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02/12/2010 | FRANCE | N°09DA00624

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 02 décembre 2010, 09DA00624


Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Camille A, demeurant au ..., par le cabinet d'avocats Brochen, Alsac, Sion, Arnoux, Andrieux, Bonduel ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0607325 du 3 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant, d'une part, à la condamnation de la commune de Marly à lui verser une somme totale de 308 195,49 euros en réparation du préjudice subi à raison de l'illégalité de son licenciem

ent, majorée des intérêts au taux légal et, d'autre part, à la condam...

Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Camille A, demeurant au ..., par le cabinet d'avocats Brochen, Alsac, Sion, Arnoux, Andrieux, Bonduel ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0607325 du 3 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant, d'une part, à la condamnation de la commune de Marly à lui verser une somme totale de 308 195,49 euros en réparation du préjudice subi à raison de l'illégalité de son licenciement, majorée des intérêts au taux légal et, d'autre part, à la condamnation de la commune de Marly à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la commune de Marly au paiement de la somme de 156 882,21 euros en réparation du préjudice subi ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Marly la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté du 28 septembre 1995 prononçant son licenciement était, comme l'a estimé le Tribunal administratif de Lille dans son jugement du 3 février 2009, entaché d'illégalité ; que cette illégalité est fautive et de nature à engager la responsabilité de la commune ; que, toutefois, ce jugement est entaché d'erreur de droit et de fait en ce qui concerne l'analyse qu'il fait des préjudices qui ont résulté pour le requérant de ce licenciement de ses fonctions de directeur de l'harmonie municipale ; que l'arrêté du 22 novembre 1990 le nommant à ce poste ne comporte aucune précision quant à la durée de cet engagement ; que cette nomination répondait à un besoin permanent et était, dans l'intention des parties, conclu pour une durée indéterminée ; qu'il a occupé ce poste de manière ininterrompue jusqu'à son licenciement irrégulier ; que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que ce contrat avait été souscrit pour une durée de 3 ans et tacitement reconduit pour une même durée ; que l'annulation de l'arrêté le licenciant aurait dû conduire la ville à le réintégrer, ce qui n'a pas été fait ; que les préjudices qu'il a subis s'élèvent, d'une part, à 61 882,21 euros au titre des pertes de rémunérations sur la période du 1er décembre 1995 au 4 décembre 2006, et non à 4 000 euros comme l'a estimé le Tribunal, d'autre part, à 45 000 euros au titre de la dégradation de sa situation financière et à son surendettement consécutifs à ces pertes de rémunérations, et, enfin, au titre du préjudice moral physique et professionnel à 50 000 euros et non 2 000 euros, comme l'ont estimé les premiers juges ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2009, présenté pour la commune de Marly, représentée par son maire en exercice, dont le siège est situé Hôtel de ville, place Gabriel Péry à Marly (59770), par la SCP Gros, Deharbe, Hicter et Associés, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir que la Cour a confirmé le jugement du Tribunal administratif de Lille annulant l'arrêté du 28 septembre 1995 licenciant M. A ; que le Tribunal, par le jugement attaqué, a condamné la commune à verser à M. A une somme de 6 000 euros majorée des intérêts au taux légal, en réparation des préjudices subis par ce dernier ; que M. A, qui ne peut se prévaloir des dispositions réglementaires applicables aux agents non titulaires de l'Etat, n'est pas fondé à soutenir qu'il était titulaire d'un contrat à durée indéterminée ; qu'en vertu de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, le requérant a été recruté pour une durée déterminée et qui ne pouvait excéder 3 ans, et ce contrat ne pouvait être renouvelé que par reconduction expresse ; que les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de droit ; que, s'agissant des préjudices allégués, en premier lieu, le requérant ne saurait prétendre à réparation au titre des pertes de rémunération que sur la période du 1er décembre 1995 au 31 octobre 1996, terme de son engagement, en deuxième lieu, eu égard à la modicité de la rémunération perçue au titre de ses fonctions de directeur de l'harmonie, le requérant ne saurait soutenir que son licenciement a été la cause de la prétendue dégradation de sa situation financière et de son surendettement, en troisième lieu, eu égard à l'investissement personnel de l'intéressé dans ses fonctions, tel qu'il ressort de ses fiches de notation, la réalité et l'ampleur du préjudice moral allégué ne sont pas établis et le requérant ne saurait prétendre, à ce titre, à une indemnité de 50 000 euros ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 20 septembre 2010, présenté pour M. A, qui persiste dans les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et fait en outre valoir que la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005, certes postérieure aux faits de l'espèce, a permis sous certaines conditions à un agent recruté en application du 5ème alinéa de la loi n° 84-53 de bénéficier d'un recrutement pour une durée indéterminée, le Législateur ayant autorisé le recrutement de contractuels sur des postes permanents ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie le 12 novembre 2010 et régularisé par la production de l'original le 15 novembre 2010, présenté pour la commune de Marly qui persiste dans ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sylvie Appèche-Otani, président-assesseur, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Gildas Brochen, avocat, pour M. A et Me Jean-Paul Carton, avocat, pour la commune de Marly ;

Considérant que M. Camille A relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lille en tant que ce jugement n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation de la commune de Marly à lui verser une somme totale de 308 195,49 euros majorée des intérêts au taux légal en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de son licenciement illégal de ses fonctions de directeur de l'harmonie de cette commune ;

Considérant que M. A a été recruté en 1990 par deux arrêtés distincts du maire de la commune de Marly, pour exercer respectivement les fonctions de directeur de l'école de musique de la commune et celles de directeur de l'harmonie municipale ; que par un jugement en date du 24 juin 1999, le Tribunal administratif de Lille a, d'une part, rejeté le recours de M. A dirigé contre la délibération en date du 27 juillet 1995 par laquelle le conseil municipal de la commune de Marly avait supprimé l'emploi de directeur de l'école de musique et, d'autre part, annulé l'arrêté en date du 28 septembre 1995 par lequel le maire de cette commune l'avait licencié en sa qualité de directeur de l'harmonie municipale ; que ce jugement a, sur ce dernier point, été confirmé par un arrêt de la cour de céans du 12 mars 2003 ;

Sur la responsabilité :

Considérant que l'arrêté en date du 28 septembre 1995 par lequel le maire de la commune de Marly a licencié M. A en sa qualité de directeur de l'harmonie municipale a été annulé, au motif qu'il reposait sur des faits dont la matérialité n'était pas établie ; que l'illégalité de cet arrêté est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Marly ;

Sur les préjudices :

Considérant que par l'arrêté en date du 28 septembre 1995, le maire de la commune de Marly n'a licencié M. A qu'en sa seule qualité de directeur de l'harmonie municipale et non de directeur de l'école de musique de la commune ; que, dès lors, le requérant n'est fondé à demander que la réparation des préjudices subis du fait de la perte de ces seules fonctions ;

En ce qui concerne le préjudice financier lié à la perte des rémunérations attachées aux fonctions de directeur de l'harmonie municipale :

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée que les actes pris par les collectivités et établissements publics territoriaux en vue de recruter des agents non-titulaires doivent, sauf disposition législative spéciale contraire, prévoir une durée d'engagement déterminée et ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse ; que dans le cas où la décision de recrutement d'un agent non-titulaire s'est trouvée néanmoins tacitement reconduite, cette circonstance ne peut légalement avoir pour effet de conférer à l'engagement dès son origine une durée indéterminée ; que le maintien en fonction à l'issue de l'engagement initial a seulement pour effet de donner naissance à un nouvel engagement, prévu lui aussi pour une période déterminée et dont la durée est, à défaut de précision, celle qui était assignée à l'engagement initial ; que l'arrêté en date du 22 novembre 1990 par lequel le maire de la commune de Marly a recruté M. A en qualité d'agent non-titulaire pour exercer les fonctions de directeur de l'harmonie municipale à compter du 1er novembre 1990 ne comporte aucune précision quant à la durée de l'engagement de l'intéressé ; que, dans ces conditions, il y a lieu, comme l'ont estimé les premiers juges, de considérer que le maire de la commune de Marly a entendu recruter M. A pour la durée maximale autorisée par la loi, soit pour une durée de trois ans ; que cet engagement, qui prenait normalement fin le 31 octobre 1993, s'est trouvé tacitement reconduit pour la même durée, soit jusqu'au 31 octobre 1996, par l'effet du maintien en fonctions de l'intéressé au-delà du terme de son engagement initial ; que, dès lors, l'arrêté en date du 28 septembre 1995 par lequel le maire de la commune de Marly a illégalement licencié le requérant en sa qualité de directeur de l'harmonie est intervenu au cours de l'engagement de l'intéressé, qui s'achevait normalement le 31 octobre 1996 ; qu'il suit de là que le préjudice financier subi par M. A à raison de l'illégalité de son licenciement en qualité de directeur de l'harmonie est constitué par la perte de la rémunération attachée à ces fonctions entre le 1er décembre 1995, date d'effet de l'arrêté de licenciement du 28 septembre 1995, et le 31 octobre 1996, date du terme normal de son engagement ;

Considérant qu'eu égard au montant de la rémunération mensuelle perçue par le requérant au titre de ses fonctions de directeur de l'harmonie et dont le montant brut s'établissait en novembre 1995 à 2 556 francs (soit 389 euros) et aux prélèvements sociaux y applicables, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'en allouant à ce titre une indemnité de 4 000 euros, le Tribunal n'aurait pas réparé l'intégralité du préjudice subi de ce chef ;

En ce qui concerne les autres chefs de préjudice :

Considérant, d'une part, que si M. A, a rencontré, postérieurement à novembre 1995, des difficultés financières et s'est retrouvé dans une situation de surendettement l'ayant contraint à vendre l'habitation pour laquelle il avait bénéficié d'un prêt immobilier en cours de remboursement, il ne résulte pas de l'instruction que ces troubles ayant affecté ses conditions d'existence seraient directement imputables à l'éviction illégale de ses fonctions de directeur de l'harmonie municipale de la commune de Marly, dès lors que ces fonctions ne représentaient qu'une partie de l'activité du requérant, lequel était par ailleurs notamment directeur de l'école municipale de musique, et ne lui procuraient qu'une rémunération accessoire de niveau au demeurant assez modeste ; que M. A ne saurait donc davantage prétendre à une indemnité à ce titre ;

Considérant, d'autre part, que le requérant soutient que la dégradation de son état de santé est la conséquence de son licenciement, et produit des documents médicaux et notamment un certificat médical établi en 2010 et faisant état d'une dissection aortique survenue dix ans auparavant ; que toutefois, aucun lien direct entre l'illégalité fautive entachant l'arrêté du 28 septembre 1995 et le préjudice ainsi allégué ne peut être regardé comme établi ;

Considérant, enfin, que le Tribunal a fait une juste appréciation du préjudice moral subi par le requérant en évaluant celui-ci à 2 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de cet article : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en vertu de ces dispositions, la cour administrative d'appel ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que la commune de Marly n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées à ce titre par M. A doivent être rejetées ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A la somme demandée par le commune de Marly au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Marly tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Camille A et à la commune de Marly.

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N°09DA00624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA00624
Date de la décision : 02/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Foucher
Rapporteur ?: Mme Sylvie Appeche-Otani
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS BROCHEN ALSAC SION ARNOUX ANDRIEUX BONDUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-12-02;09da00624 ?
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