Vu la requête, enregistrée le 22 octobre 2007, présentée pour la société VALAUBRAC, dont le siège social est Z.A. Les Calsades à Bozouls (12340), venant aux droits de la société Espalux expansion ;
La société VALAUBRAC demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0505975 du 14 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de Mme Nathalie X, annulé la décision du 18 novembre 2005 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement pour motif économique ;
2°) de rejeter la demande de Mme X ;
3°) de mettre à la charge de Mme X la somme de 2 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2008 :
- le rapport de M. Seillet, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Aebischer, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société VALAUBRAC fait appel du jugement du 14 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de Mme Nathalie X, annulé la décision du 18 novembre 2005 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement pour motif économique ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance, et en particulier du mémoire, en date du 10 juillet 2007, produit devant le Tribunal administratif de Grenoble par Mme X, que celle-ci avait soulevé le moyen tiré de ce que la situation économique et financière de la société Espalux Expansion n'avait été appréciée au bon niveau, en ce que le motif économique ne pouvait être apprécié au seul niveau du sous-secteur économique de la fabrication de meubles de cuisine et de salles de bains alors qu'il devait l'être au niveau du secteur plus général de la fabrication de meubles ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutiennent tant la société VALAUBRAC que le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, en retenant, pour prononcer l'annulation de la décision en litige, le motif qu'en ne vérifiant la réalité du motif économique invoqué par la société Espalux qu'au regard de la seule situation de celle-ci et non au niveau du groupe Parfival, comprenant vingt-deux sociétés dont plusieurs oeuvrent dans le secteur d'activité de l'ameublement, l'inspecteur du travail avait entaché d'erreur de droit la décision attaquée, le Tribunal administratif de Grenoble ne s'est pas fondé sur un moyen soulevé d'office ;
Sur la légalité de la décision en litige :
Considérant qu'en vertu des dispositions, applicables à la date de la décision en litige, des articles L. 412-18, L. 425-1 et L. 436-1 du code du travail relatives aux conditions de licenciement, respectivement, des délégués syndicaux, des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou leur appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation économique de l'entreprise justifie le licenciement du salarié en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié ; que, si la société demanderesse relève d'un groupe, l'autorité administrative ne peut se borner à prendre en considération la seule situation de la société demanderesse pour apprécier la situation économique mais est tenue de faire porter son appréciation sur l'ensemble des sociétés du groupe oeuvrant dans le même secteur d'activité que la société en cause ;
Considérant, en premier lieu, qu'un secteur d'activité est caractérisé par son objet ; qu'il ressort des pièces du dossier que la société Espalux Expansion, aux droits de laquelle vient la société VALAUBRAC, a pour activité la conception, la fabrication de meubles de cuisine et de salles de bains, ainsi que sa commercialisation à travers un réseau de distributeurs franchisés, de concessionnaires et par des enseignes de grande distribution ; que cette société fait partie du groupe Cauval Industrie, filiale du groupe Parfival, à une filiale duquel, la société Fimmopress, elle a été cédée ; que les activités principales du groupe Parfival, dont plusieurs sociétés sont spécialisées dans la fabrication de sièges ou d'articles de literie, relèvent du secteur de l'ameublement ; qu'ainsi, nonobstant les circonstances, à les supposer établies, que les techniques de fabrication des meubles de cuisine et des salles de bains seraient spécifiques, que les prix des produits ne seraient pas comparables ni les produits substituables, et que les concurrents et les circuits de distribution ne seraient pas les mêmes selon les secteurs, et nonobstant un historique, des lieux d'exploitation et une direction opérationnelle différents, l'inspecteur du travail était tenu d'apprécier si la situation économique de la société VALAUBRAC et de l'ensemble des sociétés du groupe auquel elle appartient, oeuvrant dans le secteur d'activité de l'ameublement, justifiait le licenciement de Mme X, sans se limiter, contrairement à ce que soutient la société requérante, à l'appréciation des difficultés économiques du seul sous-secteur de la fabrication et de la commercialisation des meubles de cuisines et de salles de bains ; qu'il ressort des termes mêmes de la décision en litige du 18 novembre 2005 que, pour estimer que la réalité du motif économique invoqué était établie, l'inspecteur du travail s'est borné à constater la fermeture prévue du site de production de la société VALAUBRAC à Thonon-les-Bains ; qu'il en résulte que l'autorité administrative ne peut être regardée comme ayant fait porter son examen, comme elle y était tenue, sur l'ensemble de la situation économique des sociétés du groupe, à laquelle appartenait cette société, oeuvrant dans le même secteur d'activité de l'ameublement ;
Considérant, en second lieu, que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'ainsi, lorsque la légalité d'une décision administrative est subordonnée à la satisfaction de plusieurs conditions et que l'administration a omis d'examiner l'une de ces conditions au cours de la procédure administrative, elle peut faire valoir pour la première fois devant le juge de l'excès de pouvoir le motif tiré de ce que cette condition était, en réalité, remplie à la date de la décision attaquée ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis l'auteur du recours à même de présenter ses observations sur ce nouveau motif, de rechercher si celui-ci, combiné à celui qui avait été retenu initialement, est de nature à fonder légalement la décision ; que dans l'affirmative, le juge peut écarter le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise l'administration en s'abstenant d'examiner l'une des conditions légales de la décision, sous réserve que le défaut d'examen de cette condition n'ait pas privé l'intéressé d'une garantie procédurale ;
Considérant que le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité fait valoir, pour la première fois en appel, que la condition de légalité de la décision d'autorisation de licenciement en litige, tenant à la réalité des difficultés économiques de l'ensemble des sociétés du groupe auquel appartient la société VALAUBRAC oeuvrant dans le secteur d'activité de l'ameublement, était, en réalité, remplie, à la date de ladite décision, et que si l'inspecteur du travail avait pris en considération ces difficultés, il aurait pris la même décision ; que la réalité à la date de la décision en litige, de ces difficultés économiques, dont la société requérante ne s'était, au demeurant, pas prévalu, ne ressort pas, toutefois, des pièces du dossier ; que, dès lors, en tout état de cause, ce motif n'est pas de nature à fonder légalement la décision en litige ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société VALAUBRAC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision en litige du 18 novembre 2005 ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de sa requête tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions de Mme X tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui n'a pas formé appel du jugement attaqué, une somme quelconque au titre des frais exposés par Mme X et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société VALAUBRAC est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de Mme X tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 07LY2360