sens de l'article R. 121-4 précité et que par suite, aucune construction n'y était possible en application de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme.

8. La circonstance qu'un certificat d'urbanisme délivré le 15 mars 2017 pour un projet de construction de deux maisons sur un terrain d'assiette constitué de la parcelle BC 293 et des parcelles voisines BC 292 et BC 294 indiquait que cette parcelle était constructible sans mentionner l'existence de cet espace remarquable est sans incidence sur la légalité de l'avis conforme du préfet, ce certificat ayant au demeurant cessé de produire ses effets à la date de dépôt de la demande de permis de construire en litige. Il en est de même des circonstances que le projet a bénéficié d'un avis favorable de l'architecte des bâtiments de France et qu'il serait situé dans une zone urbanisée constructible au sens du règlement national d'urbanisme.

9. Enfin, au regard des dispositions citées au point 2, le maire de Lanton, qui était en situation de compétence liée, était tenu de refuser le permis de construire sollicité au regard de l'avis défavorable légalement émis par le préfet. Par suite, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de cet arrêté et de l'impossibilité d'identifier l'auteur de la signature doivent être écartés comme inopérants.

Sur les frais de l'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lanton qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. A..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. C... A... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Lanton et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de MM. A... est rejetée.

Article 2: M. C... A... versera à la commune de Lanton une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à la commune de Lanton et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2023.

La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLe président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX01645 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01645
Date de la décision : 27/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : LOURME

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-06-27;21bx01645 ?
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