LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB1
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 4 juin 2025
Cassation partielle
M. BARINCOU, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président
Arrêt n° 562 F-D
Pourvoi n° K 23-14.154
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 JUIN 2025
La société RS Energie, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 23-14.154 contre l'arrêt rendu le 1er février 2023 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale A), dans le litige l'opposant à M. [G] [J], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Douxami, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la société RS Energie, après débats en l'audience publique du 5 mai 2025 où étaient présents M. Barincou, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Douxami, conseiller rapporteur, Mme Panetta, conseiller, et Mme Thuillier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 1er février 2023), M. [J] a été engagé en qualité de mécanicien robinetier par la société RS Energie à compter du 13 avril 2015.
2. Licencié pour motif économique le 16 décembre 2016, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Examen des moyens
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
3. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme au titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que la cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient ; que l'entreprise, qui fait partie d'un groupe, n'a pas à justifier de l'existence de la cause économique du licenciement au niveau du secteur d'activité du groupe, dès lors qu'elle intervient dans un secteur d'activité différent de celui des autres sociétés du groupe, notamment au regard des produits ou services proposés et de la clientèle ciblée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a retenu que la société RS Energie devait établir l'existence de difficultés économiques au niveau du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, après avoir retenu que l'extrait K bis de la société RS Energie mentionne que son activité principale est la maintenance de matériel de robinetterie industrielle, que l'attestation de qualification délivrée par EDF vise la maintenance robinetterie et s'est fondée sur les mentions du contrat de travail du salarié et de sa fiche de poste, n'a pas apprécié concrètement l'activité de la société RS Energie et n'a pas recherché, comme celle-ci l'y invitait, si elle ne fournissait pas des services différents de ceux offerts par les autres sociétés du groupe et intervenait sur un marché différent pour des clients différents, ce qui justifiait qu'elle intervenait sur un secteur différent de celui des autres sociétés du groupe, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016. »
Réponse de la Cour
4. Après avoir exactement énoncé que la cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient, la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a retenu, effectuant la recherche prétendument omise, en prenant en considération l'activité du groupe RS telle que rappelée de manière concordante par les parties et l'activité propre de la société RS Energie au regard de son extrait Kbis, de l'attestation de qualification délivrée par EDF pour la période du 23 septembre 2015 au 9 septembre 2018, du contrat de travail et de la fiche de poste du salarié, que l'activité de cette dernière relevait, non du secteur d'activité limité de la maintenance en robinetterie sur site nucléaire visé dans la lettre de licenciement, mais du secteur d'activité de la robinetterie industrielle du groupe dont elle faisait partie.
5. Ayant constaté que l'employeur, auquel il appartenait d'établir les difficultés économiques affectant le secteur d'activité du groupe, se bornait à verser aux débats ses seuls bilans, ce dont il résultait qu'il ne démontrait pas la réalité des difficultés économiques au niveau du secteur d'activité à prendre en considération, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre d'indemnité de grand déplacement avec intérêt au taux légal à compter du 12 mai 2017, alors « que le défaut de réponse aux conclusions constitue le défaut de motifs ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir qu'il n'était pas tenu d'appliquer l'accord du 26 février 1976 annexé à la convention collective de la métallurgie du Rhône, prévoyant et déterminant l'indemnité de grand déplacement, dès lors que celui-ci n'avait pas fait l'objet d'un arrêté d'extension ; que la cour d'appel, qui, pour condamner l'employeur au paiement de l'indemnité de grand déplacement, a laissé sans réponse ce moyen déterminant, a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
8. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif.
9. Pour condamner l'employeur à payer une somme à titre d'indemnité de grand déplacement, l'arrêt retient qu'en imposant au salarié, dans le contrat de travail de justifier de la prise d'un logement extérieur à son point de départ, l'employeur ajoute une condition au versement de l'indemnité de grand déplacement alors que l'accord du 26 février 1976 prévoit expressément que le salarié n'a pas à fournir de justificatif.
10. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'employeur, qui soutenait qu'il n'était pas tenu d'appliquer l'accord du 26 février 1976 qui n'avait pas fait l'objet d'un arrêté d'extension, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement condamnant l'employeur à payer la somme de 3 978,93 euros net à titre d'indemnité de séjour de grands déplacements avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2017, l'arrêt rendu le 1er février 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ;
Condamne M. [J] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la demande de la société RS Energie.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le quatre juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.