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10/04/1995 | FRANCE | N°09-52945

France | France, Tribunal des conflits, 10 avril 1995, 09-52945


Vu l'expédition du jugement du 5 juillet 1994 par lequel le tribunal administratif de Nice, saisi d'une demande de M. Patrick X..., demeurant ..., tendant à ce qu'il soit mis fin au recouvrement des amendes pour infraction aux règles de stationnement qui lui ont été infligées et à ce que lui soit remboursée la somme de 15 596,50 francs qu'il a déjà payée à ce titre à la Trésorerie principale, a renvoyé au tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu le jugement du 23 février 1994

par lequel le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nice...

Vu l'expédition du jugement du 5 juillet 1994 par lequel le tribunal administratif de Nice, saisi d'une demande de M. Patrick X..., demeurant ..., tendant à ce qu'il soit mis fin au recouvrement des amendes pour infraction aux règles de stationnement qui lui ont été infligées et à ce que lui soit remboursée la somme de 15 596,50 francs qu'il a déjà payée à ce titre à la Trésorerie principale, a renvoyé au tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu le jugement du 23 février 1994 par lequel le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nice s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande de M. X... tendant à l'étalement de sa dette envers le receveur principal de Nice-Amendes correspondant à des amendes pour infraction au stationnement demeurées impayées ;

Vu, enregistré le 9 février 1995, le mémoire présenté pour le ministre de l'Economie, tendant à ce que le Tribunal des Conflits constate que les conditions d'un conflit négatif n'étaient pas réunies et subsidiairement à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente pour connaître du litige par les motifs que les deux juridictions n'ont pas été saisies du même litige ; qu'en effet M. X... avait demandé au juge de l'exécution d'échelonner le paiement de sa dette alors qu'il a saisi le tribunal administratif d'une demande d'annulation des amendes infligées ; que toutefois, le tribunal administratif ayant requalifié la demande comme tendant à contester le recouvrement d'amendes de stationnement, le ministre entend soutenir que seul le comptable public est compétent pour établir ou refuser un échéancier à un redevable ; que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif la décision du comptable est détachable de la procédure pénale ; que si le Conseil d'Etat a jugé (section, 4 novembre 1994, Kormer) à propos d'une mesure de libération conditionnelle, qu'il n'appartient pas au juge administratif de connaître d'un litige portant sur la nature et la limite d'une peine infligée par le juge judiciaire et dont l'exécution est poursuivie à la diligence du ministère public, cette jurisprudence ne peut être transposée dans la matière du paiement des amendes forfaitaires qui n'ont pas à leur source une condamnation pénale ; qu'il résulte des articles 5 et 6 du décret du 22 décembre 1964 sur le recouvrement des amendes et condamnations pécuniaires par le comptable direct du Trésor que les comptables ont la maîtrise des poursuites et qu'il n'appartient qu'à l'autorité administrative de suspendre ou de poursuivre l'exécution des mesures de recouvrement ; que, d'ailleurs, l'application de l'ancien article 1244 du Code civil a été écartée lorsque la dette trouve sa cause dans une infraction pénale et que, de même, le juge judiciaire n'est pas compétent pour accorder des délais de paiement aux contribuables poursuivis ou pour ordonner la discontinuité des poursuites ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le Code de la route ;

Vu le Code de procédure pénale, notamment ses articles 529-6 et suivants et R. 49 et suivants ;

Vu le décret n° 64-1333 du 22 décembre 1964 modifié ;

Considérant qu'aux termes de l'article 34 ajouté au décret du 26 octobre 1849 par l'article 6 du décret du 25 juillet 1960 portant réforme de la procédure des conflits d'attribution : " Lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif a, par une décision qui n'est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l'ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l'autre ordre saisie du même litige, même si elle estime que ledit litige ressortit à l'ordre de juridiction primitivement saisi, doit, par un jugement motivé qui n'est susceptible d'aucun recours, même en cassation, renvoyer au Tribunal des Conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu'à la décision de ce tribunal " ;

Considérant que, saisi par M. X... d'une demande tendant à l'étalement de sa dette envers le receveur principal du Trésor de Nice-Amendes, correspondant à des amendes demeurées impayées pour infractions aux règles de stationnement des véhicules, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nice a, par un jugement du 23 février 1994, déclaré qu'en vertu du principe de la séparation des pouvoirs entre l'autorité administrative et l'autorité judiciaire, les tribunaux judiciaires et, par conséquent, celui de l'exécution, sont incompétents pour ordonner le sursis aux poursuites engagées par un comptable du Trésor chargé de recouvrer des amendes et condamnations pénales d'ordre pécuniaire ;

Considérant que, saisi par l'intéressé d'une demande tendant à ce que le tribunal administratif intervienne auprès du ministère public et de la Trésorerie générale, pour être déchargé du paiement d'amendes de stationnement dont il ne serait pas en état de s'acquitter et du remboursement de la somme de 15 596,50 francs qu'il a déjà payée à ce titre, le tribunal administratif a, par l'article 3 de son jugement, rejeté ces conclusions non pas au motif qu'il appartiendrait aux tribunaux judiciaires d'en connaître mais à celui qu'il n'appartient pas au tribunal d'adresser des injonctions à l'Administration ; que, sur ce point, le tribunal administratif n'a pas décliné la compétence de la juridiction administrative au profit de l'autre ordre de juridiction et n'a, d'ailleurs, pas saisi le Tribunal des Conflits d'une question de compétence ;

Considérant que M. X... ayant précisé dans ses écritures devant le tribunal administratif, qu'il entendait demander l'annulation des décisions qui l'avaient constitué débiteur d'amendes pour stationnement irrégulier, le tribunal administratif a, par le même jugement du 5 juillet 1994, estimé que le litige ainsi soulevé concerne des décisions non détachables de la procédure pénale dont il n'appartient qu'aux juridictions judiciaires de connaître et, estimant que le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nice avait décliné la compétence du juge judiciaire sur le même litige a, par l'article 1er de ce jugement, renvoyé cette partie du litige au Tribunal des Conflits, en application des dispositions précitées de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Considérant que le tribunal de grande instance ne s'est pas prononcé sur le bien-fondé des décisions prises pour le recouvrement forcé d'amendes de stationnement mais seulement sur une demande de délais du paiement de celles-ci en raison de la situation de fortune de M. X... et que c'est sur ce chef de demande qu'il a décliné la compétence de l'autorité judiciaire ; qu'au surplus la demande présentée au juge judiciaire portait sur le paiement d'amendes encore dues alors que celle dont le juge administratif a été saisi portait pour l'essentiel sur la restitution d'amendes déjà payées et ne concernait donc pas les mêmes infractions ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'en déclarant qu'il n'appartenait pas au juge administratif de se prononcer sur le bien-fondé des actes de recouvrement des amendes, le tribunal administratif n'a pas créé un conflit négatif de compétence entre les deux ordres de juridiction ; qu'ainsi les conditions de saisine du Tribunal des Conflits posées par l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 ne sont pas remplies ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du 5 juillet 1994 du tribunal administratif de Nice est annulé ;

Article 2 : La cause et les parties sont renvoyées devant ce tribunal.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 09-52945
Date de la décision : 10/04/1995

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Conflit - Conflit négatif des juridictions - Déclaration d'incompétence du juge de chaque ordre - Nécessité .

En l'état de la décision du juge de l'exécution d'un tribunal de grande instance qui, saisi de la demande d'un particulier tendant à l'étalement de sa dette envers le comptable du Trésor chargé de recouvrer des amendes demeurées impayées pour infractions aux règles du stationnement, s'est déclaré incompétent en vertu de la règle de la séparation des pouvoirs pour ordonner un tel sursis, ne constitue pas un conflit négatif de compétence entre les deux ordres de juridiction la décision du tribunal administratif qui rejette l'action de l'intéressé tendant à être déchargé du paiement d'amendes de stationnement et au remboursement d'amendes déjà payées au motif qu'il ne lui appartient pas d'adresser des injonctions à l'Administration.


Références :

Code civil 1244
Décret du 26 octobre 1849 art. 34
Décret 64-1333 du 22 décembre 1964 art. 5, art. 6

Décision attaquée : Tribunal administratif de Nice, 05 juillet 1994


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Lemontey .
Avocat général : Commissaire du Gouvernement : M. Gaunet
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Morisot.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Ancel et Couturier-Heller.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:TC:1995:09.52945
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