Vu I°), sous le n° 09LY00501, la requête, enregistrée le 5 mars 2009, présentée pour la société FRANCE TELECOM, dont le siège est 6 Place d'Alleray à Paris Cedex 15 (75505) ;
FRANCE TELECOM demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0703725 du 29 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 22 septembre 2006 par lequel le ministre délégué à l'industrie avait révoqué M. A ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A au tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société soutient que le jugement est mal fondé dès lors que le rapport de saisine du conseil de discipline a été signé par une personne disposant d'une délégation régulièrement publiée, que le procès verbal établissant qu'aucun accord sur une proposition de sanction n'avait été obtenu du conseil de discipline était joint à la demande de sanction adressée par son président au ministre ; que la demande de première instance doit être rejetée dès lors que le conseil de discipline était régulièrement composé, que le rapporteur n'a pas fait preuve de partialité, que toutes les sanctions ont été mises aux voix, que la circonstance que le conseil de discipline n'aurait pas été informé des motifs de la sanction est sans influent sur la légalité de celle-ci, que les faits d'utilisation frauduleuse de matériel d'essai et de maintenance de la société en vue d'un profit personnel sont établis et fautifs, alors même qu'ils ne sont pas constitutifs du délit d'escroquerie, que la gravité de la faute justifiait la révocation de l'agent ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu la mise en demeure adressée le 26 janvier 2010 à la SCP Deygas-Perrachon-Bes et associés, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 2010, présenté pour M. A, qui conclut au rejet de la requête et demande la condamnation de la société FRANCE TELECOM à lui verser la somme de 2 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que la requête est irrecevable dès lors que la société n'était pas partie en première instance et n'avait pas qualité pour faire tierce-opposition au jugement ; que la procédure préalable au licenciement était irrégulière dès lors que le signataire du rapport de saisine du conseil de discipline était incompétent, que le ministre n'a pas été régulièrement saisi de l'ensemble du dossier, que le conseil de discipline était irrégulièrement composé, que le rapporteur a fait preuve de partialité, que les sanctions disciplinaires n'ont pas été mises aux voix, que le conseil de discipline n'a pas été informé des motifs de la sanction, que la sanction est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 2 juillet 2010, présentée pour M. A ;
Vu II°), sous le n° 09LY00530, le recours, enregistré le 9 mars 2009, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI ;
Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0703725 du 29 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 22 septembre 2006 par lequel le ministre délégué à l'industrie avait révoqué M. A ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A au tribunal administratif ;
Il soutient que le jugement est mal fondé dès lors que l'attestation du secrétaire du conseil d'administration suffit à établir l'insertion au recueil de la délégation consentie au signataire du rapport de saisine du conseil de discipline, que le compte-rendu des débats au conseil de discipline était joint à la demande de sanction présentée par le président de FRANCE TELECOM ; que pour le reste il s'en remet aux écritures de FRANCE TELECOM et à ses mémoires de première instance ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu la mise en demeure adressée le 26 janvier 2010 à M. A, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 ;
Vu le décret n° 96-1174 du 27 décembre 1996 ;
Vu le décret n° 2004-980 du 17 septembre 2004 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2010 :
- le rapport de M. Givord, président ;
- les observations de Me Brun, représentant M. A et de M. A ;
- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
La parole ayant été, de nouveau, donnée à Me Brun et à M. A ;
Considérant que les requêtes n° 09LY00501 présentée pour FRANCE TELECOM et n° 09LY00530 présentée par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI sont relatives à la situation d'un même fonctionnaire, présentent à juger la même question et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que par les requêtes susvisées, FRANCE TELECOM et le MINISTRE DE L'ECONOMIE demandent à la cour d'annuler le jugement du 29 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté, en date du 22 septembre 2006, par lequel le ministre de l'industrie avait révoqué M. A, agent de maîtrise de la société FRANCE TELECOM ;
Sur la recevabilité de la requête de FRANCE TELECOM :
Considérant que FRANCE TELECOM, mis en cause par le tribunal, employeur de M. A a, en cette qualité, intérêt à faire appel du jugement par lequel le tribunal administratif a annulé le licenciement de ce fonctionnaire en poste dans la société ; que, dés lors, la fin de non recevoir présentée par M. A doit être rejetée ;
Sur le bien-fondé du jugement :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 8 du décret susvisé du 27 décembre 1996 : Les délégations de compétence ou de signature précisent les compétences déléguées ou les actes dont la signature est déléguée et le titulaire de la délégation. Les actes portant délégation de compétence ou de signature sont publiés dans les conditions prévues par le conseil d'administration. ; que pour l'application de ces dispositions, le conseil d'administration de FRANCE TELECOM a, par une délibération du 10 septembre 1997, décidé que pour assurer la publication des délégations consenties par son président, celles-ci seraient insérées dans un registre tenu par le secrétaire du conseil ; que ce secrétaire a attesté, le 16 septembre 2007, que la délégation donnée, le 14 novembre 2005, par le président du conseil d'administration à M. B pour signer les rapports de saisine du conseil de discipline pour les sanctions du quatrième groupe applicables aux fonctionnaires de FRANCE TELECOM avait été insérée dans le registre, le 15 novembre 2005 ; qu'en l'absence de tout élément au dossier de nature à mettre en cause l'exactitude de cette attestation, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé que le rapport saisissant le conseil de discipline du cas de M. A avait été signé par une personne ne justifiant pas d'une délégation régulièrement publiée ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 10 du décret du 17 septembre 2004 : Au vu de l'avis du conseil de discipline ou si aucune des propositions soumises à ce conseil, y compris celle consistant à ne pas proposer de sanction, n'a obtenu l'accord de la majorité des membres présents, le président de France Télécom peut, soit décider d'infliger au fonctionnaire poursuivi l'une des sanctions des trois premiers groupes prévues à l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, soit proposer au ministre chargé des télécommunications d'infliger à ce fonctionnaire l'une des sanctions du quatrième groupe prévues au même article. / La proposition adressée au ministre est accompagnée du dossier soumis au conseil de discipline, de l'avis émis par celui-ci ou, à défaut, du procès-verbal établissant qu'aucun accord sur une proposition de sanction n'a pu être obtenu, ainsi que d'un rapport motivé établi par le président de France Télécom. (...) ; que le compte-rendu du conseil de discipline, réuni le 3 mars 2006, mentionne que la révocation de l'agent et l'absence de toute sanction ont fait l'objet d'un partage des voix du conseil, que toutes les autres sanctions ont été rejetées à l'unanimité ; que ce compte-rendu constitue le procès verbal établissant qu'aucun accord n'a pu être obtenu au sein du conseil de discipline ; qu'il ne résulte pas des termes de l'arrêté en litige, qui vise l'avis du conseil de discipline, que le ministre aurait commis une erreur sur le sens des délibérations du conseil de discipline ; qu'ainsi, en l'absence de tout élément au dossier de nature à établir que le compte-rendu de la séance du 3 mars 2006 du conseil de discipline n'aurait pas été joint à la demande de sanction, adressée le 30 mai 2006 par le président de FRANCE TELECOM au ministre, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé que la révocation de M. A était intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de transmission du procès verbal prévue par les dispositions précitées de l'article 10 ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon ;
Sur la légalité externe de l'arrêté du 22 septembre 2006 :
Considérant, en premier lieu, que M. A n'indique ni le nom ni le grade des agents qui auraient irrégulièrement siégé lors du conseil de discipline réuni le 3 mars 2006 ; que dès lors, le moyen tiré de la composition irrégulière du conseil de discipline est dépourvu des précisions permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 20 du décret susvisé du 17 septembre 2004 : La délégation par le président de France Télécom de ses pouvoirs de nomination et de gestion et son autorisation de subdélégation prévues par le premier alinéa de l'article 29-1 de la loi du 2 juillet 1990 susvisée ne comprennent pas son pouvoir de proposition de sanctions du quatrième groupe. ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le président de FRANCE TELECOM délègue sa signature pour signer le rapport saisissant le conseil de discipline de la situation d'un agent à l'encontre duquel il est envisagé de prendre une sanction du quatrième groupe ; que comme il a été dit précédemment, M. B justifiait d'une délégation de signature régulièrement publiée pour saisir le conseil de discipline de la situation de M. A ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort ni du rapport de saisine du conseil de discipline ni des débats devant ce conseil que le rapporteur aurait dénaturé les faits reprochés à l'agent ou cherché à abuser le conseil ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des termes mêmes du procès-verbal du conseil de discipline que toutes les sanctions figurant dans l'échelle des sanctions ont été mises aux voix, conformément aux dispositions de l'article 8 du décret susvisé du 17 septembre 2004 ;
Considérant, en cinquième lieu, que la demande de sanctions adressée au ministre a été signée par le président du conseil d'administration de FRANCE TELECOM ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'ensemble du dossier et le procès verbal établissant qu'aucun accord n'a pu être obtenu au sein du conseil de discipline n'auraient pas été joints à cette demande ; que celle-ci est motivée par la circonstance que les faits reprochés à l'agent, constitutifs de manquement à l'honneur et à la déontologie professionnelle sont d'une particulière gravité ; qu'ainsi, M. A n'est pas fondé à soutenir que la demande adressée au ministre aurait méconnu les dispositions de l'article 10 précité du décret du 17 septembre 2004 ;
Considérant, en dernier lieu, que la circonstance, postérieure à la décision attaquée, que le conseil de discipline n'aurait pas été informé des motifs qui ont conduit le ministre à prononcer une sanction est sans incidence sur la légalité de la décision de révocation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière ;
Sur la légalité interne de l'arrêté du 22 septembre 2006 :
Considérant qu'au cours des années 1996 et 1997, M. A a utilisé des indicatifs réservés à l'exploitation et à la maintenance du réseau, depuis son domicile, pour obtenir en priorité la liaison téléphonique avec le standard d'une émission de jeux télévisés, lui permettant ainsi de donner la réponse avant les autres concurrents ; qu'il a ainsi gagné plus d'une dizaine de fois sous son nom ou ceux de prête-nom ;
Considérant que si la Cour d'appel de Lyon a relaxé, le 18 décembre 2002, l'intéressé du délit d'escroquerie, les faits reprochés constituent une utilisation frauduleuse des moyens du service pour la recherche d'un enrichissement personnel ; qu'ils sont constitutifs d'une faute justifiant une sanction disciplinaire ;
Considérant qu'eu égard à la gravité des faits, contraires à la probité et de nature à porter atteinte à l'image de la société, alors même qu'ils étaient anciens à la date de la décision attaquée et que M. A n'avait pas fait antérieurement l'objet d'une sanction disciplinaire, la sanction de révocation n'est pas manifestement disproportionnée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que FRANCE TELECOM et le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 22 septembre 2006 par lequel le ministre de l'industrie a révoqué M. A et à demander le rejet des conclusions de première instance présentée par M. A ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. A la somme que la société FRANCE TELECOM demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par M. A soient mises à la charge de FRANCE TELECOM, qui n'est pas la partie perdante ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 29 décembre 2008 est annulé. Les conclusions présentées au tribunal administratif par M. A et tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2006 décidant sa révocation sont rejetées.
Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à FRANCE TELECOM, au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI et à M. Jean-Pierre A.
Délibéré après l'audience du 29 juin 2010, à laquelle siégeaient :
M. Givord, président de formation de jugement,
M. Seillet et Mme Pelletier, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 12 juillet 2010.
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Nos 09LY00501,09LY00530...
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