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22/03/2012 | FRANCE | N°11LY00858

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 5, 22 mars 2012, 11LY00858


Vu la requête, enregistrée le 1er avril 2011, présentée pour M. Nicolas A domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0807276 du 3 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, d'une part, a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 790 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de la sanction d'exclusion prononcée à son encontre par la section disciplinaire de l'Université Claude Bernard Lyon 1 le 6 octobre 2006 et, d'autre part, a renvoyé au Conseil d'Etat ses conclusi

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Vu la requête, enregistrée le 1er avril 2011, présentée pour M. Nicolas A domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0807276 du 3 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, d'une part, a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 790 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de la sanction d'exclusion prononcée à son encontre par la section disciplinaire de l'Université Claude Bernard Lyon 1 le 6 octobre 2006 et, d'autre part, a renvoyé au Conseil d'Etat ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité en réparation des conséquences dommageables de la durée excessive de la procédure de sursis à exécution suivie devant le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

2°) de prononcer la condamnation demandée avec capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la faute lourde de l'Etat est caractérisée ;

- l'université a rendu une décision suivant une instruction conduite à charge ;

- n'a pas été prise en compte la fausse attestation d'un médecin ;

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, ses conclusions relatives au sursis à exécution ne relevaient pas de la compétence du Conseil d'Etat pour durée excessive de la procédure ;

- la jonction par le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) de sa demande de sursis avec l'action au fond l'a privé de la possibilité d'échapper à l'exécution de la sanction ;

- il a perdu le bénéfice d'une année d'études et d'une année de revenus pour un préjudice estimé à 250 000 euros ;

- il avait pour projet d'embrasser la carrière d'orthodontiste et a dû y renoncer ;

- son préjudice peut être estimé à 500 000 euros ;

- il a exposé des frais dans les procédures devant l'université Claude Bernard Lyon 1 et le CNESER pour un montant de 10 000 euros ;

- son préjudice moral s'élève à 30 000 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 juillet 2011, présenté par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le Tribunal a statué compte tenu des pièces et témoignages produits par l'intéressé ;

- le moyen tiré d'une faute lourde manque en fait ;

- le requérant a bien invoqué une durée excessive de la procédure de sursis à exécution devant le Tribunal et c'est donc à juste titre que ce dernier a renvoyé ces conclusions au Conseil d'Etat ;

- il renvoie pour le surplus à ses écritures de première instance ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 octobre 2011, présenté pour M. A, qui, par les mêmes moyens, conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Vu le courrier en date du 6 janvier 2012 par lequel les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office le moyen tiré de ce que M. A n'est pas recevable à relever appel du jugement attaqué en tant qu'il a procédé au renvoi au Conseil d'Etat des conclusions relatives à la durée excessive de la procédure de sursis à exécution devant le CNESER ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 janvier 2012, présenté pour M. A qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 janvier 2012, présenté par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui maintient ses précédents moyens et conclusions ;

Il soutient en outre que M. A n'est pas recevable à relever appel du jugement attaqué en tant qu'il a procédé au renvoi au Conseil d'Etat de ses conclusions relatives à la durée excessive de la procédure de sursis à exécution devant le CNESER ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2012 :

- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

- et les observations de Me Perrier, avocat de M. A ;

Considérant que par une décision du 6 octobre 2006, la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Claude Bernard Lyon 1 a déclaré M. A coupable d'avoir falsifié des documents dans le cadre de sa 4ème année d'études en odontologie et a prononcé à son encontre la sanction d'exclusion de tout établissement public d'enseignement supérieur pour une durée de deux ans dont un an avec sursis, entraînant la nullité des groupes d'épreuves des modules 2 et 5 des enseignements de D2 ; que M. A a saisi le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), statuant en appel, de demandes de sursis à exécution et d'annulation de cette décision ; que par une décision du 24 septembre 2007, le CNESER a annulé cette sanction et relaxé l'intéressé, au bénéfice du doute, des poursuites disciplinaires engagées à son encontre, ne statuant pas expressément sur sa demande de sursis à exécution ; que M. A a recherché devant le Tribunal administratif de Lyon la responsabilité de l'Etat du fait de fautes qu'aurait commises la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université dans l'exercice de sa fonction juridictionnelle et le CNESER en n'examinant pas sa demande de sursis à exécution ; que par un jugement du 3 février 2011 le Tribunal a regardé les conclusions mettant en cause la procédure de sursis devant le CNESER comme tendant en réalité à la mise en jeu de la responsabilité de l'Etat en raison de la durée excessive de la procédure de sursis à exécution au sens du 5° de l'article R. 333-1 du code de justice administrative et les a transmises au Conseil d'Etat et, a rejeté les conclusions relatives aux conséquences de la décision de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université ;

Sur les conclusions relatives à la durée excessive de la procédure de sursis à exécution devant le CNESER :

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal a renvoyé au Conseil d'Etat les conclusions de M. A concernant sa demande de sursis à exécution devant le CNESER ; que par une décision du 13 février 2012, le Conseil d'Etat a statué sur ces conclusions et condamné l'Etat à verser à l'intéressé une indemnité en réparation du préjudice moral résultant pour lui des désagréments causés par le délai excessif de la procédure de sursis à exécution ; que, dès lors, en tant qu'elle est dirigée contre cette partie du jugement attaqué, la requête susvisée de M. A est devenue sans objet ;

Sur les conclusions relatives aux fautes lourdes qu'aurait commises la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université Claude Bernard Lyon 1 :

Considérant qu'en vertu des principes généraux régissant la responsabilité de la puissance publique, une faute lourde commise dans l'exercice de la fonction juridictionnelle par une juridiction administrative est susceptible d'ouvrir droit à indemnité ; que si l'autorité qui s'attache à la chose jugée s'oppose à la mise en jeu de cette responsabilité dans les cas où la faute lourde alléguée résulterait du contenu même de la décision juridictionnelle et où cette décision serait devenue définitive, la responsabilité de l'Etat peut cependant être engagée dans le cas où le contenu de la décision juridictionnelle est entaché d'une violation manifeste du droit communautaire ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers ;

Considérant, en premier lieu, que le fait pour le CNESER d'avoir annulé la sanction infligée par la section disciplinaire de l'université alors que M. A lui reproche en particulier d'avoir instruit son dossier à charge ne saurait suffire à révéler une faute lourde de nature à engager la responsabilité de l'Etat dès lors que, d'une part, l'intéressé a reconnu les faits qui lui étaient reprochés et que, d'autre part, comme en témoigne la décision de relaxe prononcée au bénéfice du doute, cette sanction n'était pas manifestement infondée et que la section disciplinaire s'est déterminée en fonction de l'ensemble des éléments portés à sa connaissance, y compris des éléments à décharge et des circonstances atténuantes jouant en faveur de l'intéressé ; que la prise en compte par la section disciplinaire d'un témoignage qui, par la suite, s'est révélé erroné, n'est pas davantage constitutive d'une faute lourde ;

Considérant, en second lieu, que si, en violation des règles sur le secret de l'instruction, l'université a communiqué à un témoin dans l'instance disciplinaire le rapport de la commission d'instruction du CNESER, cette circonstance, postérieure à la décision de la section disciplinaire du conseil d'administration de l'université à l'origine des préjudices allégués, ne saurait donc ouvrir droit à réparation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif a rejeté ses conclusions à fin de condamnation de l'Etat pour faute lourde commise dans le fonctionnement de la justice ;

Sur les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. A une somme au titre des frais qu'il a exposés à l'occasion du litige ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A relatives à la durée excessive de la procédure de sursis à exécution devant le CNESER.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Nicolas A et au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2012 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Steck-Andrez et M. Zupan, présidents-assesseurs,

MM. Picard et Poitreau, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 22 mars 2012.

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No 11LY00858


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 11LY00858
Date de la décision : 22/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Incidents - Non-lieu - Existence.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Fondement de la responsabilité - Responsabilité pour faute - Application d'un régime de faute lourde.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : CHOUVELON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-03-22;11ly00858 ?
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