Vu la requête, enregistrée le 30 janvier 2012, présentée pour le Grand Conseil de la Mutualité, agissant par son directeur général en exercice, la SCP F...Avarezi, prise en la personne de MeF..., en qualité d'administrateur judiciaire et MeC..., en qualité de mandataire judiciaire, et dont le siège est Maison de la Mutualité 1 rue François Moisson à Marseille (13002), par Me H... ;
Le Grand Conseil de la Mutualité demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1003282 du 29 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions en date du 12 mars et du 28 mai 2010 par lesquelles l'inspectrice du travail des Bouches-du-Rhône l'a autorisé à licencier M. B... G... et a rejeté le recours gracieux formé contre cette autorisation ;
2°) de mettre à la charge de M. B...G...la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2013 :
- le rapport de M.A...'hôte, premier conseiller,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- les observations de Me H...pour le Grand Conseil de la Mutualité et de Me E... pour M.G... ;
1. Considérant que, par un courrier du 20 janvier 2010, le directeur du Grand Conseil de la Mutualité a demandé à l'inspection du travail des Bouches-du-Rhône l'autorisation de licencier pour faute grave M. B...G..., exerçant l'activité de chirurgien-dentiste et titulaire d'un mandat de délégué du personnel ; que l'inspectrice du travail de la 11ème section des Bouches-du-Rhône a accordé l'autorisation sollicitée le 12 mars 2010 ; que, le 28 mai 2010, elle a rejeté le recours gracieux formé le 18 mai par M.G... ; que le Grand Conseil de la Mutualité demande à la Cour d'annuler le jugement du 29 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions de l'inspectrice du travail du 12 mars et du 28 mai 2010 ;
Sur la recevabilité des demandes de première instance :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier de première instance, notamment d'un courrier des services postaux du 25 juin 2010, que M. G...a été avisé le 17 mars 2010 que le pli recommandé lui notifiant la décision de l'inspectrice du travail du 12 mars 2010 était mis en instance au bureau de poste ; qu'ainsi, en tout état de cause, le délai de recours ouvert à l'intéressé pour contester cette décision a commencé à courir au plus tôt à cette date et expirait le 18 mai 2010 à minuit ; que M. G... a saisi le tribunal administratif de Marseille d'un recours en annulation par une télécopie du 18 mai 2010, parvenue à 16 heures 19 et régularisée par la présentation de l'original signé enregistré au greffe du tribunal le lendemain ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir soulevée devant eux tirée de la tardiveté de la demande d'annulation de la décision du 12 mars 2010 ;
3. Considérant, en second lieu, que la décision du 28 mai 2010 ayant rejeté le recours gracieux de M.G..., qui comportait la mention des voies et délais de recours, a été notifiée au mandataire de l'intéressé, MeE..., le 2 juin 2010 ; que cette notification a été de nature à faire courir à l'encontre de M. G...le délai de recours contentieux ouvert contre cette décision, dès lors que les dispositions de l'article R. 2421-12 du code du travail, selon lesquelles " la décision de l'inspecteur du travail est (...) notifiée par lettre recommandée avec avis de réception (...) au salarié ", s'appliquent uniquement aux décisions prises sur les demandes d'autorisation de licenciement mais ne régissent pas les décisions prises ultérieurement sur les recours gracieux formés contre ces dernières ; que M. G...a demandé pour la première fois au tribunal d'annuler la décision du 28 mai 2010 dans son mémoire enregistré le 3 mars 2011 ; que, par suite, sa demande d'annulation était tardive et c'est à tort que les premiers juges y ont fait droit ; que le jugement du 29 novembre 2011 est, dans cette mesure, entaché d'irrégularité et doit être annulé ;
Sur la légalité de la décision du 12 mars 2010 :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2411-5 du code du travail : " Le licenciement d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. (...) " ;
5. Considérant qu'en vertu de ces dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis du mandat de délégué du personnel, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec leurs fonctions représentatives normalement exercées ou leur appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exercice des fonctions dont il est investi ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 15 du contrat de travail liant M. G...au Grand Conseil de la Mutualité : " Le présent contrat sera résilié de plein droit sans préavis, ni indemnité, dans le cas de faute grave appréciée dans les conditions prévues aux articles 18, 19 et 20 ci-dessous, ainsi qu'en cas de faute contre l'honneur et de délai de droit commun " ; qu'aux termes de l'article 20 du contrat : " Tout litige portant sur des questions purement professionnelles est de la compétence exclusive de la juridiction disciplinaire et sera soumis au Conseil Départemental de l'Ordre des Chirurgiens-Dentistes " ;
7. Considérant qu'il incombe à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé pour motif disciplinaire, d'apprécier, sous le contrôle du juge administratif, si les règles de procédure d'origine conventionnelle préalables à sa saisine, ont été respectées, y compris lorsque ces règles sont issues des stipulations propres au contrat de travail de l'intéressé ;
8. Considérant qu'il ne ressort ni de la lecture de la décision du 12 mars 2010, ni d'aucune pièce du dossier qu'avant d'autoriser le licenciement de M. G..., l'inspectrice du travail ait vérifié si la procédure préalable prévu à l'article 20 précité du contrat de travail avait été respectée par le Grand Conseil de la Mutualité ; que la télécopie adressée le 2 mars 2010 par l'inspectrice du travail au conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes des Bouches-du-Rhône tendait uniquement à recueillir l'avis de cette instance sur la compatibilité de l'état pathologique de M. G... avec l'exercice de sa profession, seule question dont le conseil de l'ordre avait été jusque là saisi par l'employeur, mais n'avait aucunement pour objet de s'assurer que la formation disciplinaire du conseil de l'ordre avait été préalablement appelée à se prononcer sur les griefs justifiant la procédure de licenciement pour faute engagée à l'encontre de l'intéressé, comme l'imposait l'article 20 du contrat de travail ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que la saisine de la juridiction disciplinaire n'a été sollicitée par le Grand Conseil de la Mutualité que le 4 mars 2010, soit postérieurement à la télécopie du 2 mars ; qu'il suit de là, ainsi que l'a jugé le tribunal, qu'en ne contrôlant pas si la règle de procédure prévue par le contrat de travail de M. G..., qui constitue une garantie de fond de nature à priver de base légale son licenciement, avait été régulièrement mise en oeuvre, l'inspectrice du travail a entaché sa décision d'erreur de droit ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont prononcé l'annulation de la décision du 12 mars 2010 ayant autorisé le licenciement de M G... comme étant entachée d'illégalité ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Grand Conseil de la Mutualité et le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sont fondés uniquement à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision de l'inspectrice du travail du 28 mai 2010 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes des parties présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 novembre 2011 est annulé en tant qu'il a prononcé l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 28 mai 2010.
Article 2 : La demande d'annulation de la décision de l'inspectrice du travail du 28 mai 2010 présentée par M. G... devant le tribunal administratif de Marseille et le surplus des conclusions d'appel des parties sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Grand Conseil de la Mutualité, à la SCP F...Avazeri, à Me D...C..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à M. B... G....
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N° 12MA00395 2
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