N° 3689
Conflit de la loi du 20 avril 1932
SARL Plein Soleil
LE TRIBUNAL DES CONFLITS
Vu la requête présentée pour la SARL Plein Soleil, dont le siège est situé Chemin de la Barque à Valenty, 05300 Ventalon, représentée par son gérant en exercice, tendant à ce que le Tribunal, saisi par application de l'article 1er de la loi du 20 avril 1932 :
1°) annule l'arrêt de la Cour de cassation en date du 27 novembre 2007, en tant qu'il a rejeté le pourvoi qu'elle avait formé contre la décision du 28 juin 2006 par laquelle la cour d'appel de Grenoble l'a condamnée, solidairement avec la SARL Montgenèvre Exploitation, à indemniser à hauteur de 16 200,30 euros le préjudice subi par M. et Mme Y... du fait de l'absence de classement en résidence de tourisme de la résidence "Plein Soleil" à Montgenèvre (Hautes-Alpes), où ils sont propriétaires d'un ensemble immobilier, l'a déboutée de la demande qu'elle avait formée à l'encontre de M. et Mme Y... en vue d'obtenir le remboursement de l'avance de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle leur avait consentie, et a limité à 8 100,15 euros le montant de la somme que la SARL Montgenèvre Exploitation avait été condamnée par le tribunal de grande instance de Gap à lui verser au titre de ce remboursement, ensemble cette décision de la cour d'appel de Grenoble ;
2°) annule l'arrêt en date du 18 octobre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a décidé qu'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 15 285,61 euros serait remboursé par l'Etat à M. Y... ;
3°) rejette la demande d'indemnité présentée contre elle par M. Y... à la cour d'appel de Grenoble ;
4°) condamne l'Etat et M. Y... à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 75 I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les décisions attaquées ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été notifiée à M. Y... et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui n'ont pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu la loi du 20 avril 1932 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Philippe Bélaval, membre du Tribunal,les conclusions de M. Jean-Dominique Sarcelet, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'article 1er de la loi du 29 avril 1932 que les décisions définitives rendues par les juridictions de l'ordre administratif et les tribunaux judiciaires dans les instances introduites devant ces deux ordres de juridiction et portant sur le même objet peuvent être déférées au Tribunal des conflits "lorsqu'elles présentent contrariété conduisant à un déni de justice" ;
Considérant que M. et Mme Y... ont acquis en 1998 auprès de la SARL Plein Soleil un ensemble immobilier composé de deux appartements meublés et deux emplacements de stationnement situés dans la résidence de vacances " Plein Soleil" à Montgenèvre (Hauteset#8209;Alpes) ; qu'au moment de cette acquisition, ils ont conclu avec la SARL Montgenèvre Exploitation un bail commercial d'une durée de neuf ans afin de permettre à cette société d'exercer une activité d'hébergement touristique dans les appartements dont ils étaient devenus propriétaires ; qu'en 2001, M. et Mme Y... ont demandé au tribunal de grande instance de Gap de prononcer la résiliation du bail conclu avec la SARL Montgenèvre Exploitation en raison du non-paiement par cette dernière de sommes dues au titre de loyers et de charges ; qu'à l'occasion de ce litige, la SARL Plein Soleil a fait valoir qu'au moment de la vente de l'ensemble immobilier, elle avait fait l'avance à M. et Mme Y... de la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'opération et que la résiliation du bail conclu entre M. et Mme Y... et la SARL Montgenèvre Exploitation l'exposait à la perte de cette avance dès lors qu'aux termes des stipulations du bail, elle devait lui être remboursée sur les loyers perçus par cette dernière société auprès des locataires des appartements ; qu'après résiliation du bail par un jugement rendu le 7 avril 2004 par le tribunal de grande instance de Gap, par un arrêt du 28 juin 2006, la cour d'appel de Grenoble a d'une part, condamné la SARL Plein Soleil et la SARL Montgenèvre Exploitation à indemniser le préjudice résultant pour M. Y... de l'incapacité dans laquelle il s'est trouvé d'obtenir auprès de l'Etat le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée né de la déduction de la taxe grevant l'acquisition de l'ensemble immobilier des cotisations qu'il devait acquitter au titre de ses recettes taxables, du fait de l'absence de classement par l'autorité préfectorale de la résidence "Plein Soleil" en résidence de tourisme et d'autre part, rejeté en conséquence de cette condamnation la demande de remboursement de l'avance de taxe présentée par la SARL Plein Soleil à l'encontre de M. Y... ; que la Cour de cassation a confirmé cet arrêt par un arrêt du 27 novembre 2007 ; qu'entretemps, par un arrêt rendu le 18 octobre 2007 et devenu définitif, la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à la demande de M. Y..., lui a reconnu la qualité de redevable de la taxe sur la valeur ajoutée et a ordonné le remboursement par l'Etat du crédit de taxe né de la déduction de la taxe ayant grevé l'acquisition de ses biens ;
Considérant que les décisions juridictionnelles analysées ci-dessus, rendues par les juridictions de l'ordre judiciaire portaient, pour la partie de ces décisions déférée au Tribunal, sur l'indemnisation du préjudice résultant pour M. et Mme Y... de la carence de la SARL Plein Soleil à obtenir le classement de la résidence "Plein Soleil" en résidence de tourisme, du fait de l'absence de conformité du bâtiment aux normes exigées, tandis que l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Marseille portait sur le droit de M. et Mme Y... à obtenir, sur le fondement des dispositions du b et du c de l'article 261 D-4° du code général des impôts, le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée résultant de l'imputation sur les montants de taxe dont ils étaient redevables de la taxe ayant grevé l'acquisition immobilière à laquelle ils avaient procédé au sein de la résidence ; que par suite ces décisions ne portaient pas sur le même objet ; qu'ainsi l'une des conditions auxquelles les dispositions de l'article 1er de la loi du 29 avril 1932 subordonnent l'ouverture de la voie de recours qu'elles instituent fait défaut ; que dès lors la requête de la SARL Plein Soleil n'est pas recevable, et ne peut qu'être rejetée, y compris les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Plein Soleil est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, qui est chargé d'en assurer l'exécution.