La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/04/2018 | FRANCE | N°15BX03884

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 26 avril 2018, 15BX03884


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme I... E...veuve G...et M. H... G...ont demandé au tribunal administratif de Limoges, d'une part, d'enjoindre à la communauté de communes de Noblat de réaliser, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir, les travaux préconisés par l'expert dans son rapport remis le 13 janvier 2011 afin de faire cesser les nuisances sonores émises par la soufflerie du centre aquatique Aqua Noblat, d'autre part, de condamner la communauté de communes de Noblat à leur verser respec

tivement les sommes de 10 000 euros en réparation des préjudices qu'ils s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme I... E...veuve G...et M. H... G...ont demandé au tribunal administratif de Limoges, d'une part, d'enjoindre à la communauté de communes de Noblat de réaliser, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir, les travaux préconisés par l'expert dans son rapport remis le 13 janvier 2011 afin de faire cesser les nuisances sonores émises par la soufflerie du centre aquatique Aqua Noblat, d'autre part, de condamner la communauté de communes de Noblat à leur verser respectivement les sommes de 10 000 euros en réparation des préjudices qu'ils subissent du fait des nuisances sonores émises par le centre aquatique de Noblat.

Par un jugement n° 1200587 du 8 octobre 2015, le tribunal administratif de Limoges a condamné la communauté de communes de Noblat d'une part, à verser respectivement à

M. G...et à Mme G...les sommes de 1 500 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis en raison des nuisances sonores induites par le fonctionnement du centre aquatique Aqua Noblat, d'autre part, à payer les frais des expertises liquidés et taxés à la somme globale de 10 891,77 euros. Le tribunal administratif de Limoges a enfin rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 décembre 2015, le 27 janvier 2016, le 12 février 2016, le 9 juin 2017, et le 4 août 2017, la communauté de communes de Noblat, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Limoges du 8 octobre 2015 en tant qu'il l'a condamnée à verser respectivement à M. G...et à Mme G...les sommes de 1 500 euros et à payer les frais des expertises liquidés et taxés à la somme globale de 10 891,77 euros ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner solidairement les sociétés CD 21, BVL architecture, SOPCZ, BEHI et Apave à la garantir de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre, en principal, intérêts, frais et accessoires ;

3°) de condamner solidairement les sociétés CD 21, BVL architecture, SOPCZ, Apave et BEHI à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de leur responsabilité contractuelle ;

4°) de condamner solidairement les sociétés CD 21, BVL architecture, SOPCZ, Apave et BEHI à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le défendeur en première instance devant le tribunal administratif peut devant la cour administrative d'appel invoquer tous moyens, y compris des moyens nouveaux, de sorte que la communauté de communes de Noblat peut demander à ce que la société CD2I la relève indemne des condamnations prononcées à son encontre ;

- la communauté de communes de Noblat a mis en oeuvre, depuis que M. et Mme G...ont fait état de nuisances sonores provenant de la soufflerie d'aération de la piscine, les moyens propres à faire cesser ces nuisances ; elle a procédé à l'installation de baffles acoustiques, conformément au rapport d'expertise du 13 janvier 2011, et donc pris les mesures nécessaires pour faire cesser les désordres allégués par ces derniers ;

- les demandes tendant à la condamnation de la communauté de communes de Noblat à faire réaliser les travaux préconisés par l'expert doivent être rejetées en ce que M. et Mme G... ont opposé plusieurs refus à cette dernière en vue de procéder à une nouvelle expertise, laquelle aurait pourtant permis de constater si les nuisances sonores se trouvaient désormais en deçà des seuils autorisés ; seule une nouvelle expertise permettait de vérifier si après travaux les normes acoustiques réglementaires étaient respectées dans la propriété de M. et MmeG... ;

- le préjudice allégué par M. et Mme G...résulte des défauts de réalisation des travaux effectués par la société SOPCZ pour le compte de la communauté de communes de Noblat, ainsi que l'a relevé l'expert dans un rapport déposé le 10 février 2014 ; l'expert relève que la société SOPCZ, en faisant le choix de la mise en place des silencieux du type " SRP arpège MO 1 " dont la documentation technique précise : " baffles acoustiques pour moyenne et hautes fréquences ", n'a pas respecté les recommandations données dans le rapport d'expertise du 25 octobre 2011 ; l'expert relève également que la société SOPCZ n'a pas fait appel à un bureau d'étude spécialisé en acoustique ni pu produire les calculs d'atténuation demandés ; les travaux réalisés doivent être repris par la SOPCZ conformément aux conclusions de l'expert ;

- le bureau d'études CD 21, membre du groupement de maîtrise d'oeuvre en charge de la construction de l'espace Aqua Noblat, avait une mission EXE tant pour les plans d'exécution que pour les détails quantitatifs, il était donc chargé de vérifier la bonne mise en oeuvre du traitement acoustique ; la société SOPCZ avait aussi l'obligation de réaliser des essais de fonctionnement de l'installation dans son ensemble sous le contrôle du bureau d'études ;

- la société BEHI, assistant à maître d'ouvrage Haute Qualité Environnementale, avait conseillé la communauté de communes de Noblat, dans le cadre du concours de maîtrise d'oeuvre, dans l'établissement du référentiel HQE ; le confort acoustique avait été classé comme cible à traitement " performant " ; cette société, dans son rapport rédigé sur la base de la mission PRO du groupement de maîtrise d'oeuvre, précisait que " les nuisances dues aux différents éléments techniques sont correctement traités (sic)" ; elle est intervenue durant toute la phase de construction car elle avait comme mission la vérification du respect des exigences de la qualité environnementale (technique, mise en oeuvre) ;

- la société BVL avait également une mission EXE dans le cadre du contrat de maîtrise d'oeuvre ;

- les dispositifs mis en oeuvre par les constructeurs ne permettent pas d'atteindre le niveau de performance en matière de respect de 1'émergence sonore lors de leur fonctionnement, alors que cette mission relevait précisément de bureau de contrôle technique, APAVE, titulaire d'une mission F ;

- les désordres constatés sont imputables aux erreurs commises par la maîtrise d'oeuvre de la société CD21, mais résultent aussi de défauts de réalisation des travaux effectués par la société SOPCZ, la société BVL architecture, la société Apave et la société BEHI ;

- elle sollicite en outre une somme de 5 000 euros au titre de dommages et intérêts en raison du trouble de jouissance subi et des tracasseries engendrées par cette situation.

Par des mémoires en défense enregistrés le 4 février 2016, le 3 mars 2016, et le 5 février 2018, la société CD 21 conclut au rejet de la requête, et à ce que la cour mette à la charge de la communauté de communes de Noblat une somme de 5 000 euros à titre de dommages intérêts et une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions de la communauté de commune de Noblat dirigées contre elle sont irrecevables dès lors qu'elles sont présentées pour la première fois en appel ;

- les demandes indemnitaires de la communauté de commune de Noblat ne sont accompagnées d'aucune motivation et l'expert n'a jamais évoqué son éventuelle responsabilité ;

- la communauté de communes de Noblat ne démontre pas qu'elle aurait commis une faute contractuelle ; le pré-rapport d'expertise invoqué par la communauté de communes de Noblat ne lui est pas opposable dès lors qu'elle n'était pas partie au litige ;

- elle avait pour seule mission la conception et le suivi de la réalisation des lots techniques structure (gros oeuvre et charpente), fluides (plomberie, CVC, électricité) et VRD ; l'établissement des niveaux sonores limites à respecter, ainsi que le calcul des solutions techniques adaptées, n'étaient pas de sa responsabilité ; il résulte en revanche des documents contractuels que M.F..., architecte et ingénieur, était chargé de la mission de direction et d'exécution des Travaux " DET " comprenant la mission dite HQE (Haute Qualité Environnementale), et a perçu pour cela des honoraires ; il lui appartenait à ce titre de vérifier le bon respect des spécifications acoustiques tout au long de la réalisation.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2016, Mme E...veuve G...et M. G...demandent à la cour de confirmer le jugement du tribunal administratif de Limoges du 8 octobre 2015 en tant qu'il a considéré que la responsabilité de la communauté de communes de Noblat était engagée, de le réformer en tant qu'il a limité le montant de leur préjudice à la somme de 1 500 euros chacun, de condamner la communauté de communes de Noblat à leur verser à chacun une somme de 10 000 euros, d'enjoindre à la communauté de communes de Noblat de réaliser les travaux préconisés par l'expert à la page 33 de son rapport et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, enfin de mettre à la charge de la communauté de communes de Noblat une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- au regard de l'importance des nuisances constitutives de troubles anormaux du voisinage, ils sont fondés à solliciter en réparation de leurs préjudices respectifs, la condamnation de la communauté de communes de Noblat à leur verser, à chacun, la somme de 10.000,00 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis ;

- les travaux réalisés par la communauté de communes de Noblat sont insuffisants au regard des préconisations de l'expert, ainsi qu'il le relève dans son deuxième rapport du 10 février 2014.

Par des mémoires en défense enregistrés le 24 juin 2016 et le 30 juin 2017, la société Apave SudEurope conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire en cas de condamnation solidaire ou in solidum, à ce que la cour prononce un partage de responsabilité entre les codébiteurs de cette obligation et condamne in solidum la société SOPCZ et la société CD 21 à la garantir des condamnations correspondant aux parts de responsabilités leur incombant, et en cas d'appel en garantie dirigé à son encontre à ce que la cour limite la part de responsabilité susceptible d'être mise à sa charge, enfin, à ce que la cour mette à la charge de la communauté de communes de Noblat ou de tout autre succombant une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions en garantie dirigées contre elle par la communauté de communes de Noblat sont nouvelles en appel, alors qu'elle n'avait pas été appelée en première instance, et par suite irrecevables ;

- aucun élément n'est versé au dossier de nature à justifier de l'habilitation du président de la communauté de communes de Noblat à ester en justice ;

- la communauté de communes de Noblat ne présente aucune demande particulière et ne formule aucun grief à son encontre ;

- aucune faute ne peut lui être reprochée dans le cadre de sa mission de contrôle technique qui concernait la solidité de l'ouvrage et la sécurité des personnes ; aucune mission de type Ph relative à l'isolation acoustique ne lui a été confiée ; la mission F à laquelle se réfère la communauté de communes de Noblat est relative au fonctionnement des installations, c'est-à-dire à la vérification que l'installation peut assurer le service demandé dans des conditions de performance imposées par les prescriptions techniques contractuelles ; les essais pratiqués par la SOPCZ et qu'elle a vérifiés ne comprenaient pas d'essais sonores ;

- les travaux de la société SOPCZ ont été réceptionnés sans réserve le 16 octobre 2009 ;

- la communauté de communes de Noblat n'a jamais constaté que le système de ventilation était défaillant lors de la mise en service de la piscine ; la plainte pour nuisances sonores résulte non pas du maître de l'ouvrage mais de tiers par rapport à l'ouvrage public qui affirment que l'importance du niveau sonore de la soufflerie leur cause un trouble anormal et spécial, sans pour autant alléguer que les préjudices subis résulteraient d'un défaut technique de cette soufflerie ; elle n'était pas titulaire d'une obligation de vérification du niveau sonore des installations ;

- la société SOPCZ a commis une faute en ne s'assurant pas de la cohérence des travaux préparatoires réalisés par rapport aux exigences réglementaires en termes acoustiques ; la responsabilité de cette société est engagée au titre de la période 2009-2012 dans la mesure où les nuisances sonores sont imputables à un manquement contractuel ;

- la société CD 21 devait, en qualité de bureau d'études de traitement de l'air, définir les caractéristiques du traitement acoustique que l'entreprise en charge du lot n°15 devait mettre en oeuvre et elle avait également en charge le contrôle de sa mise en oeuvre.

Par des mémoires en défense enregistrés le 12 janvier 2017, le 3 juillet 2017, et le 23 août 2017, la société SOPCZ conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de la communauté de communes de Noblat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions dirigées à son encontre sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;

- le maître d'ouvrage dont la responsabilité est mise en cause par un tiers dans le cadre de dommages liés à l'existence d'un ouvrage public ne peut agir en garantie contre les constructeurs que sur un fondement contractuel ; or les dommages causés aux tiers qui sont rattachés aux obligations contractuelles des constructeurs relatives à la réalisation de l'ouvrage prennent fin avec la réception ;

- à la suite de l'inauguration du centre aquatique, et après les plaintes des époux G...relatives aux nuisances sonores, elle a procédé à des travaux de correction acoustique la semaine n°5l de l'année 2009, qui n'ont pas donné satisfaction ; à la suite du rapport d'expertise du 13 janvier 2011, elle a effectué de nouveaux travaux en mars 2012 ; à la suite de ces travaux, les époux G...se sont opposés à la réalisation de nouvelles mesures acoustiques et un nouveau rapport d'expertise a été réalisé le 10 février 2014, lequel démontre que les niveaux de bruit mesurés n'excèdent pas les inconvénients normaux de voisinage ;

- pour la période du mois d'octobre 2009 au mois de mars 2012, seule la responsabilité de la communauté de communes de Noblat, qui ne démontre ni un cas de force majeure ni une faute de la victime, peut être engagée en sa qualité de maître d'ouvrage.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 juin 2017, la société BVL Architecture conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que les sociétés CD 21, SOPCZ, BEHI et Apave soient condamnées à la garantir de toute condamnation éventuelle prononcée à son encontre et à ce que la cour mette à la charge de la partie succombante la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions en garantie dirigées contre elle par la communauté de communes de Noblat sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;

- la communauté de communes de Noblat ne démontre pas qu'elle ait commis une quelconque faute ;

- les sociétés CD 21, SOPCZ, BEHI et Apave doivent la relever indemne de toute condamnation dès lors que le bureau d'études avait une mission EXE et devait vérifier la bonne mise en oeuvre des contraintes acoustiques du chauffage et de la ventilation ;

- la société SOPCZ avait connaissance des impératifs de traitement acoustiques du bâtiment ;

- la société BEHI devait vérifier le respect des exigences de la qualité environnementale et, notamment, le respect des normes acoustiques en vigueur.

Par ordonnance du 2 février 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 23 février 2018 à 12 heures.

Un mémoire présenté pour la société SOPCZ a été enregistré le 1er mars 2018, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., représentant la SA SCOP SOPCZ et de MeB..., représentant la société BVL Architecture.

Considérant ce qui suit :

1. La communauté de communes de Noblat a fait procéder à la construction d'un centre aquatique, inauguré le 16 octobre 2009, situé à proximité de la maison d'habitation de Mme G...et de son fils. Ces derniers se sont plaints des désagréments sonores provoqués par la soufflerie de l'aération de la piscine. Ils ont saisi le tribunal administratif de Limoges d'une demande d'expertise le 23 juin 2010 et l'expert a déposé son rapport le 13 janvier 2011. Par une requête enregistrée le 11 avril 2012, M. et Mme G...ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'enjoindre à la communauté de communes de Noblat de réaliser les travaux recommandés par l'expert et de condamner la communauté de communes de Noblat à leur verser la somme de 20 000 euros en réparation de leur préjudice en lien avec les nuisances sonores. Le 10 février 2014, un second rapport d'expertise a été déposé par M.D..., suite à sa nouvelle désignation par le tribunal administratif de Limoges sur requête en référé expertise introduite par la communauté de communes, qui n'avait pu obtenir l'accord amiable des consorts G...pour procéder à des mesures de contrôle des travaux effectués. Par jugement du 8 octobre 2015, le tribunal administratif de Limoges a condamné la communauté de communes de Noblat à verser respectivement à M. G...et à Mme G...des sommes de 1 500 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis en raison des nuisances sonores induites par le fonctionnement du centre aquatique Aqua Noblat avant la réalisation des travaux. La communauté de communes de Noblat relève appel de ce jugement par la voie de l'appel principal et présente des conclusions en garantie à l'encontre des constructeurs, alors que M. et Mme G...demandent la réformation du jugement par la voie de l'appel incident. Des appels provoqués croisés sont également présentés par certains constructeurs à titre subsidiaire.

Sur l'appel principal :

2. La communauté de communes de Noblat fait valoir qu'elle a mis en oeuvre, depuis que M. et Mme G...ont fait état de nuisances sonores provenant de la soufflerie d'aération de la piscine, les moyens propres à faire cesser ces nuisances en procédant à l'installation de baffles acoustiques, conformément au rapport d'expertise du 13 janvier 2011. Toutefois, le rapport d'expertise remis par l'expert judiciaire après ordonnance du tribunal administratif de Limoges en date du 23 juin 2010 et la réalisation de mesures acoustiques réalisées le 25 octobre 2010 à l'extérieur du centre aquatique Aqua Noblat et à l'extérieur de l'habitation de M. et Mme G...ont permis de relever que l'émergence globale calculée en période nocturne et en configuration fenêtres ouvertes était supérieure aux limites réglementaires déterminées par le code de la santé publique, soit respectivement 5 dB et 7 dB dans le salon et la chambre de M. G... alors que la limite réglementaire est fixée, en l'espèce, à 3 dB. Ainsi, les premiers juges ont pu estimer à juste titre que pour la période du 16 octobre 2009, date de l'inauguration du centre aquatique, au mois de mars 2012, les nuisances sonores subies par M. et Mme G... et résultant du fonctionnement de cet ouvrage public sont constitutives de troubles anormaux et spéciaux, sans que la communauté de communes puisse utilement faire valoir, au regard de la période retenue, qu'elle aurait pris les mesures nécessaires pour mettre fin aux nuisances ou que M et Mme G...se seraient opposés à une campagne de mesures de vérification en 2013.

3. La communauté de communes de Noblat appelle en garantie les sociétés CD 21, BVL architecture, SOPCZ, BEHI et Apave. Toutefois, ces conclusions n'avaient pas été formellement présentées devant le tribunal, sans que la communauté de communes puisse utilement faire valoir qu'elle avait mentionné les sociétés comme défenderesses et rappelé devant les premiers juges le contenu du rapport de l'expert qui mettait en cause l'insuffisance des mesures prises par la SOPCZ, le cabinet d'architectes et le bureau de contrôle. Ces conclusions, qui contrairement à ce que soutient la collectivité requérante sont distinctes de moyens et ne peuvent être présentées pour la première fois en appel, ne peuvent donc qu'être rejetées, comme l'ont fait valoir les productions des sociétés mises en cause, comme irrecevables.

4. Enfin, si la communauté de communes demande également la condamnation des mêmes sociétés à l'indemniser des " troubles de jouissance et tracasseries engendrées par cette situation ", ces conclusions, également nouvelles en appel, sont dépourvues de toute argumentation de nature à en apprécier le fondement. Par suite, elles ne peuvent qu'être rejetées.

Sur l'appel incident :

5. En premier lieu, M. et Mme G...font valoir que les travaux réalisés par la communauté de communes de Noblat sont insuffisants au regard des préconisations de l'expert, ainsi qu'il le relève dans son rapport du 10 février 2014. Il résulte toutefois de ce second rapport d'expertise judiciaire qu'après les travaux réalisés par la société SOPCZ pour le compte de la communauté de communes de Noblat en mars 2012, consistant en la pose de huit " baffles acoustiques " dans la cour anglaise qui accueille l'air vicié extrait des locaux du centre nautique, les émergences globales et spectrales mesurées sont conformes à la réglementation applicable, que ce soit en période diurne ou nocturne et en configuration fenêtres fermées ou ouvertes. S'il est vrai que ce rapport relève également qu'en basse fréquence et en configuration période nocturne et fenêtres fermées, des émergences spectrales non conformes ont été constatées, il ne résulte pas de l'instruction que le bruit provoqué par le système de ventilation du centre aquatique à compter du mois de mars 2012 aurait excédé les inconvénients que doivent normalement supporter, sans indemnité, dans l'intérêt général, les riverains ou les voisins d'ouvrages publics.

6. M. et Mme G...soutiennent en deuxième lieu qu'au regard de l'importance des nuisances constitutives de troubles anormaux de voisinage, ils sont fondés à solliciter en réparation de leurs préjudices respectifs, la condamnation de la communauté de communes de Noblat à leur verser à chacun, la somme de 10 000 euros. Toutefois, en indemnisant à hauteur de 1 500 euros le préjudice de M. et Mme G...en lien avec les nuisances sonores subies pendant la période comprise entre le 16 octobre 2009 et le mois de mars 2012, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce.

7. Enfin, les travaux réalisés par la société SOPCZ pour le compte de la communauté de communes de Noblat en mars 2012 ayant permis de limiter les nuisances sonores subies par M. et Mme G...dans des proportions telles qu'elles ne sont plus constitutives de troubles anormaux de voisinage, les conclusions à fin d'injonction présentées par ces derniers ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.

Sur les conclusions de la société CD 21 tendant à ce que la cour mette à la charge de la communauté de communes de Noblat une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts :

8. La société CD 21 ne démontre pas que le présent appel lui ait causé un préjudice de nature à ouvrir droit à indemnisation. Par suite, ces conclusions ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

9. Il n'y pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la communauté de communes de Noblat est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident de M. et Mme G...sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes de Noblat, à M. J...G..., à Mme I...E...veuveG..., à la Société des ouvriers, plombiers, couvreurs, zingueurs de Limoges (SOPCZ), à la société BVL Architecture, à la société CD 21 Bureau d'Etudes, à la société BEHI et à la société Apave Sudeurope.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 avril 2018.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIESLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

No 15BX03884


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX03884
Date de la décision : 26/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-01-03 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Responsabilité encourue du fait de l'exécution, de l'existence ou du fonctionnement de travaux ou d'ouvrages publics.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DURAND-MARQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-04-26;15bx03884 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award