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18/01/2011 | FRANCE | N°09LY00771

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 18 janvier 2011, 09LY00771


Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2009, présentée pour la SCI CHAMER, dont le siège est 33 Avenue de Wagram à Paris (75017) ;

La société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-3908 en date du 29 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que la commune des Allues (Savoie) soit condamnée à lui payer une indemnité de 318 253,43 euros, outre intérêts au taux légal capitalisés ;

2°) de condamner la commune des Allues à lui payer une indemnité de 289 384 euros, avec intérêts au taux l

égal à compter du 2 décembre 2004 et ensuite capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de l...

Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2009, présentée pour la SCI CHAMER, dont le siège est 33 Avenue de Wagram à Paris (75017) ;

La société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-3908 en date du 29 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que la commune des Allues (Savoie) soit condamnée à lui payer une indemnité de 318 253,43 euros, outre intérêts au taux légal capitalisés ;

2°) de condamner la commune des Allues à lui payer une indemnité de 289 384 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 2 décembre 2004 et ensuite capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de la commune des Allues le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société soutient que la commune a commis une faute engageant sa responsabilité en lui délivrant des certificats d'urbanisme et des notes de renseignements positifs ; que ces documents mentionnaient l'absence de desserte des parcelles en cause sans indiquer qu'elle pouvait entrainer leur inconstructibilité ; que le POS n'exige pas d'accès et de desserte automobile permanente ; que, si lesdites parcelles ne disposaient pas d'un accès permanent des services de lutte contre l'incendie et étaient ainsi inconstructibles au regard de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme, la commune était tenue de délivrer un certificat négatif ; que son préjudice est constitué du coût de l'acquisition desdites parcelles et des frais financiers liés aux emprunts qu'elle a souscrits pour cette acquisition ; qu'il est également constitué des honoraires d'architecte exposés pour élaborer le dossier de permis de construire ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 juillet 2010, présenté pour la commune des Allues qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que par arrêté du 5 novembre 2007 le maire a soulevé la prescription quadriennale ; que le point de départ du délai de prescription est au plus tard le 1er janvier 2001 ; que la demande préalable de la société est datée du 23 mars 2005 ; que le fait générateur de la créance alléguée est constitué par la notification du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 29 décembre 1999 ; qu'aux termes des certificats d'urbanisme délivrés à la société, la constructibilité de la parcelle était clairement subordonnée à des réserves portant en particulier sur l'impossibilité de l'accès automobile en hiver ; que les certificats délivrés ne comportent pas d'indications inexactes ; que seuls les frais exposés antérieurement à la délivrance du premier permis de construire peuvent revêtir un lien de causalité avec les fautes alléguées ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 décembre 2010, présenté pour la SCI CHAMER qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 décembre 2010, présenté pour la commune des Allues qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 décembre 2010, présenté pour la SCI CHAMER qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes moyens ;

Vu la note en délibéré présentée pour la SCI CHAMER le 4 janvier 2011 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2010 :

- le rapport de M. Fontbonne, président-assesseur ;

- les observations de Me Terraux, avocat de la SCI CHAMER, et celles de Me Gueyraud, avocat de la commune des Allues ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que le certificat d'urbanisme positif délivré par le maire des Allues en dernier lieu le 13 novembre 1997 déclare le tènement objet de la demande placé en zone UDa du POS constructible sous les réserves et selon les prescriptions mentionnées dans ce document ; que sous la rubrique équipements publics il est mentionné que le tènement n'est pas desservi par la voirie ; que sous la rubrique observations et prescriptions particulières il est mentionné, d'une part, qu'une partie du tènement est en zone non aedificandi, et, d'autre part, que l'isolement par les pistes de ski rendant l'accès impossible en hiver il sera exigé une participation pour la réalisation d'aires de stationnement ;

Considérant que la SCI CHAMER indique avoir acquis le tènement en cause le 9 décembre 1997 sur la foi de ce certificat ; que par jugement du 29 décembre 1999, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé le permis de construire délivré le 16 juillet 1999 par le maire des Allues à la SCI CHAMER ; que ce jugement a été confirmé par arrêt définitif de la Cour du 2 novembre 2004 ; que tant la Cour que le tribunal administratif ont jugé que, dès lors que la construction projetée ne pouvait être atteinte en hiver qu'en traversant une piste de ski, le permis délivré méconnaissait tant l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme que l'article UD 3.2. du règlement du POS prévoyant qu'une construction ne peut être placée à plus de 100 mètres d'une voie déneigée ;

Sur l'exception de prescription quadriennale opposée par la commune :

Considérant que, le délai de prescription de la créance de la SCI CHAMER a commencé à courir le premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle l'arrêt susmentionné de la Cour du 2 novembre 2004 est devenu définitif ; que la créance de la société n'était, dès lors, pas atteinte par la prescription quadriennale lorsqu'elle a saisi le tribunal administratif le 22 juillet 2005 ; que, dans ces conditions, l'exception soulevée par la commune doit être écartée ;

Sur la responsabilité de la commune :

Considérant que, si le certificat d'urbanisme en cause fait état d'un terrain non desservi par la voirie, il ne mentionne ensuite comme conséquence de l'impossibilité d'accès automobile en hiver que l'assujettissement du projet à la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement ; qu'ainsi le terrain est déclaré constructible sans que la réserve énoncée soit présentée comme susceptible de faire obstacle à la délivrance d'un permis régulier ; que, par suite, en omettant d'indiquer les conséquences qui s'attachaient aux conditions particulières de la desserte, le maire des Allues a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

Considérant que la SCI CHAMER ne pouvait ignorer l'enclavement du terrain par les pistes de ski et les conditions très particulières de desserte en découlant ; que, par suite, en acquérant le tènement au vu de ce certificat, la société a commis une imprudence de nature à atténuer la responsabilité de la commune dans la proportion de 50 % ;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne les frais d'acquisition du tènement :

Considérant que, si la SCI CHAMER demande que lui soit remboursé le prix d'acquisition du terrain d'assiette du projet litigieux, ainsi que le coût du prêt immobilier souscrit y afférent, elle n'établit ni même n'allègue avoir eu l'intention de revendre ledit terrain, qui reste, en tout état de cause, sa propriété ; que, dans ces conditions, elle ne démontre pas l'impossibilité de valoriser le terrain dans de bonnes conditions et le préjudice dont elle se prévaut à ce titre ne peut être regardé comme établi ;

En ce qui concerne les honoraires d'architecte :

Considérant que la SCI justifie avoir exposé en pure perte la somme de 4 866 euros d'honoraires d'architecte afférents à la conception du projet et au dépôt de la demande de permis de construire ; que le préjudice ainsi subi procède directement de l'illégalité fautive susmentionnée engageant la responsabilité de la commune, alors même qu'il est également susceptible de se rattacher à la faute résultant de la délivrance le 16 juillet 1999 d'un permis irrégulier ; que dès lors que ce préjudice n'a pas fait l'objet d'indemnisation à ce dernier titre, la SCI est fondée à demander, compte tenu du partage de responsabilité susmentionné, une indemnité de 2 433 euros ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SCI CHAMER est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de condamner la commune des Allues à payer à la SCI CHAMER une indemnité de 2 433 euros ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

Considérant que la société a droit aux intérêts au taux légal sur la somme qui lui est due à compter du 24 mars 2005, date de réception par la commune de sa demande préalable ; que la capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif, le 11 avril 2008 : qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; qu'il y a lieu de procéder à une capitalisation à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure ;

Sur les frais irrépétibles :

Considérant que les conclusions de la commune des Allues tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administratif doivent être rejetées, dès lors qu'elle est partie perdante ; que sur le fondement des mêmes dispositions il y a lieu de mettre à sa charge le versement à la SCI CHAMER d'une somme de 1 200 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 29 janvier 2009 est annulé.

Article 2 : La commune des Allues est condamnée à payer à la SCI CHAMER une indemnité de 2 433 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCI CHAMER est rejeté.

Article 4 : Sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la commune des Allues versera à la SCI CHAMER une somme de 1 200 euros.

Article 5 : Les conclusions de la commune des Allues tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI CHAMER et à la commune des Allues.

Délibéré après l'audience du 4 janvier 2011, à laquelle siégeaient :

M. Bézard, président de chambre,

M. Fontbonne, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 janvier 2011.

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N° 09LY00771

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00771
Date de la décision : 18/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: M. Gérard FONTBONNE
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : BARRAQUAND ET LAPISARDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-01-18;09ly00771 ?
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