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05/06/2025 | FRANCE | N°22500561

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 juin 2025, 22500561


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 2


CH10






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 5 juin 2025








Cassation partielle




Mme MARTINEL, président






Arrêt n° 561 F-D


Pourvoi n° Z 22-24.789








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2025


L'établissement [3], établissement public de santé, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 22-24.789 contre l'arrêt n° RG : 18/12180 rendu le 28...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CH10

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 5 juin 2025

Cassation partielle

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 561 F-D

Pourvoi n° Z 22-24.789

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2025

L'établissement [3], établissement public de santé, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 22-24.789 contre l'arrêt n° RG : 18/12180 rendu le 28 octobre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Essonne, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'établissement [3], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne, et l'avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 octobre 2022), à la suite d'un contrôle effectué par l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, ayant révélé des anomalies de tarification pour l'année 2013, la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, agissant pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne (la caisse), a notifié un indu au [3] (le GHU), qui l'a contesté en saisissant d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

2. Le [3] fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors :

« 1°/ que les frais d'hospitalisation au titre des soins de psychiatrie sont financés par une dotation annuelle de financement ; que tous les soins dispensés aux patients hospitalisés dans un établissement de soins psychiatriques recevant une telle dotation ne constituent pas nécessairement, ni des frais d'hospitalisation, ni des soins de psychiatrie ; qu'il en va notamment ainsi des actes de sismothérapie réalisés sur ces patients, sous anesthésie générale, hors du service de psychiatrie dans lequel ils sont hospitalisés ; que la cour d'appel devait donc rechercher si, comme il était soutenu, de tels actes pouvaient concrètement être considérés comme des frais d'hospitalisation relatifs à des soins de psychiatrie ; qu'en omettant cette recherche, elle a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 174, L. 16222 et R. 162-29 du code de la sécurité sociale et R. 6122 25 du code de la santé publique ;

2°/ que la prise en charge du séjour et des soins avec ou sans hébergement, représentatifs de la mise à disposition de l'ensemble des moyens nécessaires à l'hospitalisation du patient, est assurée par des forfaits, et notamment par des forfaits dénommés « groupes homogènes de séjour » dont la liste est établie selon la classification des groupes homogènes de malade ; que, lorsque des frais d'hospitalisation au titre des soins de psychiatrie ne sont pas financés par la dotation annuelle de fonctionnement, leur prise en charge est assurée par des forfaits ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 174 et R. 162-32 du code de la sécurité sociale, ensemble l'arrêté du 19 février 2009 ;

3°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la cour d'appel qui a relevé d'office, sans inviter les parties à s'en expliquer, le moyen tiré de ce que l'annexe I de l'arrêté du 19 février 2009 ne mentionnait pas le traitement des dépressions graves par sismothérapie en son annexe I, ce qui rendait les dispositions relatives à la facturation au moyen de groupes homogènes de séjour inapplicables, a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

3. Aux termes de l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2010-177 du 23 février 2010, dans les établissements de santé mentionnés aux a, b et c de l'article L. 162-22-6, la part des frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés dans le cadre des activités mentionnées au 2° de l'article L. 162-22 qui est prise en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie est financée par une dotation annuelle de financement.

4. En application de l'article L. 162-22-6, a, b et c, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'ordonnance précitée, les établissements concernés sont les établissements publics de santé, les établissements de santé privés à but non lucratif admis à participer à l'exécution du service public et ceux ayant opté pour la dotation globale de financement.

5. Selon les articles L. 162-22, 2°, et R. 162-29-2, 2°, du code de la sécurité sociale, le premier dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010, le second dans sa rédaction créée par le décret n° 2010-1177 du 5 octobre 2010, alors en vigueur, les activités financées sous la forme de la dotation énoncée à l'article L. 174-1 sont les activités de soins en psychiatrie.

6. Il résulte de la combinaison de ces textes que dans les établissements publics de santé, les activités de soins en psychiatrie sont prises en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale sous forme d'une dotation annuelle de financement.

7. Sauf disposition contraire, cette dotation couvre l'ensemble des actes et prestations en lien avec les activités de soins en psychiatrie.

8. Il s'ensuit qu'en l'absence de texte les excluant, les frais occasionnés par les séances de sismothérapie réalisés au sein d'un établissement de santé public sur des patients hospitalisés dans le service de psychiatrie de ce même établissement sont inclus dans sa dotation annuelle de financement.

9. L'arrêt constate que le [3] a réalisé des séances de sismothérapie sur des patients hospitalisés dans son service de psychiatrie.

10. Il en résulte que le [3] ne pouvait facturer, au titre de la tarification à l'activité, ces séances, dont les frais étaient couverts par la dotation annuelle de financement.

11. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par l'article 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt, qui a validé l'indu notifié au [3] par la caisse, se trouve légalement justifié.

Mais sur le premier moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

12. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande en paiement de la somme de 826,22 euros, alors « que saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité, devant elle, de prétentions nouvelles ou la relevant d'office, la cour d'appel est tenue de l'examiner au regard de chacune des exceptions que prévoient les articles 564 à 567 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la contestation portée devant les premiers juges ne concernait que le point 4 du contrôle et que le tribunal avait statué ultra petita en annulant l'ensemble de l'indu ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable la demande formée par la caisse en paiement de la somme de 826,22 euros, correspondant au solde de l'indu annulé à tort en première instance, que devant le premier juge, la caisse n'avait demandé que le paiement de la seule somme de 15 007,40 euros correspondant au point 4 du contrôle et que dès lors la demande formée au titre de solde de l'indu était irrecevable comme nouvelle, sans rechercher, au besoin d'office, si cette demande ne relevait pas des exceptions visées aux articles 565 et 566 du code de procédure civile, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles susvisés. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile :

13. La cour d'appel est tenue d'examiner au regard de chacune des exceptions prévues aux textes susvisés si la demande est nouvelle.

14. Selon le deuxième, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. Selon le troisième, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

15. Pour déclarer irrecevable comme nouvelle la demande de la caisse relative au solde des chefs d'indu n° 1, 2 et 3, l'arrêt retient que devant le premier juge, la caisse n'a demandé le paiement que de la somme correspondant au chef d'indu n° 4.

16. En se déterminant ainsi, sans rechercher, même d'office, si ces demandes ne tendaient pas aux mêmes fins que celles formées par la caisse en première instance ni n'en constituaient pas l'accessoire, la conséquence ou le complément, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Et sur le second moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident

Enoncé du moyen

17. La caisse fait grief à l'arrêt de fixer le point de départ de l'intérêt légal à compter du 15 septembre 2022, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, aucun désaccord n'existait entre les parties sur le fait que la notification d'indu du 15 octobre 2014 avait été réceptionnée par le Centre Hospitalier le 17 octobre 2014 ; que dans ses conclusions, le [3] indiquait expressément avoir réceptionné la lettre de notification de l'indu le 17 octobre 2014 et versait aux débats une copie de ce document sur laquelle était apposé un tampon attestant d'une réception le 17 octobre 2014 ; que dès lors, le point de départ des intérêts au taux légal qui étaient sollicités par la caisse « à compter de la notification d'indu du 15 octobre 2014 » devait être fixé au 17 octobre 2014 ; qu'en retenant, pour fixer le point de départ de ces intérêts au 15 septembre 2022, soit huit années plus tard, que la caisse ne prouvait pas la date de réception de la notification de l'indu litigieux, date qui était pourtant constante, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

18. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

19. Pour fixer le point de départ de l'intérêt au taux légal au 15 septembre 2022, date de dépôt des conclusions de la caisse, l'arrêt retient que cette dernière ne justifiait pas de la date de réception de la lettre de notification de l'indu litigieux.

20. En statuant ainsi, alors que dans ses conclusions, le [3] exposait avoir reçu la lettre de notification le 17 octobre 2014 et produisait une copie de ce document sur lequel était apposé un tampon attestant d'une réception à cette même date, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre griefs du pourvoi incident, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande formée par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne de paiement de la somme de 826,22 euros et en ce qu'il a condamne le [3] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne la somme de 15 007,40 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2022, l'arrêt rendu le 28 octobre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne à l'établissement [3] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'établissement [3] et le condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne à la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le cinq juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 22500561
Date de la décision : 05/06/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 octobre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 jui. 2025, pourvoi n°22500561


Composition du Tribunal
Président : Mme Martinel (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:22500561
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